i Digitized by the Internet Archive in 2014 https://archive.org/details/laterreetlavie4518soci J BULLETIN DE LA iiTi wmm DiccLiiiimioi DE FRANCE (Revue des Sciences naturelles appliquées) 45« ANNEE JANVIER 1898 SOMMAIRE ERET-\VATTEL. — Allocution prononcée à la séance générale du 26 novembre 1897. 1 AUSTIER. — L'Ivoire à l'Exposition Coloniale de Bruxelles-Tervueren 3 . P4NART. — La culture du Bananier dans l'Amérique centrale et le commerce des _]èananes axix États-Unis 13 Extraits et Analyses. ■ort sur les travaux exécutés en 1896, à la station acquicoledeBoulogne-sur-Mer {à suivre) 23 ine africaine de quelques animaux domestiques en Europe 34 :1AST0NNET des FOSSES. — Les productions végétales et animales de la Crète. 3o ennemi du Criquet migrateur de la République Argentine 37 prétendue maladie vermineuse des Truffes 37 N'Djembo, Liane à Caoutchouc du Ferman Vaz 38 nouveau Champignon parasite des Lys. , , . 39 cuivre dans les Huîtres vertes 40 Société ne prend sous sa responsabilité aucune des opinions par les auteurs des articles insérés dans le Bulletin. Un numéro 2 francs ; pour les membres de la Société 1 fr. 50 AU SIEGE DE LA. SOCIÉTÉ NATIONALE D'acclimatation de fkance RUE DE LILLE, 4:1 PARIS ET A LA LIBRAIRIE CERF, 12, RUE SAINTE-ANNE Le Bulletin paraît tous les mois;. ifiESYL-JEYES^ Ch *H 0 0 •H DESINFECTANT ANTISEPTIQUE Le seul joignant à son Efficacité, scientifiquement démontrée, l'immense avantage de n'être ni Toxiç[ïl© ni Oorrosif- Hémostatique et Styptique puissant. Adopté par les Ecoles Nationales Vétérinaires, le Service de Santé de l'Armée, la Préfecture de la Seine et la plupart des Services d'Hygiène et de Désiiifection des Départements. Reconnu indispensable dans la pratique vétérinaire. Envoi franco sur demande de Rapports scientifiques et Prospectus*. SOCIÉTÉ FRANÇAISE de PRODUITS SANITAIRES et ANTISEPTIQUES 35, Rue des Francs -Bourgeois (ci-devant 31, Rue des Petites-Ecuries), Paris. ET CHEZ TOUS LES DROGUISTES ET PHARMACIENS. 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ARTHRITISME REGONSTITUANTE.indKiuéedanstouteslesGONVALESCENGES 1 ALLOCUTION PRONONCÉE A LA SÉANCE GÉNÉRALE DU 26 NOVEMBRE 1897 par M. RAVERET-WATTEL, Vice-président de la Société. Messieurs, Nous ouvrons aujourd'hui notre quarante-cinquième ses- sion. Ainsi que vous Tavez sans doute remarqué, nous repre- nons cette année un peu plus tôt que de coutume le cours de nos travaux. Le Conseil a pensé qu'il convenait de devancer légèrement l'époque habituelle de nos réunions, afin de nous mettre à même de tenir, durant cette session, le plus grand nombre possible de séances. Pendant les vacances qui viennent de s'écouler, la Société n'est pas restée inactive. M. le Secrétaire général vous fera connaître, dans un instant, la part prise, par plusieurs délé- gations de la Société ou de ses différentes Sections, tant à des Congrès scientifiques qu'à des excursions pour la visite d'éta- blissements consacrés à l'acclimatation ou à l'élevage. Gomme mesure récemment prise par le Conseil, j'ai à men- tionner la création d'une Section coloniale, qui vient s'a- jouter à nos cinq Sections déjà existantes : Mammifères, Or- nithologie, Aquiculture, Entomologie, Botanique. Je me borne à vous signaler cette création, dont M. le Secrétaire général doit aussi vous entretenir tout à l'heure. Vous estimerez cer- tainement, Messieurs, que l'organisation de cette Section s'imposait au moment où nous nous proposons de nouer des relations plus intimes avec nos colonies, et de faire, dans le Bulletin, une place aussi large que possible aux questions d'accHmatation intéressant les possessions françaises d*outre- mer. Par suite de circonstances diverses, la publication de notre Bulletin a, depuis quelque temps, souff'ert dans sa régularité. Le Conseil, Messieurs, s'en est préoccupé. Nous espérons que tout retard aura bientôt disparu et que vous n'aureii plus * Bull. Soc. nat. Accl. Fr. 1898. — 1. 2 BULLETIN DE LA SUGIÉTE D'ACCLIMATATION. de ce côté, aucun regret à exprimer. Par les derniers nu- méros parus, vous avez pu constater que l'intérêt offert par la lecture de notre recueil ne tend pas à diminuer, et que la forme et le fond de cette publication sont très satisfaisants. En terminant, permettez-moi, Messieurs, de faire appel à votre zèle pour recruter de nouveaux adhérents, afin qu'en même temps que s'accroîtra le nombre de nos collaborateurs, s'augmentent aussi les ressources budgétaires dont nous avons besoin pour assurer la bonne marche et le développe- ment de notre Société. 11 n'est pas un seul d'entre nous qui ne puisse, par son influence personnelle, faire au moins une recrue dans sa famille, dans son voisinage, parmi ses con- naissances. Ce simple effort aurait pour résultat de doubler immédiatement notre effectif et de développer considérable- ment nos moyens d'action. N'est-ce pas là une raison suffi- sante pour stimuler notre active propagande 1 Mettons-nous donc résolument à l'œuvre, et la session qui s'ouvre au- jourd'hui ne restera pas stérile. L'IVOÎËË A L'ËIPOSITION COLONIALE DE BRUXELLES-TERVUEREN (1) par E. CAUSTIER, Secrétaire des séances de la Société d'Acclimatation. Dans une communication faite le 23 avril 1897, à la Société d'Acclimatation et dans un travail récent (2) publié dans la Revue générale des sciences, nous avons montré qu'Anvers était devenu le marché d'ivoire le plus considérable du monde. Créé en 1888, ce marché importait en 1895, 362,000 kilos d'ivoire et en vendait 274,500 kilos. Le tableau suivant, emprunté au travail cité plus haut, indique les importations et les ventes d'ivoire faites sur le marché d'Anvers de 1888 à 1896 : ANNÉES. IMPORTATIONS. TOTAL DES VENTES. STOGËS. 1888 6,400 kilos. 6,400 kilos. » kilos. 1889 46,600 — 46,600 — 20,000 — 1890 77,500 — 77,500 — 18,000 — 1891 59,500 — 59,500 — • 21,000 — 1892 118,000 — 118,000 — 34,500 — 1893 224,000 — 224,000 — 41,000 — 1894 264,500 — 186,000 — 98,500 — 1895 362,000 — 274,300 — 166,000 — 1896 200,000 — 265,700 — 100,300 — On voit que depuis 1894, l'importation subit une forte hausse, alors que la vente reste à peu près stationnaire ; il en résulte que les quantités en stocks vont en augmentant, d'au- tant plus que les commerçants anversois ont soin, afin de i"é- gulariser le marché, de ne mettre en vente qu'une quantité d'ivoire ne dépassant pas 70,000 kilos pour chaque vente tri- mestrielle ; c'est la quantité considérée comme suffisante pour la consommation. (1) Communication faite dans la séance générale du 17 décembre 1897, (2) E. Causlier, L'état actuel du trafic et de l'industrie de l'ivoire^ Revue générale des sciences, 30 octobre 1897. 4 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. D'autre part, la presque totalité de l'ivoire vendu à Anvers provient de l'État indépendant du Congo. Cela tient à ce que le fleuve du Congo draine naturellement le commerce de l'Afri- que centrale. Or, de toutes les richesses de cette région, l ivoire est assurément l'une des plus exploitées. Aussi bien, il importait pour la Belgique de réserver une place d'honneur pour l'ivoire dans l'Exposition coloniale installée dans le domaine royal de Tervueren, à 13 kilo- mètres de Bruxelles. Ce parc, promenade familière aux Bruxellois, était bien le cadre séduisant qu'il fallait à cette manifestation coloniale où l'on avait rassemblé, avec un art souvent original, tout ce qui intéresse l'ethnographie, la flore, la faune, les cultures, l'exportation et l'importation de l'État indépendant du Congo. Certes le gros public est toujours plus attiré vers les objets pittoresques que vers les caoutchoucs, les gommes, les résines ou autres produits naturels dont l'industrie retire cependant un si grand profit. Mais aussi, dans une telle Exposition, les commerçants, les industriels, les futurs agents de factorerie et même les simples particuliers peuvent, en quelques heures, connaître les richesses naturelles, s'initier à l'organisation de la colonie et se rendre compte des débouchés qu'off're cette vaste contrée africaine. Aussi les Belges, comprenant les ser- vices que peut rendre à la cause de l'expansion africaine, une telle leçon de choses coloniales, viennent de décider que cette Exposition resterait permanente, ce qui lui permettra de s'enrichir tous les jours de documents scientifiques et écono- miques. En somme, ce qui a fait le succès de cette Exposition, c'est qu'à côté de l'inévitable foire exotique qui amuse la foule, il y avait les éléments qui renseignent et satisfont les esprits sérieux. C'est un exemple que les organisateurs de notre Exposition coloniale de 1900 feront bien de méditer. De toutes les richesses accumulées dans ce palais colonial de Tervueren, l'ivoire seul doit nous occuper. Cette matière figurait en deux endroits : P dans un hall réservé à la faune et à ses produits; 2° dans le salon d'honneur réservé aux œuvres d'art. L'IVOIRE A L'EXPOSITION COLONIALE DE BRUXELLES. 5 I. Défenses brutes et travaillées. La faune du Congo est disposée avec une mise en scène tout à lait pittoresque autour d'une large rampe circulaire qui mène dans la galerie souterraine réservée aux produits de la pêche. Et là, dans un paysage conventionnel, les animaux, les plus dissemblables étalent leurs dépouilles et forment comme une Arche de Noé qui constitue l'une des principales attractions de l'Exposition coloniale. L'ivoire est représenté : 1° par une série de défenses saines ; 2" par des défenses ayant des défauts \ S*" par des défenses monstres ; 4» par des produits travaiilés, P DÉFENSES SAINES. — Les défenses sont classées comme par les courtiers des marchés d'ivoire en trois catégories : 1" les grosses dents qui pèsent plus de 25 kilos ; 2'^ les dents moyennes qui pèsent moins de 25 kilos ; 3** les petites dents dont le poids est inférieur à 18 kilos. Parmi les grosses dents, nous avons remarqué une paire de défenses longues de 2 mètres 75 et pesant chacune 78 kilos ; au total, 156 kilos, que portait le crâne de leur possesseur. Ce sont, il faut le dire, des exceptions, car le poids moyen des défenses vendues à Anvers va sans cesse en diminuant. Il est descendu de 12 kilos à 10, et il ne dépasse guère aujour- d'hui 10 kilos. Le tableau suivant montre cette baisse en même temps que celle du prix moyen du kilogramme. ANNÉES. paix DU KILO. POIDS MOYEN. 1888 » c. 9 k. 400 gr. 1889 24 12 500 18P0 25 51 10 900 1891 20 02 9 200 43 8 300 1893 » 8 800 1894 05 7 300 40 8 800 1896 15 82 G 400 Donc les défenses sont petites, ce qui prouve bien que l'on 6 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. prend l'ivoire sur la bête vivante. Et combien d'Éléphants sont tués qui ne donnent pas même un kilo d'ivoire ! Le lieu- tenant Hanolet, Commissaire général du Congo belge, dit avoir tué, il y a quelques années, à Zongo, sur l'Ubangi, cinq Éléphants qui portaient ensemble à peine 10 kilos d'ivoire. Il paraît que ce massacre était nécessaire pour supprimer un troupeau d'Éléphants qui venait chaque nuit ravager les plan- tations. Ces observations ne font qu'appuyer les chiffres que M. Bourdarie et moi avons publiés sur l'exportation totale de l'ivoire africain et par suite sur le nombre probable d'Élé- phants tués chaque année (environ 40,000). Certaines dents, parmi les moyennes et les petites, sont classées à part : ce sont les hangles destinées à fournir des anneaux et des bracelets aux Indiens et aux indigènes de la côte orientale d'Afrique. Dans ces défenses, les creux sont utilisés pour faire des bracelets et les pointes pour fabriquer des billes de billard. Ces pointes doivent être alors bien rondes et bien pleines. Si l'on en juge par les produits exposés, les défenses d'Afrique présentent deux formes principales : une droite et une courbe. Cette différence très nette, comme du reste de nombreux points ayant rapport à l'ivoire, reste inexpliquée faute d'une connaissance suffisante de l'histoire naturelle de l'Éléphant sauvage. Les dents de la côte occidentale d'Afrique fournissent la qualité connue sous le nom dHvoire vert à cause de sa trans- parence et de son reflet. Cet ivoire est recherché par les industriels, car il est environ 30 0/0 meilleur marché que l'ivoire de l'Inde et de l'Est africain. Le climat du pays où habite l'Éléphant influe sur la qualité de l'ivoire : la finesse du grain et la transparence augmentent avec la chaleur et l'humidité. C'est pourquoi dans les parties basses des rivières, l'ivoire est plus apprécié que dans les par- ties hautes ; aussi l'ivoire du haut Congo est peu recherché. 2° DÉFENSES AYANT DES DÉFAUTS. — Souvent l'ivoire pré- sente des défauts qui, dans une certaine mesure, diminuent sa valeur commerciale. Ce sont tantôt des crevasses dues à ce que les défenses ont subi des alternatives d'humidité et de sécheresse, tantôt des foryyiations pathologiques dont la L'IVOIRE A L'EXPOSITION COLONIALE DE BRUXELLES. 7 cause n'est pas bien connue. Parmi celles-ci, on trouve des cavités ayant la forme d'un œuf et qui se détachent tout d'une pièce; un de ces œufs ayant la dimension d'un œuf d'Au- truche allongé, était exposé. On trouve aussi des formations bien connues des débiteurs d'ivoire sous le nom de chandelles et de fèves. Cette question a été développée dans notre ar- ticle de la Revue générale des sciences et je ne puis qu'y renvoyer le lecteur que cette étude intéresserait. 3" DÉFENSES MONSTRES. — A. côté de l'ivoire sain et de l'ivoire malade, on a placé des défenses contournées, irrégu- liè;es, et qui n'ont d'intérêt que pour les collectionneurs. 4« Ivoire travaillé. — L'usage le plus noble de l'ivoire est assurément dans la sculpture; il en sera parlé plus loin, car j'estime que le réel intérêt de cette exposition de l'ivoire réside surtout dans cette belle collection de sculptures ex- posées au. Salon d'honneur. Je voudrais cependant dire la méthode employée par les organisateurs pour bien faire comprendre au public les diffé- rentes phases du travail de l'ivoire. On avait exposé trois défenses identiques de chaque modèle : P La première restait intacte et servait de témoin-, 2° La seconde était débitée et montrait les pièces inache- vées ; .3<^ La troisième était remplacée par une série d'objets ravis- sants comme savent l'être les^bibelots d'ivoire. On est véritablement émerveillé du nombre et de la variété des objets qu'il est possible de tirer d'une défense grâce à un découpage ingénieux. Ivoire d'Hippopotame. — A côté d'un crâne d'Eléphant, voici un crâne d'Hippopotame avec des défenses et des objets fabriqués. Certaines de ces dents pèsent de 6 à 7 kilos ; leur ivoire est plus blanc, plus fin, mais il est aussi plus dur et plus cassant que celui de l'Eléphant. On enlève, au mo.yen d'acides, Fémail qui est difficile à entamer et les dents sont alors livrées au commerce sous le nom dents hriilées. Cet ivoire était recherché autrefois pour faire des dentiers à cause de sa blancheur et de sa dureté, mais depuis la vulcanisa- tion du caoutchouc, il est presque complètement délaissé. De 35 francs le kilo, son prix est descendu actuellement à 5 francs. 8 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. II. La sculpture chryséléphantine. Ce fut incontestablement le clou de cette Exposition colo- niale. Comme l'on comprend en admirant les œuvres d'art que renferme le salon d'honneur cette parole de Pline : « L'ivoire est la matière la plus précieuse pour fabriquer des dieux. » Dans ce Salon d'honneur ont été réunies toutes les mani- festations artistiques ayant rapport au Congo et qu'on pour- rait classer en deux catégories : 1° Les œuvres des indigènes constituant Varl congolais-, les œuvres des artistes helges^ affirmant un véritable réveil de la sculpture chryséléphan- tine. 1° L'art congolais. — L'exposition des objets sculptés par les indigènes du Congo montre nettement l'évolution du sen- timent artistique chez ces peuples primitifs. On retrouve par- tout, même dans leurs œuvres les plus naïves, le besoin inné de donner à ces productions une forme élégante. Avec un peu d'observation il est possible de suivre la gradation de ce sentiment du beau chez les diverses peuplades, suivant qu'on l'étudié dans la grande forêt équatoriale, ou sur la côte, ou dans une zone intermédiaire. P Dans la grande forêt équatoriale, la lutte pour la vie ne laisse guère de loisir au noir, obligé qu'il est de disputer à la nature le droit d'exister; aussi l'indigène fabrique des objets simples dont la ligne est harmonieuse, mais dépourvue d'ornementation. Les autres arts éclosent avec la même sim- plicité : la danse, motivée par l'exubérance de natures souples et saines, reste sans recherche; la musique, nécessitée par le besoin de rendre la parole plus expressive, est réduite à une mélodie sauvage. 2° Autour de la forêt ceyitrale, les tribus vivent dans un état de paix relative; elles ont alors des loisirs qui leur per- mettent de décorer, d'ornementer leurs objets. Dès lors, nous voyons les Congolais travailler et sculpter le bois; mais c'est surtout l'ivoire qu'ils apprécient. Il est vrai de dire que l'ivoire n'a pas toujours été pour eux une matière précieuse, car avant l'arrivée des Européens, les défenses restaient souvent L'IVOIRE A L'EXPOSITION COLONIALE DE BRUXELLES. 9 sans emploi. C'est à peine si les indigènes s'en servaient pour fabriquer des objets usuels tels que des pilons et des mor- tiers, des bracelets, des manches de couteaux et surtout des trompes dont la taille atteignait parfois 2 mètres. 3° A la côte, les artistes noirs décorent les défenses qu'on leur confie; ils sculptent en bas-relief de longues théories de personnages s'enroulant en spirale autour de la défense et courant l'un derrière l'autre comme sur l'escalier d'une tour- Ce travail, qui coûte aujourd'hui 1 schilling par figure, se fait aussi sur des dents d'Hippopotames et de Pacochères. Les nombreux spécimens qui sont exposés témoignent de la bonne volonté des sculpteurs congolais et montrent que ceux-ci usent du même procédé que nos enfants quand ils commencent à dessiner : ils exagèrent les détails et inter- prètent souvent d'une façon réaliste les types qu'ils veulent reproduire, montrant par exemple sur un petit fétiche les dé- tails de la chevelure, les tatouages et certaine expression de physionomie qui devient caractéristique. Dans le Bas-Congo, les ivoires ont une plus grande valeur ; ce sont des fétiches servant de pommeau aux cannes des grands chefs. Dans le Sud et surtout dans la Djuma, les ivoiriers font de minuscules fétiches et des plaques sur lesquelles ils repré- sentent des personnages accroupis semblables à des divinités indoues. Vers le Tanganyika, les féticheurs de Misiti ont des mas- ques d'ivoire qui sont, du reste, sans grande expression. Toutes ces productions indigènes ne pouvaient manquer d'attirer l'attention des artistes belges et ces modèles afri- cains qui ne sont souvent que de naïves interprétations de la nature, ont inspiré aux sculpteurs belges certains essais intéressants. 2« L'art belge et la sculpture chryséléphantine. — Déjà en 1893, le Gouvernement de l'Etat du Congo voulant créer un mouvement artistique, une renaissance de la sculp- ture sur ivoire, avait adressé à l'occasion de l'Exposition d'Anvers un chaleureux appel aux artistes belges; et, ce qui valait mieux encore que l'éloquence, l'Etat du Congo fit dis- tribuer gracieusement, aux meilleurs statuaires belges, des défenses d'Eléphant d'une valeur considérable. Quatorze 10 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. sculpteurs répondirent à cet appel et leurs envois firent pres- sentir l'importance de la future école chryséléphantine. Enfin, en 1897, à Tervueren, les artistes belges ont montré quel merveilleux parti la sculpture pouvait tirer de l'ivoire, Plus de .quatre-vingts pièces d'ivoire étaient rassemblées dans le Salon d'honneur et constituaient un véritable Salon des ivoires. Quelques-unes de ces pièces sont de véritables chefs- d'œuvre de grâce et de finesse. Ajoutons que les artistes avaient tenu à donner à leurs œuvres un cachet particulièrement colonial en les faisant reposer sur des socles en bois de la forêt tropicale. Toute la section congolaise avait du reste ses étagères, ses meubles d'art, ses boiseries, taillés dans ce bois aux chaudes couleurs que fournissent les forêts de l'Afrique tropicale. Je citerai en particulier un magnifique bois rouge (Sarcocephalus), sorte d'acajou flammé de larges veines d'or et qui doit être d'un grand prix pour l'ébénisterie ou l'art ornemental. A côté des produits ordinaires de la sculpture sur ivoire, c'est-à-dire des Christs et des éventails, voici des figurines, des bustes, des groupes, des coffrets, des cadres et même une pendule ! Souvent le ton laiteux de l'ivoire est rehaussé par des applications fort heureuses de bronze, d'argent et d'or. Je noterai même une certaine Vierge victorieuse du Mal, en ivoire et vermeil enrichi de pierres précieuses, qui était d'un gracieux effet. De toutes ces œuvres, une des plus captivantes est celle de M. Wolfers qui a conservé à la défense sa grandeur natu- relle, et qui a fait supporter ce beau motif courbe par un Cygne de métal dont le cou et les ailes s'enroulant en spi- rale autour de la défense, ont fourni un motif décoratif réel- lement original. A côté des ivoires sculptés nous signalerons aussi des pein- tures sur panneaux en ivoire, et des incrustations fort habiles sur des objets et meubles de luxe. En résumé, cet ensemble montre chez la jeune école belge, une originalité et une vigueur remarquables. Sans atteindre l'art d'un Phidias, elle n'en atteste pas moins une véritable résurrection d'un art antique qui fut si florissant chez les Grecs et les Romains et qui semblait mort depuis le xviii^ siècle. L'IVOIRE A L'EXPOSITION COLONIALE DE BRUXELLES. H Dès la plus haute antiquité, les hommes ont utilisé l'ivoire pour orner leurs maisons et leurs temples, ou pour sculpter les images de leurs dieux. Déjà l'homme primitif de la Gaule, comme le montrait M. Piette au dernier Congrès des Sociétés savantes, tirait de l'ivoire du Mammouth des statuettes qui sont aujourd'hui ce que seront, dans les temps futurs, les fétiches congolais. Les Iléhreux en décoraient leurs meubles et les murs de leurs palais. Les Musées assyrien et égyptien du Louvre pos- sèdent de nombreux objets en ivoire. Les Grecs apprennent des Phéniciens l'art de travailler cette matière. Dans leurs sculptures, ils combinent l'or et l'ivoire : l'or pour les vêtements et l'ivoire pour le nu. Avec Phidias les œuvres sont colossales : la Minerve du Parthé- non a 12 mètres et le Jupiter d'Olympie 19 mètres de hau- teur. Certes, on trouverait peut-être encore des Phidias au- jourd'hui, mais oii serait le Gouvernement qui commande- rait des Minerve et des Jupiter? L'ivoire à ce point de vue ne pourra jamais remplacer le moderne et démocratique bronze. A Rome, l'ivoire fut aussi prodigué ; et l'art byzantin en fit un emploi considérable. Pour ne citer qu'un exemple, l'église Sainte-Sophie, à Constantinople, a trois cent soixante- cinq portes décorées de bas-reliefs en ivoire. L'art chrétien, comme l'art arabe et celui de l'Extrême- Orient, a produit de nombreux objets d'ivoire. Sous Charle- magne ce sont des bas-reliefs, des statuettes et des instru- ments du culte. Au moyen âge, les ivoiriers font vivre dans de charmants diptyques tout un monde de personnages saints découpés avec une admirable candeur C'est au xv^ siècle que furent sculptés les grands 'retables en ivoire du Musée de Cluny. Au xvi« et au xvii« siècles, l'ivoirerie prend un grand développement en France, en Allemagne et aux Pays-Bas : certains crucifix en ivoire sont attribués à Michel-Ange, et d'autres sculptures éburnines passent pour être de Benve- nutoCellini; c'est du xvii^ siècle que date le célèbre bas- relief de Samt Léon venant au-devant d'Attila, tant admiré à Saint-Pierre de Rome. Depuis le xviii^ siècle, cet art est tombé en désuétude, et sauf la fameuse Minerve du Parthénon que Simart exposa en 1855 à Paris et qui est actuellement conservée au château de Dampierre, dans la famille du duc 42 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. de Luynes, on peut dire que le travail artistique de l'ivoire avait presque disparu. Les artistes belges séduits par le grain et l'éclat si cares- sant de l'ivoire, ont voulu tenter de fixer leurs conceptions dans cette riche matière que leur colonie africaine procure en si grande abondance. 11 faut reconnaître qu'ils y ont réussi et qu'ils ont produit une véritable rénovation de cet art char- mant delà sculpture sur ivoire. Ils ont montré qu'il pouvait exister un parallélisme entre l'évolution coloniale d'un pays et le développement de l'art ornemental. Cette renaissance est si frappante que notre ami Bourdarie prévoit déjà l'heu- reux moment où chaque famille possédera ses ivoires d'art au lieu de sa douzaine de couteaux à manche d'ivoire. Assurément l'art n'a pas à se préoccuper des débouchés; mais, si sans perdre rien de sa valeur esthétique, il crée ces débouchés, pourquoi ne pas l'en féliciter? Et c'est là l'im- pression qui a été ressentie par tout visiteur de l'Exposition coloniale de Tervueren. Il a senti, ce visiteur, que si les colo- nies peuvent étendre l'horizon économique et scientifique d'un pays, elles peuvent aussi apporter leur contribution à Fart, soit par les œuvres naïves des primitifs, soit par les merveilleuses matières premières qu'elles fournissent. N'est- ce pas là un fait capital pour nos artistes modernes qui s'épuisent à faire du « nouveau » et à chercher « autre chose » ? En résumé, les partisans de l'idée coloniale en Belgique, et en particulier tous ceux qui ont collaboré à cette colossale entreprise de l'Etat indépendant du Congo, peuvent être re- connaissants aux artistes et aux « ouvriers (Tart » qui ont provoqué cette renaissance de l'art décoratif moderne. Aussi l'on comprend que le Gouvernement belge ait voulu flatter ses artistes en même temps que rendre hommage au Roi Léo- pold II, en inscrivant en tête du Catalogue de cette Exposi- tion, cette épigraphe : « Le degré artistique d'un pe^fple est V expression la plus élevée de sa perfectibilité, et la protec- tion des arts souligne la grandeur d\m Gouvernement. >^ 13 LA CULTURE DU BANANIER DANS L'AMÉRIQUE CENTRALE ET LE COMMERCE DES BANANES AUX ÉTATS-UNIS (I) par A.-L. PINART. Ayant été chargé, au mois de juin 1896, par M. le Pré- sident du Conseil, Ministre de l'Agriculture et M. le Ministre du Commerce, d'une mission à l'effet d'étudier les cultures tropicales et les transactions commerciales auxquelles elles donnent lieu dans l'Amérique centrale, je me suis efforcé, durant mon dernier voyage dans ces régions, de réunir les élé- ments d'un rapport actuellement en préparation. Mes notes sont encore bien incomplètes et j'attends les résultats d'enquêtes particulières qui se poursuivent à ma demande et n'ont pas en- core pris fin. Toutefois, M. le Secrétaire général de la Société d'Acclimatation ayant bien voulu me demander de commu- niquer à la Société la partie de mon rapport qui touche à la culture du Bananier dans ces régions où elle s'est déve- loppée d'une manière prodigieuse dans ces dernières années, j'ai cru devoir accéder à son désir. La banane est, comme Ton sait, l'un des principaux élé- ments de la nourriture des populations de toutes races qui habitent les zones intertropicales. Quoi d'étonnant alors qu'aux États-Unis, chez un peuple essentiellement pratique, on ait cherché à faire entrer ce produit alimentaire si consi- dérable dans l'alimentation générale? Une livre de bananes, nous dit Humboldt, contient autant de matière nutritive que 44 livres de pommes de terre. Crichton Campbell, l'un des fervents avocats de la banane aux États-Unis déclare qu'une livre de banane équivaut, comme pouvoir nutritif, à 25 livres de pain cuit. Les Américains, ayant compris le parti important que l'on pouvait tirer de ce fruit, l'importent aujourd'hui en quantités prodigieuses. Le nombre de régimes introduits en 1896, par les ports du Golfe (1) Communication faite dans la séance fçénérale du 17 décembre 1897. 14 BULLETIN DE Lk SOCIÉTÉ L'ACCLIMATATION. du Mexique, la Nouvelle- Orléans et Mobile, puis par ceux de New- York, Gharleston, etc., n'a pas été inférieur à vingt-cinq millions, absorbés par le commerce aussitôt leur débarque- ment. Si j'ajoute que chaque régime de banane provenant de l'Amérique centrale porte de 120 à 180 fruits, qu'il pèse de 30 à 40 kilogrammes, Ton se rendra facilement compte du déve- loppement extraordinaire qu'a dû prendre la culture du Bana- nier pour pouvoir faire face à une telle consommation. Nous ne nous occuperons pour le moment que des régions de l'est et du centre des Etats-Unis, la Californie et les autres États du Pacifique, s'approvisionnant d'autre part à la côte sud du Mexique et aux îles Hawaï. Aussi, partout dans les endroits favorables de la côte nord de l'Amérique centrale, depuis la colonie de Belize par 19*' de Lat. N. jusqu'à Santa -Marta en Colombie, se sont dévelop- pées d'immenses cultures de Bananiers. La Jamaïque, Saint- Domingue, Cuba, les Bahamas produisent aussi beaucoup, mais en qualité inférieure. Des agglomérations considérables se sont formées, des villes mêmes se sont élevées dans ces contrées tropicales telles La Ceiba, Rama, Bocas del Toro, par exemple, que nous avons connue en 1883, une misérable bour- gade, absolument isolée à l'entrée de la baie de l'Amirauté, dans le Chiriqui du nord, est devenue aujourd'hui une ville importante en communication directe deux fois par mois avec la Nouvelle-Orléans: elle possède même un journal heb- domadaire El Criterio. En 1883, le district avait à peine 500 habitants, aujourd'hui il en a près de 10,000. Le département de Zélaya au Nicaragua, l'ancien royaume des Mosquitos, il y a quelques années encore ignoré des géo- graphes, a lui aussi des plantations de Bananiers et des va- peurs mettant Rama et Bluefield en communication constante avec la Nouvelle-Orléans. Que dire de Port-Limon au Costa-Rica ! Les deux côtés de la ligne de chemin de fer qui unit le port à la capitale ne for- ment dans la partie basse du trajet qu'une forêt de Bananiers et quand arrive au port le vapeur annoncé, des trains se suc- cèdent à l'infini, venant déverser sur le wharf d'embarque- ment des cent et des mille tonnes de bananes, toutes trans- portées à la Nouvelle-Orléans. Plus au Sud, Colon, Carthagène, Santa- Marta fournissent aussi un contingent considérable : mais comme dans ces ports LA CULTURE DU BANANIER DANS L'AMÉKlQUE CENTRALE- 1o le trafic se fait surtout [avec New-York, il y a durant les mois d'hiver un grand ralentissement en raison des froids rencontrés dans le trajet au delà du Cap Hatteras qui ruinent parfois les cargaisons. Au nord, enfin, nous avons le Honduras, le Guatemala et la Colonie anglaise de Belize, desservis par une ligne hebdo- madaire de vapeurs qui mettent en communication Belize, Livingston, Puerto-Barrios et Puerto-Cortes avec la Nouvelle- Orléans. A chaque voyage, les vapeurs retournent avec un chargement complet de bananes. Une autre ligne fait le service deux fois par mois avec les ports de la Ceiba, de Trujillo et Roatan. Une fois par mois une autre ligne touche généralement dans ces ports avec attache à New-York. INous devons mentionner encore comme port d'attache à venir des vapeurs fruitiers, celui de Galveston au Texas, appelé à devenir très important en raison de ses communica- tions directes avec l'intérieur des Etats-Unis du sud- ouest, ce port étant le terminus sur le Golfe du Mexique de la grande ligne de pénétration des chemins de fer de la Compagnie du Sud-Pacifique qui se prêterait certainement à une entente pour les transports à bon marché sur son immense réseau. Nous terminerons ici ces considérations générales par lesquelles nous avons voulu rendre évidente l'importance énorme qu'a prise la culture de la banane et l'espoir bien fondé que l'on peut avoir de son développement encore bien plus considérable. Passons à la description du Bananier et de sa culture. Le Bananier appartient, comme chacun sait, à la famille des Musées, dont les espèces sont fort nombreuses : l'espèce cultivée dans les régions qui nous occupent aujourd'hui est de Musa paradisiaca. Il en existe de très nombreuses va- riétés mais qui jusqu'à présent, n'ont, à notre connaissance, jamais été classées scientifiquement, Iloraninow lui-même, dans son Prodromiis Scitaminearum {Ptersburgi, 1862), y ayant renoncé. La seule variété qui soit cependant aujour- d'hui cultivée en grand, la seule qui soit admise sans contes- tation sur les marchés des États-Unis, est la variété du M. sapientum, dite Taïla ou de Taïti : ce Bananier fut, dit-on, introduit à la côte sud du Mexique à San-Blas et à Acapulco par les galions de Manille et c'est là qu'il se serait d'abord 46 BULLETIN BE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. développé, jusqu'au moment où il fut transporté à la côte nord, où aujourd'hui il règne en maître (1). Il a l'avantage d'être plus résistant que les autres variétés, de se reproduire très facilement par rejets, de donner un régime compact, régu- lier, d'un poids presque toujours égal, supportant plus facile- ment que tout autre les transports lointains, et dont le fruit bien formé, gros et succulent, se prête aussi bien à être mangé cuit que cru. Toutes les innombrables plantations de la région qui nous occupe possèdent exclusivement cette variété pour l'exportation : comme c'est le point qui nous intéresse spé- cialement, nous nous limiterons donc à l'étude de cette seule variété. Sur les marchés de la Nouvelle-Orléans, de Mobile et en général du Golfe du Mexique, on rencontre souvent la grosse espèce de bananes dit Plût-aii-ciel ou Dieu le veuille ; cultivée surtout à Saint-Domingue, elle ne peut se manger que cuite et est assez insipide : le régime ne porte que quelques fruits, de 10 à 25, mais chacun de ces fruits pèse jusqu'à 2 kilo- grammes. A New-York, l'on introduit aussi en très petite quantité la banane-figue {Musa mensuaria) ou Neïne : c'est un fruit délicieux, bien connu aux Antilles et dans l'Amérique cen- trale : le goût en est délicieux, mais le régime est fort petit et ne dépasse guère 2 kilogrammes, c'est un fruit de luxe. Il serait superflu de décrire ici le Bananier au point de vue botanique. Tout le monde connaît, pour l'avoir vu en voyage ou au moins dans les serres et les plates - bandes estivales des jardins, cette gloire des tropiques. L'élégance de sa forme, la beauté de son port, la grandeur et l'émeraude un peu mat de ses feuilles se développant en spi- rales autour d'un tronc gracile et souple, s'agitant au moindre souffle de la brise, en ont fait chez nous une plante d'orne- ment. Rarement, cependant, on voit le Bananier épanouir sa fleur sortant comme un fort bouton de rose écarlate se fai- (1) Nous ne croyons pas devoir revenir ici sur la question si disculée déjà de savoir si le Bananier est originaire d'Amérique : un faii curieux à signaler cependant, c'est que la banane possèJe dans presque toutes les langues in- diennes de la région un nom spécial indéniable qui ne provient pas de l'éiranger comme cela a lieu pour tant d'autres plantes, d'animaux, dVbjets divers intro- duits en Amérique depuis la découverte. Banane se dit Zapalotl en Nahuatl, Tnl dans la plupart des langues de la famille Maya-Quiche. Ajahaa en Ghorti, Mori en Lenca, Bun en Guaymie, Kalpal en Dorasque, etc., etc. LA CULTURE DU BANANIER MANS L'AMÉRIQUE CENTRALE. 17 sant jour à travers les feuilles plus petites, tVun vert plus tendre, de son bourgeon terminal, éclatant, s'ouvrant et lais- sant voir autour de son axe floral des rangées concentriques de petites fleurs d'un blanc-jaunâtre, disposées d'une manière régulière autour de son axe et qui bientôt deviendront les ba- nanes. Dans l'espèce, ou plutôt la variété qui nous occupe, il est rare que les fleurs stériles qui apparaissent les premières sur le style ou axe floral soient nombreuses : c'est ce qui pro- duit ces beaux régimes compacts si appréciés aux Etats- Unis. Les fleurs ne tardent pas à tomber et la banane apparaît, toute petite d'abord, sortant de l'ovule, mais elle s'allonge, grossit presque à vue d'oeil. Le poids fait pencher de plus en plus le régime mollement caché au milieu de la gerbe feuillue qui le protège des ardeurs du soleil. Le fruit a grossi et présente maintenant une peau ferme, bien tendue, unie : il est plein, et, bien que pas entièî^ement mûr, c'est le mo- ment de couper le régime et de l'envoyer au port d'em- barquement ; cueillie à point, la banane mûrit facilement en douze et quinze jours. Si le régime doit être consommé sur place, on le laisse sur pied quelques jours de plus, jusqu'au moment où ses fruits prennent cette belle coloration jaune d'or qui est le propre de la banane Taïla. Le régime cueilli, on abat dans toute plan- tation rationnellement exploitée, le pied qui l'a produit pour laisser la place à un autre qui, en peu de mois, aura produit aussi son régime. A la côte nord de l'Amérique centrale, le pied de Bananier produit chaque année de deux à trois et jusqu'à quatre et cinq rejets différents portant fruit. Le Bananier dont il s'agit varie comme hauteur suivant que la situation et le terrain lui sont plus ou moins favo- rables. 11 est rare cependant de le voir dépasser 3 mètres. La banane s'emploie de différentes manières, crue ou cuite. Grue, c'est un fruit savoureux, farineux, sucré légèrement, agréable au goût, tant soit peu astringent, peu digestif pour certains estomacs qui n'y sont pas habitués, surtout chez les enfants auxquels elle est apte à donner des embarras gas- triques, si la maturité n'est pas assez complète ou bien trop prononcée : c'est cependant crue qu'on la préfère aux Etats- Unis et qu'on la consomme dans les proportions indiquéei^: ci-dessus. Bîdl Soc. nat. Accl. Fr. 1898. - 2 18 BULLETIN DK LA SOCIÉTÉ D'ACCLLMATATION. Cuite, on prépare la banane de nombreuses manières. Sous les tropiques, on la cueille avant sa maturité, on la pèle, car sa peau, dans cet état, est fort acre et on la fait cuire au four ou sous la cendre : èlle sert alors de pain. On en fait, en outre, après dessication, une farine (pour cela, on la pile dans un mortier une fois desséchée), et on la conserve alors dans des vases ou sacs à l'abri de l'humidité : dans ces conditions elle dure fort longtemps. Cette farine, très nourrissante, sert surtout en voyage où on en fait une boisson très saine et très rafr aîchissante, espèce de gruau épais, que l'on mélange quel- quefois avec du sucre pour parer à un goût un peu insipide. Coupée en rouelles ou en tranches, elle entre dans les potages comme légume et forme une des ressources du ménage comme la pomme de terre chez nous. La banane mûre et cuite au four est un aliment très sain et très nutritif en même temps qu'agréable au goût ; on la fait aussi frire, on en fait des gâteaux, des bonbons, etc. etc. Crich- ton-Campbell, l'avocat principal de l'alimentation par la ba- nane aux États-Unis, conseille aux mères de ne jamais laisser aller à jeun leurs enfants à l'école et de mettre dans leur panier une banane cuite dont le goût et le pouvoir nutritif donneront à l'enfant une force de résistance infiniment plus grande qu'une tartine de pain avec de la confiture. En outre, dit-il, le prix modique de la banane (un centime à New- Yoriv, un demi-centime à la Nouvelle-Orléans), en fait un des aliments par excellence à rechercher par la classe peu aisée. Nous devons ajouter qu'avec la banaue mûre, fermentée, Ton distille une eau-de-vie à goût empyreumatique pro- noncé, rèche à la langue et au gosier. La i)roportion d'al- cool étant très forte, il serait peut-être bon d'étudier les moyens d'enlever à cette liqueur l'huile essentielle qui lui donne un goût peu agréable : les déchets qui se produisent fatalement sur une plantation pourraient ainsi être utilisés. Les gens du pays qui, cependant, aiment une liqueur un peu forte, dédaignent l'eau- de-vie de bananes, à moins qu'ils n'aient pas autre chose pour la remplacer. Si nous passons maintenant au mode de culture en grand du Bananier, tel qu'on le pratique à la côte nord de TAmé- rique Centrale, on reconnaîtra que cette culture est des plus simples et des i)lus rudimentaires. Le seul Draicl) ick pour LA CULTURE DU BANANIER DANS L'AMÉRIQUE CENTRALE. -19 l'Européen qui veut s'y livrer, consiste dans le climat. Le Bananier pour se développer et produire à son aise demande en effet un climat chaud et humide : le minimum de tempéra- ture qui lui convienne est de 22« cent. Pour trouver les ter- rains propres nous devons choisir partout dans ces régions la zone littorale qui est certainement peu saine pour l'Européen, mais avec certaines précautions faciles à prendre, il est per- mis d'affirmer que les craintes émises généralement à cet égard, sont d'ordinaire bien exagérées. Le choix du terrain a une grande importance : il ne doit être ni trop sec, ni trop humide. Un sol noir {btack loam) ou rouge ferrugineux est préférable, dans un endroit un peu élevé au-dessus d'une rivière, à une hauteur suffisante pour que les inondations périodiques ne l'envahissent point. Nous choisirions volontiers pour un établissement de ce genre un terrain courant fortement en longueur sur les bords d'une rivière et peu épais en profondeur : il est alors facile de trans- porter sans grands frais aux différents degrads de la rivière les régimes de bananes atin de les embarquer sur les canots, chalands ou bateaux qui les conduiront au port d'embar- quement. L'endroit choisi doit être protégé des vents du Nord, qui soufflent souvent en tempête sur cette cote, de novembre à janvier. Dans le défrichement, on réserve généralement du côté du Nord un rideau de forêt suffisant pour protéger la plantation. Les vents violents ont pour effet de griller les jeunes feuilles qui protègent le régime au début de son dé- veloppement et de l'exposer aux ardeurs du soleil qui le dessèche et le rend inutilisable. L'endroit une fois choisi, l'on procède au défrichement, ce qui, en certains points, n'est pas chose facile : la forêt est im- pénétrable, les Lianes, les Palmiers nains épineux, toute cette végétation exubérante du sous-bois tropical près des rivières, rendent souvent le travail fort pénible : on abat à la hache ou au machete tout ce que l'on peut, en ayant soin de laisser à eux-mêmes les gros arbres qu'il serait trop dispen- dieux d'attaquer directement : le feu se chargera tout à l'heure de les réduire à néant. Le défriciiement se fait au commencement de la saison sèche, en novembre et décembre, puis, ce travail terminé et les bois abattus suffisamment secs, on profite d'une journée où le vent est un peu fort, du quar- 20 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. tier le plus favorable pour ne pas attaquer le rideau de forêt qui a été laissé pour protéger la plantation des vents du Nord, on répand sur les premières abattis du pétrole et on y met le feu. Celui-ci prend avec une extrême violence et net- toie en peu de temps l'espace abattu, ne laissant des grands arbres de la forêt épargnés jusqu'alors que des troncs à demi calcinés, dans lesquels le feu continuera à couver pendant plusieurs jours. Le travail de défrichement se fait généralement par con- trat avec des gens du pays qui en ont Fiiabitude et qu'il est toujours facile de se procurer : le défrichement d'un hectare de terrain revient dans ces conditions à environ 80 pesos, soit au change actuel de l'argent à un peu de moins de 200 francs. Nous ne parlons pas ici du prix de l'achat ou de l'occupa- tion des terrains soit gouvernementaux, soit particuliers, les prix ou redevances étant absolument minimes et négli- geables. Le terrain ayant été ainsi nettoyé, on attend les premières pluies légères pour faire la plantation des rejets de Bana- niers. Les rejets ou choquards de Bananiers de l'espèce ou variété préférée se trouvent facilement dans le pays et ne doivent pas revenir à plus de 5 pesos par centaine. Le terrain disposé, on plante ces rejets à des distances va- riables suivant le lieu et la température. Nous pensons que îa distance de 3 mètres entre chaque pied est la plus re- commandable : cependant nous avons vu des plantations où la distance entre chaque pied ne dépasse pas 2 mètres et même 1 m. 50. Le rapport est évidemment plus considérable dans le second cas pour les premières années, mais après cela, il faut craindre l'étouffement qui se produira certaine- ment à moins de sacrifier chaque année partie des rejets. Nous croyons donc la distance de 3 mètres préférable parce que dans ces conditions nous parons à l'étouffement et qu'en même temps, les pieds sont assez près les uns des autres pour empêcher que le soleil ne dessèche le sol aux alen- tours. La plantation dans ces conditions devrait avoir neuf cent quatre-vingt-dix-neuf pieds de Bananiers, mais comme il reste toujours sur le terrain, même bien nettoj^é, un certain LA CULTURE DU BANANIER DANS L'AMÉRIQUE CENTRALE. 21 nombre de souches des gros arbres qui ont été brûlés, nous croyons que le nombre réel de pieds à l'iiectare sera de huit cents. Le rejet se plante dans un trou préparé à l'avance d'envi- ron 50 cent, de profondeur : on rebouche et l'on a soin de tasser suffisamment la terre tout autour pour empêcher au- tant que possible l'action du soleil sur les racines. La planta- tion faite, il est nécessaire, dans les premiers temps, d'em- pécher les mauvaises herbes et le sous-bois de repousser pour ne pas étouffer les jeunes plants. Ce travail ne dure pas longtemps, car le Bananier pousse très rapidement et étouffe bientôt à son tour tout ce qui pousse au-dessous de lui. Huit mois sont généralement suffisants pour que le Bana- nier donne son premier régime : celui-ci est la plupart du temps de petite dimension et ce n'est que dans la seconde année qu'il commence à produire régulièrement des régimes pouvant affronter les marchés américains. Dès lors la plantation à ce point n'exige plus de soins régu- liers, si ce n'est celui de veiller à la maturation et à la récolte des régimes arrivés à point : aussitôt cueillis, les régimes sont transportés aux différents dégrads de la rivière et mis à bord des bateaux qui se rendent directement aux ports d'em- barquement. Là, au passage des bateaux fruitiers, on vend couramment le régime, soit à bord même des vapeurs, soit aux agents et suivant les points, et suivant leur poids, à raison de 30 à 60 et même 80 centimes argent : les régimes de Bocas del Toro obtiennent le plus haut prix. La main d'œuvre nécessaire à l'exploitation d'une planta- tion de Bananiers d'un hectare, une fois en production, est fort peu de chose et nous conseillons à toute personne qui voudrait tenter l'aventure, de ne pas faire de plantation de moins de 10 hectares. Dans ce cas, deux escouades de dix hommes chacune, au maximum, sont très suffisantes, cha- cune de ces escouades étant dirigée par un chef. Le prix de la main (]'œuvre est généralement de 1 peso argent pour les ouvriers et de 2 pesos à 2 pesos 50 pour les chefs. La main-d'œuvre est relativement facile à recruter pour ce genre de travaux. Le transport par bateaux ou canots de la plantation au port est toujours assez dispendieux, soit que la plantation 22 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. possède elle-même ses moyens de transport, ce qui est le plus pratique, mais nécessite dès le principe une mise de fonds assez considérable; soit qu'elle le tasse faire par con- trat, ce qui est possible en plusieurs points. Il est donc à tous égards, préférable de s'établir près d'un port. A la côte des Mosquitos au Nicaragua, sur la rivière Rama, les vapeurs viennent chercher les bananes jusqu'aux planta- tions mêmes, la rivière étant navigable sur un assez long parcours : à Puerto Barrios, à Puerto Cortez, à Puerto Limon, à Colon, à Santa-Marta, les trains de chemins de fer amènent lesbananes jusqu'aux wharfs d'embarquement, presque toutes les plantations étant situées dans ces régions, sur la ligne ferrée elle-même; il y a de ce fait grande économie dans le transport. Quoiqu'il en soit, et quels que soient les frais de transport, nous considérons la culture du Bananier comme appelée à fournir à celui qui veut s'y livrer d'énormes bénéfices, tout en s'efforçant de produire pour la classe peu aisée, comme nous le démontre Crichton-Campbell, un aliment sain, très nutritif et bon marché. Enfin, nous croyons que, suivant l'exemple donné aux Etats-Unis, il serait nécessaire que quelqu'un veuille se dé~ Youer, comme Crichton-Campbell et d'autres, à la diffusion de la banane dans l'alimentation : il faudrait évidemment pou- voir se la procurer à bon marché, et de bonne qualité, ce qui aujourd'hui n'existe pas. La banane que nous trouvons sur le marché parisien, par exemple, est petite, sans saveur et revient très cher. Il nous semble que dans notre colonie du Sénégal et surtout des Rivières du Sud, oii le climat est ana- logue à la côte nord de l'Amérique centrale, la banane Taïta se développerait à merveille et comme son fruit supporte faci- lement un voyage par mer assez long, il serait facile de l'a- mener à un prix raisonnable dans les ports français. C'est un essai que nous croyons pouvoir recommander comme devant être fructueux. 23 EXTRAITS ET ANALYSES. RA.PFORT SUR LES TRAVAUX EXÉCUTÉS EN 1896, A LA StATTON AQUIGOLE DE BOULOGNE-SUR-MeR. par Eugène Canu, directeur de la Station. Boulogne, le 1er mars 1897. Monsieur le Ministre, J'ai l'honneur de vous adresser notre Rapport annuel relatif aux études et aux travaux poursuivis à la Station aquicole de Boulogne' en 189Ô. Comme de coutume, ces travaux ont trait à la pêche fluviale et ma- ritime et à diverses questions importantes pour les pêcheries du nord de la France. Dans notre exposé, nous examinerons successivement les diiSerents points ayant trait aux chapitres suivants : I. Pisciculture fluviale. — IL Études techniques. — III. Applications pratiques. — IV. Ques- tions diverses. I. Pisciculture fluviale. P Repeuplement des cours d'eau. — Les essais de repeuplement exé- cutés depuis un certain nombre d'années par la Station aquicole de Boulogne avaient porté de préférence sur diverses espèces inte'res- santes au point de vue de l'acclimatation des variétés étrangères dans nos rivières particulièrement riches en Truites. Ni l'une ni Fautre de ces varie'te's n'ont fourni de résultats satisfaisants dans nos cours d'eau, maigre' des versements comptant annuellement de 2,000 à 5,000 jeunes truitelles âgées de six à dix mois. Et tandis que le re- peuplement des eaux fermées de différentes propriéte's particulières a parfaitement réussi dans cette région avec la Truite arc-en-ciel {Sal- moirideus], cette espèce n'a nullement prospéré dans la partie de la Liane affermée par la Société des pêclieurs à la ligne de Boulogne depuis une dizaine d'anne'es. Bien plus, la croissance ordinairement rapide de ce Poisson, qui le fait préférer par les pisciculteurs à notre Truite des ruisseaux indigènes {Salmo fario), la croissance, dis-je, demeure manifestement plus lente en rivière, et les Truites arc-en-ciel intro- duites dans les eaux vives du Boulonnais par la Station aquicole ont un développement qui semble toujours tardif et précaire quand on le compare aux conditions de croissance dont l'espèce locale est coutumière. 24 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. Quant au Saumon de Californie [Salmo quinnat], les versements dalèvins d'un certain âge exécutés dans nos rivières n'ont pas laisse' plus de traces que l'empoissonnement tente' à l'aide des individus âgés de deux ou trois mois. De même pour le Salmo fotitinalis et pour l'Ombre commune [Tliymallus vexillifer). De sorte que tous les essais ante'rieurs d'acclimatation dans les eaux ouvertes restent encore douteux quant à leur efficacité. — Aussi, suivant accord établi entre le bureau de la Société des pêcheurs et nous- mêmes, les Truites adultes de ces diverses variétés que nous conser- vions comme reproducteurs furent versées elles-mêmes dans les ruis- seaux affermés du Boulonnais, pour un dernier essai d'acclimatation : il s'agissait alors d'individus âges de quatre à cinq ans, très vigoureux et capables de se maintenir en bonnes conditions si les eaux leur sont véritablement favorables. Il fut convenu, en conséquence, que les essais d'acclimatation d'espèces étrangères resteraient dans l'avenir une exception dans nos pratiques de pisciculture fluviale ; toutes nos ressources, malheureu- sement limitées, seront appliquées à la culture des espèces indigènes. L'élevage des Salmonidés exécuté à la Station aquicole de Boulogne a comporté, en 1896 : 15,000 œufs de Truites du lac de Guéry au Mont-Dore, qui furent mis en incubation dans nos appareils. Les alevins produits furent élevés dans l'Aquarium de l'établissement pendant six et huit mois au bout desquels 10,000 truitolles furent déversées, partie en juin et le reste en septembre, dans la Liane, les ruisseaux du Brunembert, Bellozanne et Cantraine, sur les territoires de Carly et Samer. 2,000 œufs de Salmo fontinalis, provenant de l'Aquarium du Tro- cadéro, ont été élevés de môme dans nos bassins. Dans le courant de juillet un accident aux conduites d'adduction de la Compagnie des eaux de Boulogne qui approvisionne la Station aquicole vint sus- pendre toute circulation d'eau dans l'aquarium et causer la perte de ces alevins, avec celle de la plupart des jeunes truitelles du Guéry, restant encore en élevage dans l'établissement. Ces accidents, trop fréquents en été, et les épidémies [Ichthf/opthi- rius, multifiliis, Bodo necator^ etc.). qui sévissent assez souvent dans nos aquariums d'alevinage, rendent très précaire l'élevage des trui- telles mises au delà du printemps en stabulation dans les locaux de la Station aquicole. Aussi avons-nous étudié la création d'un Eta- blissement départemental de pisciculture fluviale qui supprimerait toutes ces difficultés dans l'alevinage de nos jeunes Salmonidés en été. Pendant la saison de ponte de 1896-1S97, nous avons commencé l'application de notre programme tendant à l'emploi des méthodes de pisciculture artificielle pour le repeuplement intensif des espèces régionales. EXTRAITS ET ANALYSES. 25 Pour la première fois, ditns cette conlre'e, nous avons poursuivi, sur les frayères de la rivière la Canche, la capture et la mise en stabu- lation dans des viviers flottants d'un certain nombre de reproduc- teurs, de Saumons de la Canche et Truites de mer. Pour ces opé- rations, nous avons obtenu l'autorisation et le concours actif de M. l'Ingénieur des ponts et chaussées de l'arrondissement de Mon- treuil et des agents sous se? ordres. 50,000 œufs de Saumons et de Truites de mer ont e'té fécondes par les soins de la Station aquicole de Boulogne, sur la berge même de la Canche, à Brimeux, en appliquant la méthode ordinaire et la mé- thode russe de fécondation artificielle. Les reproducteurs étaient des poissons choisis, d'une très belle taille, et mesuraient de 1"\20 à C'",'75 de longueur. L'une et l'autre des deux méthodes de fécondation nous ont donné de très bons résultats : la proportion des œufs non fécondés étant infime dans les deux lots. Ces œufs fécondés furent rapportés le jour même de leur féconda- lion par chemin de fer jusqu'à Boulogne, pour y être disposés dans les appareils de la Station aquicole. Depuis leur mise en incubation artificielle, nos œufs de Saumons et de Truites de mer suivent leur dé- veloppement normal. Les fécondations artificielles ont été opérées du 28 novembre au 11 décembre 1896. Les œufs de Saumon fécondés, le 11 décembre étaient le 29 décembre au milieu de l'enveloppement blastodermique du jaune, au stade F distingué dans l'Embryogénie de la Truite, par M. le docteur Henneguy(l). Le 12 janvier 1897, ils montraient les traces de leurs taches oculaires, visibles au travers du choriou, et qui restent les seules preuves convaincantes de réussite dans les opérations de pisciculture artificielle pour les personnes peu instruites ou peu versées dans les observations embryologiques. Nous devons constater, Monsieur le Ministre, le très vif intérêt porté par les pêcheurs aux opérations de pisciculture artificielle ap- pliquées ainsi aux Poissons les plus estimés de notre contrée : nous trouvons là un grand encouragement à poursuivre avec ténacité les opérations nouvelles entreprises dans notre service, d'autant plus que la culture artificielle du Saumon indigène n'est actuellement pour- suivie en France que dans la Dordogne et dans l'Adour, toutes les autres opérations restant des essais d'acclimatation de Saumons du Rhin dont le succès n'est pas du tout certain dans les eaux fran- çaises. Avec plus de ressources, il nous serait très facile, dans l'avenir, d'étendre l'importance de nos opérations de pisciculture sur les Sau- mons et Truites de mer du nord de la France, et d'élever jusqu'à plusieurs centaines de millions le nombre des sujets cultivés artifi- (1) Journal de VAnatomie et Physiologie^ 1889. 26 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. ciellement chaque année par les soins de la Station aquicole de Bou- logne. Pour la produclion des œufs et pour la mise en incubation jusqu'à l'éclosion des alevins, nous sommes suffisamment armés pour atteindre ce résultat. Il n'en est malheureusement pas de môme pour l'alevinage des saumoneaux et des truitelles, ainsi que nous l'avons dit plus haut, et c'est un point que nous ne cessons de signaler à l'at- tention du Conseil géne'ral du Pas-de-Calais en vue d'un Etublissc- ment départemental de pisciculture. En outre de cet élevage, des pontes artificielles de nos meilleures espèces locales, il reste en alevinage à la Station aquicole 700 jeunes Salmo fontanalis^ mis en incubation dès leur arrivée de TAquarium du Trocade'ro, et qui sont e'clos du 20 au 30 janvier 1S97. Ceux-ci sont destinés à être transplantés dans les cours supérieurs de la Liane et de la Course, affluent de la Canche, aux eaux très vives et très froides qui semblent convenir à cette espèce américaine. De même, cinquante exemplaires de rOmbre-Chevalier du lac Pa- vin, âgés de vingt mois, sont en alevinage dans les eaux vives d'une propriété privée qui est gracieusement mise à notre disposition à cet effet. Dès que la taille de ces Poissons, variant aujourd'hui de 14 à 20 centimètres, semblera suffisante pour les mettre à l'abri des dépré- dations des Saumons, grosses Truites et Brochets, ils seront trans- plantés dans l'une ou l'autre de nos rivières (probablement dans la Canche, dont les eaux sont assez profondes et dont le foud est très riche en Gammarides). 2° Projet d' Etablissement départeraental de pisciculture fluviale. — le territoire du département du Pas-de-Calais en général et de la région boulonnaise en particulier est largement doté de rivières et de petits fleuves favorables au développement des espèces fluviatiles les plus recherchées pour la consommation publique. Néanmoins on se plaint vivement dans cette contrée de la disparition du Poisson et l'admi- nistration départementale s'est préoccupée sérieusement de cette question. Le Conseil général du Pas-de-Calais émet le vœu qu'une étude soit faite en vue de la création d'un Etablissement de pisciculture chai-gé du réempoissonnement des rivières. Transmis par M le Préfet du Pas- de-Calais au Service des Ponts et Chaussées, ce vœu est l'objet d'un examen approfondi, tant au point de vue technique qu'au point de rue budgétaire. Nous avons été saisi par MM. les Ingénieurs du Ser- vice des Ponts et Chaussées du désir manifesté par le Conseil général du Département, et nous avons accepté d'apporter notre appui à la solution cherchée. Une commission spéciale composée de MM. les Ingénieurs de Bou- logne et de Montreuil, de M. le Président de la Société des pêcheurs à la ligne de Boulogne et du Directeur de la Station aquicole, s'est réu- EXTRAITS ET ANALYSES. 27 nie plusieurs fois en 1896 pour l'examen de diverses localités pro- pices à celle fondation d'une Station rurale de pisciculture; sur les bords d'un ruisseau donnant un approvisionnement d'eau suffisant. Un rapport préliminaire fut fourni au Conseil général dans la session d'août 1896, et les propositions définitives seront fournies à la se^^sion prochaine de 1897. Nous mentionnerons que, dans ce rapport, l'éven- tualité de la remise de cet Etablissement départemental sous la conduite du Directeur de la Station aquicole de Boulogne, particu- lièrement versé dans les questions de pisciculture pratique, se trouve envisagée pour être traitée à fond dans le sens affirmatif au cours du rapport de'finitif. A la vérité, nous trouverions, Monsieur le Ministre, un secours très efticacc dans la fondation d'une Station rurale de pisciculture affectée au repeuplement des rivières de cette contrée, et c'est un point que nous avons suffisamment indiqué plus haut, en men- tionnant les essais de repeuplement exécutés en 1896 par la Station aquicole. Nous avons donc fait approuver par la commission d'étude du projet deux solutions également bonnes à soumettre au choix du Con- seil géne':al. La première comporte des dépenses d'installation assez élevées. Elle envisage la construclion d'un établissement définitif, sur un ter- rain à acquérir par le département, terrain alimenté par des sources fournissant l'eau à un grand, nombre de réservoirs et bassins d'alevi- nage pour les jeunes Poissons élevés jusqu'à dix mois, à des bassins de slabulation pour les adultes reproducteurs, et aussi à des appa- reils d'éclosion. — Uu des emplacements proposés est à la limite des bois de la Cahoteric, aux confins des territoires communaux de Sor- rus, de Sainl-Josse et de la Caboterie, dans l'arrondissement de Mon- treuil. Le phm coté de cet emplacement a été dressé à la demande de la commission d'étude, et le débit des sources a été jaugé pendant l'été de 1896. Nous ne croyons pas que les ressources budgétaires du département du Pas-de-Calais permettront d'entreprendre cette créa- tion coiiteuse. La seconde solution, plus modeste et peut être tout aussi efficace quant aux résultais à obtenir avec les espèces régionales, tendrait à prendre eu location, à bail, l'un des nombreux moulins à eau établis sur le cours de nos rivières à Truites, livières dont les eaux très vives et très fraîches conviennent à merveille pour la stabulation des jeunes Salmonidés. Les dépendances du moulin, dans le bief supérieur et dans le bief inférieur de la chule d'eau, permettraient d'établir des bassins et des réservoirs flottants sur la rivière même, afin de procéder, ainsi qu'on le fait généralement en Suisse, en Allemagne et aussi au Nid-du-Ver- dier près Fécamp, à l'alevinage de nombreux saumoneaux et Iruitelles BULLETIiN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. produits par fécondation artificielle sur les frayères et par incubation dans les appareils de ia Station aquicole à Boulogne. Nous osons espérer, Monsieur le Ministre, que celte solution mo- deste autant que pratique [)ourra obtenir l'acquiescement du Conseil ge'ne'ral et du Préfet da Pas-de-Calais, S° Causes du dépeupletnent des Hcrevisses dans VAa. — Les rivières du Haut-Boulonnais et des collines de Picardie e'taient encore peuplées d'un grand nombre d'Ecrevisses, il y a peu d'années. Ces Crustacés ont aujourd'hui disparu de la plupart de ces cours d'eau. L'une de ces rivières, l'Aa, très riche en Truites dans son cours su- périeur, reste pour ainsi dire la seule qui contienne encore des Ecre- visses en nombre appréciable. Encore s'est-il passé là dans ces der- nières années un fait digne de la plus sérieuse attention. L'Aa, qui se jette dans la Mer du Nord sous Gravelines, compte encore quelques Ecrcvis.'es depuis sa source jusqu'à Lumbres, les environs de Fauquembergues sont seuls suffisamment riches pour per- mettre actellement une pêche profitable. — En 1891 et 1892, les vil- lages de Rumilly, Ouve, Wirquiu, Merck et Saint-Liévin étaient également très riches en Ecrevisses. Dans les communes de Merck- Saint-Liévin , en particulier, les habitants pratiquaient en grand nombre une pêche régulière de ces Crustacés, à l'aide de balances, et ils y trouvaient, par un travail du soir relativement peu pénible, le moyen d'augmenter notablement le produit du travail aux champs qu'ils exécutent le jour. Dans une bonne soirée de pêche, un homme largement équipé de balances, capturait alors jusqu'à 10 à 12 dou- zaines d'Ecrevisses marchandes. A l'époque actuelle, cette pêche a cessé complètement par suite de la disparition de ces Crustacés à Merck et à Saint-Liévin. Au cours de nos recherches sur la pêche des Truites dans la vallée de l'Aa, nous avons eu — à maintes reprises — l'occasion de recueillir les doléances des anciens pêcheurs d'Ecrevisses de Saint-Liévin jus- qu'à Rumilly. Notre attention s'est naturellement fixée sur cette brusque disparition de l'Ecrevisse dans des eaux qui Lavaient abritée si largement autrefois; et pour trouver la cause de ce phénomène, nous avons autopsié et disséqué un grand nombre de Crustacés de l'Aa, afin de rechercher à quelle sorte d'épidémie le dépeuplement rapide de la rivière pouvait être imputé. Ni dans les organes vitaux, ni dans les muscles du corps ou des pattes de ces Ecrevisses, nous n'avons trouvé trace de ces Distomes ou Psorospermies qui signalent le déve- loppement de ce que l'on a appelé maintes fois la Peste des Ecrevisses. Nous avons pu constater toutefois de fréquents déversements d'eaux industrielles dans la rivière, et nous avons rapproché ce fait du dé- peuplement de l'Aa en Ecrevisses, car on sait combien ce Crustace' est susceptible à l'égard de la pollution des eaux qu'il habite. Après enquête, nous avons appris que la disparition des Ecrevisses dans EXTRAITS ET ANALYSES. 2'.) cette région est postérieure à rintrodurlion de nombreuses fabriquo'; de papier qui sont venues depuis peu d'années supplanter et rempla- cer les minoteries d'autrefois. Remarquons, d'ailleurs, aussi que le cours supérieur de l'Aa, à Tamont de Fauqucmberques, ne com,)te aucune papeterie et qu'il a conserve des Errevisses. Néanmoins, il est juste de dire que la richesse de l'Aa en Ecre- visses avait subi, longtemps avant le développement de l'industrie du papier dans cette contrée, des fluctuations analogues à colles que nous constatons dans ces dernières années sans en trouver la cause évi- dente. C'est ainsi que la grande abondance d'Ecrevisses à Merck- Saint-Lièvin ne datait guère que de douze h quinze ans, au dire des pêcheurs les plus exercés et des marchands de ces villages. Avant cette période d'abondance, les Crustacés étaient rares dans l'Aa où on ne les péchait que très irrégulièrement. Peut-être enfin, faut-il encore tenir compte de la pêche intensive qui eut lieu sans surveillance et sans scrupule durant les dernières années d'abondance. Cette pêche s'élevant certains jours jusqu'à cent douzaines d'Ecrevisses, était alors suffisante pour enrayer à Merck- Saint-Lièvin la reproduction d'un Cruslacé qui croît lentement et qui se reproduit aussi rarement. Des recherches que nous avons exécutées, il semble résulter, Mon- sieur le Ministre, que l'Ecrevisse est dépeuplée dans l'Aa pour des causes étrangères à l'histoire naturelle de ce Crustacé : par les déver- sements d'eaux industrielles d'une part, et par l'effet d'une pêche très intensive d'autre part. Pour la première de ces raisons, le repeuplement de cette rivière par l'élevage artificiel de ce Crustacé, nous a semblé une expérience certaine d'aboutir en ce moment à un échec, et nous l'avons différée jusqu'à l'époque où la surveillance très stricte de l'Aa pourra être exercée de manière à faire respecter les lois sur la contamination des eaux poissonneuses par les résidus de fabrique. II. — Etudes techniques. Observations sur l'histoire naturelle des Saumons et Truites de mer. — Les mœurs des Saumons et Truites de mer sont encore assez mal connues ou interprétées par les pêcheurs et par les naturalistes pour qu'il soit nécessaire de les remettre à l'étude. Après avoir organisé, dans le cours de l'année 1895, les premières pratiques de pisciculture artificielle, qui aient été exécutées dans le nord de la France sur ces espèces locales (sans négliger néanmoins les quelques fécondations artificielles d'oeufs de Saumon exécutées à l'île Sainte-Aragone, dans la Somme, par M. Lefebvre, d'Amiens), nous nous sommes efforcé de poursuivre l'étude zoologique des Saumons et Truites de mer dans la BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. Cancbe, en tenant compte des découvertes scientifiques les plus récentes. Le Saumon, abondant dan=? la Candie et dans l'Autbie, et la Truite de mer, répandue sur toutes nos plajj^cs parsemées de rochers, sont les Poissons les plus précieux pour la pêche marilime et fluviale du nord de la France. L'attention s'est donc tout naturellement portée sur ces animaux, et do'jà divers rapports des Ingénieurs des Ponts et Chaus- se'es de l'arrondissement de Montreuil, ainsi que des rapports anté- rieurs des directeurs de la Station aquicole de Boulogne, ont examiné dans le cjurs de ces dernières années la question du Saumon de la Canclie, en particulier dans l'anne'e 1889. — Ce dernier rapport de la Station aquicole fait remarquer que la présence du Saumon remontant en masse dans la Cancbe daterait de 1883-1884, à la suite des travaux d'endiguement des eaux du fleuve au travers des sables de l'estuaire. Néanmoins le Saumon femelle, en robe de noce, est connu dans les rivières du nord de la France depuis un plus grand nombre d'années. Nous en trouvons la preuve convaincante dans le tome XXI de VHis- toire naturelle des Poiasons, publiée par Valenciennes en 1818. Aux pages 129 et 130 de ce traité, le naturaliste du .Tardin des Plantes signale la capture dans l'Autbie, petite rivière de Picardie qui se jette dans la baie de Somme près du Crotoi C?), d'un Poisson désigné par les pêcheurs du pays sous le nom de truite guilloise. Ce Poisson était une femelle de 30 pouces (0,81) de longueur, ayant le cori)S rempli d'œufs prêts à être pondus, avec le dos, les flancs, les joues et la caudale couverts de grandes taches rouges irrégulières. Cette description permet de reconnaître l'espèce qui nous est familière dans la rivière voisine, la Canche, où nous l'avons observée longuement sur les frayères pendant la période de la fraie, espèce dont nous avons eu nombre d'exemplaires entre les mains pour la pratique des féconda- tions artificielles. D'ailleurs, la Truite guilloise des pêcheurs de PAuthie n'est point la seule variété qu'on ait voulu séparer des Salmonidés anadromes qui nous occupent. Valenciennes de'crit encore, dans le même volume de son ouvrage, sous le nom de Truite de Bâillon {Traita Bailloni), une (orme nouvelle découverte dans la Soamie, rapportée de Norvège à Paris, et que nous avons signalée à part sous ce nom par le docteur Moreau dans son Traité le plus récent d'ichthyologie française. La Truite de Bâillon serait caractérisée par neuf rayons branchiostèges et par la présence sur ses flancs d'un i)otit nombre de taches noirâtres largement empourprées à leur périphérie. Nous avons retrouvé, en hiver, sur les frayères de la Canche, des Poissons du même aspect, gonflés d'œufs miirs,et que nous n'hésitons nullement à rapprocher de la Truite de Bâillon. Néanmoins, nous nj pouvons considérer cette espèce comme distincte : la variabilité du nombre de huit à douze des rayons branchiostèges est bien connue dans nos Salmonidés ana- EXTHAITS ET ANALYSES. 31 dromes, d'après les rccberches les plus approf )ndies dont ces organes furent l'objet depuis dix ans. La livrée de la Truite de Bâillon se re- trouve d'ailleurs c'galement en Norvège dans les Salmonidés ana- dromes; elle est même fréquente parmi les Truites de mer ayant accompli un séjour prolonge en eau douce et qui reçoivent Tepithète de Tajmen. Examinant les caractères distinctifs usités dans la spc'cifîcation moderne des Salmonidés, nous voyons, par oxem.ple, sur quelques-uns des spécimens capturés par nous dans la Gauche, les nombres et rap- ports suivants : )lATUliE LOTlUEii;! i'RiliTiTlOX É:l\E^ AVrililEli:{ES DE L'AliC BRANCHIAL DENTITION DU POISSON.. TOTALE. DE LA TÊTE. A DIÎHITE ET A llAUl.'lHi. DLf VOMEl!. Saumon mâle . . . . 1.04 1/4,72 12 + 9-21 1 2 + 8-:o 2 dents. Idem. 0.7o 1/4,68 13 + 8-21 13 4- 8-21 4 dents et 2 ran- gées recouvertes. Saumon femelle. i.no 1/:j,-26 12 + 9-21 13 -1- 9-22 2 dents. Truite de mer fe- 4 dents et 2 ran- melle o.r;0 1/^,.^.4 11 4- 7-1 S 11 +7-18 gées recouvertes. Truite de Bailion femel e 0.43 1/4,77 11 -f- 7-18 11 + 8-19 Nonibreusesdenls En raison des nombres et des caractères portes à ce tableau, et suivant Topinion e'noncce par le professeur F. -A. Smitt sur les rap- ports et la caractéristique des divers Salmonidés anadromes, nous sommes amenés à conclure qu'il n'y a point lieu de distinguer dans nos cours d'eau entre d'autios sortes de Salmonidés que le Saumon, la Truite de mer et la Truit " des ruisseaux. C'est une conclusion qui a de rim'jortance pour la conduite des pratiques de pisciculture dans notre r.^gion et pour l'élude uUeiieure des conditions d'exislcnce de ces importantes espèces de Poissons. Dans un rapport antérieur, nous avons eu l'occasion de signaler. Monsieur le Ministre, les données intéressantes pour l'étude des mi- grations et de la reproduction naturelle du Saumon qui permet de réunir la métiiode dite du mar({uaj:;e individuel, applique'e aux Pois- sons capturés, numc'roLés, étiquetes et rejetes ensuite en rivière afin de fournir ultérieurement au temps V()ulu des dénuées certaines sur leurs habitudes et sur leurs traus^omi Uions, s'ils étaient recapturés et observés alors à ce point de vue. — Les conclusions do ce rapport ont d'ailleurs été publiées au Bulletin d'informations du Ministère de l'A- gricultui'C eu janvier ISDG. Datis l'année qui vient de s'écouler, nous nous sommes nalurellenieut ctlorcûs de satisfaire à ces conclusions en appliquant daus notre région la méthode norvégienne dont nous avions exposé les avantages dans cerappoi't. La Station aquicole de Boulogne ne possédant ni les moyeus, ni la liberté d'action nécessaires pour 32 BULLETIN DE LA SOCIÉTP' D'aCGLLMATATION. semblable élude, nous avons provoqué rintervention du Service des Ponts et Chaussées de l'arrondissemont de Montreuil. L'Administration des Ponts et Chaussées de Monlreail avait à sa disposition, depuis plusieurs années, un crédit annuel spécial de 1,200 francs pour des observations méthodiques sur les mœurs du Saumon, dans la rivière de la Canche rattachée à cette circonscription. Nous avons obtenu qu'en 189G, on y mette à l'essai le marquage indi- viduel des Saumons capturés aux barrages par les garde-pêclie , Saumons marqués jusqu'alors d'un signe distinctif sans numéro d'ordre, signe variable chaque année pour tendre uniquement à établir Tannualito ou la bisannualité de la montée et de la ponte. Soixante-seize Saumons ont été marqués cette année d'un signe distinctif individuel, avec numéro d'ordre. Ce signe consiste en une épingle d'argent piquée dans la nageoire adipeuse, repliée et tordue de manière à enserrer l'arrière de cette nageoire; Té.pingle se termine par une fiche minuscule de deux à trois millimètres carrés qui porte le numéro d'ordre gravé. Capturés au barrage de Brimeux par un garde-pêclie stationnant constamment en ce point très important à préserver du braconnage organisé au moment des montées de Saumons par les meuniers et usiniers, les soixante-seize Poissons furent marqués du 30 mai au 19 décembre 1896. Le marquage à l'aide de fiches numérotées a déjà permis d'établir que ces animaux relâchés dans la Canche après l'opération, exécutent dans cette rivière des allées et venues assez importantes. Beaucoup de Poissons nume'rotés ont été recapturés de nouveau en 1896 , ce qui indique un séjour prolongé en rivière, après la montée; de plus, plu- sieurs d'entre eux furent repris bien à l'aval du point de remise en liberté : tel fut le n° 6, marqué le 16 juin et repêché le 17 septembre à deux lieues au-dessous de Brimeux. Notons, d'autre part, le n° 4. marqué et rejeté à Brimeux le 8 juin, qui fut repris au même point le 10 octobre; puis le n^ 14, marqué le 7 août et repris le 6 novembre; le 57, marqué le 23 novembre, qui sert aux fécondations artificielles, après nouvelle capture le 8 décembre, etc. Dans le cours de nos opé- rations de fécondation artificielle des œufs de Saumon au bord de la Canche, nous avons, d'ailleurs, repris un grand nombre de Saumons marqués qui se trouvaient alors en pleine activité de la fraie. Ceci montre bien, sans aucune contestation possible, que les ani- maux remontés en rivière dès le mois d'avril et mai efifectuent vérita- blement leur ponte en décembre, après un long stationnement et diverses allées et venues vers l'aval et vers l'amont qui les exposent aux captures des pêcheurs et surtout aux agissements des braconniers au filet que n'arrête jusqu'à ce jour aucune surveillance de nuit sérieusement organisée. Dans la Canche, où les dernières frayères ne sont pourtant éloignées EXTRAITS ET ANALYSES. 33 de la mer que de 6 lieues seulement, le séjour en rivière des gros Saumons reproducteurs dure de neuf à dix mois chaque année. Malgré le rapprochement de la mer et du point extrême de la montée, rapprochement qui cantonne tous les reproducteurs dans un espace restreint entrecoupe d'un petit nombre de moulins et barrages (parti- cularité diminuant beaucoup les chances de capture en faveur de la sécurité de la montée), la vie du Saumon en eau douce a donc, dans la Canche, la même durée que dans les grands fleuves où ces Poissons doivent parcourir des centaines de kilomètres avant d'atteindre leurs frayères. Dès lors, il semble bien probable qu'un séjour si prolongé en eau douce a pour but : P De permettre uniquement la transformation des organes repro- ducteurs et la maturation des produits sexuels; 2" De satisfaire ainsi à une nécessité physiologique constante pour tous les fleuves à Saumons, grands et petits. Le séjour prolongé du Saumon en eau douce ne dérive donc point, comme on l'a dit parfois, des exigences d'un voyage plus ou moins long et plus ou moins laborieux vers les frayères. Tels sont, Monsieur le Ministre, les premiers résultats des études que la biologie encore obscure du Saumon cous a conduit à entreprendre. Ce ne sont point, à vrai dire, les seuls résultats pratiques à attendre des marquages opérés en 1896, sur les Saumons de la Cariche : des conclusions d'un ordre très intéressant doivent intervenir à la fin de la prochaine saison de pêche, s'il nous était donné de poursuivre dos observations et d'étudier l'état physiologique de Saumons marqués en 1896 et recapturés en mer ou en rivière en 1897 ou 1898. Pour nous mettre à même de poursuivre cette étude, il y aurait in- térêt, Monsieur le Ministre, à mettre à la disposition de la Station aquicole de Boulogne en 1897 et dans les années suivantes, le crédit spécial de 1,200 francs accordé en 1896 et dans les années antérieures au Service des Ponts et Chaussées de Montreuil-sur-Mer pour l'étude du Saumon dans la Canche; et ce transfert de crédit nous paraît d'autant plus désirable que l'usage de cette somme pourrait être ainsi affecté partiellement dans l'avenir aux opérations de pisciculture arti- ficielle que nous avons déjà poursuivies cette année dans la Canche en utilisant cette ressource budgétaire du Service des Ponts et Chaussées de Montreuil. En raison même des modifications apportées dans les services de la pisciculture et de la surveillance des pêches fluviales qui se trouvent rattachés au Département de l'Agriculture par le décret du 7 novembre 1896, la nécessité de l'affectation de ce crédit à l'un des services spéciaux du Département de l'Agriculture, — comme la Station aquicole de Boulogne dans le département du Pas-de-Calais, — doit être envisagée, et nous ne saurions, Monsieur le Ministre, solliciter trop vivement votre bienveillante attention sur ce poiut. Bull. Soc. nat. Accl. Fr. 1898. — 3. 34 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. Nous rappellerons encore que Pe'tude des Saumons marque's qui s'opère en Norvège vient de conduire cet important pays de production jus- qu'à la revision de ses lois sur la pêche et la protection du Saumon, revision qui s'exe'cute en 1896-1897 par les soins d'une commission technique spe'cialement appointée par le Slorthing; nous y voyons, Monsieur le Ministre, une preuve convaincante de l'inlérèt supérieur qui s'attache à la continuation des expériences entreprises méthodi- quement dans notre région en 1896 sous les auspices de la Station aquicole de Boulogne. (La fin au prochain nu7nero.) X Origine africaine de quelques Animaux domestiques EN Europe. M. le professeur C. Keller, de Zurich, a fait à la 80*^ session de la Société helvétique des Sciences naturelles, tenue à Engelberg en 1897, une conférence sur les éléments d'origine africaine que l'on retrouve dans nos diverses races d'animaux domestiques. Il fait remarquer tout d'abord que l'on peut tirer des conclusions sur l'origine et l'extension de certaines races domestiques non seule- ment de l'anatomie comparée et des recherches archéologiques, mais encore de l'ethnologie. Geoffroy Saint-Hilaire admettait, que nos meilleurs et nos plus an- ciens animaux domestiques provenaient d'Asie ; mais cette hypothèse a déjà été fortement infirmée par des découvertes précédentes, et l'au- teur montre par une série de faits que, à côte' de l'élément asiatique, il existe en Europe un élément d'origine africaine beaucoup plus im- portant. Parmi les Chiens, ce sont les races du Sud et particulière- ment les Lévriers, dont nous savons qu'ils abondaient dans l'ancienne Egypte, qui doivent être venus d'Afrique par la Méditerranée. En ce qui concerne les Equidés, l'origine asiatique est certaine pour une partie au moins des Chevaux ; l'Ane de la petite race, au contraire, a été domestiqué pour la première fois par les peuplades hamitiques de l'Afrique orientale et a été importé de là en Égypte et en Europe. Per- sonne ne conteste l'origine africaine du Chat domestique qui a été l'objet d'un culte dans la vallée du Nil et n'a pénétré en Europe que depuis la période historique. Enfin une bonne partie de nos races bovines d'Europe peuvent dériver de races africaines. Cette hypothèse, quoique contraire à l'opinion généralement admise, est basée sur des données anàtomiques incontestables. Le passage en Europe a dii se faire déjà à l'époque des palaffites et des restes de ces types anciens se sont conservés jusqu'à nos jours dans certaines races brunes des Alpes. X EXTRAITS ET ANALYSES. 35 Les productions végétales et animales de la. Crète (1), par H. Castonnet des Fosses. La Crète ne paraît pas être aussi fertile qu'autrefois. Son sol s'est épuise'. Ne'anmoins ses productions sont encore nombreuses. Il faut d'abord citer les Olives, puis les Caroubes, les raisins secs et le Vin. Les Céréales que l'on cultive sont le Blé, le Seigle, l'Orge et le Maïs. Les meilleurs Blés sont ceux de la plaine de Messara. Le Seigle n'est cultivé que dans les montagnes. Il n'en est pas de même de l'Orge, qui est répandue un peu partout, dans les plaines, dans les vallées et dans les montagnes. Néanmoins, la Crète ne produit pas suffisamment de céréales pour sa consommation et elle est obligée d'avoir recours à l'étranger. Les arbres fruitiers sont nombreux ; nous citerons : le Poi- rier, le Pommier, le Cerisier, le Prunier, le Noisetier, l'Abricotier, le Pêcher, le Cognassier, le Mandarinier, le Grenadier, l'Amandier, l'Oranger, le Citronnier. Autrefois, le Mûrier était beaucoup plus cul- tivé qu'il ne l'est actuellement. L'on a essayé la culture du Coton, mais l'on n'a jamais obtenu que de médiocres récoltes. Le Lin est d'une espèce dégénérée. Le Tabac est de médiocre qualité, sauf celui des environs do Rethymo. L'on a voulu prétendre que la Crète conve- nait au Café. C'est une erreur. La température y est trop basse en été pour que le Caféier puisse s'en accommoder. Comme légumes, l'île produit des Fèves, des Haricots, des Tomates, des Aubergines, des Oignons, des Épinards, des Choux, des Radis, des Artichauts. La Pomme de terre, la Salade, la Betterave réussissent mal, les Carottes ne sont bonnes qu'aux alentours de Candie. Dans les forêts devenues fort rares et beaucoup moins touSues qu'autrefois, les arbres que l'on rencontre sont le Chêne vert, l'Arbousier, le Cèdre, le Pin, le Cyprès; le Myrte se trouve partout. Comme bétail, la Crète possède : des Chevaux, des Mulets, des Anes, des Bœufs, des Moulons, des Cbrévres et des Porcs. Les Che- vaux étaient, dans l'antiquité, célèbres parleur vitesse. L'on estime à 7,000 leur nombre dans l'île. Ils servent principalement à tourner la meule du pressoir et aux prises d'eau pour élever l'eau des puits. C'est à peine si quelques-uns sont dressés et envoyés à Conslanti- nople. Les Mulets et les Anes, qui sont très beaux et très bons, servent principalement au transport des produits et des denrées. Pour voyager dans l'intérieur de lîle comme 1 absence de routes rend impossible l'usage des voitures et des charrettes, la monture que l'on préfère est le Mulet. Les indigènes trouvent que son allure est plus douce et plus rapide que celle du Cheval. L'on estime le nombre des Mulets à 13,000 (1) Extrait d'un volume intitulé : La Crète et VHellémsme^ Paris, 1897. S6 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. et celui des Anes à plus de 40,000. Les Bœufs sont peu nombreux, abâtardis et, comme leur race s'épuise et décroît après la première génération née dans l'île, l'on est oblige' d'en faire venir de l'Asie- Mineure. Le manque de pâturages empêchera toujours que le bétail à cornes puisse prospérer en Crète. L'on essaie d'y suppléer tant bien que mal en ensemençant de Vesces et de Lupins, des champs où l'on fait, au printemps parquer les animaux. Les Bœufs sont exclusive- ment employés au labourage. Les Moutons forment de grands trou- peaux ; lis sont petits, à laine grossière, à la viande fade et sans goût. Les Chèvres que Ton évalue à plus de 200,000, sont là, comme partout ailleurs, un fléau pour l'agriculture. Beaucoup d'entre elles vivent à l'état sauvage. Les Porcs sont assez nombreux, mais leur chair est de mauvaise qualité. Les Chiens sont des Lévriers abâtardis. Il n'y a guère d'autres volailles que des Poules et des Dindons qui donnent un excellent manger. Les Oies et les Canards sont très rares, probable- ment à cause de la grande se'cheresse. De tout temps, les Crétois se sont adonnés à l'apiculture et aujour- d'hui les Abeilles fournissent un miel aussi parfumé que celui de l'an- tiquité. Les fleurs sauvages que sucent les Abeilles lui donnent un goût tout particulier. Parmi ces fleurs sauvages nous citerons le Ciste ladanifère qui secrète une matière visqueuse et odorante ; on la ré- colte avec soin et c'est un parfum très apprécié et recherché des Turcs. Au commencement du moyen âge, le Ver à soie avait été in- troduit dans la Crète et, pendant longtemps, la se'riciculture avait été une véritable industrie ; aujourd'hui il n'en est plus ainsi. A. vrai dire, il n'existe aucune magnanerie dans l'île. Chaque famille possède quelques Mûriers et la soie travaillée ne donne annuellement que 4 à 5,000 kilogrammes quand elle pourrait être bien plus considérable. Enfin, après avoir parlé de l'Abeille et du Ver à soie qui ont eu la bonne fortune d'avoir été chantes par les poètes, n'oublions pas de dire un mot d'un Mollusque, beaucoup moins poe'tique, le Colimaçon. Dans toutes les campagnes, les Colimaçons existent en grand nombre et entrent dans l'alimentation. Les indigènes les ramassent avec soin et avant de les manger, ils les nourrissent, pendant une quinzaine de jours, avec de la farine et du son pour les dégorger. L'on assure dans tout le pays que le Colimaçon ainsi préparé, constitue un mets des plus de'licats. Comme gibier, nous citerons, les Lièvres qui pullulent, les Bécasses, les Tourterelles, les Perdrix rouges. Il n'y a pas de La- pins. La faune sauvage de la Crète ne possède qu'un animal qui mérite d'être mentionné, le Bouquetin. Le Loup et le Renard paraissent man- quer complètement. EXTRAITS ET ANALYSES. 37 Un ennemi du Criquet migrateur de la République Argentine. M. le D"" Sanfurgo, médeciD à Mendoza (République Argentine), a communiqué à la Société scientifique du Chili, dans sa séance du 20 juillet 1896, un certain nombre de spécimens d'un Diptère ressem- blant à la Mouche vulgaire, qui s'attache au Criquet migrateur et dé- pose ses œufs dans le corps de cet Insecte. Ceux-ci donnent naissance à deux ou trois larves rarement plus, dont le développement amène assez promptement la mort du Criquet. L'Insecte attaque est facile à reconnaître. Son vol est lourd et moins prolongé et, en relevant Técus- son qui termine son thorax, on voit distinctement dans Tintérieur de la cavité' thoracique, les petites larves blanches. Le D'' Sanfurgo estime que le petit nombre d'oeufs déposés dans chaque Criquet tient à ce que la Mouche, pour mieux assurer le suc- cès de l'éclosion, répartit sa ponte entre plusieurs Criquets. Il pense, en outre, que l'action de ces parasites est sans doute la cause de la diminution annuelle constatée dans le nombre des Criquets. D'après M. Lalaste, les Diptères envoyés par M. Sanfurgo ressem- blent beaucoup, s'ils ne lui sont identiques, à la Lucilia macellana Fa- bricius, et qu'en tous cas ils ne doivent pas constituer une espèce de parasite particulier à M Acridmm paranense Conil. Il y a lieu, d'après lui, de n'accepter qu'avec réserves, les conclusions du D'' Sanfurgo. La Mouche, en quête de substances animales en voie de décomposi- tion pour y déposer ses œufs, ne s'attaque probablement qu'aux Cri- quets ayant déjà etfectué leur ponte et dont la mort est prochaine. Il y aurait lieu de se livrer à de nouvelles recherches sur ce point. X La prétendue Maladie vermineuse des Truffes. A diverses reprises, certains Insectes (Coléoptères, Lépidoptères, Diptères) ont été signalés comme des destructeurs de Truffes. A cette liste de tuhérivores, il convient d'ajouter, d'après M. J. Chatin, deux espèces de Nématodes : la Pelodera strongyldîdes Schn. et la Lepto- dera terricola Duj. La présence de Vers dans les Tfuffes avait alarmé certains pro- priétaires qui, considérant ces Champignons comme atteints d'une « maladie vermineuse transmissible à l'homme par l'ingestion du ve'- gétal », prièrent M. Chatin de les renseigner sur les parasites en question. Le Professeur de la Sorbonne reconnut bientôt qu'il ne s'agissait que de simples Saprophytes, n'offrant aucun danger et dont l'évolu- 38 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLLMATATION. lion ne peut s'accomplir au sein de l'organisme humain. Bien plus, la constitution de l'appareil buccal de ces deux Nématodes ne leur per- met même pas d'attaquer, encore moins de perforer, le parenchyme de la Truffe, en état d'intégrité normale ; pour que ces Vers puissent y pe'nétrer, il est ne'cessaire que les tissus de la Truffe aient subi des alléralioDS plus ou moins profondes. On doit donc rapprocher, au point de vue du parasitisme, le Pelodera strongyloïdes et le Leptodera terricola du Tylenchus putrefaciens, qui produit la maladie vermineuse de l'Oignon vulgaire (J. Chalin, 1881). Les amateurs de Truffes peuvent donc être tranquilles : les Truffes nématodées ne présentent pas la moindre nocuité; c'est à tort qu'on s'est alarmé de la prétendue maladie vermineuse qui leur a e'te' si hâtivement et si gratuitement imputée. X Le N'Djernbo, Liane a Caoutchouc du Ferman-Vaz. On sait qu'une grande partie des caoulchoucs provenant delà côte occidentale de l'Afrique est produite par de nombreuses espèces de Lianes du genre LandoLphia de la famille des Apocynees ; ne'anmoins, malgré leurs affinités botaniques, tous ces Caoulchoucs sont loin d'avoir la même valeur; il y en a d'excellents et d'inutilisables. Dans l'elat actuel de nos connaissances, il est impossible de rap- porter telle variété' de caoutchouc à une espèce végétale déterminée ; il y a là une lacune regrettable, car on ne sait quelle espèce recom- mander au colon ; d'autre pari, les Nègres profilent de notre ignorance pour mélanger au caoutchouc que nous leur achetons des lalex inu- tilisables. M. Jumelle s'est proposé de combler celte lacune et dans un pre- mier travail (1) il nous l'ait connaître en détail un caoutchouc connu au Ferman-Vaz sous ie nom de N'Djembo et décrit par lui sous le nom de Landolphia Foreti, sp. nov. La tige de cette Liane est brun rou- geâtre, couverle de lenlicelles jaunes, et toujours glabre ; les feuilles, également dépourvues de poils, môme à l'état jeune, sont ovales, avec un fort acumen au sommet, très grandes, atteignant 35 centimètres de longueur sur 20 centimètres de largeur ; elles sont arrondies à la base et portées sur des pétioles courts (15 millimètres). La nervation est pennée ; il y a, ea moyenne, douze à quatorze paires de nervures secondaires alternes, un peu obliques, bien saillantes à la face infé- rieure, et unies entre elles, à l'exlremité, par une nervure marginale. La plante se soutient à l aide de fortes vrilles axillaires ramifiées. Les lleurs, en cymes denses, sont petites, d'un blanc mat, sans [\) Comptes rendus Acad. des Scieuces, 28 juin 1897. EXTRAITS ET ANALYSES. 39 odeur. Les fruits, qui mûrissent en janvier, sont de volumineuses baies globuleuses, brunes à l'ctat sec ; les plus gros mesurent 15 centimètres de diamètre et contiennent une soixantaine de graines plongées dans une pulpe sucrée et acide, comestible et recherchée des noirs. C'est là une espèce des plus intéressantes h connaître, car, en raison de la qualité' exceptionnelle de son caoutchouc, il y a lieu de la cul- tiver dans nos colonies africaines ; déjà d'ailleurs, des semis ont été faits en Guinée française avec quelques graines fournies par le Musée Colonial de Marseille. X Un nouveau CiiAMncNON parasite des Lys (1). Au cours de l'année 1896, une maladie nouvelle a détruit la plupart des Lys [Lilium speciosum) qu'on cultive au Japon pour être exportés en Europe. Le Jardin botanique de Kew s'est fait immo'diatemcnt envoyer des bulbes attaqués et un des savants attachés à ce célèbre établissement a été char^re' de les e'tudier. L'affection présente différents stades : au début, le bulbe n'est pas modifie dans sa forme ; on constate simplement que sa base est déco- lorée et sensiblement ramollie ; mais déjà, à ce moment, l'examen mi- croscopique permet de constater que le bulbe est traversé en tous sens par un mycélium de Champignon; ce dernier, qui, pendant quelque temps, reste confiné à Pintérieur, ne tarde à faire son apparition à la surface : il s'y développe rapidement et y forme une couche blanc de neige ; enfin il émet des appareils sporifères. Sa croissance s'arrête, lorsque toutes les matières nutritives renfermées dans le bulbe ont été épuisées; les spores sont alors mûres et susceptibles de multiplier la plante. La diagnose suivante permettra de reconnaître facilement le parasite : Rhizopus necans (nor. spec). Hyphis sterilibus cootinuis conglome- ratis intricatis, senuibus candidis ; hyphis sporangiferis erectis simpli- cibus vel interdum furcatis 3-G fasciculatis continuis flavo-brunneis 20-25 {x. diam. circa 2 mm. altis basi stolones -longos emiitentibus ; sporangiis globosi circa 250 |i, diam. brunneo-nigris opacis glabris ; columella subglobosa ; sporis subglobosis minutissime striatis 5-6 ]x.. diam. pallide olivaceo-brunneis ; zygosporis doliformibus 100-120 ji. diam., hispides subnigris. Parasite sur les bulbes de diverses espèces de Lys du Japon (en par- ticulier Libium speciosum). On peut facilement faire germer les spores du Rhizopus necans sur (1) Bulletin of Miscelloneous Informations. Kew, 122-123, 1897. 40 BULLETIN I)E LA SOCIÉTÉ D'ACCLLMATATION. divers milieux artificiels et reproduire la maladie en mélangeant celles- ci à la terre dans laquelle poussent des bulbes de Lys ; toutefois, il convient de faire remarquer que ce parasite est incapable d'envahir un bulbe sain ; il ne peut s'introduire que par les blessures faites au pa- renchyme, par les places des racines, etc. . . En outre, on pourrait assez facilement arrêter le développement des spores : il suffirait de plonger pendant quelques moments les bulbes contaminés dans une solution de bichlorure de mercure (à 1/100) ou d'acide salicylique ; ces mélanges n'exercent d'action nocive sur les Lys que quand ces derniers y séjournent plus de quinze minutes. X Le Cuivre dans les Huîtres vertes. On sait les phases diverses par lesquelles a passe' la question du verdissement des Huîtres ; tour à tour, on a invoque' Texistcnce d'un pigment ou d'un parasite. Dans un récent mémoire (1;, MM. Boyce et Herdman, en se basant sur des analyses chimiques rigoureuses, donnent de ce phénomène rex[)lication suivante : toutes les huîires vertes ren- ferment une proportion considérable de cuivre, et la coloration que présentent ces Mollusques est en rapport avec la quantité de cuivre. Ce métal n'est d'ailleurs pa,s répandu uniformément dans les tissus de l'organisme : il est fixé sur les éléments figurés du sang. Pour les sa- vants anglais, il s'agit d'une dégénérescence des globules sanguins com- parables à certains processus pathologiques qu'on observe chez l'homme dans certaines maladies ; en efïct, (anémie pernicieuse, hémor- ragie, etc ], le fer, qui dans le corps joue le même rôle que le cuivre chez les Mollusques, imprègne les globules blancs du sang. Enfin, MM. Boyce et Herdman font remarquer que l'on ne peut dé- couvrir d'autre origine au cuivre, que renferment les Huîtres vertes que l'hémocyanine de leur sang (l'hémocyanine est une combinaison jouant le même rôle que l'hémoglobine, mais dans laquelle le fer est remplacé par le cuivre). 1. BoYGE ET Herdma'n. O.'i green Leucocylosis. Proceed of tke Royal So- cietij Lo7id, n° 579, 1S07. Le Secrétaire Général, gérant Jules de GUERNE. V^ersailies. — Imprimeries Cerf SUPPLÉMENT AU BULLETIN de la SOCIÉTÉ NATIONALE D'ACCLIMATATION DE ERANi'.E No de Janvier 1898 La Société offre à ses membres : Graines de Polygonum sarjialtnense, offertes par M. Charles Bullpt. Graines de Courgettes d'Egypte, otierles par M. Ciiarlcs Debreuil (Ces graines conservent très longtemps leur faculté' genninative). Graines d'Aberia cafra, ('elastrm edulis (Catha), Cerasus caroUniana, L'œsalpinia tinctoria, récoltées à Oran, par M. Leroy et offertes par lui à la Société. Graines à.' Acacia dealbata^ id.: \^v. prœcox /lorlbunda, Magnolia glauca, Pinus strobus, re'coltc'es aux îles Borroméc (Lac Majeur), par le comte G. Borromeo et ofifertes par lui à la Société. AVIS. — Le Sccrclarint prie les Membres de la Société qui désirent participer à la distribution des ^ii aines offertes par M. Charles Naudin et dont la liste à paru dans les numéros du BiUletin de juin et juillet der- niers, de vouloir bien se luiter d'envoyer leurs demandes. Nombre d'espèces sont déjà épuisées, les Palmiers entre autres. Toutefois la Société peut olinr quelques graines de Phœnix melano- carpa (de Nice), expédiées tout récemment par M. Charles Naudin, de Trachycarpus excelsa, (de la Charente), envoyées par le docteur Leclcr, et de Dattiers à fruits routes récoltées à Oran par M. Leroy. La Société décliae la responsabilité des aoDonces insérées ci-aessous Le Docteur A. Lecler, Rouillac (Charente), "offre contre envoi de 1 fr. 50 eu timbres-poste des Bulbilles d'Igname de Chine^ 50 grammes représentant 60 à TO bulbilles. suivant grosseur. — Envoi franco par poste. Par suite de changement de domicile, on désire se de'faire d'une Biche âgée de deux ans et parfaitement apprivoise'e. — Prix modo'ré. — S'adresser au siège de la Sociëië. Occasion. — Photo-jumelle Carpentier 4, 5 X 6, objectif Zeiss, poire, 12 châssis de rechange renfermés dans une boîte spéciale et de plus, un châssis amplificateur pour agrandissement 9/12 et 13/18; le tout absolument neuf, prix 200 fr (valeur réelle 265 fr.) — La photo-jumelle et ses accessoires, sauf l'amplificateur, 150 fr. (valeur réelle 200 fr.j — Ce dernier appareil seul, 50 fr, (valeur re'elle, 65 ir.) — S'adresser au siège de la Société. Un Jardinier, marié, sans enfants, âge' de moins de 40 ans, ayant les meilleures réfe'rences, cherche à se placer pour s'occuper surtout d'horticulture et spécialement de la culture des plantes exo- tiques (serres, orangerie ou pleine terre). Conviendrait comme jardi- nier en chef d'un propriétaire amateur ou d'un jardin botanique. — S'adresser au siège de la Société d'Accliînatat/ ou, 41, rue de Lille, à Paris. Il Charles NAUDIN Membre de l'Institut (Académie des sciences) Directeur du laboratoire de botanique de la Villa Thuret, à Antibes ET le Baron F. Von MUELLER Botaniste du gouvernement anglais à Melbourne . MANUEL DE L'AGCLIMAÏEUR OU CHOIX DE PLANTES RECOMMANDÉES POUR L'AGRICULTURE, L'INDUSTRIE ET LA MÉDECINE Adaptées aux divers climats de V Europe et des pays tropicaux OUVRAGE PUBLIÉ AUX FRAIS ET SOUS LES AUSPICES DE LA Société nationale d'Acclimatation de France Un volume in-8° de prés de 600 pages avec portrait. INTRODUCTION: Considérations générales sur l'acclimatation des plantes ; Aperçu général des genres de plantes auxquels sont empruntées des espèces déjà utilisées ou qui peuvent l'être ; Description sommaire des familles ou groupes naturels auxquels se rattachent la plupart des plantes indiquées dans ce volume ; Noms vulgaires des plantes et syaonymes rapportés aux noms botaniques; Énumération par ordre alphabétique des plantes, leurs usages et leur culture, formant un dictionnaire des végétaux à acclimater dans les diverses régions du globe ; Noms des auteurs cités dans le cours de l'ouvrage avec les abréviation.- iisitéefs. Prix : 7 francs. Pour les Membres de la Société nationale d'Acclimatation de France, 3 fr. 50 EN VENTE AU SIÈGE DE LA Société nationale d'Acclimatation de France 41, rue de Lille, PARIS. VERSAILLES, IMPRIMERIES CERF, 59, RUE DUPLESSIS. EYUE EES CULTURES COLONIALES r • A MIL.HE-POUTINGGN, Docteur en droit. Directeur du Service de l'Afrique Jlles à V Union coloniale française, Vice-Président de la Section coloniale a la Société d'Acclimatation de France. 5 les auspices de V Union coloniale française, cette nouvelle publication a pour but défaire mieux ^n France les diverses cultures et les productions coloniales ; de vulgariser dans les colonies ies meilleurs procédés de culture, d'y provoquer l'introduction des meilleures variétés des plantes françaises actuellement cultivées et l'acclimatation de plantes nouvelles. COMITÉ DE PATRONAGE DE LA REVUE MM. Le prince D'ARENBERG, député, vice-président du Groupe colonial, président du Oomité de l'Afrique française. Le commandant BINGER, ancien gouverneur de la Cote- d'ivoire, directeur des affaires de l'Afrique au Ministère des Colonies. j PAUL BOURDE, ancien directeur des contrôles et de 1 agri- culture en Tunisie, ancien secrétaire général à Madagascar. BUREAU, professeur de botanique nu Muséum. j CHAILLEY-BERT, professeur à l'Ecole des Sciences poli- tiques, secrétaire général de Wnion coloniale française. CHARLES-ROUX, ancien député, membre du Conseil supérieur du commerce, vice-président du Groupe colonial. CORNU, professeur de culture au Muséum. , ^. . DEHERAIN, membre de l'Institut, professeur de chimie agri- cole au Muséum et à l'Ecole d'agriculture de Grignon. MARCEL DUBOIS, professeur de géugraphie coloniale a 1 Uni- versité de Paris. DYBOWSKY, directeur de l'agriculture et du commerce en Tunisie, professeur de cultures coloniales à l'Institut natio- nal agronomique. . , . - j„ H. FLAHAUT, professeur de botanique à l'Lniversite de Montpellier. , LOUIS GRANDEAU. directeur de la Station agronomique de l'Est, rédacteur en chef du Journal d'Agriculture pratique. GRANDIDIER, membre de l'Institut. MM. Baron Jdles DE GUERNE, secrétaire général de la Société na- tionale d'Acclimatation. Dr HECKEL, professeur à la Faculté des Sciences, directeur de l'Institut colonial de Marseille. , LE MYRE DE VILERS, député de la Cochinchine, président de la Société nationale d'Acclimatation. . ^ c. ■ , Mgr LEROY, supérieur général des Missionnaires du Saint- M^^NE-EDWARDS, membre de l'Institut, directeur du Muséum CH. NAUDIN, membre de l'Institut. ^ , „ OLIVIER, docteur ès sciences, directeur de la Uevue gé- nérale des Sciences pures et appliquées. POISSON, assistant au Muséum. RISLER. directeur de l'Institut national agronomique. RIVIÈRE, ancien président de laSociété d'Agriculiure d'Alger, directeur du Jardin d'essai du Hamma. D'" TREILLE, ancien inspecteur en chef du service de santé des Colonies, , VIALA, professeur de viticulture à l'Institut national agrono- mique, directeur de la Bévue de y/tiCMiiwre. . . , H. DE VILMORIN, membre de la Société nationale dAgncul- ZOLLa', professeur à l'Ecole d'agriculture de Grignon et à l'Ecole des sciences politiques. La Jievue des Cultures coloniales paraît le 5 de chaque mois. Bureaux : 44. rue de la Chaussée d'Antin, Paris. Abonnements : un an : France, 10 francs - recouvré à domicile, 10 fr. 50. -- Colonies et Union postale, 12 francs. PEINTURE IGNIFUGE DITE ANTI-PÉTROLEUR Aa moment où l'horrible désastre du Bazar de la Charité est encore présent à toutes les mé- moires, il convient de signaler la découverte récente, par M. de Preux, d'un produit désigne sous le nom a'Anti-Pétroleur et qui rend les objets traités par lui absolument incombustibles. M. de Preux a fait, il y a peu de temps, à Saultain, près Valenciennes, des expériences déci- sives à ce sujet. Deux baraques de bois blanc recouvertes de carton bitumé et tendues de jute, l'une imprégnée du nouveau produit, l'autre à l'état naturel, ont été remplies de copeaux imbibes d'cther. Les copeaux ayant été allumés, la baraque qui avait subi la préparation resta complètement intacte, tandis que Tautre était détruite en quelques instants. Mis en présence d'un chalumeau dégageant 1,200 degrés de chaleur, le bois n'est percé qu'après 25 minutes et le carton bitumé se contracte, mais ne brûle pas et ne se fond pas. Les objets en celluloïd ne s'enflamment pas lors- qu'ils ont été traités par VAnti-Pélroleur. Après les mêmes expériences faites en grand à l'Exposition de Bruxelles, au parc du Cinquan- tenaire, le Jury international a accordé, à l'unanimité avec ses plus sincères félicitations, ù VAnti-Pétroleur, un diplôme de médaille d'or, la plus haute récompense dont il pouv^îit disposer. Le produit inventé par M. de Preux rendra d'immenses services. Il est déjà employé dans un certain nombre d'usines et il a été adopté par la Compagnie du Nord qui s'en sert dans ses dépôts de machines. S'adresser pour les commandes et les renseignements au régisseur du château de la Villelte à Saullain (Nord). Charles NAUDIN Membre de l'Institut (Académie des Sciences) Directeur du laboratoire de botanique de la Villa Thuret, à Antibes ET Le Baron F. Von MUELLER Botaniste du gouvernement anglais à Melbourne MANUEL L'ACGLIMATEUR OU CHOIX DE PLANTES RECOMMANDÉES POUR L'AGRICULTURE, L'INDUSTRIE ET LA MÉDECINE Adaptées aux divers climats de V Europe et des pays tropicaux OUVRAGE PUBLIÉ AUX FRAIS ET SOUS LES AUSPICES DE LA Société nationale d'Acclimatation de France Un volume in-8<* de près de 600 pages avec portrait INTRODUCTION : Considérations générales sur l'acclimation des plantes ; Aperçu général des genres de plantes auxquels sont empruntées ( espèces déjà utilisées ou qui peuvent Têtre ; Description sommaire des familles ou groupes naturels auxquels rattachent la plupart des plantes indiquées dans ce volume ; Noms vulgaires des plantes et synonymes rapportés aux noms botaniqu» Enumération par ordre alphabétique des plantes, leurs usages et k culture, formant un dictionnaire des végétaux à acclimater dans les diver; régions du globe ; Noms des auteurs cités dans le cours de l'ouvrage avec les abréviatic usitées. Prix : 7 Trancs Pour les Membres de la Société Nationale d'Acclimatation de France, 3 fr. 50 EN VENTE AU SIÈGE DE LA Société nationale d'Acclimatation de France, 41, Rue de Lille, PARIS. Versailles. ■— Imprimeries Cerf, 59, rue Duplessis. ^4 AS BULLETIN DE LA DE FRANCE (Revue des Sciences naturelles appliquées) 45« ANNÉE Ï^JEVRIER 1898 SOMMAIRE ! TROUESSART. — Le Mammouth et l'Ivoire de Sibérie 41 ; PAUL CHAPPELLIER. — Essais de culture sur le Safran et l'Igname iJS Extraits et Analyses. Rapport sur les travaux exécutés en 1896, à la station aquicole de Boulogne-sur-Mer, par I Eugène CANU, Directeur de la Station 63 Les Animaux domestiques de l'État indépendant du Congo (Mammifères et Oiseaux), par E. MELILMAN, vétérinaire de l'armée 7/» La question des petits Oiseaux 79 I ~ La Société ne prend sous sa responsabilité aucune des opinions émises par les auteurs des articles insérés dans le Bulletin. Un numéro 2 francs ; pour les membres de la Société 1 fr. 50 AU SIEGE DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE D'aCGLIMATATION DE FRANGE 41, RUE DE LILLE, -il PARIS ET A LA LIBRAIRIE CERF, 12, RUE SAINTE-ANNE Le Bulletin parait tous les mois. •H ^ m 0 a 0 0 ^-^ 0 g- > 5 -0) ce s ^ 0 H 0 Q 3.2 0 0 0) d ? )H S « 0 ^ CRESYL-JEYES Ch •H 0 u u 0 0 DESINFECTANT AITTZSEPTZQUB Le seul joignant à son Efficacité, scientifiquement démontrée, rimmense avantage de n'être ai Toxiq.'ao ni Oorrosif- Hémostatique et Styptîque puissant. Adopté par les Ecoles Nationales Vétérinaires, le Service de Santé de l'ArméCy la Préfecture de la Seine et la plupart des Services d'Hygiène et de Désinfection des Départements. Reconnu indispensable dans la pratique vétérinaire. Envoi franco sur demande de Rapports scientifiques et Prospectus t SOCIÉTÉ FRANÇAISE de PRODUITS SANITAIRES et ANTISEPTIQUES 55, Rue des Francs -Bourgeois (ci-devant 31, Rue des Petites-Ecuries), Pan/s. ET CHEZ TOUS LES DROGUISTES ET PHARMACIENS. Pour èNi-wàr les nombreuses Contrefaçons exiger rigoureusement sur tous les emballages les Marques, Cachets et le Nom CRÉSYL-JEYES. > •H 2 Mals»B fon46o mm 1«7B PlH «• Ml léùillH «t 12 PHi l'kiiiHr Mallli i'i, rrii ^utiikte, rarli Itll VOITELLIERàMmES(S.-lO. COUVEUSES AETIFiaiILLM ■iTÉRIEL BÉLEfAfI ¥olaill««d« ltae« OBUFt A GOUVKR pure 4o H««iéan CHIENS âê êhass0 âr»$ié$. UT*i fruM II Cttali{M illuM. MAISON A PARIS in.dttIMllIiÇM Lits, Fauteuils, Voitures et Appareils Mécaniques rour MALADES et BLESSÉS DUPONT Fab' breveté s.g.d. g. Fournisseur des Hôpitaux à IPJ^TtlS 10, Rue Hautefeuille au coin de la rue Serpente ( près l'Ecole-de-Médecine) Les plus hautes Récompenses VOITURE aux Iipo°» françaises et Etrangères. mue au moyen de 1 ou 2 leviers. Sur demande envoi franco du Catalogue — TÉLÉPHONE WSA U MtNtinA LE GAZEUSE, déclarée d'INTEUET PUBLIC r Décret du 7 A vril 18B8) BUSSANG ANEMIE, GASTRALGIE, COLIQUES NEPHRETQUES, GRAVELLE. ARTHRITISME REGONSTITUANTE.indiauéedanstouteslesCONVALESGENGES 41 LE MAMMOUTH ET L'IVOIRE DE SIBÉRIE par le D'^ TROUESSART. Les communications successives de MM. Bourdarie et Caustier ont fait connaître à la Société d'Acclimatation les sources où s'alimente actuellement le commerce de llvoire. On a vu que l'une de ces sources n'a qu'une importance très limitée, au moins pour l'Europe, presque tout l'ivoire fourni par l'Éléphant indien étant travaillé sur place, de telle sorte que c'est à peu près exclusivement celui que produit l'Elé- pliant d'Afrique que l'on trouve sur nos marchés dont les plus importants sont ceux d'Anvers et de Londres. Mais il est une troisième source dont il n'a pas encore été question ici et qui mérite cependant d'attirer l'attention : je veux parler de l'ivoire dit ivoire fossile, qui se récolte en Sibérie et qui provient d'une espèce éteinte, le Mammouth ou Elephas pri- migenius. D'après Brehm, l'ivoire de Sibérie est l'objet d'un commerce plus important que l'ivoire de l'Inde. Cet ivoire, dont beaucoup de personnes ignorent l'exis- tence, est pourtant connu depuis longtemps. Il est même pro- bable qu'avant l'invention des armes à feu, et surtout avant l'importation de ces agents de destruction chez les nègres africains, l'ivoire de Sibérie était beaucoup plus répandu qu'au- jourd'hui et faisait une concurrence très sérieuse à l'ivoire indien, même en Orient, en raison de sa qualité supérieure. L'ivoire fossile était connu des anciens. Théophraste, phi- losophe grec disciple d'Aristoteet contemporain d'Alexandre, cité par Pline, parle de l'ivoire que l'on trouve « enfoui dans la terre ». Cet ivoire était surtout recherché par les Chinois dont les traditions écrites et les traités scientifiques remontent, comme on sait, à une haute antiquité. Mais les savants chi- nois se faisaient une singulière idée des mœurs de l'animal qui fournissait cet ivoire. Dans les dictionnaires chinois et dans une encyclopédie d'histoire naturelle datant du xvi° siè- cle, cet animal est désigné sous le nom de Thlen-shu : on le dépeint comme un rat d'une taille gigantesque, comparable à Bull. Soc. nat. Accl. Fr. 1898. — 4. 42 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. celle de l'éléphant et vivant sous terre comme la taupe. Ses os sont d'un blanc d'ivoire comme ceux de l'éléphant, sans fis- sures et faciles à travailler ; sa chair est froide mais très saine. Cette dernière phrase nous montre que les Chinois avaient déjà connaissance de ces trouvailles de cadavres entiers, conservés dans la glace, dont nous parlerons bientôt. Eginhard, l'historien de Gharlemagne, donne des détails très intéressants sur les présents envoyés à l'empereur d'Oc- cident par le Khalife Haroun-al-Raschid, en 807. Parmi ces présents figurent non seulement une paire d'Eléphants vi- vants, mais encore une corne de Licorne et une « griffe » de Griffon. Ces deux objets si rares furent conservés longtemps dans le trésor sacré de Saint -Denis, et d'après une descrip- tion de ce trésor qui se trouve dans un livre datant de 1646, il paraît certain que la « corne de Licorne » était une défense d'Eléphant fossile, tandis que la « griffe de Griffon )> était une corne nasale du Rhinocéros fossile (Rhinocéros Uch07'miis] ^ dont les débris, souvent encore recouverts de leur chair et de leur peau, se trouvent ensevelis dans le sol glacé de la Sibé- rie, dans les mêmes conditions que ceux du Mammouth. Il paraît qu'au ix^ siècle, époque de la domination des Arabes, la ville de Bolghari, sur le Volga (1), était un des grands marchés où se faisait le trafic de l'ivoire entre le nord de la Russie ou la Sibérie et la Perse ou la Syrie. Le frère Avril qui fit un voj'age en Russie, en 1685, nous apprend que cet ivoire était importé en Asie et en Chine et qu'il y était très recherché. Les Perses et les Turcs, dit-il, ont la poignée de leurs cimeterres et de leurs poignards ornée de cet ivoire qu'ils préfèrent, pour cet usage, à l'or et à l'ar- gent. Cela s'explique d'ailleurs par la belle qualité de l'ivoire fossile qui est plus blanc et d'un grain plus fin que l'ivoire des Indes. On lui attribuait, en outre, à cette époque, des propriétés médicinales toutes spéciales, entre autres celle d'arrêter les pertes de sang, de telle sorte que les personnes sujettes au saignement de nez devaient toujours porter sur elles quelque objet façonné en ivoire fossile. Avril nous apprend que le nom de Maminout que les Russes donnent à l'animal est une corruption du Behemot de la Bible dont les Arabes ont fait Mehemot. Les défenses de (1) Cette ville avait probablement la position et l'importance de Nijni-Novo- gorod à l'époque actuelle. LE MAMMOUTH ET L'IVOIRE DE SIBÉRIE. 43 Mammouth s'appellent encore en russe: Mammon-ioh-Jwsi. En 1722, Pierre-le-Grand donna l'ordre de lui envoyer â Saint-Pétersbourg tous les os de Mammouth que l'on pour- rait trouver en Sibérie. Les ossements furent expédiés en si grande abondance qu'une salle entière du Musée de l'Aca- démie fut remplie de ces débris amoncelés. On ne nous dit pas ce qu'ils devinrent ensuite. Aujourd'hui le Musée de l'Aca- démie de Saint-Pétersbourg est certainement très riche en débris de Mammouth : mais la plupart de ces fossiles parais- sent y être arrivés à une époque ultérieure. Avant d'entrer dans ce que l'on pourrait appeler l'étude scientifique du Mammouth et de son ivoire, il convient de s'expliquer sur ce terme ôlvoire fossile qu'on lui applique â tort ou â raison. Si par fossile on désigne tout ce qui est enseveli dans le sol, l'ivoire du Mammouth est incontestablement fossile. Mais on sait que la plupart des ossements fossiles que l'on trouve dans les couches géologiques, et dont on peut voir de nom- breux spécimens dans nos musées de Paléontologie, ont subi une modification profonde qui en altère profondément la composition chimique. Ils sont réellement pélrifiés. L'osséine, dont on retire la gélatine, est presque entièrement détruite et remplacée par les sels minéraux qui se trouvent dans le sol où se sont conservés les ossem.ents. Les dents subissent des modifications analogues : leur substance organique (matière collagène) est remplacée par des sels métalliques. De cette transformation, qui s'opère très lentement, il résulte que les os fossiles sont à la fois plus durs et plus cassants que les os frais; dans les régions tempérées ou chaudes, dont le sol passe, suivant les saisons, par des alternatives de sécheresse et d'humidité, de chaleur et de froid, ces ossements se bri- sent et s'eff'ritent souvent avec une facilité qui fait le déses- poir des paléontologistes. Pour rendre à ces os la consistance et l'élasticité qu'ils ont perdues avec leur osséine, il faut les imprégner de gélatine avant de les séparer de la gangue de terre ou de sable qui leur a conservé jusque-là leur forme. Ces os, comme on le conçoit, sont impropres à tout usage industriel (1). Les dents, en général, plus compactes et déjà (1) On sait cependant que M. Scheurer-Kestner a trouvé moyen de retirer encore de l'osséine (f^éialiue) de certains ossements fossiles, d'origine probable- ment récente. 44 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. fortement imprégnées de sels minéraux (dans la proportion de 75 0/0), échappent plus facilement que les os à ces causes d-e destruction. Mais les défenses d'Éléphants, en raison de leur forme allongée, se conservent en général fort mal dans les couches géologiques. Celles que Ton trouve, par exemple en France, sont brisées en tronçons de quelques centimètres de long, fendillées jusqu'au centre et leurs couches superfi- cielles s'effritent et tombent en poussière quand on les touche exactement comme ces ardoises dites « pourries » que l'on trouve dans les couches superficielles des ardoisières et qui ont subi, pendant de longues années, les intempéries des saisons. Il faut se donner beaucoup de mal pour reconstituer d€ telles défenses dans un musée paléontologique, car ces dents n'ont plus rien des qualités de l'ivoire primitif, à tex- ture ferme et élastique à la fois, tel qu'on le trouve sur l'Elé- phant vivant. Cette texture n'est nullement altérée dans l'ivoire de Sibé- rie. Nous avons vu que, de l'avis de tous, cet ivoire était su- périeur comme qualité et facilité de travail à l'ivoire moderne. On peut donc dire que le nom d'ivov^e fossile qu'on lui appli- que n'est pas exact. En réalité c'est de Vivoire frais qui s'est conservé sans altération depuis des siècles dans le sol gelé de la Sibérie, grâce au climat spécial qui fait de ce pays une véritable glacière. Il n'est pas sans intérêt d'examiner de plus près les condi- tions au milieu desquelles le Mammouth a vécu dans cette vaste région septentrionale et y a laissé ses dépouilles qui - constituent aujourd'hui de véritables mines d'ivoire. On sait que, vers la fin de l'époque tertiaire, il a existé de nombreuses espèces d'Eléphants répandues sur tout le nord de l'Ancien continent et dont les deux espèces actuelles sont les derniers survivants. Ces Eléphants, dont on distingue, rien qu'en Europe, au moins quatre espèces [E. meridiona- dis, E. antiqmis, E. prisens ou E. africamis fossilis, E. pri- migenliis), ont laissé de nombreux débris dans les couches 'pliocènes et quaternaires, notamment en France : mais, ■ comme nous l'avons expliqué plus haut, leur ivoire ne peut 'être utilisé industriellement et c'est à grands frais que le sque- lette de ces grands mammifères a pu être reconstitué dans .tiuelques musées. D'autres espèces vivaient en Asie et jusqu'au Japon et dans LE MAMMOUTH ET L'IVOIRE DE SIBÉRIE. 45 l'Amérique septentrionale jusqu'au Mexique, tandis que les Mastodontes, si proches voisins des Eléphants, et munis comme eux de magnifiques défenses, s'étendaient à la même époque sur tout le nouveau continent depuis le Canada jus- qu'à la République Argentine. La plupart de ces grands herbivores se sont éteints vers la fin de l'époque tertiaire ou pendant l'époque quaternaire. Le Mammouth [Elephas primigenins) parait être celui qui a sur- vécu le plus longtemps, au moins sur Tx^ncien Continent.. C'est aussi l'espèce qui s'est avancée le plus vers le Nord puisque ses débris se trouvent dans l'Archipel de la Nouvelle- Sibérie situé dans l'Océan glacial arctique au nord de la Si- bérie, presque en face de l'embouchure de la Léna. Le Mam- mouth semble avoir été une espèce circumpolaire car ses ossements se retrouvent en Amérique, dans la baie d'Esch- scholtz, au nord du territoire d'Alaska, et dans le nord du Canada. Il est certain qu'en Europe le Mammouth a été contempo- rain des premiers hommes. On trouve dans les cavernes qua- ternaires du sud de la France des sculptures taillées dans de l'ivoire ou des bois de Renne qui représentent cet animal. Le plus précieux de ces vestiges d'un art primitif, est une lame d'ivoire de 20 centimètres de long sur 10 centimètres de large environ provenant de la célèbre grotte de la Madeleine, dans le Périgord, et qui représente le Mammouth avec ses défenses recourbées et les longs poils qui le couvraient. Bien que les traits du burin soient incomplets et indécis, en raison de l'imperfection de l'instrument et du peu de sûreté de la main de l'artiste, on est frappé de la vérité et du mouvement que présente cette image, et l'on ne peut douter que l'auteur ait vu réellement l'animal qu'il représente et ne fût familier avec son apparence extérieure et son allure habituelle pendant la vie. Les anciens naturalistes ne pouvaient se figurer qu'un Eléphant pût vivre sous un climat aussi rigoureux que celui de la Sibérie. Comme les deux espèces qui vivent actuellement, dans les parties les plus chaudes de l'Asie et de l'Afrique ont la peau presque entièrement nue, on en déduisait que le Mam- mouth devait avoir la même organisation. Par suite, on était amené à supposer que le climat de la Sibérie, et surtout celui de l'Europe, était plus doux à l'époque quaternaire que de- 46 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLLMATATION. nos jours, et on attribuait à l'interyention subite de la période glaciaire la destruction de cette grande espèce de Mammi- fères terrestres. Cette hypothèse n'a pu résister à l'évidence depuis que l'on a trouvé des cadavres de Mammouth conservés tout entiers dans la glace avec leur chair et leur peau. La première et la plus célèbre de ces trouvailles est celle dont le voyageur naturaliste Adams nous a conservé le pitto- resque récit. En l'/OQ, un pêcheur tungouse remarqua sur les bords de là mer glaciale, dans une masse de glace, un bloc informe. L'année suivante, ce bloc n'était pas encore assez dégagé pour qu'il en reconnût la nature. L'été d'après, le Mammouth était parfaitement reconnaissable : le flanc tout entier et une des défenses étaient à découvert. Enfin au bout de cinq ans, le bloc débarrassé par une fonte des glaces plus rapide que de coutume vint échouer à la côte. Le tungouse n'osa pas d'abord y toucher par une crainte superstitieuse : les anciens racon- taient, en etFet, que sur la môme presqu'île on avait autrefois trouvé un pareil monstre et que ce fut un malheur pour la famille de celui qui le rencontra : elle périt toute entière. Ce récit effraya le tungouse au point qu'il en fut malade. Cepen- dant, les énormes défenses de l'animal excitaient sa cupidité et il résolut de se les procurer. En mars LN04 il les céda en les échangeant contre des marchandises de peu de valeur. C'est seulement en 1806. qu'Adams, alors à Yakutsh, apprit, cette découverte et se rendit sur les lieux où il trouva l'animal déjà fort mutilé. Les Yakoutes du voisinage en avaient dépecé la chair pour nourrir leurs chiens. Les ours blancs, les loups et les renards en avaient pris leur part. Néanmoins le squelette était encore entier à l'exception d'un pied de devant. La plupart des grands os étaient encore réunis par leurs ligaments et des portions de peau. La tête était couverte d'une peau sèche. Une des oreilles bien con- servée était garnie d'une touffe de crins. On distinguait encore le globe de l'œil ; le cerveau desséché existait dans le crâne et les parties génitales avaient gardé leur forme. Le cou était garni d'une longue crinière dont les poils avaient ])lus de •70 centimètres de long. La. peau était couverte de crins noirs sous lesquels on voyait une laine pu bourre épaisse de cou- leur rougeâtre : ce qui restait de cette peau était si lourd que LE MAMMOUTH ET L'IVOIRE DE SIBÉRIE. 47 dix hommmes eurent peine à le transporter. On retira en outre du sol humide plus de 16 kilogrammes de poils que les Ours y avaient enfoncé en dévorant les chairs. La tête, sans les défenses, pesait plus de 200 kilogrammes. Tous ces débris et les défenses, qu'Adams put racheter à Yakutsk, furent transportés non sans peine à Saint-Pétersbourg. Le squelette restauré figure aujourd'hui dans le Musée de l'Académie des Sciences de Saint-Pétersbourg. Les défenses sont fortement recourbées en spirale figurant les trois-quarts d'un cercle. Adams dit en avoir vu qui avaient 7 mètres de long en sui- vant la courbure. Des trouvailles du même genre se sont reproduites à plu- sieurs reprises dans le courant du siècle. On en cite une demi-douzaine au moins. Malheureusement les circonstances n'ont jamais été assez favorables pour qu'on pût recueillir en son entier la peau de ce gigantesque animal. Et si l'on réflé- chit à la rigueur du climat, à l'éloignement où cette région se trouve de tout centre civilisé, à la difficulté des transports, on reconnaîtra qu'il y a peu de chances de voir jamais figurer dans nos musées un Mammouth empaillé. Mais à défaut de l'animal lui-même, d'habiles naturalistes en ont fait des imi- tations factices d'une grande perfection. Tel est le gigan- tesque moulage entrepris à grands frais par M. Martin, de Berg, près Stuttgard, en 1876, et qui, transporté en Amérique se voit actuellement dans le musée de M. Ward, âRochester, aux Etats-Unis (1). On peut donc affirmer aujourd'hui que le Mammouth a vécu sous un climat aussi rigoureux que celui de la Sibérie actuelle. La fourrure épaisse dont il était couvert et que doublait une abondante couche de graisse, en est la preuve irréfutable. On a trouvé dans les replis de ses énormes molaires des débris végétaux qui, examinés par Brandt, ont prouvé que l'animal se nourrissait des feuilles aciculées des Conifères ! arbres qui restent toujours verts. Il n'en est pas moins vrai que la végétation comme la faune du nord de la Sibérie s'est singulièi'ement amoindrie depuis l'époque du Mammouth. Dans le sol même où l'on trouve les ossements du Mam- mouth, on exploite parallèlement un gisement considérable de bois fossile qui prouve qu'en ce lieu même, ou à une faible (1] On trouvera deux photographies de ce Mammouth factice dans la Naturt du 12 mai 1877, 5« année, 1" sem., p. 376 et 377. '48 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. distance, il a existé de vastes forêts de Conifères dont on ne voit plus trace aujourd'hui. Jusqu'à plus de cent lieues, au sud de l'embouchure de la Léna, on ne trouve plus qu'une végétation rabougrie dont les pousses les plus élevées ne dépassent pas la hauteur de nos buissons, et qui se couche en quelque sorte sur le sol pour s'abriter contre les vents vio- lents qui régnent en toute saison dans ces parages pendant le court été des régions arctiques le sol ne se dégèle pas au delà de 90 centimètres. C'est assez pour la culture de quelques céréales, mais trop peu pour permettre aux grands arbres d'enfoncer leurs racines à la profondeur voulue pour assurer leur croissance. La faune a subi également des réductions considérables depuis l'époque où vivait le Mammouth. Tschersky qui a étudié spécialement cette faune (1) cite vingt-trois es- pèces de Mammifères terrestres dont les débris se trouvent avec ceux du Mammouth. Parmi elles, il convient de citer le Tigre, l'Ours brun, le Mouflon {Ovis nonicola), le Saî- gor, l'Elan, le Cerf [Cervus canadensis), le Bœuf musqué, le Bison (ou Aurochs) , le Cheval sauvage, le Rhinocéros tichorhinus, enfin le Chien domestique, indice de la présence de l'homme. Les seules qui y vivent encore aujourd'hui sont l'Ours blanc, le Loup, le Renard bleu (ou Isatis), le Renne et deux Lemmings. On remarque que plusieurs de ces grands Mammifères, notamment le Cheval sauvage et le Bison ont disparu beaucoup plus tard de TEurope tempérée où ils vivaient, à la même époque, avec le Mammouth et le Rhino- céros iichorhinus, sans que cette disparition puisse être attri- buée, au moins exclusivement, à la main de l'homme. On ne peut non plus l'attribuer au changement de la température, mais plutôt à un ensemble de causes éminemment complexes qui, en modifiant lentement le climat, et par suite la flore, ont forcé les animaux à se retirer peu à peu vers d'autres contrées (comme c'est le cas pour le Tigre, le Cerf, le Cheval, etc), ou ont amené leur extinction complète, probablement faute d'une nourriture sufCisante, comme c'est le cas pour le Rhi- nocéros et le Mammouth, les plus grands de tous (2). (1) Tschersky, Beschreib. Posiertiàrer Sâugethiere (Mém. Acad. Pétersb., xl, 1891-92, m-4% 511 p. et 6 planches). (2) Voyez à ce sujet : Nehrinj?, Ueher Tundren und Stcppen, Berlin, 1890 (avec une bibliographie des travaux antérieurs). LE MAMMOUTH ET L'IVOIRE DE SIBÉRIE. i9 Une autre cause, toute locale, a dû agir sur la faune du nord de la Sibérie. Tout indique qu'à l'époque du Mammouth l'archipel des îles Liakhoff était encore réuni au continent. Lorsque se produisit le phénomène de transgression qui sépara ces îles de la terre ferme, ces animaux chassés par l'envahissement des eaux de la mer, durent se réunir en foule sur les points où l'on trouve aujourd'hui leurs ossements accumulés, en nombre incalculable, d'après le récit de tous les voj^ageurs. Beaucoup d'entre eux se noyèrent ou périrent étouffés dans le sable ou la vase des marais de l'embouchure de la Léna. Les cadavres que l'on trouve entiers sont restés dans la position verticale, comme si la congélation rapide du liquide où ils flottaient les avait saisis peu de temps après leur mort. Le D"" Bunge, un des derniers naturalistes qui aient visité ces contrées, nous fait un tableau peu engageant de ce pays de l'ivoire (1). Attaché comme médecin et naturaliste, de 1882 à 1884, à l'une des deux stations organisées par la Société géographique Russe, à l'embouchure de la Léna, il se rendit aux îles Liakhoff (archipel de la Nouvelle Sibérie) pour y re- cueillir des ossements de l'époque quaternaire. Situées au nord-est du delta de la Léna, ces îles sont inha- bitées. En été seulement les habitants du continent y viennent pour recueillir de l'ivoire. On peut se faire une idée de la rigueur du climat par ce fait que la température moyenne de juillet (le mois le plus chaud de l'année) ne dépasse pas + 3». Dans cette saison le D"* Bunge eut de la neige pendant quinze jours. En hiver le thermomètre descend à — 50'' centigrades. Il y souffle un vent presque perpétuel qui souvent dégénère en ouragan. Le sol est constitué de couches quaternaires de terre gelée alternant avec des couches de glace très mince dont le mode de formation n'est pas encore connu. Les os fossiles sont si abondants qu'en deux courts étés M. Bunge put réunir une collection de 2,500 spécimens choisis, car faute de moyens de transport il dut se restreindre et abandonner sur place les quatre cinquièmes de sa récolte primitive. Les osse- ments recueillis sont très bien conservés : on les distingue à peine des ossements frais. « Nos chiens, dit M. Bunge, man- gèrent la moelle des os de Mammouth que nous cassâmes, et (1) Bunge, La faune éteinte des Bouches de la Léna (Congrès international de Zoologie de Moscou en 1892, II, p. 281, 1893). 50 BULLETIN DE Là SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. parfois les Yakoutes se régalèrent des restes tendineux adhé- rant aux os ». Après le Mammouth, le Cheval sauvage est un des animaux les plus abondants de cette l'aune fossile. Il n'est pas rare de trouver des défenses de Mammouth en- tières et souvent d'une taille et d'une beauté remarquables. Sauér, à la suite de son voyage avec Billings, en 1802, en parle en ces termes : « Les dents de Mammouth égalent les dents d'Eléphant pour la blancheur et la finesse de Tivoire, mais elles sont d'ailleurs bien différentes, car elles ont une forme spirale qui fait à peu près un cercle et demi. » Voici les dimensions d'une défense rapportée par Sauër et qu'il cite comme une des plus grandes qu'il ait vue : Longueur en suivant la courbe... 2'", 60 — en ligne droite 1"\52 eirconfe'rence à la racine 0™,37 — à 56 cenLimelrcs de la racine.. 0'^,45 — au milieu 0"\40 — de la poiule 0"','24 Cette défense pesait 57 kilogrammes. On en connaît de beau- coup plus grandes, s'il est vrai, comme l'avance Adams, qu'il en existe de 1 mètres de long. La forme de ces défenses est assez variable : celles des jeunes ont presque la même épais- seur dans toute leur longueur. D'autres sont enroulées trois fois en spirale comme les cornes de la grande Antilope nommée Koudou (Strepsiceros Imdn). Patin qui vit une de ces défenses à Saint-Pétersbourg dit que sa spirale aurait enveloppé un cylindre de 38 centimètres de diamètre et que les trois tours de spire étaient éloignés l'un de l'autre, à peu près de 46 centimètres, la grosseur de la dent étant sensible- ment la même dans toute sa longueur. Toutefois cette forme de défense paraît avoir été anormale et tout à fait exception- nelle. De quelle manière se fait la récolte industrielle de cet ivoire? Les renseignements précis nous manquent un peu à cet égard. Il ne semble pas qu'il y ait de chercheuis attitrés adonnés à cette profession, mais un certain nombre de pé- cheurs Yakoutes se rendent chaque année, pendant le court été de ces latitudes, qui dure à peine un mois comme nous l'avons vu, aux îles Liakhoff pour y recueillir de l'ivoire qu'ils rapportent en traîneau sur le continent. Ils vont ensuite le LE MAMMOUTH ET L'J VOIRE HE SBÉRIE. 51 vendre à Yakoutsk, capitale de la Sibérie Orientale, ou plus souvent encore, les marchands de Yakoutsk visitent à des époques déterminées les villages de Fembouchure de la Léna pour acheter cet ivoire. Yakoutsk ou Jakoutsk, est une ville de 5,000 âmes, sur la Léna, à mi-distance entre l'embouchure du fleuve et la fron- tière de la Chine. C'est là que se trouve centralisée l'industrie de l'ivoire de Sibérie : il s'y tient des foires importantes pour le commerce des fourrures et de l'ivoire fossile. Une partie de cet ivoire est façonné sur place. Autrefois, surtout, les Yakoutes en fai.^^aient non seulement des bijoux et des ornements variés, mais encore des objets usuels, des perçoirs et même des hameçons. Au rapport de Middendorf qui visita ce pays vers 1840, on a apporté annuellement sur le marché, depuis 200 ans, plus de cent paires de défenses, provenant non seulement de la Nouvelle Sibérie mais encore de l'Ile des Ours, située beaucoup plus à l'Est, en face de l'em- bouchure de la Kolyma. 11 est probable que la plus grande partie de cet ivoire s'est dirigé vers la Chine, et qu'une petite partie seulement a pris le chemin de l'Europe qui en est sé- paré par une distance beaucoup plus grande. A la dernière exposition de Nijui-Novogorod, l'ivoire de Sibérie était représenté mais d'une manière assez insuffi- sante, si l'on en croit le rapport officiel (1), qui consacre dix ligues à peine à ce i)récieux produit sous le nom russe de Mamontob kosl (corne de Mammouth). On n'avait pas exposé de défenses brutes, mais seulement quelques objets travaillés, notamment une petite cassette d'une valeur de 25 roubles (50 fr.) et un modèle de tente yakoute du prix de 20 roubles (40 fr.). Sur le marché d'Ya- koutsk la première qualité de cet ivoire vaut 25 francs par pond ou 16 kilogrammes; la seconde qualité l'7 fr. 50; la troisième qualité 5 à francs. Il n'y a dans le pays que dix à vingt ouvriers qui s'adonnent au travail de l'ivoire, et la production va, paraît-il, en diminuant. Cette diminution peut tenir aux progrès de la civilisation, aux rapports plus fréquents avec l'Europe, qui ont amené jusque dans ces contrées éloignées les objets usuels et les bi- (1) Nous adressons ici nos remerjiemepts à M. Deniker, bibliothécaire en chef du Muséum, qui a bien voulu nous traduire le passage (^en langue russe) qui concerne l'ivoire iossile. 52 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLLMATATION. joux que l'on fabriquait autrefois sur place avec l'ivoire. Il est difficile de croire que Ténorme quantité des défenses indi- quée par la masse d'ossements dont parlent les voyageurs qui ont visité les archipels du nord de la Sibérie, ait été épuisée dans l'espace de quelques siècles. Il est bien probable que la surface seule de ces vastes ossuaires a été explorée, et qu'en fouillant le sol à une plus grande profondeur, en s'aidant au besoin de la dynamite pour faire éclater le sol gelé, on fera encore de belles récoltes. Il est certain, d'ailleurs que tous les points où l'on trouve de l'ivoire n'ont pas été explorés. Ainsi donc, si l'ivoire africain venait un jour à nous man- quer, comme le fait est malheureusement probable et prédit depuis longtemps, on trouverait encore, selon toute appa- rence, une réserve précieuse dans l'ivoire de Sibérie. Dans une œuvre d'imagination intitulée La Floride et dont l'action se passe en Afrique, un de nos plus spirituels écri- vains, Méry, donne pour décor à l'un de ces chapitres ce qu'il appelle le « Cimetière des Eléphants ». Méry a transporté en Afrique une légende qui a cours à l'Ile de Ceylan. En effet, les Cingalais racontent qu'au centre de Tile, dans un site sau- vage et retiré, abrité par de hautes montagnes, se trouve une vallée où les Eléphants chargés d'années et qui se sentent près de leur fin, vont mourir pour déposer leur dépouille près de celles de leurs ancêtres qui s'y sont accumulées de- puis de longs siècles. Il est peu probable que de tels cime- tières existent en Afrique : dans tous les cas, s'il en a existé, il est certain qu'ils ont été pillés depuis longtemps, par les nègres africains. Par contre, on peut dire que la Sibérie est le cimetière de ce grand Eléphant quaternaire qu'on désigne sous le nom de Mammouth. C'est là, dans l'archipel de la Nouvelle-Sibérie, à l'île des Ours et probablement aussi à l'Ile Wrangel, ou sur d autres points encore inexplorés des ri- vages de l'Océan Glacial Arctique, que de hardis voyageurs endurcis au froid des régions polaires et désireux de s'enri- chir, trouveraient encore à exploiter de véritables mines du plus bel ivoire. 53 ESSAIS DE CULTURE SUR LE SAFRAN ET L'IGNAME par Paul CHAPPELLIER. A diverses reprises, et notamment il y a deux ans, je vous ai rendu compte de mes cultures. Je suis entré à ce sujet plusieurs fois dans des détails circonstanciés ; mes communi- cations ayant été insérées dans notre Bulletin, je n'y revien- drai pas aujourd'hui, je vous demande cependant la permis- sion de vous rappeler, aussi brièvement que possible, quelques généralités. Je parlerai d'abord du Safran. Cette plante, le Crocus sa- turiis, n'est plus guère cultivée que dans deux contrées, savoir : en France, dans le Gâtinais, portion du département du Loiret, et en Espagne. Cette culture mérite quelque intérêt. Elle a fait pendant longtemps la fortune des petits cultiva- teurs du Gâtinais, et cependant elle est aujourd'hui délaissée précisément au moment où elle devait prendre une nouvelle extension, pour remplacer le vignoble détruit par le phyl- loxéra. L'Espagne produit dix fois plus que la France ; c'est le con- traire qui devrait avoir lieu ; si nos petits cultivateurs étaient moins routiniers. Depuis bien longtemps cette question me préoccupe, mes essais commencés en 1844 n'ont jamais cessé depuis cette époque. Je poursuis deux buts dilférents : en premier lieu, l'amé- lioration de la culture, en second lieu, le perfectionnement de l'espèce même que nous cultivons. Sur le premier point, amélioration de la culture, j'ai obtenu quelques succès. Ce système que j'ai imaginé, est approuvé et adopté par ceux des cultivateurs qui ont le courage de se soustraire à une routine vieille de plusieurs siècles. Ce nouveau système diminue sensiblement le prix de re- vient du produit; s'il était généralement adopté, il aurait pour effet de ramener en France une grande partie de cette 54 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLLMATATION. culture. Or, il ne faut pas oublier que le Safran est une den- rée spécialement d'exportation, la presque totalité est vendue à l'étranger et les denrées agricoles françaises d'exportation deviennent de plus en plus rares. Sur le second point, perfectionnement de la variété même du Safran que no'us cultivons, notre Société m'a prêté à plu- sieurs reprises son concours. Sur ma demande, elle a fait venir des oignons de Safran de Chine et d'Anatolie, moi-même, j'en ai importé de diverses contrées. Toutes ces sortes semblaient au début différer un peu de la nôtre, ces différences tenaient sans doute à des influences passagères de climat et de culture, ont diminué d'année en année, et ont fini par disparaître entièrement. Ne trouvant nulle part une meilleure variété existante, il fallait se résoudre à en créer une. Vous connaissez les moyens employés en pareil cas, hybridation, semis et sélec- tion, etc. Mais, dès le début, je me suis heurté à une difficulté qui semblait insurmontable : le Safran ne produit pas de graines. Après bien des recherches infructueuses, j'ai hni par trouver dans une des îles de l'Archipel grec (Syro) un Crocus indigène dont le pollen féconde notre Crocus cultivé. De cette union artificielle sont sorties un grand nombre de variétés. Je ne vous citerai que la dernière obtenue. Elle a figuré à l'Exposition du Chrysanthème de 1896, et a été citée, figurée et décrite dans plusieurs recueils. Voici en quelques mots quel est son mérite. La seule partie utilisable du Safran consiste dans les trois stigmates contenus dans chaque fleur. D'après le très faible volume de l'hybride que j'avais ex- posé, on ne pouvait guère attendre qu'une seule fleur, c'est- à-dire trois stigmates ; or, il en portait une trentaine. Trente stigmates au lieu de trois ! inutile de vous expliquer quel résultat précieux ce serait pour les cultivateurs ; mal- heureusement ces stigmates ne sont pas parfaits; ils ont un défaut, ce qui fait que mon hybride ne peut pas dès aujour- d'hui entrer dans la grande culture, il a besoin d'être encore travaillé et perfectionné, toujours au moyen du semis de sa graine naturelle ou hybridée, et de la sélection ; c'est la tâche que je poursuis actuellement. ESSAIS DE CULTURE SUR LE SAFRAN ET L'IGNAME. 55 Je dois ajouter que cet hybride présente im intérêt parti- culier au point de Yue de la botanique. Non seulement les diverses pièces qui constituent la (leur : pétales, sépales et étamines, ont disparu en se translormant en véritables stigmates: mais les écailles qui entourent l'oi- gnon et les feuilles, elles-mêmes sont terminées par un frag- ment de stigmate. C'est là, au dire des botanistes qui l'ont examiné, un phénomène des plus curieux et qui n"a jamais été observé jusqu'à ce jour. En résumé, au point de vue de l'amélioration de la culture, j'ai oJ:)tenu de très bons résultats dûment constatés et entrés dans la pratique, et sous le rapport de la création d'une va- riété améliorée, je suis en très bon chemin, je possède des hybrides très intéressants, et avec un peu de persévérance et de patience on atteindra certainement le but que je poursuis depuis si longtemps. Je passe maintenant à une autre plante, le Stachys tuberi- fère, ce petit légume adressé à notre Société par le D'" Brat- scheinde, auquel notre collègue M. Paillieux, son zélé propa- gateur a donné le nom de Crosne du Japon, en voici trois spécimens (fig ). Ce petit tubercule a beaucoup de qualités : sa forme est jolie, il est productif et rustique, mais on lui reproche deux défauts, d'abord son volume est bien faible ; quel que soit le soin apporté à son arrachage, il en reste toujours en terre un grand nombre qui sont perdus, qui repoussent au printemps et envahissent le potager, et puis il n'a pas par lui-môme une saveur bien caractérisée, une pomme de terre cuite à l'eau salée a un goût très appréciable, il n'en est pas de même du Stachys. Aussi, dès l'apparition de ce légume, j'ai entrepris de l'amé- liorer, toujours par le même moyen, semis et sélection ; mais j'ai éprouvé la même difficulté que pour le Sapmn, le Stachy ne produit pas de graines et ne fleurit même pas habituelle- ment, malgré tous mes efforts, je n'ai obtenu depuis environ huit ans, qu'une vingtaine de fleurs et pas une seule graine fertile. J'avais cependant fécondé ces très rares fleurs avec le pollen d'espèces voisines, d'abord celui du palustois, espèce indigène, et surtout avec celui d'une espèce exotique, le Flo- 56 BULLETIN DE LA iSOCIÉTÉ D'ACCLLMATATION. ridana que j'ai importée d'Amérique. Ce dernier a un volume bien plus considérable que notre légume (il pèse sept fois autant), puis il a une saveur prononcée, trop prononcée même. J'avais espéré qu'en mariant ensemble ces deux plantes et en sélectionnant leur progéniture, j'aurais pu parmi leurs enfants en trouver un ayant des qualités inter- médiaires entre les parents, sans avoir leurs défauts ; peine inutile, je n'ai jamais obtenu une seule graine fertile, ce qui ne m'empêche pas de poursuivre mes essais. D'autres seront, je l'espère, plus adroits ou plus heureux; en tout cas, l'introduction du Floridana est un fait intéressant. J'arrive à l'Igname, j'ai eu déjà plusieurs fois l'occasion d'examiner ici même les questions que soulève la culture de l'Igname de Chine. [Mes communications ont été insérées au Bulleli)iy il serait superflu d'y revenir, je vous demande ce- pendant la permission d'en résumer aussi brièvement que possible les points principaux. C'est à la Pomme de terre qu'on peut surtout comparer l'Igname. Voici, en peu de mots, ce qui ressort de cette com- paraison. Je dois dire tout d'abord que la plante chinoise n'a pas la prétention de détrôner la plante de Parmentier, surtout au point de vue de la grande culture. L'Igname ne sort pas, pour le moment du moins, du potager et n'aspire qu'au rôle secon- daire de légume. Sa chair est plus fine, elle plaît davantage à certains palais et est mieux supportée par les estomacs délicats. La plante est aussi vigoureuse et aussi productive que la Marjolen et autres variétés potagères de Pommes de terre ; elle est plus rustique, car elle peut rester en terre tout l'hiver et n'être arrachée qu'au fur et à mesure du be- soin. Si on laisse quelques pieds dans le sol, ils repoussent au printemps et donnent l'année même une récolte plus abondante. La Pomme de terre au contraire doit être ar- rachée à parfaite maturité ; récoltée avant, elle se conserve mal, laissée plus tard en terre, elle repousse et perd de sa qualité. Une fois récolté, le tubenmle de l'Igname se conserve sans pousser jusqu'en mars et avril, tandis que ceux de la Pomme de terre entrent en végétation même en hiver et perdent par ESSAIS DE CULTURE SUR LE SAFHAN ET L'IGNAME. 57 ce fait une partie de leur valeur et deviennent même moins saines. Enfin, considération importante, la maladie de la Pomme de terre cause périodiquement aux cultivateurs des pertes désastreuses et a amené parfois des famines. Cette année même, dans certaines contrées, la moitié de la récolte a été perdue. Quant à l'Igname, on ne lui connaît aucune maladie. Et cependant, malgré tout ces avantages, ce légume est à peine cultivé. La cause en est bien connue, le tubercule fusiforme est très long, 70, 80 parfois davantage, puis sa contexture est très fragile, par suite l'arrachage est difficile et coûteux, de plus, dans les terrains peu profonds, un défonçage dispen- dieux devient nécessaire et est parfois impossible. C'est pourquoi notre Société, frappée de ces qualités et de ces défauts, a institué un concours pour l'introduction ou la production d'une variété à tubercules courts rendant l'arra- chage facile. Quelques variétés exotiques paraissant remplir ces condi- tions ont été introduites mais n'ont pas donné de résultats pratiques. L'année dernière, la Société sur ma demande, a fait venir de Calcutta une espèce qui y est cultivée en grand et qui rem- plissait le but comme l'indique son nom même, Globosa ; en voici un spécimen provenant de ma culture, mais c'est une plante qui ne peut réussir en pleine terre que dans les climats chauds. C'est pourquoi j'en ai remis quelques tubercules à notre collègue M. Bourdarie qui les a fait parvenir à M. Cha- lot, directeur du Jardin d'Essai de Libreville, au Congo. L'une des plus récentes introductions a été celle du Dios- corea fiirgini, espèce comestible à tubercule arrondi envoyé de Chine par le Père Farges à la maison Vilmorin, qui m'en a confié quelques bulbilles. Depuis deux ans que je les cultive, les tubercules que j'ai obtenus atteignent à peine le volume d'une noix. Si au moins ils m'avaient fourni du pollen, il aurait pu m'aider pour mes hybridations, mais je n'ai pas vu une seule fleur. Cette introduction n'a donc donné jusqu'à présent, comme toutes les autres aucun résultat pratique. Il devenait dès lors nécessaire de recourir à la production Bull. Soc. nat. Aecl. Fr. 1898. — 5. 58 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. de la variété désirée ; c'est le travail auquel je me livre de- puis une dizaine d'années. Je vous ai tenu au courant de toutes les difficultés que j'ai eu à surmonter et des résultats partiels que j'ai obtenus d'année en année ; ces diverses communications ont été in- sérées à notre Bulletin. Je me bornerai aujourd'hui à mettre sous vos yeux mes dernières obtentions, mais auparavant je dois vous rendre compte d'un essai dont vous m'avez chargé. Un de nos distingués collègues, M. le D'" Heckel, professeur à la Faculté de Marseille, nous a adressé l'an dernier plu- sieurs tubercules obtenus par un moyen beaucoup plus simple que celui que j'emploie et par lequel il espérait pouvoir peut- être atteindre plus facilement le même but. Ces tubercules m'ont été remis par la Société. Je les ai cultivés mais n'ai obtenu que des tubercules fusiformes comme le type. Cela était à prévoir. En effet, l'auteur de cette expérience M. le capitaine Du- bian, vice -président de la Société d'horticulture de Marseille, s'était contenté de fractionner des tubercules que j'avais adressées à M. Heckel et avait planté ces fragments. Or, on sait que les tubercules d'Igname portent deux sortes d'yeux : 1" l'œil terminal et principal qui constitue ce qu'on peut appeler le nœud vital de la plante, et qui est destiné à se développer au printemps et à produire une nouvelle plante ; 2° un très grand nombre d'yeux secondaires, pour ainsi dire latents et peu apparents, répandus sur toute la surface des tubercules. Sur le très petit fragment que je vous présente et qui ne pèse que quelques grammes, on compte quarante de ces yeux secondaires. Si vous plantez ces tubercules entiers ou simplement sa portion supérieure, sa tête, l'œil terminal seul poussera. Si au contraire vous plantez un fragment, même minime, deux ou trois et même moins, celui-ci par exemple, l'un des petits yeux latents se développera, mais le tubercule qu'il produira ne sera pas différent du type, il ne constituera pas une va- riété distincte. Il en est de même de la Pomme de terre ; coupez en trois ou quatre morceaux une Pomme de terre très longue, la vite- lotte par exemple, chacun de ces morceaux, si toutefois il est muni d'un œil donnera naissance à un pied, mais les tuber- KSSAIS DE CULTURE SUR LE SAFRAN ET L'IGNAME. 59 eu les que ce pied produira seront toujours des vitelottes très longues. Il était donc à prévoir que les tubercules produits par ceux obtenus par M. Dubian au moyen du fractionnement conser- veraient la forme allongée du type. C'est ce qui est arrivé. Toutefois, l'un des tubercules que j'ai obtenus mérite une mention spéciale, la voici : son volume est bien faible, mais il est bifurqué. Y aurait-il là une tendance à former une va- riété bifide, je ne le pense pas. Cependant, je ne manquerai pas de le replanter cette année afin que l'expérience soit complète. M. Dubian a sans doute continué et complété son expé- rience, il serait très intéressant d'en connaître les résultats. M. le Secrétaire général aurait-il l'obligeance de s'en in- former ? Voici maintenant les deux meilleures variétés que j'ai ob- tenues il y a deux ans. Sur ce tableau j'ai d'abord placé à droite et en haut, comme point de comparaison une Igname ordinaire en deux mor- ceaux. Sur le côté gauche, voici une variété à tubercules courts et nombreux, il y en a huit sur le même pied; par contre ils sont un peu maigres, il est possible que par une culture ultérieure ils deviennent moins nombreux et plus vo- lumineux. Dans la variété du milieu, également courte, il n'y a que quatre tubercules mais ils sont beaucoup plus gros. Voici la longueur et le poids de ces trois échantillons. Longueur : Igname ordinaire 85; variété 46.40, poids; Igname ordinaire 630 ; variété à huit tubercules à peu près le même poids 620, et celle à quatre tubercules 1,050 grammes. La variété du milieu est donc moitié moins longue que l'Igname type et elle pèse deux tiers en sus. Si la variété à huit tubercules améliore un peu son volume et si celle à quatre tubercules se maintient, il me semble que le problème posé par la Société sera résolu. Si je ne craignais d'abuser de votre patience, je voudrais vous dire encore quelques mots au sujet de l'intérêt que la production d'une variété à tubercule court pourrait avoir pour nos colonies ou au moins pour certaines d' entre elles 60 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. permettez-moi de vous lire, ce ne sera pas long, un passage d'une communication faite ici à ce sujet il y a deux ans. « Nous assistons, depuis quelques années surtout, au spec- tacle grandiose et trop souvent sanglant de toutes les nations européennes — on étouffe dans cette vieille Europe — se ruant sur le continent africain, pour s'en arracher les lam- beaux, et s'y tailler des colonies. Loin de moi la prétention d'apprécier l'opportunité de cette immense curée; je me borne à constater le fait. La France elle-même vient de s'appro- prier un assez joli morceau : la grande île africaine. » Or, dans les terres basses et chaudes de ces climats équa- toriaux et tropicaux, la culture de la Pomme de terre est à peu près impraticable; à peine est-elle possible sur les hauts plateaux, mais elle y est peu productive et même, dans ces conditions exceptionnelles, les tubercules récoltés sont im- propres à la reproduction. On doit tous les ans faire venir à grands frais la semence des pays tempérés. » Ces contrées chaudes et humides sont au contraire le cli- mat d'élection des Ignames ; elles y ont à l'état sauvage une végétation exubérante ; on trouve en Galédonie des tuber- cules pesant jusqu'à 100 kilos. Elles y nourrissent des popu- lations entières. » Toutefois, parmi ces Ignames indigènes et spontanées, plusieurs sont vénéneuses, d'autres sont de très médiocre qualité. L'importation dans ces contrées d'une variété d'Igname de Chine à tubercule court constituerait une pré- cieuse ressource principalement pour l'alimentation des co- lons européens. » En somme, sous ces climats, les rôles de ces deux plantes sont changés : c'est l'Igname qui est le légume de fond et de grande culture, et la Pomme de terre y descend au rôle se- condaire de légume de fantaisie. » Depuis que j'ai écrit cette note, il vient de se passer tout récemment un fait qui intéresse également la question que je viens de traiter devant vous. On ne parle de rien moins que de partager entre les di- verses nations européennes cet immense empire chinois où grouillent 400 millions d'habitants et, si ce projet de par- tage doit être regardé comme une utopie irréalisable, tout au moins peut-on prévoir le moment plus ou moins rapproché ESSAIS DE CULTURE SUR LE SAFRAN ET L'IGNAME. 61 OÙ chacune de ces nations se mettra à grignoter un morceau de cet immense gâteau. Inutile de dire que les Chinois eux-mêmes ne sentent nul besoin de l'introduction chez eux d'une Igname plus courte que celle qu'ils cultivent depuis des milliers d'années. Ils ont toute la patience, toute la persévérance nécessaire pour ar- racher sans se plaindre ces racines de 80 centimètres de long, ils ne demandent pas comme certains de nos jardiniers la journée de huit heures et 2 à 3 francs par jour. Mais en sera- t-il de même des colons européens qui pourront s'établir dans leur pays, certainement non. Permettez-moi à ce sujet, de vous lire un court passage de ce que j'écrivais il y a quelques années dans la Revue horti- cole, au sujet d'un des modes de culture de l'Igname en Chine. « A propos de nouveaux modes de culture de l'Igname, je rappellerai, à titre de curiosité, le suivant, qu'un voyageur m'a dit avoir vu pratiquer en Chine même. » De grands réservoirs cimentés, ayant environ 80 centi- mètres de profondeur, sont remplis de sable; les pieds sont très rapprochés, soit 30 centimètres en tous sens. Pour ar- river à nourrir des plants aussi drus dans un sol aussi mai- gre, on répand à profusion l'engrais énergique cher aux fils du Ciel ; le produit est très abondant ; un réservoir de mé- diocre étendue suffit aux besoins de toute une famille. Les tubercules, dûment pelés et cuits, ne conservent rien de l'odeur caractéristique de l'engrais employé. » Je sais plus d'un propriétaire et d'un jardinier auxquels cette culture répugnerait ; quelle inconséquence 1 » Les Parisiens ne croquent-ils pas à belles dents, — sou- vent sans les peler, — ces jolis Radis roses, non seulement arrosés à l'eau de Seine, dont I centimètre cube contient, au dire de nos bactériologues, des milliers de germe typhiques et autres, mais encore irrigués avec ce liquide onctueux et parfumé dont l'égoùt collecteur inonde la plaine de Genne- villiers ! » Et l'engrais flamand î Je n'ai jamais mangé de meilleures Asperges que chez un de mes parents, manufacturier dans un faubourg de Lille. Tous les hivers, les fosses étaient remplies d'une nappe liquide, de 20 centimètres d'épaisseur de l'en- grais fabriqué par ses ouvriers. Pendant huit jours, les 62 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION- senteurs qui saturaient l'atmosphère rendaient l'accès du po- tager impossible ; mais aussi quelles magnifiques et succu- lentes Asperges nous mangions quelques mois après ! » Non la culture de l'Igname longue ne sera jamais prati- quée par le colon européen en Chine. Aussi, même dans ce pays, l'introduction d'une variété à tubercule court serait- elle très utile. Je me suis peut-être un peu trop étendu sur cette question coloniale, mais yous me le pardonnerez en raison de ce fait que notre Société vient de créer dans son sein une nouvelle section, la Section coloniale, dont nous attendons les meil- leurs résultats, surtout si, comme nous l'espérons, cette nou- velle section obtient la coopération active du très éminent colonial qui nous lait l'honneur de présider à nos travaux. 6a EXTRAITS ET ANALYSES. Rapport sur les travaux exécutés en 1896, a la Station AQUIGOLE DE RoULOGNE-SUR-MeR, par Euf^ène Ca.nu, directeur de la Station. ( Suite et fin 2^ Observations su,' la rex^roiuction naturelle des Soles dans ses relations avec le repeuplement des fonds et la pisciculture marine. — L'élude de la reproduction et du repeuplement méthodique et rationnel des poissons de mer — que nous avons été le premier, il y a cinq ans, à entre- prendre dans le nord de la France, — n'a point été délaissée par la Station aquicole. Nous avons conduit ces recherches dans une voie nouvelle, ei:coie inexplorée dans tuule la France en nous attachant particulièrement à ce qui concerne la Sole, l'espèce la plus recherchée et la plus importante pour les pêcheurs, pour le commerce et pour la consommation publique. C'est ainsi, Monsieur le Ministre, que nous avons exécuté, en mer, — dans la Manche jusqu'au méridien du Trépoit, et dans la mer du Nord au large. des côtes belges et françaises, — des séries de pèches quantitatives pendant trois années consécutives, dans les régions de ponte de la Sole. Ces pêches quantitatives furent laites suivant la mé- thode ordinaire du professeur Hensen, en filtrant dans un filet approprié des colonnes d'eau de mer d'une section horizontale donnée par l'ouver- ture de l'engin et d'une hauteur déterminée par la profondeur d'immer- sion de l'engin ramené verticalement à la surface. Elles sont, en tous points, susceptibles d'établir une évaluation aussi exacte que possible de la quantité d'œufs de Sole existant en mer et provenant de la ponte naturelle dans la région qui nous occupe. L'importance (ou le succès) de la reproduction naturelle de ce poisson accuse par ce moyen des fluctuations annuelles très considérables dont l'intérêt ne peut échapper à personne en ce qui concerne le repeuplement des fonds. En pleine période de reproduction, vers la fin d'avril ou au com- mencement de mai, nous avons obtenu à l'aide du filet vertical de Ilenscn, les maxima du nombre des œufs de Sole existant en mer par mètre carré de surface. Ces maxima sont d'ailleurs des moyennes dé- duites de plusieurs rendements numériques des pêches obtenues par le filet Hensen durant toute la période de vingt à trente jours où le 1. Voir le numéro de janvier, p. 23. 64 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. produit de ces pêches est le plus eleve' de toute la saison de ponte. Les maxima ont varié, sur les lieux mêmes de la ponte des Soles, entre 143 pour 1894, 59 pour 1895 et 112 pour 1896. Un pareil rende- ment dans la ponte naturelle des Poissons de mer est très élevé' en ce qui concerne les bonnes années 1894 et 1896. Je ne connais même pas d'exemple d'un plus grand nombre d'œufs d'une seule espèce de pois- son, recueillis en mer en un même endroit, si j'en juge d'après les quelques documents publiés par divers zoologistes qui se sont occupés de cette question. Quant au maximum plus faible que nous relevons pour 1895, il est encore très satisfaisant comme rendement numérique de la ponte des Soles. Si nous examinons maintenant la moyenne des rendements évalués durant toute la période de ponte pendant les trois années qui nous occupent, nous voyous ces nombres tomber de 9.5 œufs de Soles par mètre carré pour Tannée 1894, à 2.6 pour 1895 et à 6.4 pour 1896. Il ne nous est pas possible de comparer la densité numérique de ces pontes de Soles avec celle d'autres espèces de poissons, puisqu'il n'a jamais e'té relevé ou publié d'observations de ce genre méthodiquement réparties sur toute la période de ponte d'une «spèce comestible considérée dans la même région. Des déductions certaines, intéressantes à la fois pour l'industrie des pêches maritimes et pour la préservation des richesses naturelles né- cessaires à l'alimentation publique, peuvent et doivent sortir de cette e'tude quantitative de la ponte naturelle de la Sole dans les eaux ex- ploitées par nos pêcheurs. C'est la conviction intime qui se dégage pour moi des premiers résultats que je me suis efiforcé d'obtenir dans cette voie tout récemment ouverte par Hensen dans l'observation des pêches maritimes. Il importe de connaître réellement par le nombre des œufs naturel- lement produits et fécondées autant que par l'étendue de la période de ponte active, l'imporlance et le succès toujours variable de la re- production des espèces de poissons les plus utiles. Il importe égale- ment de rapprocher ces données des captures de poissons faites (au bout de deux ou trois années) dans les meilleures saisons de pêche. C'est Tunique moyen, nous semble-t-il, de se mettre en mesure d'ap- précier avec toute Texaclilude possible et avec une précision suffisante, la puissance de production de tels ou tels fonds, en même temps qu'on pourra saisir ainsi la relation qui unit l'exploitation de ces fonds de pêche et leur dépeuplement en espèces comestibles. Toutes les théories, tous les arguments énoncés sur la question du dépeuplement des mers exploitées pour la pêche ont le plus grand besoin de s'ap- puyer, à l'heure actuelle sur des preuves positives de ce genre. Nos relevés de la richesse des pontes naturelles en mer nous donnent actuellement une base suffisante pour évaluer en moyenne la quantité considérable d'œufs que la Sole dissémine annuellement dans les eaux de la région que nous avons observée. EXTRAITS ET ANALYSES. 65 Dans l'année 1895 la moins productive à ce sujet, toute la surface des lieux de ponte des Soles placées à notre connaissance au voisiuagc et à l'intérieur des eaux françaises de la Manche et de la mer du Nord, depuis le Tre'port jusqu'à la Belgique, toute celte surface, dis-je, e'va- luée à 360 milles marins carrés, contenait en moyenne 2.6 œufs de Sole par mètre carré, soit 7 millions par carré d'un mille de côté. En totalité, ceci fait, pour l'espace signalé plus haut et correspondant à un développement de côtes de 80 milles, le total de 2,520 millions d'œufs de Sole flottant en moyenne dans la mer, pendant toute la pe'riode de pontes un peu active, c'est-à-dire pendant quatre mois de l'année 1895. La dure'e du développement de l'embryon dans l'œuf étant ordinairement de neuf à dix jours, cette masse d'œufs de Sole se trouve naturellement renouvelée au fur et à mesure des éclosions soit en bloc, tous les dix jours par l'effet des pontes successives. Ce qui revient à dire, en somme, que les Soles devaient pondre alors, dans la région considérée, sept millions d'œufs par mille carré tous les dix jours, pour maintenir au chififre moyen que nous avons constaté le contingent d'œufs en voie d'éclosion. Renouvele'es ainsi tous les dix jours, soit douze fois en quatre mois, les pontes de Soles donnent le total remarquable de trois milliards d'œufs constate' au cours de nos recherches sur la ponte annuelle de ces poissons dans nos parages de la Manche et de la mer du Nord pour Tannée 1895. La connaissance positive de cette puissance de production des Soles est importante, quel que soit le point de vue auquel on se place pour envisager la question du repeuplement des fonds. Elle prend encore plus d'importance si Ton envisage la nécessité d'entrer dans la pratique de la pisciculture marine artificielle, car l'évaluation métho- dique des fluctuations qui affectent d'une année à l'autre les pontes naturellement produites par la Sole dans notre région peut seule montrer quelle est l'échelle à laquelle il convient logiquement d'en- treprendre la reproduction artificielle de ce poisson pour rétablir l'équilibre de repeuplement entre une bonne année et une mauvaise. Ainsi, nous concluons, de l'écart constaté entre les productions de 1895 et de 1895, qu'il eût fallu produire artificiellement 8,5 milliards d'œufs de Sole en 1894 pour pouvoir prétendre à un véritable repeu- plement des fonds de la mer du Nord et de la Manche. Et véritablement nous ne disposons, dans l'état actuel de la régle- mentation nationale et internationale des pêches maritimes que d'un seul moyen pour subvenir aux insuffisances et aux fluctuations du repeuplement naturel des Soles dans nos eaux cotières ei avoisi- nantes : c'est la pratique suffisante et raisonnée de la pisciculture marine que j'ai proposé d'appliquer dans cette région dès l'année Pour l'année 1894 Pour l'année 1896 11 7,9 milliards. 66 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 1893, alors que celle méthode de repeuplement n'avait point subi l'expérience démonstrative faite en Ecosse et qu'elle rencontrait en France plus de critiques que de partisans. III. — Applications pratiques. 1° Application en France du Hareng congelé comme appât dam la pêche aux hameçons. — Notre attention reste constamment fixée sur les améliorations que peut subir l'industrie des pêcheurs du Nord de la France et nos efforts tendent toujours à démooirer l'utilité' et le profit de ces améliorations pour convaincre les armateurs et les pêcheurs naturellement peu enclins à toute modification dans leurs pratiques ordinaires. Ce n'est qu'en insistant avec persévérance sur tel ou tel procédé recommandable, qu'il nous est possible d'aboutir à un résultat dans l'introduction des procédés nouveaux applicables à la pêche maritime française pour le plus grand profit de l'alimentation publique. Les moyens d'action matér.els doot nou=! disposons ne nous permettent pas en efifet d'entreprendre les démonstrations pratiques à grande échelle qui sont indispensables pour amener la conviction nécessaire dans l'esprit des intéressés. Néanmoins, dans le cours de l'année 189(3, nous avons obtenu, dans la voie des améliorations industrielles, un succès dont l'importance mérite d'être signalée avec détails. Depuis plusieurs années, nous avions reconnu que l'une des pêches les plus recommandables des côtes de la Manche, la pêche aux cordes, (lignes de fond établies en mer et pourvues d'un grand nombre d'ha- meçons appâtés de poissons et d'encornets) souffrait grandement dans la plupart des ports d'une disette momentanée ou prolongée des pois- sons d'amorce utilisables. De plus la fourniture des amorces restait le plus souvent l'apanage de l'importation anglaise qui trouve dans ce commerce des bénéfices considérables, une étude approfondie de la question nous avait permis de reconnaître qu'une solution satisfai- sante des difficultés d'amorçage dans la pêche aux cordes se trouvait dans la méthode de conservation par la congélation appliquée aux poissons d'amorce de pêche française. Déjà, en 1894, nous avons développé à plusieurs reprises dans diffé- rentes publications, la mise en pratique de ce procédé et nous appe- lions l'attention des intéressés sur cette utile innovation. En 1895, nous avons opéré plusieurs (ssais pratiques d'une étendua restreinte et limités par les ressources pécuniaires dont dispose la station aquicole. Cette démonstration pratique produisait le plus heureux effet et nous sommes heureux de pouvoir vous signaler, Monsieur le Ministre, la réussite complète de nos études sur celte question des amorces EXTRAITS ET ANALYSES 67 congélces par la mise en application opérée à Clierbourg en 1896, suivant nos indications et sur nos plans qui ont été fournis aux inté- ressés d'une manière absolument gratuite. Notre initiative dans cette question d'application technique a donc réalisé entièrement l'installa- tion d'une industrie absolument nouvelle en France et nous avons la satisfaction d'avoir conduit les travaux de la station aquicolc do Bou- logne de manière à re'pondre aux besoins les plus urgents de la pèche maritime côtière du Nord de la France. C'est au cours du dernier semestre de 1896, dans le port de Cher- bourg, que nous avons e'tudié cette application pratique de la conser- vation des amorces par la conge'lation, faisant cette étude à la de- mande d'un homme éclairé, M. Aristide Bienvenu, armateur et constructeur de bateaux de pêche, qui connaît parfaitement les besoins et les conditions du quartier maritime de Cherbourg, dans lequel un commissaire de la marine, M. Le Brisoys-Surmont, nous signalait, en 1894, la nécessite' de rendre service aux pêcheurs à corde en leur évitant des chômages trop fréquents uniquement dus au manque de boëtte. Nous avions d'ailleurs constaté nous-même ces chômages dans les petits ports du quartier, comme Barfleur, par exemple. Au point de vue technique, l'intérêt spe'cial de l'installation cons- truite à Cherbourg par M. Bienvenu, suivant nos conseils, re'side dans l'utilisation d'une bâtisse, déjà existante, d'une sorte de magasin, construit en pierres et couvert eu tuiles, lequel peut être facilement adapté aux aménagememenls de-î cales froides et des congélateurs à poissons d'amorce. Les congélateurs pour geler le poisson et les réfrigérateurs pour abaisser la température des cales froides à poissons congelés sont basés sur l'emploi du mélange réfrigérant de sel et de glace pilée, mélange aussi facile à employer qu'il est simple à préparer. Cette méthode frigorifique nous a paru préférable pour l'économie même du projet, en ce sens qu'elle évite l'achat de machines réfrigérantes coû- teuses et délicates. Dans cette industrie, dont le fonctionnement est intermittent et momentané, il importe de ne point immobiliser un capital élevé, qui ne trouverait pas des intérêts suffisants dans le gain des opérations. Il est d'ailleurs facile de se procurer de la glace dans les ports de pêche de la Manche où on l'emploie beaucoup dans la conservation du pois- son frais. En ce qui concerne le sel, nous avons fait auprès de M- le Direc- teur général des douanes et auprès de M. le Ministre du Commerce, de l'Industrie, des Postes et Télégraphes, toutes les démarches néces- saires pour dcmonlrer l'intérêt que présentait la conservation des amorces par congélation, au point de vue du développement des pêches françaises. A la suite de ces démarches, la demande de degré- 68 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLLWrATION. vement des droits sur le sel introduite par l'entrepreneur a obtenu l'approbation du Comité' consultatif des Arts et Manufactures, ratifié successivement par MM. les minisires du Commerce et des Finances. Dans ces conditions que nous avons contribue' de toute notre influence à faire établir, la conservation des amorces congelées par la méthode indiquée ci-dessus est devenue une industrie applicable dans toute la région du Nord, industrie mise en mesure de concurrencer heureusement l'importation des amorces d'Angleterre. Les congélateurs où les Poissons sont congelés par l'action du mé- lange réfrige'rant de glace et de sel sont imités à la fois du type cana- dien des pêcheries des Grands-Lacs et du type ame'ricain des pêcheries terreneuviennes. Ce sont de grandes caisses doubles, en bois, dont les dimensions prises à l'intérieur des parois sont de 4 m. sur l'",80 et l'",20. Deux compartiments égaux existent dans chaque caisse avec des couvercles spe'ciaux, qui rendent la fermeture aussi hcrmétque que possible. Chacun d'eux possède dans le fond un orifice d'e'coulement pour le liquide de fusion de mélange. Dans ces appareils, les Poissons à congeler sont disposés à l'intérieur de caissons de fer blanc à cou- vercle emboîtant et qui mesurent Oï^jSO sur 0,'"60 et sur O'^jOS ou bien des dimensions moitié moindres, soit 0'",40 sur 0"".G0 et sur 0™,08. Un congélateur avec ses deux subdivisions contient 48 grandes caisses ; il peut geler, en moyenne, dix à douze mille harengs en douze heures. A cet efifet, les caisses en fer blanc alternent dans le congélateur en chargement avec des couches de glace et de sel de 0^,10 qui en- veloppent entièrement chacune d'elles. La fusion de cette quantité de mélange re'frigérant intercalaire suffit pour assurer la congélation par-faite lorsqu'il n'y a point de de'perdition de froid provenant d'une faute dans le travail et lorsque les proportions du mélange de glace pilée [ivois, pelletées) et de sel (une pelletée) sont bien conservées- Si l'on excepte la construction des doubles parois isolantes, en bois avec intervalles bourrés de sciure, qui doublent les murailles et le plafond de la cale aux Poissons congelés, de manière à éviter tout échaufifement de la masse provenant de Texte'rieur, la particularité' la plus intéressante de l'installation établie à Cherbourg consiste dans la composition des réfrigérateurs qui tapissent, pour ainsi dire, toute la paroi intérieure des cales froides où sont emmagasinées les amorces après congélation. Ces réfrigérateurs sont du type américain de Gloucester et non du type canadien de la région des Lacs ; leur section horizontale est rec- tangulaire et non pas circulaire. Vus de face, ils présentent, à droite et à gauche deux montants verticaux en bois, épais de 0"%05, larges de 0'",20, en haut, et de O'^ylO, en bas. Sur ces montants sont clouées les faces interne et externe du réfrigérateur, constituées toutes deux par une feuille de fer blanc d'un mètre de largeur. En raison de EXTRAITS ET ANALYSES. 69 l'amoindrissement de la largeur des montants vers le bas, les feuilles de fer blanc ne sont point verticales, mais inclinées de 0"»,10 vers Tin- te'rieur de l'appareil considère' dans toute sa hauteur (2 mèlres). La pente de 0™,05 par mètre assure l'écoulement rapide du liquide de fusion produit par le me'lange réfrigérant et le développement intégral de froid que ce mélange est capable de fournir. Dans le bas, chaque réfrige'rateur communique avec une gouttière en planches qui recueille sur tout le pourtour des cales froides leau de fusion produite, pour la conduire aux de'versoirs charge's de l'évacuer au dehors dans les sables perméables des miellés qui l'absorbent par infiltration. La cale froide actuellement construite à Cherbourg, pour les de'buts de l'opération dans la saison 1896-1897, contient de 100,000 à 120,000 harengs suivant le mode de magasinage adopté ; en vrac ou en caisse cette cale compte un développement de surface réfrigé^ rante (fer blanc des réfrigérateurs) égal à 48 mètres carre's environ, ce qui fait une moyenne de 4 à 5 de'cimètres carre's par 1,000 harengs. La température maintenue dans la cale froide avec la moitié des ré- frigérateurs en chargement est aisément de — 8 degrés centigrade, en bas, et de — 5 degrés en haut. Une installation très simple de tuyaux, conducteurs d'air sous faible pression, permet d'assurer le renouvelle- ment de l'atmosphère intérieure des cales nécessaire à la bonne con- servation des produits. Ceux-ci doivent rester emmagasinés pendant trois mois au plus, période au bout de laquelle toute la réserve sera consommée. L'application de cette méthode de conservation des amorces pour la pêche est ainsi poursuivie à Cherbourg dans les meilleures con- ditions de succès. Déjà l'essai des amorces congelées a été fait par les pêcheurs de cette localité en comparaison avec les amorces fraîches qui ne manquent pas dans la saison d'hiver. Pour ce premier essai, 1,500 ki- logrammes de harengs congele's ont servi d'amorce dans les mêmes pêches et sur les mêmes fonds que des harengs de pêche fraîche employés exclusivement jusqu'alors. Les amorces congelées ont donné toute satisfaction aux pêcheurs à cordes qui attestent leurs bonnes qualités de résistance sur l'hameçon ei leurs propriétés attrac- tives : l'attrait qu'elles conservent pour le Poisson est témoigné pra- tiquement par ce fait que la capture est aussi abondante sur les lignes appâtées de harengs congelés que sur celles appâtées de hareng frais. Cette épreuve est donc concluante. Elle vient démontrer d'une ma- nière complète l'avenir de cette innovation que nous avions juste- ment pronostiqué depuis longtemps. Il nous reste à en estimer l'importance au point de vue économique et financier de la pêche française et au point de vue de l'alimentation publique. •70 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. L'importance économique de l'application d'amorces congclo'es telle que nous la voyons établir 5 Cherbourg ne consiste point seulement dans le développement mate'riel du commerce nouveau qu'elle com- porte, bien que ce commerce soit destine à fournir une nouvelle source de revenus aux divers intéressés dans les pêches maritimes du quartier de Cherbourg. L'effet le plus louable et le plus utile de cette innovation est dans l'assurance d'un travail régulier qu'elle donne aux pêchetirs à cordes, au lieu des chômages forcés qui les retiennent au port sans pêche et sans salaire. Ainsi, grâce aux réserves d'amorces, le capital et les hommes actuellement engages dans la pêche à Cher- bourg fourniront un travail ininterrompu et régulier, autant que le permettront les circonstances atmosphériques et l'abondance du Poisson, il s'en suivra de plus un rendement plus considérable dans les captures, pour favoriser ])eaucoup d'alimentiou publique en Nor- mandie. Si nous nous efforçons d évaluer en chiffres l'importance du trafic nouveau acquis ainsi à la pêche dans le port de Cherbourg seul, nous constatons les relevés suivants. A Cherbourg s'approvisioDuent actuellement en moyenne quinze ba- teaux cordiers, que les difticultés inhérentes à l'approvisionnement d'amorces réduisent à ne travailler effectivement que dix jours par mois, ce qu'on exprime en disant que ces pêcheurs font en moyenne dix marées par mois, alois qu'ils pourraient atteindre aisément le to- tal mensuel de vingt marées avec de l'amorce à discrétion. Chaque bateau pêcheur consomme par maiée 400 Harengs employés comme appâts. C'est donc, pour l'approvisionnement des 150 marées faites par les Cordiërcs atterrissant à Cherbourg, un total de 150 X 400 = 60,000 Harengs utilisés par mois. Jusqu'à 1896-1897, ces 60,000 Harengs pour amorces étaient achetés çà et là, en Angle- terre, à Guernesey principalement et ils arrivaient à Cherbourg pa- quetés, dans la glace, concassés, plusieurs jours après leur capture. Cette amorce était loin d'être aussi satisfaisante qu'on l'aurait désiré et pourtant elle coûtait très cher aux pêcheurs normands, de 10 à 15 francs, en moyenne 12 francs pour cent Harengs. Il y avait donc par mois de disette d'amorces françaises, une importation anglaise s'élevant h 7.200 francs ; et cette importation peut se trouver rem- placée favorablement aujourd'hui par des amorces congelées, do très bonne qualité et vendues à meilleur compte à nos pêcheurs. En effet, le prix de vente de ces dernières peut s'élever à 6 ou 10 francs, en moyenne à 8 francs le cent. Sur 60.000 Hareng-;, la four- niture d'amorces congelées établissant une économie moyenne de 4 francs par cent permeltrait aux pêcheurs à cordes cherbourgeois de réaliser par mois une économie de 2,400 francs dans leurs frais gé- néraux, en même temps qu'elle réserverait aux Harengs de pêche fran- çaise un débouché nouveau de 4,800 francs par mois Elle consétve- EXTRAITS ET ANALYSES. 71 rait. par suite, au commerce français, une somme do 7,200 francs versc'e jusqu'alors aux mains des fournisseurs anglais. Le bdne'fice total pour le port de Cherbourg serait donc de 14,4(tO francs par mois par le seul fait de la substitution de l'amorce congelée importée d'An- gleterre : encore n'escompterons-nous pas dans cette somme la plus- value obtenue dans le rendement de la pêche par l'emploi d'un appât mieux conserve et plus attractif pour le poisson. Tous ces avantages sont un benëlicc immédiat pour le commerce fiançais et, nous pouvons le dire, un accroissement de richesse pour la France. Un autre bc'néfice des réserves d'amorces congelées découle du tra- vail plus assidu que ces réserves permettront à nos pêcheurs Cher- bourgeois ; au lieu de 10 marées par mois, avec de bonnes amorces, avons-nous dit, ces pêcheurs pourraient en faire 20, soit 10 irarécs en plus pour 15 bateaux. Avec 400 Harengs consommés par marée et par bateau, ceci ferait une consommation supplémentaire de GO, 000 Ha- rengs par mois et, comme nous Tavons calculé précédemment, un nou- veau débouché pour la pèche haranguiérc et ])our le commerce d'amorces évalué à 4,800 francs. En escomptant le produit net de ces nouvelles pêches à la valeur primitive des amorces importées (ce qui est un minimum très strict, comme le savent tous les intéressés dans la pêche h Cherbourg) nous arrivons néaimioins à une plus-value men- suelle des rendements des pêches, aux cordes montant à 12,000 francs, nouvelle somme apportée au commerce et à la pêche française par l'usage des amorces congelées. Nous ne tenons d'ailleurs en ceci aucun compte de l'augmentation (d'un tiers à la moitié en moyenne) qui résul- tera dans cette valeur du poisson péché, lorsqu'il arrivera par les inter- médiaires accoutumés à la disposition du consommateur lui-même. Ainsi, au total, une augmentation de la richesse publique supérieure à 20,000 francs par mois découle de cette première introduction dans les usages de la pêche côliere du procédé que nous avons fait con- naître en l'Yance pour la conservation des amorces congelées. L'innovation appliquée dés le début à Cherbourg où elle est à même de produire les conséquence économiques que nous venons de signa- ler durant une période de cinq à six mois chaque année, ne peut man- quer de s'étendre à d'autres ports de pêche, dès que la nouvelle de l'entrée du procédé dans la pratique industrielle sera connue des intéressés. Cà et là sur les côtes françaises les mêmes disettes d'amorces existent qui contraignent à des chômages plus ou moins prolongés les pêcheurs cordiors qui nous occupent. Il en est de même en Europe dans d'autres nations qui s'appliquent à la pêche Peut-être même notre exemple y servira-t-il de stimulant, en par- ticulier, chtz les Hollandais et les Allemands qui exploitent la mer du Nord. Nous en trouvons un témoignage dans imc excellente étude développée en septembre 189S, au congrès international des pêches 72 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. de Berlin, sur la question de l'amorce envisagée au point de vue dos pêcheries allemandes, par M. le D"" Ehrenbaum, de l'Institut biolo- gique et aquicole d'Heigoland (Milheilungen d. Deutscli. Seefischerei. Verein, 1896). En ce qui concerne les pêcheries françaises, nous avons e'ié saisis depuis longtemps de demandes d'informations relatives au procédé de conservation des amorces par la congélation ; depuis que nous l'avons recommandé et expérimenté pour la première fois en France, divers projets nous avaient été soumis pour des conseils et des ren- seignements. Peut-être ces projets eussent-ils été suivis d'applica- tion, si la station acquicole de Boulogne avait possédé en temps utile les moyens d'action suffisants pour procéder dans tous les ports inté- ressés aux démonstrations pratiques capables de faire apprécier les qualités et la me'thode si heureusement préconisée par nous à Cherbourg. / 2^ Etude expérimentale du pouvoir de conservation des matières em- ployées pour préserver les filets de pêche. — Nous avons continué en 1896 l'étude expérimentale du pouvoir de conservation des diverses ma- tières employées comme teintures préservatrices des filets de coton employés pour la pêche des Harengs, Maquereaux, etc., et qui se cor- rompent très rapidement à bord des grands bateaux pêcheurs du Nord de la France. Nous avons collaboré dans cette étude avec M. le Directeur du la- boratoire de chimie agricole et industrielle de Boulogne et nos essais combinés ont reçu de précieux encouragements de la société agricole et des sciences industrielles de Boulogne. Les premiers résultats de ces études ont été publiés dans une bro- ctiure spéciale distribuée aux intéressés et dans une note insérée dans le fascicule de juillet du Bulletin dépêches du ministère de la marine. L'observation méthodique des faits nous a montré que : 1° les pro- cédés usuels de tannage au cachou ; 2° les enduits de coaltar seul ou délayé d'huile de houille; 3° l'imbibilion des filets blancs ou ca- choutés dans les huiles lourdes de houilles dites huiles créosote'es sont d'excellents préservatifs contre les moisissures et la pourriture des filets de coton. Ces diverses méthodes ont pour effet de retarder plus ou moins réchauffement des fibres végétales mouillées et souillées par les impuretés (sang, mucus, plantes et animaux pélagiques) qui s'accumulent dans la cale des bateaux de pêche où sont remisés les filets à bord. Eu organisant nos expériences : P sur le filet blanc n'ayant subi aucune préparation ; 2" sur le filet cachouté ; 3° sur le filet cachouté puis coaltaré; 4*^ sur le filet huilé; 5° sur le filet huilé puis coaltaré, de telle sorte qu'elles réalisent aussi exactement que possible les con- ditions auxquelles ces filets sont soumis. Durant leur séjour en mer EXTRAITS ET ANALYSES dans les bateaux de pêche, nous nous sommes convaincus nettement que réchauffement des matières organiques n'est pas la seule cause qui agisse dans la destruction des filets aux harengs, une croyance trop répandue parmi nos praticiens. D'autre part le filet cachouté et coaltére', le filet cachoute et huile', le filet huilé et coallaré, de môme que le filet simplement huilé se sont tous monlre's plus enclins à réchauffement que le filet simplement cachoute'. Rigoureusement, s'il s'agissait de combattre simplement l'e'chauffement, la préférence reviendrait donc à l'ancienne méthode, ce que nous ne pourrions soutenir devant les résultats des pratiques généralement adoptées et suivies depuis de longues années. A vrai dire, il n'existe dans les méthodes de préservation an- ciennes et nouvelles, aucun procédé qui permette à l'armateur d'éviter les soins attentifs et constants que réclament les filets en service dan» la pêche. La croyance qu'on en avait eue, en ce qui concerne le trai- tement aux huiles créosotées a fait place à bien des déceptions qui se sont traduites par un revirement à peu prés complet plus favorable au cachou. IV. — Questions diverses. Ecole pratique des Pêches maritimes. — Au cours de l'année 1896, nous vous avons informé, Monsieur le Ministre, des efforts tentés par nous, en vue de l'organisation d'une école pratique des pêches mari- times, annexée à la station aquicole de Boulogne. Vous avez bien voulu encourager ces efforts et nous permettre de réaliser cette fondation, en même temps que vous nous faisiez con- naître, par dépêche du 13 juin 1896, qu'il nous appartenait de pour- suivre nos démarches en vue de la garantie du budget supplémentaire réclamée pour la fondation de cette école par les Chambres de Com- merce intéressées dans cette fondation. Nous pouvons, Monsieur le Ministre, vous faire connaître dans ce rapport sur nos travaux de 1896, la réalisation de ce desideratum. Les Chambres de Commerce de Boulogne, Dunkerque et Calais sont en mesure de subventionner l'école pratique des pêches qui sera orga- nisée à bord du bâtiment à voiles le Zéphir que le département de la Marine nous a cédé et remis à Cherbourg, le P'" octobre 1896. Ces Chambres de Commerce prélèvent sur leur budget une partie des subventions; elles ont obtenu sur les sommes adjugées comme primes au développement de la marine marchande les compléments néces- saires pour parfaire leurs contributions. Ces sommes seront prochai- nement ordonnancées à l'adresse de la station aquicole et l'école des pêches annexée à cet établissement pourra dés lors s'organiser d'une manière définitive. Bull. Soc. nat. Accl. Fr. 1898. — 6 74 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. Toiles sont les questions principales que nous avons traitées au cours de Tannée 1896 dans les travaux de la station aquicole de Bou- logne. Nous nous sommes efiforcés de remplir ainsi, dans toute la limite de nos moyens d'action, le rôle éminemment utile qui nous incombe dans l'étude méthodique des pêcheries du nord de la France, en vue de l'initiative des améliorations profitables aux grands intérêts que repré- sentent nos pêches nationales (1). X Les Animaux domestiques de l'État indépendant du Congo (Mammifères et Oiseaux), par E. Meuleman, vétérinaire de l'armée. Le Cheval n'existe pas à l'état naturel ou aborigène dans l'Etat indépendant du Congo. Ceux que l'on y rencontre sont d'importation récente et viennent le plus souvent des îles Canaries, parfois, mais plus rarement du Se'négal, de Lagos, de Sainte-Marie, de Bathurst. La Socie'té des produits du Congo, en établissant son haras de l'île de Mateba, a introduit un étalon et deux juments ardennais. Cette société a fait ainsi uu essai qu'il était avantageux de tenter, étant donne' que la présence de Chevaux sur les rives du grand fleuve africain démontrait la possibilité' du parfait acclimatement de ceux-ci. Dans l'intérieur de l'Etat, outre les montures ayant conduit les voyageurs, il existe quelques Chevaux ramenés des sources du Chari par le commandant Hanolet qui les avait reçus eu présent du Cheik Al-Sunusi. Ceux-ci appartiennent à la race barbe et sont destinés à former la souche d'un élevage que l'on tente à Makoanguay-Banzy ville,. Yakoama et Djabbir. L'Ane importé au Congo est géne'ralement originaire des îles Cana- ries. Il est de taille moyenne, bien conformé, doué d'une résistance peu commune et rend énormément de services pour les explorations. Sa sobriété le fait préférer au Cheval; il se sustente parfailenient avec les herbes qu'il trouve aux environs des campements autour des- quels on le laisse brouter en liberté. Dans la partie Est de l'Etat, on rencontre une race africaine; l'Ane de Mascate, qui est pour le Nègre arabisé ce qu'est le Cheval pour l'Arabe du désert. Les grands chefs se font un luxe de couvrir leur monture de riches harnais; ils l'entourent de soins spéciaux et ne consentent jamais à se séparer des sujets de valeur. (1) Rapport adressé à M. le Ministre de l'Agiiculture, extrait du Bulletin du Ministère de V Agriculture, novembre 1897. EXTRAITS ET ANALYSES- 75 Cet Ane est plus grand el plus vigoureux que le premier; la finesse, la correction et la beauté de ses formes, en font, en quelque sorte, le pur sang de son espèce, L'Etat possède quelques beaux reproducteurs de cette race, destinés à améliorer celle importe'e des Canaries. Le Mulet — Ce sont encore les îles Canaries et quelquefois le Por- tugal et le Se'négal qui fournissent les Mulets; mais ils sont moins re'pandus que les Anes et même que les Chevaux. Cela tient à leur prix élevé tout autant qu'à l'impossibilité de leur reproduction. Du reste l'Ane remplace parfaitement le Mulet dans ses divers services et n'est pas comme lui un animal de luxe; car si l'on paie 300 francs un bon baudet, on doit e'valuer à 1500 et 1800 francs le prix d'une mule de réelle qualité. Le Bœuf est assez répandu dans le domaine de l'Etat; toutefois on ne le rencontre à l'état naturel que dans les districts du Kwango oriental, du Kossaï, du Lualaba, dans le Katanga, le Manyema, les environs du lac Albert-Edouard et le Haut-Uelle. On doit à l'Etat indépendant et à diverses Sociéte's commerciales de l'avoir introduit dans le Bas-Congo jusqu'au Stanley-Pool et des agents du Gouvernement en ont môme conduit au prix de grandes difficultés jusqu'au Bangala. Ceux du Haut-Ubangi viennent du Wadaï. Le bétail du Bas-Congo, ainsi que celui du Kwango oriental et du Kassaï, est originaire des possessions portugaises situe'es au sud de l'embouchure du Congo. Il est bien constitue', fort, vigoureux, très rustique, est caracte'risé par un garrot et un fanon très développés ; il fournit une chair de bonne qualité et le lait des vaches, bien qu'en petite quantité, est suffisamment riche pour être comparé à celui de quelques-unes de nos races européennes. Le be'tail du Manyema est plus grand et remarquable par ses cornes très longues et très pointues. En quelques points de la région du Tan- ganiyka se rencontre le Zebu. Aux environs du lac Bangv^elo existe une race à courtes cornes, rappelant celle de l'Alderney ; au sud du Katanga, une race sans cornes; dans les environs des lacs Albert et Albert-Edouard, le bétail se ressent de la proximité du pays des Latuka et des Bari et appar- tient à la race hindoue (Zébu). Enfin, le bétail ramené des sources du Chari par le commandant Hanolet se rapproche plutôt, comme type, de celui de l'Angola, bien qu'il n'y ait entre les deux aucun lien de parenté. On comprendra aise'ment les avantages qui résultent de la présence du bétail dans les stations de l'Etat. C'est le point de départ d'une amélioration successive dans la nourriture du personnel blanc, et dans la suite, de celle du personnel noir. Aujourd'hui déjà, le lait, ré- servé avant tout aux fonctionnaires dont la santé laisse à désirer, est un aide puissant qui favorise leur gue'rison. 76 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. Différents essais d'emploi du Bœuf comme animal de trait et de bât ont été tentés, et re'cemment, ils ont donné de bons résultats, au camp de Zambi, où les Bœufs, dressés à tirer la charrue et la herse, com- mencent à rendre de grands services à l'agriculture. Les habitants du sud de l'Etat nous ont initiés à un emploi du Bœuf peu connu dans nos pays européens; nous voulons parler du Bœuf de selle. Sans avoir la légèreté, la souplesse et la rapidité du Cheval, il n'en fait pas moins une excellente monture résistante, vigoureuse, marchant d'un pied sûr, et demandant peu de soins. Le dressage n'est ni long ni difficile, mais nécessite l'emploi de gens qui l'ont pratiqué, et on le comprendra mieux lorsque nous aurons dit que ce sont les taureaux les plus forts qui sont destinés à ce service. Les stations de Luzambo et de Luluabourg ont toujours un certain nombre de taureaux dressés qui sont de tous les voyages et reconnais- sances. C'est ainsi que le commandant Le Marinel se servit d'un taureau de selle lorsqu'il accompagna le major Von Wissmann jusqu'à Niangwe et lorsqu'il fit son voyage d'exploration au Katanga. Citons aussi le major Von Wissmann qui l'employa pour ses deux traversées de l'Afrique, la délimitation de la frontière congo-portu- gaise dont chaque membre possédait un Bœuf de selle et il nous serait aisé d'allonger notre liste. Terminons en disant que tous ceux qui ont eu l'occasion de l'employer lui reconnaissent ces qualités maî- tresses : la force, l'endurance, la docilité et la sobriété. La Chèvre est également très répandue et c'est à peine si deux ou trois peuplades, tels les Niam-Niam du Nord n'en possèdent pas. L'espèce commune que l'on rencontre le plus généralement est, en Afrique, ce qu'elle est en Europe, avec cette seule différence qu'elle y donne moins de lait, mais en conservant toutes les qualités de sobriété, de rusticité et de reproduction- La Chèvre des Mangbettu est différente; elle a un camail de poils longs qui se prolonge sur toute l'épine dorsale; elle est de couleur chamois avec teinte plus foncée pour le camail. Le front est forte- ment busqué; les cornes longues et faiblement recourbées. Chaque station possède son troupeau de Chèvres destiné à contri- buer à la fourniture de viande fraîche au personnel blanc. En Europe, sous l'influence d'un préjugé qu'il serait aussi difficile de définir que de justifier, nous ne nous faisons guère à l'idée de voir la chair de Chèvre entrer dans la consommation courante ; elle n'est cependant ni mauvaise ni dure et il n'y a guère qu'à un vieux Bouc chargé d'ans et de vermine que l'on doive faire grâce en lui reniant, vis-à-vis de ses cadets, l'égalité devant la casserole. L'émasculation se pratique sur les boucs dans la Ilaute-Mongala et rUbangi-Dua. Le Mouton existe dans presque toute l'étendue de l'Etat indépen- dant et, si quelques peuplades du Nord, du Nord-Ouest et du Centre EXTRAITS ET ANALYSES- 77 n'en posse'daient plus à l'arrivée des agents de l'Etat, il faut en cher- cher bien souvent la cause dans les incursions et les razzias aux- quelles elles furent soumises, il y a peu d'années, de la part des Madhistes et des Arabes. Ce Mouton appartient à une race que l'on rencontre dans toute l'Afrique équatoriale et paraît être une variété' de la race soudanaise. Elle est caracle'rise'e par une toison de poils analogue à celle de la Chèvre. Chez le mâle, le poil de l'encolure, de la partie ante'rieure des épaules et du poitrail est long, tandis qu'il est court sur le restant du corps. Il forme ainsi un camail complet qui lui donne l'air d'un petit Bison. Celte ressemblance s'accentue encore par la présence de cornes spiralées semblables à celles que porte le Mérinos. Dans la Zone arabe et le Haut-Nil existe une variété à queue grosse rappelant les Moutons à queue trilobée de la Syrie [Ovis steatopyqa). Chez celui-ci, la queue est le siège d'un dépôt adipeux qui lui fait prendre des proportions volumineuses au point de fournir jusqu'à un kilo et plus de graisse. Le Mouton du Congo a la robe blanche et noire. C'est une grande exception que d'en trouver un qui soit d'une seule couleur. 11 fournit sa chair qui est de bonne qualité, et dans certaines régions l'émasculation des Be'liers se pratique couramment et donne à la chair une réelle finesse de goût. Quant au lait de Brebis, il est employé au même titre que le lait de Chèvre. Le Porc est moins répandu que le Mouton et la Chèvre ; on le ren- contre surtout dans le sud et le centre de l'Etat, tandis qu'il fait défaut dans le nord et l'est, où la religion musulmane semble avoir été la cause de sa disparition ou de sa non-introduction. Il appartient à la race Hérique dont il constitue une variété re'pan- due dans une grande partie de l'Afrique. Ge'néralement, il a la peau et les soies noires, parfois tâche'es de roux ou de blanc. En Afrique, le Porc a un rôle tout spécial à remplir. Il est chargé de la propreté des alentours des villages et à ces fonctions il doit d'être le plus souvent atteint de ladrerie. Aussi les Européens ne con- sentent-ils guère à faire entrer dans leur ordinaire que la chair des porcs très jeunes ou dont ils ont surveillé l'engraissement. En revanche, le Noir, qui ne s'arrête pas à si peu, est friand à l'excès de la viande du Porc. C'est pour lui la meilleure et la plus chère, celle qui est de tous les festins. Dans la région des Cataractes, l'importance d'un marché est cotée au nombre de Porcs abattus et débités et c'est pour les vendeurs une réelle source de profits. Les Mangbetler ont à moitié domestiqué le Porc sauvage. Le Chien du Congo est celui de toute l'Afrique équatoriale, une race propre à cette contrée et ayant beaucoup d'affinités avec celle que l'on rencontre chez les peuples primitifs de l'Asie, l'Ame'rique et 78 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. rOceanie. C'est le Chien sauvage re'duit à la domesticité par plusieurs siècles de contact avec l'homme qui a tiré parti de ses qualités spé- ciales pour la chasse. Ce n'est pas cependant que celui du Congo soit bien remarquable à ce point de vue; beaucoup de peuplades qui ne s'adonnent pas à ce sport ont laissé se perdre cette faculté pre'cieuse, tandis que d'autres l'ont entretenue et se sont fait du Chien un puis- sant auxiliaire dans leurs courses de tous les jours à la recherche de leur nourriture. Chez les premières, que nous trouvons surtout le long des rivières, le Chien devient, dès qu'on a franchi l'Inkisi, un animal comestible très recherché et l'on pourrait facilement dénombrer les peuplades du Haut-Congo pour qui les Caniches ne sont pas une denrée très prisée. • L'on serait tenté de croire, qu'e'tant donne's ces deux emplois, l'indi- gène prodigue ses soins au plus fidèle ami de l'homme; il n'en est rien. Cette bête utile se nourrit comme elle peut, se glisse furtivement la nuit dans les cases où elle dort, blottie dans un coin, et, pour avoir une idée exacte de l'indififérence que lui témoigne le Nègre, il suffirait de connaître la besogne révoltante à laquelle les chiens ont dû en venir pour se pourvoir de nourriture. Le Nègre bakongo a, au sujet du Chien, deux croyances assez sin- gulières; un Chien est-il pris en flagrant délit de vol, il lui coupe les oreilles afin qu'il ne commette plus de nouveaux larcins, veut-il le faire grandir, il lui coupe la queue. Ainsi que nous l'avons dit, le Chien du Congo rappelle celui du type primitif à tête conique, à mâchoire supérieure pointue et forte- ment proéminente, à oreilles droites. Le corps fortement levretté devient cylindrique chez ceux qui sont gras, la queue est nouée comme chez le Bouledogue et le Carlin ou portée fortement courbe'e sur le dos. Dans le Haut Naboma et le Soudan existe une variété de Chiens rappelant beaucoup le Sloughi ou Lévrier des Arabes et il n'en diffère que par des proportions moindres et des oreilles attachées trop bas; il a beaucoup de vitesse et acquiert une certaine valeur lorsqu'il est bien dressé à la chasse. Signalons en passant que la rage n'a jamais été constatée dans l'Afrique équatoriale. Le Chat est d'origine européenne et se rencontre seulement dans certaines stations. Il est quelquefois remplacé par la Civette. La Poule du Congo est la Poule commune à plumage excessive- ment varié. Elle est de taille moyenne; on en fait une telle consom- mation que le Noir ne conserve guère que ce qu'il lui faut de pon- deuses pour assurer son commerce. En cela il est prévoyant, mais il ne songe pas à améliorer la race qui gagnerait beaucoup à avoir plus de taille. EXTRAITS ET ANALYSES. 79 Les Arabes ont importé une Poule de taille plus grande, haute sur- tout sur pattes. La Poule est, dans certaines régions peu riches en vivres frais, la base de l'alimentation du personnel blanc des stations. Aussi l'imagi- nation et l'initiative des Européens ont trouvé à la préparer avec des proce'dés qui feraient se pâmer nos Vatels en renom. Au surplus, les cuisiniers noirs, pâles émules de Brillât -Savarin, mettent-ils à varier les menus, un soin dont on ne les soupçonnerait guère capables. Les œufs sont assez difficiles à obtenir en général à l'état frais; le Noir préfère les garder pour les faire couver. 11 les mange rarement et ne les aime que fortement avancés. Le Canard ne se rencontre que dans les régions dont les habitants ont un commerce suivi avec la côte; il est d'origine européenne et paraît avoir été importé par les Portugais. La seule race introduite est le Canard de Barbarie, gros et volumineux, à tête garnie de caron- cules écarlates. , Quant aux races de Canards sauvages, elles sont très nombreuses. Le Pigeon — le Bizet et le Pigeon voyageur que l'on trouve dans beaucoup de stations sont d'origine européenne. On en voit parfois chez les indigènes, mais c'est là une exception. Leur acclimatement s'est fait facilement, ils sont restés très proli- fiques, mais ont perdu toute habitude de s'éloigner du pigeonnier. D'aucuns prétendent que la présence de nombreux Oiseaux de proie a été la cause efficiente de ce changement dans leurs mœurs et, à vrai dire, nous n'eu voyons guère d'autre qui puisse le justifier. Toujours est-il que leur vie se passe entre le toit des habitations et le pigeonnier; il est excessivement rare de les voir s'élever et tourner longtemps dans les airs, comme ils le font ici. Enfin rappelons les expériences de communications par pigeons voyageurs qui furent faites dans le Bas-Congo en 1888. Elles eurent un résultat satisfaisant, mais elles furent abandonnées comme offrant trop de difficultés pratiques (1). X La question des petits Oiseaux. Une proposition de loi vient d'être déposée à la Chambre, visant la protection des petits Oiseaux. L'exposé des motifs est vraiment suggestif et donne des détails (1) Extrait du volume publié par les soins du lieutenant Masui sous le titre de Ginde de la Section de rEtai indépendant du Congo à l'exposition de Eruxelles-Tervueren en 1897. 80 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. dont on ne se doute pas. Ainsi le comte du Périer de Larsan, auteur du projet, constate que de septembre à février une partie de son arron- dissement se couvre de lacets à un crin. Tout ce qui passe dans l'air est pris. Et c'est de cette façon qu'un calcul, fait dans quelques stations du chemin de fer traversant la partie landaise du département de la Gi- ronde, des Oiseaux tués et exporte's pendant une saison, a donne' le chififre de 17,000 kilos de petits Oiseaux expédie's en messagerie par chemin de fer et 8,000 kilos par voitures, en tout 25,000 kilos. En fixant à une moyenne de 33 grammes le poids de chaque Oiseau, on arrive au chiffre de 750,000 petits Oiseaux détruits en quelques mois dans une région seulement 1 Or, si on considère que les entomologistes évaluent à deux cents le nombre de larves, insectes, chenilles, chrysalides, pucerons que dévore par jour un petit Oiseau, on arrive à cette constatation que les pauvres oiselets tués auraient, dans une année, débarrassé la terre de 55 milliards d'insectes 1 Le Moineau, lui-même, si redoutable en tant que granivore, rend de grands services au printemps quand il est insectivore. « Si l'on compte, dit M. Pélicot, 50 millions de moineaux en France, et s'ils détruisent 4 livres de blé à 22 francs les 100 kilos, leurs dépré- dations s'élèvent à 22 millions de francs. C'est leur budget. Mais, en regard, chacun d'eux détruisant par semaine au moins 1,680 Chenilles et 360 Hannetons (en douze jours et par nichée), on arrive au chiffre très respectable de 84 billions de Chenilles dévorées en une semaine, et de 16 billions de Hannetons en douze jours pour toute la France. » Cela se compense bien ! L'Italie, l'Autriche, l'Allemagne se sont entendues pour protéger rOiseau. De même en Suisse. La France fera-t-elle quelque chose ? Il y a bien eu un congrès ornithologique à Paris en 1895. Mais après des séances, intéressantesd 'ailleurs, chacun est rentré chez soi. Ce qui démontre qu'il ne faut pas attendre une entente internationale et agir nous-mêmes, seuls . SUPPLÉMENT AU BULLETLN de la S0C1ÉTI<: NATIONALE D'ACGLLMATATION DK FRANCE No de Février 1898 La Société offre à ses membres : Graines de Polygonum sachalinense, offertes par M. Charles Ballet. Graines de Courgettes d'Egypte, offertes par M. Charles Debreuil (Ces graines conservent 1res longtemps leur faculté gerniinativc). Graines à' Aberia cafra, Celastrus edulis (Catha), Cerasus caroliniana, Cœsalpinta tmctoria, récoltées à Oran, par M. Leroy et oIFertes par lui à la Société. Graines à'' Acacia dealbata^ id.: vd^v. prœcox florihunda. Magnolia glauca^ Pi7ms strobus^ re'coltc'cs aux îles Borronées (Lac Majeur), parle comte G. Borromeo et offertes par lui à la Société. AVIS. — Le Sccrclariat prie les Membres de la Sociélc qui désirciff participer à la distribution des }j;rain(;s offertes par M. Charles Naudin et dont la liste a paru dans les numéros du Bulletin de juin vX juillet der- niers, de vouloir bien se liàler d'envoyer leurs demandes. Nombre d'espèces sont déjà épuisées, les Palmiers entre autres. Toutefois la Société peut ollru- çiuelques graines de Phœnix melano- carpa (de Nice), expédiées tout récemment par M. Charles iNaudin, de Trachycarpus excelsa, (de la Charente), envoyées par le docteur Lecler, et de Dattiers à fruits rouges récoltés à Oran par M. Leroy. La Société décline la responsabilité des annonces insérées ci-àessous Le Docteur A. Lccler, Rouillac (Charente), offre contre envoi de ] fr. 50 en timbres-poste des Bulbilles d'Igname de Chine, HO grammes représentant 60 à 70 bulbilles, suivant grosseur. — Envoi franco par poste. Par suite de changement de domicile, on désire se de'faire d'une Biche âgée de deux ans et parfaitement apprivoisée. — Prix modéré. — S'adresser au siège de la Socio'ie'. Occasion. — Photo-jumelle Carpentier 4, 5 X 6, objectif Zeiss, poire, 12 châssis de rechange renfermés dans une boîte spéciale et de plus, un châssis amplificateur pour agrandissement 9/12 et 13/18; le tout absolument nouf, prix 200 fr (valeur réelle 265 fr.) — La photo-jumelle et ses accessoires, sauf l'amplificateur, 150 fr. (valeur réelle 200 fr.j— Ce dernier appareil seul, 50 fr. (valeur re'elle, 65 fr.) — S'adresser au siège de la Socie'té. Un Jardinier, marié, sans enfants, âge de moins de 40 ans, ayant les meilleures réfe'rences, cherche à se placer pour s'occuper surtout d horticulture et spécialement do la culture des plantes exo- tiques (serres, orangerie ou pleine terre). Conviendrait comme jardi- nier en chef d'un propriétaire amateur ou d'un jardin botanique. — S'adresser au siège de la Société d' Acclimatation^ 41, rue de Lille, à Paris. Charles NAUDIN Membre de P Institut (Académie des sciences) Directeur du laborotoii-e de botanique de la Villa Tluiret, à Amibes ET le Baron F. Von MUELLER Botaniste du gouvernement anglais à Melbourne. MANUEL DR L'AGGLIMATEUR OU CHOIX DE PLANTES RECOMMANDÉES POUR L'AGRICULTURE, L'INDUSTRIE ET LA MÉDECINE Adaptées aux divers climats de V Europe et des pays tropicaux OUVRAGE PUBLIÉ AUX FRAIS ET SOUS LES AUSPICES DE LA Société nationale cV Acclimatation de Finance Un volume de prés de 600 pages avec portrait. INTRODUCTION: Considérations générales sur l'acclimataLion des plantes ; Aperçu générai des genres de plantes auxquels sont empruntées des espèces déjà utilisées ou qui peuvent l'être ; Description sommaire des familles ou groupes naturels auxquels se rattachent la plupart des plantes indiquées dans ce volume ; Noms vulgaires des plantes et synonymes rapportés aux noms botaniques; Énumération par oy^dre alphabétique des [)lantes, leurs usages et leur culture, formant un dictionnaire des végétaux à acclimater dans les diverses régions du globe ; Noms des auteurs cités dans le cours de l'ouvrage avec les abréviations usitées. Prix : 7 francs. Pour les Membres de la Société nationale d'AccUm-itation de France, 3 fr. 50 EN VENTE AU SIÈGE DE LA Société nationale Acclimatation de France 41, rue de Lille, PARIS. VERSAILLES, IMPRIMERIES CERF, 59, RUIS DUPLBSSIS. lEVUE DES CULTURES COLONIALES '.recteur: A. MILHE-POUTINGON, Docteur en droit. Directeur du Service de l'Afrique es Antilles à VUmon coloniale française, Vice-Président de la Seciiou coloniale à la Société ionale cf Acclimatation de France. jéesous les auspices de l'Union coloniale française, cette nouvelle publication a pour but défaire mieux ..aitre, en France, les diverses cultures et les productions coloniales ; de vulgariser dans les colonies meilleurs procédés de culture, d'y provoquer l'introduction des meilleures variétés des plantes françaises tuellement cultivées et lacclimatation de plantes nouvelles. COMITÉ DE PATRONAGE DE LA REVUE MM priiiro D'ARENBERG, député, vice-président du Groupe .coloiii.ii, président du r.omité de l'Afrique fmuçaise. ie coniiiiandant BINGER, ancien gouverneur de la Côte- d Ivoire, directeur des affaires de l'Afrique au Ministère des Colonies. •AUL BOURDE, ancien directeur des contrôles et de l'agri- cultiiri' en Tunisie, ancien secrétaire général à Madagascar. lUREAU, professeur de botaoiiiue au Muséum. . CHAILLEY-BERT, piofesseur à l'Ecole des Sciences poli- tiques, secrétaire général de \'U7iion coloniale française. :HARLES-ROUX. ancien député, membre du Conseil supérieur du coinineice, vice-président du Groupe colonial. :ORNU, [irolesseur de culture au Muséum. lEHERAIN, membre de l'Iiistitut, professeur de chimie agri- cole au Muséum et à l'KcoIe d'agriculture de Grignon. lARCEL DUBOIS, professeur de géographie coloniale à l'Uni- versité de Paris. YBOWSKY, directeur de I agriculture et du commerce e i ïuuis e, pi of sseur de cultures coloniales ;i l'Insiitut natio- nal agronomique . FLAHAUT, professeur de botanique à l'Université de Montpellier. ouïs GRANDEAUi directeur de la Station agronomique de l'Est, rédacteur en chef du Journal d'Agriculture pratique. RANDIDIER, membre de l'Institut. MM. Daron Joles de GUERNE, secrétaire général de la Société na- tionale d'Acclimatation. Di- HECKEL, professeur à la Faculté des Sciences, directeur de l'Institut, colonial de Marseille. LE MYRE de VILERS, député de la Cochinchine, président de la Société nationale d'Acclimatation. Mgr LEROY, supérieur général des Missionnaires du Saint- Esprit. MILNE-EDWARDS, membre de l'Institut, directeur du Muséum Cm. NAUDIN, nietnbre de l'Iûstitut. OLIVIER, docteur ès sciences, directeur de la Revue gé' nérale des Sciences pures et appliquées. POISSON, assistant au .Muséum. RISLER, directeur de l'Institut na ional agronomique. RIVIÈRE, ancien pré- dent rie iaSo ■ éié d Agr cul ure d'Alger, due -M'ur du Jardin d'essai du Ham na D'' TREILLE, ancien inspecteur eu chef du service de santé des Colouies. VIALA, professeur de viticulture à l'Institut national agrono- mique, directeur de la Bévue de Viticulture. H. DE VILMORIN, membre de la Société nationale d'Agricul- ture. ZOLLA, professeur à l'Ecole d'agriculture de Grignon et à l'Ecole des sciences politiques. La Revue des Cultures coloniales paraît le 5 de chaque mois. Bureaux : 44, rue de la Chaussée d'Antin, Paris. Abonnements : un an : France, 10 francs — recouvré à domicile, 10 tr. 50. — Colonies et Union ostale, 12 francs. PEINTURE IGNIFUGE DITE ANTI-RÉTROLEUB Au moment où l'horrible désastre du Bazar de la Charité est encore présent à toutes les mé- loires, il convient de signaler la découverte récente, par M. de Preux, d'un produit désigné ous le nom ù'Ânti-Pétroleur et qui rend les objets traités par lui absolument incombustibles. M. de Preux a fait, il y a peu de temps, à Saultain, près Valenciennes, des expériences déci- j Ives à ce sujet. Deux baraques de bois blanc recouvertes de carton bitumé et tendues de jute, une imprégnée du nouveau produit, l'autre à l'étal naturel, ont été remplies de copeaux imbibés l'éther. Les copeaux ayant été allumés, la baraque qui avait subi la préparation resta complètement itacte, tandis que l'autre était détruite en quelques instants. Mis en présence d'un chalumeau I égageant 1,200 degrés de chaleur, le bois n'est percé qu'après 25 minutes et le carton bitumé se oniracte, mais ne brûle pas et ne se fond pas. Les objets en celluloïd ne s'enflamment pas lors- qu'ils ont été traités par VAnti- Pétroleur. j Après les mêmes expériences faites en grand à l'Exposition de Bruxelles, au parc du Cinquan- maire, le Jury international a accordé, à l'unanimité avec ses plus sincères félicitations, ' VAnti-Pétroleur, un diplôme de médaille d'or, la plus haute récompense dont il pouvait ^isposer. Le produit inventé par M. de Preux rendra d'immenses services. Il est déjà employé dans un îrlain nombre d'usines et il a été adopté par la Compagnie du Nord qui s'en sert dans ses èpôls de machines. ; S'adresser pour les commandes et les renseignements au régisseur du château de la Villette Saultain (Nord). Charles NAUDIN Membre de l'Institut (Académie des Sciences) Directeur du laboratoire de botanique de la Villa Thuret, à Aûtibes ET Le Baron F. Von MUELLER Botaniste du gouvernement anglais à Melbourne MANUEL D E L'ACGLIMATEUR OU CHOIX DE PLANTES RECOMMANDÉES POUR L'AGRICULTURE, L'INDUSTRIE ET LA MÉDEClNhl Adaptées aux divers climats de V Europe et des pays tropicaux OUVRAGE PUBLIÉ AUX FRAIS ET SOUS LES AUSPICES DE LA Société nationale d'Acclimatation de France Un Yolume in-8*' de près de 600 pages avec portrait INTRODUCTION : Considérations générales sur Tacclimation des plantes ; Aperçu général des genres de plantes auxquels sont empruntées des| espèces déjà utilisées ou qui peuvent Fêtre ; \ Description sommaire des familles ou groupes naturels auxquels se' rattachent la plupart des plantes indiquées dans ce volume ; Noms vulgaires des plantes et synonymes rapportés aux noms botaniques, E numération par ordre alphabétique des plantes, leurs usages et leur culture, formant un dictionnaire des végétaux à acclimater dans les diverses régions du globe ; Noms des auteurs cités dans le cours de l'ouvrage avec les abréviations usitées. Prix : 7 fRANCS Pour les Membres de la Société Nationale d'Acclimatation de France, 3 fr. 50 EN VENTE AU SIÈGE DE LA Société nationale d'Acclimatation de France, 41, Rue de Lille, PARIS. U Stcrètairt Gtair&l, gérant Jules dk GUERNB. Versailles. — Imprimeries Cerf, 59, rue Duplessis. BULLETIN DE LA ill DlCCl DE FRANCE (Revue des Sciences naturelles appliquées] 45' ANNÉE MARS 1898 SOMMAIRE EREL. — La Perruche ondulée lEL ROGERON. — L'albinisme et le mélanisme chez le Canard sauvage liS> — Essais d'acclimatation en Indo-Chine ï Sxiraits et Analyses. |ssement de pisciculture d'Ancourt (Seine-Inférieure) ♦ ijumon de Californie à l'Ecole de viticulture de Beaune. Extrait d'une note de M. J. j VOIRIN, professeur à l'Ecole feiïs de Székély. Expériences faites par E. JOUZIER, ingénieur agronome, professeur f à l'Ecule nationale de Rennes ouille-Canard [Holothyrus coccinella Gervais) * . ^ > . > 101 104 108 112 Société ne prend sous sa responsabilité aucune dës» opinions es par les auteurs des articles insérés dans le Bulletin* Un numéro 2 francs ; pour les membres de la Société i fr.- AU SIÈGE DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE D'ACCLIMATATION DE ^RANCB -il, RUE DE LILLE, 41 PARIS ET A LA LIBRAIRIE CERF, 12, RUE SAINTE- ANNE Le Bulletin paraît tou 4l les lii6i^< .0 U .H «H 0 >^ V) 2 ^ C 61) es ;^ 0 0 Q as- ce «H > 9 ^ S Ohm ^ ffl * «as 0 '0 .5 d 0 S S w es w 1 1 s Vol CRESYL-JEYES DESINFECTANT AITTISEFTIQUE Le seul joignant à son Efficacité, scientifiquement démontrée, l'immense avantage de n'être ni ToxiÇLUO ai Oorrosif. Hémostatique et Styptique puissant. Adopté par les Ecoles Nationales Vétérinaires, le Service de Santé de l'Armée, la Préfecture de la Seine et la plupart des Services d'Hygiène et de Désinfectio7t des Départements. 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La forme générale rappelle l'Hirondelle, moins la queue qui se déploie en éventail comme celle du Faisan. L'ensemble du plumage est vert tendre. Le bec est d'un jaune vieil ivoire, la membrane qui en forme la base et qui constitue son appareil nasal est bleue chez le mâle adulte et chez la femelle, d'un brun que l'approche de la ponte rend de plus en plus foncé. Disons en passant que les femelles étant toujours plus chères que les mâles, et que la seule différence étant dans la couleur du nez, les marchands peu scrupuleux font des fe- melles avec des mâles en humectant à ceux-ci l'appareil nasal et en le brunissant au crayon de nitrate d'argent. — La tête, la gorge et les joues sont jaunes, une tache d'un beau bleu agrémente celle-ci, au-dessus, quelques petits points noirs forment comme ses satellites. La nuque et le cou sont vert jaunâtre finement zébré de noir. Le dos est également vert jaunâtre, les ailes sont marbrées de noir. Le dessus du corps est vert pomme, la queue est composée de plumes bleues et jaunes qui s'étagent en forme d'éventail. La patte courte est, chez l'Oiseau importé, d'un bleu ardoise très ca- ractéristique, tandis que chez les sujets nés en Europe elle est gris rosé, et blanche chez les dégénérés. Les jeunes su- jets sont d'un vert plus tendre, les ondulations sont moins accentuées, la tête est zébrée de raies vertes et jaunes, le bec est rosé, les sexes sont donc dans le jeune âge très diffi- ciles à distinguer. L'Ondulée, comme tous les Oiseaux d'Aus- (1) Communication faite à la séance générale du 11 mars 1898. Bull. Soc. nat. Accl. Fr. 1898. — 7. 82 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. tralie,est très rustique et s'acclimate bien dans l'Europe cen- trale. Les meilleures et les plus recherchées sont celles qui sont nées en France d'Oiseaux réellement importés, mais ce sont là des sujets assez rares. La reproduction de Per- ruches importées ne s'obtient pas en effet aussi facilement que l'on pourrait bien le croire. Le long \oyage qu'elles ont à su- bir dans des conditions déplorables, à bord des voiliers, fait qu'a l'arrivée elles sont en fort mauvais état. Il y a parmi ces captifs des vieux sujets qui constituent une perte sèche, car ils ne tardent pas à périr, et parmi les jeunes beaucoup ne peuvent arriver à se remettre de la traversée. Quand on est arrivé à sauver quelques couples, la plus grande difficulté n'est pas résolue. Notre saison d'hiver correspondant à leur saison d'été, ces Oiseaux demandent à reproduire dans les mois les plus froids de l'année, et c'est ce qu'il faut éviter à tout prix, car ils s'épuiseraient ainsi inutilement. Il ne faut donc laisser en volière les Perruches importées que l'on a réussi à acclimater qu'au printemps, et empêcher l'hiver toute velléité de reproduction en les tenant en cage et même en séparant les sexes. Supposons donc l'amateur en possession de quelques bons couples bien acclimatés ou issus d'importés, et le printemps venu, la première chose à faire est de les installer. La meil- leure exposition est celle du levant. Les Oiseaux ont ainsi les premiers rayons du soleil pour se réchauffer de l'engourdis- sement de la nuit et ils sont à l'abri des ardeurs du midi. Pour dix à douze couples d'Ondulées il faut un emplacement de 6 mètres carrés. L'endroit étant choisi, de préférence contre un mur bien exposé, on défoncera le sol sur toute la surface que devra occuper la volière à environ 0,30 centi- mètres de profondeur. Dans le fond, bien aplani, on placera un grillage à mailles assez fines pour que les Souris, qui gâchent et salissent la nourriture, ne puissent s'introduire par le sol, puis on montera sur ce grillage les petits murs qui doivent former le soubassement destiné à recevoir les trois parties de l'installation, c'est-à-dire l'abri complet, le demi- abri et l'air libre. L'abri complet est une cabane ou plutôt un placard adossé au mur, large de 2 mètres, profond de 1 mètre et haut de 2"', 50. La façade, qui sera mobile pour que l'on puisse l'en- lever l'été, est percée au milieu d'une porte et de deux LA PERRUCHE ONDULÉE. 83 petites baies yitrées pour éclairer l'intérieur. Au-dessus de la porte, tout le long de la façade, on percera des trous de 0,03 centimètres de diamètre. Au-dessus de ces trous/ for- mant étagère, on clouera une petite tablette pour que les Perruches puissent y séjourner, ce sera leur balcon. Le demi-abri est constitué par le toit qui avance d'un mètre, les côtés au lieu d'être en planches comme dans l'abri complet sont en grillage. La Perruche ondulée ayant souvent la dé- plorable habitude de dormir accrochée au grillage, il sera utile pour éviter les invalides de clouer deux grillages sur les poteaux formant le bâti qui devront avoir au moins 0,05 centimètres d'épaisseur. Le premier, de la même maille que celui qui a été enfoui dans le sol, sera placé sur la face intérieure des poteaux, le second, à maille plus large sur la face extérieure. Ces gril- lages étant ainsi écartés de toute l'épaisseur des poteaux, empêcheront les Chats de dévorer les pattes des Perruches imprudentes. Il suffira pour terminer l'installation de ména- ger une porte assez basse dont le bout de la partie à air libre, puis de remettre de la teiTe dans cette partie et du sable dans les autres Dans la partie â air libre, qui sera le jardin de ces intéressants pensionnaires, on aura soin de planter quelques Thuyas, car les Perruches aiment beaucoup cet arbuste, et il sera nécessaire de les remplacer tous les ans. Il ne reste plus qu'à placer les perchoirs et les bûches. Celles que l'on trouve chez les marchands ne conviennent pas. La bûche pour être acceptée par la Perruche devra lui inspirer confiance, et c'est par sa forme, son volume et la façon dont sera placé le trou d'entrée que l'on arrivera à donner à l'Oiseau l'illusion de la sécurité. Les bûches devront avoir, dimensions prises à l'intérieur : profondeur 0,28 centi- mètres, diamètre 0,10. Le trou d'entrée de 0,03 de diamètre sera percé à 0,05 du sommet et â 0,20 du fond. La partie su- périeure sera fermée par un couvercle attaché à la bûche par un clou fixé dans un coin, de façon qu'on puisse le tour- ner. Ce couvercle ne devra pas fermer hermétiquement afin de laisser échapper la buée qui se dégage des jeunes en moi- teur. Quelques amateurs conseillent de mettre deux bûches par couple. L'expérience m'ayant démontré que presque ja- mais les couples ne changent de nid, c'est une dépense inu- tile. Les premières années, je mettais deux bûches par 84 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. couple, afin de décider les femelles à pondre aussitôt que les jeunes commencent a grandir. Ces bûches doubles sont toujours restées inhabitées. Les femelles préféraient pondre dans la première, même avant le départ des jeunes, ce qui fait que ceux-ci commençaient à couver les œufs avant que la ponte ne fût complète C'est ce qui explique pourquoi dans les nichées il y a des jeunes à peine em[)lumés alors que les aînés commencent quelquefois à sortir, ce qui n'arrive qu'au moment où ils sont grands comme père et mère. On place les bûches sous l'abri complet et quelques-unes sous le demi-abri à hauteur convenable pour que l'on puisse facile- ment les décrocher pour les visiter et les nettoj^er après chaque couvée, ce qui est indispensable. La visite des nids n'a aucun inconvénient, l'Ondulée n'abandonnant jamais sa famille, et cela permet de surveiller les couvées, d'enlever et de remplacer les femelles qui vien- draient à mourir sur leurs œufs. Ce dernier point est très important, car il faut veiller avec soin à ce qu'il y ait tou- jours autant de femelles que de mâles pour que la bonne entente règne entre toutes les couvées. La volière terminée, meublée et les grands froids passés, il ne reste plus qu'à lâ- cher les Perruches et à songer à leur alimentation en vue d'une bonne reproduction. On nourrit la Perruche ondulée de Millet, d'Alpiste et de Mouron; mais avec cet ordinaire, la captivité aidant, on a vite des sujets anémiés et des générations de dégénérés. Ce sont d'abord les grandes plumes des ailes et de la queue qui manquent aux jeunes ou qui sont coupées par les parents^ probablement pour en sucer le sang ; puis peu à peu arrive la calvitie complète. Dans le premier cas on peut encore tirer parti des jeunes, qui, sous le nom de trognons, trouvent pre- neurs, parce qu'ils servent aux marchands à tromper les amateurs peu connaisseurs à la recherche d'Oiseaux nés en France, en leur assurant que les plumes pousseront ce qui n'arrive jamais. Quand les jeunes sont complètement déplu- més il n'y a qu'à les tuer et ce n'est pas chose facile, car ils ont la vie extrêmement dure. J'ai remarqué que, plus la dégénérescence était accentuée, plus nombreux étaient les jeunes. Il faut croire que dans cette espèce les facultés prolifiques sont en raison inverse de la qualité physique des sujets. LA PERRUCHE ONDULÉE. 85 Pour obtenir de beaux produits, il ne faut donc pas se con- tenter de leur distribuer du Millet et de l'Alpiste, car si en captivité la Perruche ondulée se contente de graines il n'en est pas de même en liberté. — Les gros spécimens de cet ordre sont omnivores et font dans leurs pays des dégâts par- fois considérables. — Au moment des nichées les grosses es- pèces n'hésitent pas, en effet, à s'abattre sur les troupeaux de Moutons et solidement accrochés dans la toison de leurs victimes ils frappent avec leur bec terrible sur la tête de ces animaux jusqu'à ce qu'ils aient fait un trou suffisant pour Yider complètement la boîte crânienne. Les petits Perroquets comme l'Ondulée profitent de ce carnage et viennent manger les restes. J'ai observé le fait dans mes volières. J'ai surpris plusieurs fois des Ondulées accrochées sur le dos de Colins de Californie et cherchant à leur défoncer la tête ; mais comme le Colin est un oiseau très remuant, l'instabilité fai- sait perdre aux Perruches leurs moyens d'action, et les petits Gallinacés s'en débarrassaient assez bien. L'Ondulée a donc besoin d'une nourriture animalisée, mais laquelle? La cer- Yelle de Mouton se présente naturellement à notre esprit, mais outre qu'il faut la leur servir très fraîche pour qu'elles daignent y goûter, c'est un aliment cher, qui se corrompt ra- pidement, et n'est pas sans danger. Après bien des essais et des expériences de plusieurs années, j'ai été amené à sup- poser que c'était l'acide phosphorique de la cervelle qui était l'aliment indispensable à la Perruche ; et les résultats surpre- nants que j'ai obtenus en leur offrant une pâtée azotée, où le phosphate de chaux rendu assimilable entrait dans une cer- taine proportion, m'ont prouvé jusqu'à l'évidence que je ne m'étais pas trompé. En fournissant à l'Ondulée, en plus des graines ordinaires, les éléments toniques dont je viens de parler on obtiendra d'elle tout ce que l'on voudra. De février à novembre les couvées se succéderont dans les bûches sans interruption et on aura la satisfaction, tout en observant les mœurs si intéressantes de cet Oiseau, d'avoir des jeunes nom- breux et aussi vigoureux que s'ils étaient nés en liberté. La Perruche ondulée, une fois acclimatée et bien nourrie, est rarement malade. C'est la congestion causée par la trop grande chaleur qui, si on n'y prend garde, fait le plus de vic- times. Comme cet Oiseau ne se baigne qu'en se plaçant sous Ja pluie, il importe l'été, où les jours pluvieux sont rares, de 86 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLBLVTATION. lui fournir de temps en temps son bain privilégié, soit au moyen d'un jet d'eau soit avec un arrosoir muni d'une pomme. Quelques sujets et, plus particulièrement, les fe- melles mal nourries, qui se laissent aller à ronger les ailes et les pattes de leurs petits, sont parfois atteints de cécité com- plète. Je n'ai pu diagnostiquer ce mal, mais j'en ai trouvé le remède. Quand on trouve un Oiseau dans cet état, paupières fermées et soudées ensemble, joues déplumées, il suffit de lui badigeonner le tour des paupières avec de la teinture d'iode en prenant bien garde d'en mettre sur la suture qui les joint, et de placer le malade à l'infirmerie. Au bout de deux ou trois applications d'iode, il se forme des croûtes qui tombent, les paupières se rouvrent, et l'œil reprend bientôt son état normal. Les femelles périssent aussi au moment de la ponte, faute de soins. Quand on s'aperçoit, quelques jours après l'accouplement, qu'une femelle fait le gros dos, il y a neuf chances sur dix pour que ce malaise soit causé par l'arrêt de l'œuf. Après s'en être assuré, il suffit d'humecter d'huile la partie souffrante et de maintenir la malade quelques minutes au- dessus de la vapeur d'eau, puis de la placer dans une petite cage. Au bout de deux ou trois heures on y trouvera l'œuf, objet de l'accident. L'élevage de l'Ondulée donne lieu à un commerce impor- tant. Des grandes Perrucheries se livrent à cette industrie, qui était assez rémunératrice il y a une quinzaine d'années, époque â laquelle ces Oiseaux valaient encore 10 à 15 francs le couple. Les prix actuels de 5 fr. le couple, payant à peine les frais de nourriture, beaucoup d'amateurs ont abandonné cet élevage. Il existe parait-il deux variétés d'Ondulées, la jaune et la bleue. J'ai eu l'occasion de posséder des jaunes qui s'obtiennent en sélectionnant les sujets jaunâtres que l'on trouve quelquefois dans les couvées ordinaires et dont la cause est de l'albinisme. Quant â la variété bleue annoncée par nos voisins les Belges, je n'ai jamais pu en voir un seul sujet et je crois, jus- qu'à preuve du contraire, que c'est une autre espèce et non une variété de l'Ondulée. 87 L'ALBINISME ET LE MÉLANISME CHEZ LE CANARD S^IjY AGE (ANAS B08CHAS) (1) par Gabriel ROGERON. La domesticité est, on sait, une cause d'albinisme et de mélanisme chez les animaux ; il n'est point d'espèce depuis longtemps domestiquée qui ait pa échapper à cette loi. Cependant tous les individus dans chaque espèce n'y sont pas soumis, beaucoup s'y soustraient continuant à porter la livrée primitive (2), tandis que les autres sont plus ou moins atteints d'albinisme ou de mélanisme au point de devenir entièrement de l'une ou de l'autre de ces deux couleurs, qui peuvent d'ailleurs se combiner, se mélanger à l'inflni entre elles et avec la couleur primitive. A rétat sauvage on retrouve cependant parfois ces mêmes modifications; mais chose singulière, elles semblent avoir lieu en raison directe du voisinage et des rapports de ces animaux avec l'homme, et, chose plus singulière encore, en raison des rapports qu'ils pourront avoir plus 'tard avec lui, c'est-à-dire de leur prédisposition à la domesticité. On dirait que l'homme influe sur leur coloration, et cela en proportion de ses rela- tions avec eux. Les espèces domestiques, sous la puissance directe de l'homme et, par là même, en relations perpétuelles avec lui, sont, en effets je le repète, toutes sans exceptions soumises à l'albinisme ou au mélanisme. Mais certaines de celles qui, bien que sauvages et parfaitement indépendantes, l'approchent de très près, ne sont pas exemptes de cette influence et offrent des cas bien plus fréquents de ces sortes d'aberrations que celles qui vivent en dehors de sa sphère et loin de son voisinage. Ainsi, sans parler des Souris et Rats blancs, le Moineau qui bien que parfaitement indépendant, approche de très près (1) Mémoire lu au Congrès des Sociétés savantes le 23 avril 1897 . (2) Avec des nuances cependant presque toujours affaiblies. 88 BULLETIN DE LA SUCIÉTÉ B'ACCLIMAÏATIOM. rhômme et vit souvent de sa nourriture (1) est fréquemment atteint d'albinisme, au moins partiel. Le Choucas habitant avec nous nos cités en présente également quelquefois des cas, et il en a fréquemment des atteintes dès qu'il se trouve à l'état de captivité ; j'en ai possédé moi même qui étaient devenus en partie gris et mélangés de blanc sur le dos, les ailes et la queue; le même fait s'est reproduit chez d'au- tres personnes, tandis que je n'ai jamais été témoin des mêmes faits, même en captivité, chez les Corneilles et les Freux qui à l'état sauvage vivent plus éloignés de nous. Enfin chez les Canards, le Canard sauvage [Anas Boschas), la souche de nos Canards domestiques, est le seul de sa nom- breuse famille à revêtir assez souvent ces couleurs blanches et noires ; et ces variations de plumage sont infiniment plus communes chez les Canards qui nous fréquentent de plus près, qui habitent pour ainsi dire parmi nous, connus en Anjou sous le nom de Canards d'Etangs, que chez les Canards sauvages de passage arrivant sans doute des régions inhabitées de l'extrême Nord. Peu de Canards d'étangs sont entièrement blancs. Dans la grande généralité des cas, cette couleur envahit seulement une partie plus ou moins étendue de leur plumage, laissant le reste avec ses nuances primitives. Il est des parties du corps plus rebelles à l'albinisme ; rarement la tête en est atteinte; aussi conserve-t-elle d'ordinaire son vert éclatant. Il en est tout autrement du bas du cou où le blanc se porte de préfé- rence, élargissant le collier chez le mâle d'une façon démesurée au point d'envahir parfois le jabot en totalité ou en partie, ainsi que tout l'avant du corps de l'oiseau. La femelle d'ail- leurs, est sujette à ces mêmes transformations de son plumage gris ou blanc. Les côtés du corps, les rémiges en tout ou partie, les plumes secondaires des ailes, peuvent également être colorées de blanc. Alors, dans ce dernier cas, le beau miroir bleu, si éclatant chez les deux sexes, se trouve décoloré complètement. A voir ces taches de blanc plus ou moins étendues suivant les individus, on dirait qu'un acide répandu sur le plumage l'a décoloré par places en laissant intacts les endroits non atteints. Cependant ce n'est pas toujours le hasard qui préside dans la distribution de ces taches, il existe (1) C'est peut-être même dans celte nourriture délicate et variée qu"il faut chercher le germe de f albinisme. l'albinisme et le MÉLAiNlSME CHEZ LE CANARD SAUVAGE. 89 d'ordinaire dans cette décoloration une certaine symétrie, aussi rarement un côté de l'oiseau sera différent de l'autre, et si par exemple trois ou quatre rémiges d'une aile sont blan- ches, celles correspondantes de l'autre aile le sont aussi. Quand le Canard ou la Cane doivent être entièrement blancs, ou si le blanc doit dominer dans certaines parties du corps, dès la sortie de l'œuf il est facile de prévoir la livrée future. Les jeunes canards nouvellement éclos sur le fond jaune pâle de leur duvet sont marqués de taches brunes ré- gulières qui correspondent aux parties les plus foncées de rOiseau emplumé (1). Si ces taches sont plus ou moins absentes, c'est qu'il sera également plus ou moins atteint d'albinisme au point de devenir parfois entièrement blanc, et le blanc correspondra toujours aux endroits où le brun aura été supprimé. Le blanc, produit de l'albinisme chez le Canard, comme du reste chez les autres oiseaux qui en sont atteints, ne se modifie jamais. Je veux dire que, si par exemple c'est un mâle, les mues qui d'ordinaire apportent tant de changement dans le plumage de cette espèce, laisseront toujours ici le blanc dans toute sa pureté, tandis que le reste du corps qui n'aura pas été atteint d'albinisme revêtira suivant les mues et les saisons les nuances habituelles, de telle sorte que le jeune canard dont le plumage gris sera maculé de plusieurs taches blanches perdra à la mue d'automne toutes ses cou- leurs hormis aux parties blanches qui ne changeront pas. Il n'en sera plus ainsi, si le blanc n'est pas le produit de l'albi- nisme, mais delà coloration naturelle des mâles revêtant leur beau plumage, comme le collier blanc faisant partie de son uniforme réglementaire qui disparaîtra ou reparaîtra suivant les mues, tandis que les autres taches blanches, résultat de l'albinisme, que sa livrée pourra porter par ailleurs, seront indélébiles. Le mélanisme chez le Canard sauvage procède de même que l'albinisme dans le premier âge. Seulement le corps du jeune Canard, au lieu d'être uniformément jaune pâle, est entièrement envahi par le noir de suie, sans qu'on puisse (1) Ainsi la dessous du corps, du cou, les côtés de la face sont jaunes, et le dessus du corps est brun coupé de jaune en quatre endroits, à la place des ailes et sur les reins au-dessus des cuisses. Sur l'œil se trouve également une tache brune oblongue ; le dessus de la tête est brun. 90 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. apercevoir la moindre trace des taches symétriques que por- tent les lamellirostres de presque toutes les espèces. Mais cette couleur ne présente pas la même intensité après le pre - mier âge que le blanc chez les albinos. Une fois que les plumes ont remplacé le duvet, le mélanisme se traduit alors par un plumage seulement un peu plus sombre chez la femelle et chez les jeunes; la tête est entièrement d'un gris foncé uniforme sans lignes blanchâtres au-dessus et au-des- sous des yeux comme chez la Cane sauvage, le reste du corps est également de couleur uniforme ; il ne s'y trouve plus ces nuances plus pâles qui correspondent aux parties jaunes du jeune oiseau en duvet. Quant au miroir de l'aile, il a perdu sa couleur bleu éclatant, pour devenir entièrement d'un noir plus ou moins velouté et foncé suivant les individus. Mais là ne s'arrête pas la différence avec l'albinisme qui est toujours immuable quels que soient le sexe et la saison. Ainsi le mâle, à la seconde mue, revêtira le beau plumage de sa race, mais néanmoins avec de notables changements. Il aura la tête et le cou verts, le corps cendré, le dos et le croupion noirs, seule- ment il lui manquera plusieurs pièces de l'uniforme régle- mentaire : le collier blanc, le plastron marron et le miroir bleu. Le marron du jabot aura été remplacé par le cendré, lequel a envahi toute la partie antérieure du corps pour se souder directement au vert du cou et absorber également le petit collier blanc ; le miroir bleu de l'aile continuera à être remplacé par du noir velouté. On rencontre fréquemment sur nos marchés ces Canards atteints de mélanisme. La plupart proviennent, de même que ceux atteints d'albinisme, de nos étangs et marais où ils sont d'ordinaire sédentaires. Mais ces cas d'albinisme et de mélanisme, beaucoup plus fréquents chez nos Canards d'étangs que chez les Canards de passage, deviennent encore infiniment plus nombreux dès qu'on les possède à l'état de captivité (l),même si ces Canards apprivoisés appartiennent aux plus pures races de passage, ainsi que je vais chercher à le démontrer par quelques exem- ples qui me sont personnels. Le premier cas d'albinisme qui s'est produit chez moi n'a- vait pas néanmoins eu lieu parmi des Canards de bien pure race; plus tard il en fut autrement. Mais il- me semble plus naturel de procéder suivant l'ordre des dates. (1) Ou même simplement apprivoisés et jouissant de leurs ailes. L'ALBINISME ET LE MÉLANISME CHEZ LE CANARD SAUVAGE. 91 Je possédais alors plusieurs couples de ces Canards connus en Anjou sous le nom de Cmiards de chasse ou d'appel, oiseaux domestiques d'une race très près de la sauvage, dont se servent nos chasseurs de profession, très nombreux chez nous l'hiver en raison des cours d'eau et rivières sillonnant notre région en tous sens. Ces sortes de Canards, vivant à l'état libre dans nos marais une grande partie de l'année , contractent, en effet, de temps à autre avec les Sauvages des alliances qui les rapprochent constamment du type, de même les chasseurs, par de sévères sélections, tendent au même résultat; car c'est à la condition de ressembler le plus pos- sible aux Sauvages que ces derniers, trompés eux-mêmes par une telle similitude, s'abattent pleins de confiance près d'eux, à portée de la hutte du chasseur. Ainsi, par la grosseur, la couleur, le vol même (cette race vole également très bien), ne diffèrent-ils guère des vrais Sauvages ; seul un œil exercé peut les reconnaître à leurs formes plus lourdes, moins dis- tinguées. Je possédais donc depuis plusieurs années un certain nom- bre de ces oiseaux, qu'en ma qualité d'amateur de Canards j'avais tenu à avoir de la plus belle race, et cela sans que jamais encore, dans les couvées obtenues, il se fût produit la moindre incorrection, la moindre bigarrure ou tache blanche en leur costume gris. Mais, un printemps, je ne fus pas peu surpris de trouver une couvée d'une jeune Cane, qui pondait pour la première fois, parfaitement partagée en cinq canetons gris qui plus tard, en s'emplumant, prirent dans toute sa rigueur la livrée des Canards sauvages sans aucune trace de blanc, et cinq autres qui^ atteints d'albinisme complet, de- vinrent de ravissants petits Canards de la taille de leurs frères et volant aussi bien qu'eux, mais entièrement d'une blancheur immaculée. Cette Cane, tant qu'elle vécut chez moi, c'est-à-dire plusieurs années, ne manqua jamais de me donner désormais des couvées à peu près également parta- gées de Canards parfaitement gris et de Canards entièrement blancs, et cela bien que je ne possédasse aucun mâle blanc et qu'il n'y en eût pas non plus dans le voisinage. Malheureuse- ment, je n'attachai pas alors toute l'importance qu'il méritait à ce fait bizarre; je me défis toujours de ces albinos cepen- dant fort jolis, sans tenter de les faire reproduire entre eux ou avec des Canards gris. 92 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. Quelques années plus tard, j'avais remplacé mes Canards de chasse par des Sauvages, ou plutôt à proprement parler, je les avais transformés en vrais Sauvages, et voici comment. Je m'étais procuré un magnifique Canard sauvage de passage, blessé â la chasse, et je l'avais accouplé avec une très belle Cane cC appel. J'en avais eu des produits ayant les caractères de vrais Sauvages. Mais afin de posséder encore une race plus pure, j'accouplai de nouveau une de ces Canes demi- sang avec le même Canard sauvage. J'en obtins alors des Canards ne laissant absolument rien à désirer comme forme, comme coloris, et pouvant lutter pour l'élégance et le plu- mage avec les plus purs Sauvages. Ces Canards me donnè- rent également les années qui suivirent plusieurs couvées d'oiseaux irréprochables comme ils étaient eux-mêmes, mais il y eut une exception ; une Cane pour sa première ponte eut une douzaine de canetons dont cinq ou six portaient la livrée des Sauvages, tandis que les autres étaient jaunes sans au- cune des taches brunes ordinaires. Malheureusement, par suite d'accidents divers, je ne pus élever aucun de ces Ca- nards et je perdis la mère elle-même dans le courant de l'année ; mais il est évident qu'une partie de la couvée eût dû être entièrement blanche comme la première fois, tandis que les autres petits eussent pris la livrée ordinaire des Sau- vages. Peut-être cet albinisme était-il dù aux croisements successifs et consanguins que j'avais imposés à mes oiseaux, peut-être aussi ces sortes de croisements sont-ils la cause générale de cette anomalie si fréquente parmi les races do- mestiques. D'après ce qui s'est passé chez moi pour ces différents cas d'albinisme, il me paraît assez naturel de penser qu'à l'origine du moins, soit en captivité, soit à l'état sauvage, l'albinisme ne doit pas être partiel mais général, étendu au corps entier de l'oiseau. Je veux dire que l'albinos n'a pas dù naître dans le principe taché de blanc et de gris, mais entièrement blanc (1). Les Canards entièrement blancs seraient les pre- miers produits de l'albinisme dans la pureté duquel ils ne maintiendraient pas leur postérité, étant forcés par leur ra- (1) Ou entièrement elteint de décoloration générale plus ou inoins prononcée, avec les nuances et dessins prinailils de plumage plus ou moins noyés dans un fond de teinte blanche ou jaune, car souvent le jaune est le produit de l'albi- nisme imparfait. L'ALBINISME ET LE MÉLANISME CHEZ LE CANARD SAUVAGE. 93 reté même de s'accoupler avec des Canards gris, et ainsi ils seraient la souche première des nombreux Canards bigarrés, lesquels se reproduiraient dans les mêmes conditions de bigarrure. C'est pour cela, je le répète, que je regrette vivement de n'avoir pas conservé mes albinos. J'eusse pu ainsi avoir sous les yeux la preuve de ces transformations présumées, en les accouplant avec des Canards gris, et voir de la sorte quels en auraient été les produits, s'ils auraient pris des deux côtés et par là même s'ils auraient été revêtus de taches des deux couleurs de leurs parents, comme je le présume. Les cas de mélanisme ont encore été plus nombreux dans mes élevages que ceux d'albinisme et de plus ils continuent à se renouveler chaque printemps. Il y a une dizaine d'années, j'avais fait venir du Jardin d'Acclimatation une fort belle Cane sauvage que j'accouplai avec un Canard sauvage, très beau également, lequel était non seulement sauvage de race, mais aussi de fait, car il avait été pris adulte à l'état libre et ce n'était qu'après long- temps et beaucoup de peines que j'étais parvenu à l'appri- voiser. J'eus de ce couple plusieurs couvées, mais au bout de peu d'années je perdis la femelle qui périt en me laissant, néanmoins, un certain nombre de Canes aussi belles que leur mère. Un beau jour, je ne fus pas peu surpris de voir une de ces Canes qui avait été nicher dans les prés, me ramener une douzaine de petits dont la moitié portait la livrée des jeunes Canetons ordinaires, mais dont l'autre moitié était composée de petits Canards entièrement noirs de suie, le corps, le bec, les pieds, tout était noir sans aucune tache. N'ayant point alors l'expérience de ces Canards, j'espérai longtemps que ces petits négrillons seraient bon teint et me donneraient des Canards noirs comme des Labrador. Mais quand apparurent les premières plumes ma désillusion fut grande, et je pus voir avec regret que celles-ci ne poussaient pas noires, mais bien grises, un peu plus foncées seulement que d'ordinaire. J'élevai tous ces Canards. Ceux qui dans le premier âge avaient porté la livrée commune devinrent des Canards sauvages du type le plus pur comme leurs parents ; / les autres, les noirs, prirent un plumage à peu près sembla- ble, un peu plus brun cependant, mais avec ces différences 94 BDLLETLN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. caractéristiques dont j'ai parlé plus haut, que le miroir bleu de l'aile était changé en noir et que la tête était devenue uni- formément d'un gris foncé sans aucune de ces bandes, de ces nuances plus pâles correspondant d'ordinaire aux parties jaunes des jeunes en duvet et qui relèvent la tête des autres Canards, car ces nuances différentes sont comme les traits du visage ne contribuant pas peu à leur donner, surtout à la Cane, une physionomie jolie et fine, tandis qu'ici cette teinte sombre et uniforme inflige à ces sortes de Canards un air moins agréable et même un peu maussade. Je gardai une partie de ces Canards jusqu'à la seconde mue. Les femelles restèrent les mêmes, quant aux mâles, ils revêtirent un costume incomplet du Canard sauvage, tête et cou d'un vert brillant, corps cendré, dos et croupion d'un noir velouté; mais plusieurs parties essentielles de l'uniforme réglementaire manquèrent. Le noir continua toujours à rem- placer le bleu du miroir de l'aile comme dans le jeune âge ; le petit collier blanc et le large plastron marron disparurent également envahis par le cendré du corps s'étendant jusqu'au vert du cou. L'année suivante, assez désireux de voir quelles sortes de produits ces Canards pouvaient me donner et si leur descen- dance persisterait dans ce mélanisme relatif, ou retournerait à l'état normal, je laissai couver une des Canes. La nichée qui était nombreuse réussit parfaitement et eut pour résultat moitié Canetons entièrement noirs et moitié ordinaires. Pen- dant ce temps- là, une autre Cane sauvage, sœur de la précé- dente, de la même couvée, mais de celles qui n'avaient pas été atteintes de mélanisme et semblait de la plus pure race, Cane à laquelle je ne songeais ni n'apportais la moindre atten- tion, m'amenait des prés où elle avait été nicher une couvée toute semblable, de même composée de noirs et de gris. Depuis ce temps-là, toutes mes Canes sauvages atteintes ou non de mélanisme (mais, il est vrai, toutes parentes) man- quent rarement de m'amener de ces couvées également ou presque également partagées de Canards entièrement noirs et de Canards sauvages ordinaires ayant toutes les appa- rences de la pure race ; car jamais aucun de ces derniers n'a eu encore la moindre trace extérieure de mélanisme, bien qu'ils en eussent eu, eux, évidemment, les germes ; si je les conservais, ils me donneraient sans doute de même une par- L'ALBINISME ET LE MÉLANISME CHEZ LE CANARD SAUVAGE. 95 tie de leurs petits dans des conditions normales, tandis que les autres seraient, au moins dans les premiers âges, abso- lument nègres. Et cette année encore le même cas s'est reproduit chez moi; tandis qu'une Cane atteinte de mélanisme me donnait neuf petits dont quatre ordinaires et cinq noirs, une autre, celle-là nullement affectée de cette singulière anomalie, fai- sait deux couvées ce printemps, dans chacune desquelles les petits étaient également partagés en noirs et en gris(l). Un fait singulier dans ces différents cas de mélanisme, c'est la façon rigoureuse avec laquelle sont triés entre eux en une même couvée les gris et les noirs, sans que les uns parti- cipent en quoi que ce soit des autres, sans que les parties brunes et jaunes de Canetons gris soient nullement noircies et se ressentent tant soit peu de la parenté des frères nègres, qui eux de leur côté restent tous d'un noir uniforme sans la moindre altération dans leur duvet, sans la moindre trace de la coloration des autres. Mais ce qui n'est pas moins bizarre, c'est l'habitude chez ces couvées de se partager en nombre de petits à peu près égal de chacune des deux sortes, car sur une couvée d'une douzaine de petits il est rare que les gris l'emportent de plus d'un ou deux sur les noirs, et réci- proquement. Bien avant que ces faits se fussent ainsi produits chez moi, j'avais observé ces sortes de Canards, ces Canes grises sans miroir bleu, et ces mâles sans miroir également ainsi que sans plastron marron. Je les rencontrais tant parmi nos Ca- nards d'appel si voisins, je l'ai dit, des Canards sauvages, que parmi les Canards a" Étangs, mais rarement parmi les Sau- vages de passage, si ce n'est au moment des grands froids où les étangs étant gelés les Canards qui les habitent sont éga- lement obligés de se mettre en voyage. Mais j'étais loin de me figurer que ces Canards étaient noirs dans leur enfance ; ano- malie extrêmement singulière chez des palmipèdes gris, (1) Un fait curieux s'est produit à propos de celte dernière Caue que je pos- sède depuis ciaq ou six ans. Elle n'a cessé, sauf une exception, de me donner chaque année de ces couvées à peu près égalemeut partagées en Canetons nègres et Canetons ordinaires. Et voici l'exception : un printemps s'étant ac- couplée avec un Pilet, il en est résulté neuf mélis que j'ai élevés et dont aucun n'a eu la moindre atteinte de mélanisme {Bulletin, février 1896. Le sang Pilet avait, semble-t-il, fait disparaître chez cette Cane toute trace de cette anomalie héréditaire. 96 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. puisque non seulement la plupart des espèces de Canards, mais d'Oies et de Bernaclies, naissent tachés de couleurs plus ou moins brunes sur un fond plus pâle. J'attribuais cette lé- gère différence de plumage à la domesticité, à la fréquenta- tion plus grande de nos Canards domestiques par les Sau- nages sur nos étangs. Je me rappelle même qu'autrefois un de mes parents avait reçu d'un ami pour mettre sur sa pièce d'eau trois ou quatre couples de Canards sauvages venant de l'étang de Passavant en Maine-et-Loire, et qu'en ayant aperçu parmi eux plusieurs de cette sorte, je fus mal édifié sur la pureté de leur race ; je me figurais qu'ils n'étaient pas sau- vages ou provenaient tout au moins d'un croisement avec des Canards domestiques. Ces Canards cependant, malgré leur différence de livrée, soit dans leur jeune âge où elle est plus sensible, soit à l'état adulte, sont cependant de purs Sauvages et si vraiment sau- vages malgré cela, que ce plumage, n'est, pour ainsi dire, qu'un travestissement accidentel, puisque de ces Canards, sans transition aucune et dès la première génération, peuvent naître des Canards portant le plus classique plumage de l'es- pèce. Des faits de même nature se produisent, d'ailleurs, chez d'autres Oiseaux, entre autres, les Tourterelles à collier. J'en ai, en effet, connu un couple donnant presque alternativement des petits, couleur de leurs parents, c'est-à-dire couleur café au lait, et des petits absolument blancs. Et voici pourquoi il est fâcheux que je n'aie pas, autrefois, conservé mes albinos, non seulement pour connaître, comme je l'ai dit, leurs produits avec les Canards gris, lesquels auraient été bigarrés, je les présume, mais encore pour les croiser entre eux, afin de voir si leur albinisme était mieux fixé que chez les Canards atteints de mélanisme, ou si, au contraire, il n'était, comme chez eux, qu'accidentel ; si, en un mot, leur progéniture aurait pu revenir d'un seul coup à la couleur primitive, comme on vient de voir pour mes Canards noirs ; ce dont je doute fort, car nos Canards domestiques blancs qui n'ont pas eu. je pense, d'autre origine que les miens, se perpétuent indéfiniment dans cette même couleur. 97 ESSAIS D'ACCLIMATATION EN INDO-CHINE (1) par PARIS. Jadis ragriculture était appelée l'art de seconder la na- ture ; aujourd'hui j'oserais presque dire que c'est la science de lutter contre elle, contre tous les facteurs de destruction qu'elle multiplie avec une ubiquité que nous ne pouvons mal- heureusement lui opposer dans la résistance. Des maladies parasitaires surgissent spontanément sur plusieurs points du globe pour exterminer la même plante. Et il ne faut rien moins que le concours des sciences appli- quées pour chercher à tuer ces infiniment petits si terribles par le nombre. C'est le cas de VHemileia vastatrix qui a détruit les caféières de Ceylan et qui attaque à la fois celles de l'Amérique, de la Réunion et de Java. Quelquefois on croirait que le sol, découragé de nourrir seul une même famille, lui rationne graduellement les vivres, et tous les membres de cette famille étiolée ne donnent plus que des produits chétifs et sans qualités. C'est le cas de la plupart des produits d'Annam. Ainsi le thé, qui est de la même famille que celui d'Assam, lui est devenu inférieur, parce que l'Annamite, le voyant également croître dans les sables et les argiles et lui attri- buant une vitalité excessive, le dépouille tous les ans comme il plume ses poulets vivants, jusqu'à la carcasse. De sorte que ce précieux arbuste qui pourrait recevoir des formes gra- cieuses et fournir des feuilles délicates, si on lui conservait quelques éléments de vitalité, ressemble là-bas à une réduc- tion de bouleau sans tête. La sélection s'étant opérée, les arbustes les plus chétifs ont succombé, et les autres, devenus rustiques à ce régime, fournissent toujours des feuilles con- tenant de la théine, mais elles sont dures et sans saveur. Il en est de même des plantes et des arbres fruitiers qui, mal soignés, privés de leurs fruits avant maturité, contrariés sans cesse dans leur évolution, donnent des produits anémiés, (1) Communication faite à la Section coloniale [séance du mois de mars], Bull. Soc. nat. Accî. Fr. 1898. — 8. 98 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLLMATATION. qui n'ont avec leurs congénères d'autres lieux, des Antilles et de Java, par exemple, qu'une similitude organique. Telles sont la Canne à sucre, le Coton, la Goyave, la Mangue, etc. Pour enrayer cette dégénérescence, comme pour résister aux invasions parasitaires, deux moyens sont à notre portée, exigeant tous d'eux une grande persévérance dans la re- cherche des résultats. Le premier, c'est de rendre à la plante ses qualités primitives par des soins particuliers, ce qu'on tente de faire en Annam pour le Thé. — Le second, de beau- coup préférable parce qu'il est plus radical, c'est de remplacer la famille atteinte par une congénère exotique mieux favori- sée. C'est, je crois, ce qu'on fait en France pour la vigne. Mais la plante qu'on veut acclimater ne trouve pas toujours dans son nouvel habitat les conditions d'existence qui lui sont indispensables, elle se trouve parfois soumise à de singulières endémies et produit souvent des fruits ou des rejetons aj-ant, dès la première année, les caractères d'étiolement de leurs congénères indigènes. Telle est, par exemple, la Tomate, qui semée de graine française, devient appétissante et grosse comme elle l'eût été en France, mais si l'on emploie ses graines pour la reproduction, elle ne donne plus que des fruits annamites à peine gros comme une noix. J'ai fait des observations analogues sur le Coton, bien que je ne présente pas l'expérience comme définitive. J'ai essayé à plusieurs reprises de semer du Coton dans différents ter- rains, les graines, qu'elles fussent de Géorgie ou d'Egypte, ne m'ont donné la seconde année que des tiges petites et char- gées d'un nombre insuffisant de gousses, comme si elles eussent été le produit d'un coton indigène. Parmi les arbres fruitiers, je citerai le Mangoustanier qui croît dans une zone étroite de la Cochincliine et de la pénin- sule malaise. J'ai semé dans mes pépinières de Café plusieurs graines de Mangoustans cochinchinois, je n'ai pu obtenir que les deux feuilles cotylédonaires, et après cet effort qui avait demandé un an, les jeunes plantes ont péri. Ces difficultés d'acclimatation proviennent non seulement de ce que les limites entre les zones tempérées et torrides ne peuvent être complètement négligées, mais souvent aussi de la présence d'un facteur morbide, dans le sol ou le climat, comme pour le Mangoustan et le Coton. Quand les végétaux que nous voulons acclimater provien- ESSAIS D'ACCLIMATATION EN INDO- CHINE. 99 nent d'un pays de latitude et de climatologie analogues , la tâche est bien plus facile et le résultat moins aléatoire. C'est ainsi que des graines de Thé que j'ai rapportées de ma visite à l'île de Java et que j'ai semées en terre d'Annam, m'ont donné des Théiers beaux et vigoureux. Des spécimens d'arbres à pain et de Sapotilliers, n'existant pas en Annam, de Jaquiers, de Goyaviers et de ces superbes Manguiers de Sourabaya, que je devais à l'obligeance du docteur Treub, directeur des vastes champs d'acclimatation de Buitenzorg, ont pris en Annam un essor qu'on ne pouvait désirer plus florissant. Lorsque je fis mes premiers essais d'acclimatation du Café, je choisis le Libéria comme étant le plus vigoureux, et partant le plus apte à résister aux maladies parasitaires. On avait fait à ce Café, et on lui fait encore, une réputation de médiocrité qu'il ne mérite pas. — C'est en jouant des coudes qu'il doit prendre sa place au marché. — J'ai récolté à Phong-Lé près de Tourane, du Café Libéria dont l'infusion a été déclarée su- périeure par de nombreux amateurs et spécialistes. Mais pour obtenir ce résultat, il m'a fallu veiller sur l'ar- buste transplanté comme sur un jeune enfant. Le Libéria exige des soins qui diffèrent avec la météorologie de son lieu de transplantation. En général, il lui faut de la fraîcheur sans excès aux racines, et une ombre légère, dans les régions comme l' Annam où la saison chaude est en même temps la saison sèche. Au Tonkin, où les pluies coïncident avec les chaleurs, le Libéria n'a pas besoin d'abri. C'est parce que ces principes ont été méconnus que les Caféiers Libéria du Jardin botanique de Hanoï, plantés dans un bas-fond et trop ombragés, ont donné des tiges élancées peu garnies de bran- ches et de fruits, et que les feuilles respirant dans une atmos- phère constamment humide, n'ont pu résister à VHemileia vastairix dont cette atmosphère favorise la génération. Je dois cependant remarquer que, malgré leur emplacement défa- vorable, les Cafés Libéria étaient moins atteints que leurs similaires plus délicats, Java, Arabica, etc., mieux exposés. L'acclimatation du Caféier en Indo-Chine est une question vitale qui devrait passionner tous les chauvins de la colo- nisation, c'est une question de fortune pour la colonie et d'af- franchissement pour la métropole. Je ne crois pas encore cette acclimatation résolue au BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ L'ACCLIMATATION. Tonkin, pour deux raisons : P l'atmosphère trop humide favo- rise la manifestation de VHemileia et rend difficile le })arfait séchage de la graine; 2'^ la fructification n'est pas rationnelle. Lorsque j'ai visité le Jardin d'essai de Hanoï, en décembre 1896, c'est-à-dire, pendant la saison froide, les fruits des Caféiers n'étaient pas cueillis, alors qu'ils auraient dû, comme presque tous les fruits d'ailleurs, mûrir pendant l'été. Les grains de Café sont généralement bons à cueillir un an après la floraison ; ils ont besoin, pour élaborer l'huile essentielle qui leur donne cet arôme que nous aimons, de la plus forte action solaire. Il faut donc absolument que ces graines soient mûres, au plus tard, sur le déclin de la saison chaude. Voici comment je m'explique l'irrégularité de la végétation du Caféier au Tonkin D'après Van Delden, auteur hollandais très compétent, il faut à cet arbuste une température mini- nimum de 15'' ; le thermomètre descendant à 6° au Tonkin, la végétation du Caféier s'y trouve arrêtée pour une certaine durée à chaque hivernage, et l'évolution annuelle du fruit retarde de plus en plus jusqu'à devenir tout à fait troublée. En Annam, où la mousson chasse l'humidité et où le ther- momètre ne descend pas au-dessous de 15», je n'ai constaté aucune trace d'Hemileia, et les graines mûrissent régulière- ment d'avril à juillet. L'acclimatation du Caféier y est donc un fait acquis. J'ajouterai encore un mot sur le Libéria. J'ai vu dans ce même Jardin d'essai de Hanoï, une expérience heureuse de greffage d'Arabicas sur des Libérias. L'arbuste avait la robus- tesse de l'un et ses fruits sensiblement la forme délicate de l'autre. C'est sur cet hybride que finiront par s'entendre producteurs et importateurs. Mais les premières plantations d'hybrides seront un peu longues à établir, car il faudra d'abord greffer quelques sujets, et attendre quatre ans qu'ils donnent des fruits pour en former alors une pépinière. Voilà tout ce que je puis dire sur les essais d'acclimatation que j ai étudiés en Indo-Chine. Il y en a eu d'autres, sur la vigne et le foin notamment, mais le vague de mes observations ne me permet pas d'en faire état, car le vague est bien près du faux. 101 EXTRAITS ET ANALYSES. L'Établissement de Pisciculture d'Ancourt (Seine-Inférieure). Cet établissement, dont les débuts furent modestes, peut être actuel- lement considéré comme sorti de la période des tâtonnements et des de'penses pour entrer dans celle de Texploilalion industrielle. Le pro- priétaire, M. E. Duponchez, l'a installé à côté d'une importante blan- chisserie qu'il possède sur les bords de l'Eaulne, dans une île que forme cette rivière, au milieu même du village d'Ancourt, à huit kilomètres de Dieppe. Ayant eu occasion de lire l'ouvrage de M. Larbalétrier sur la pisci- culture, M. Duponchez trouva qu'il disposait de tout le nécessaire pour tenter un essai. L'Eaulne, au re'gime régulier, lui offrait ses eaux limpides, et dans son jardin, ainsi que dans une prairie attenante, pouvaient être créés viviers et bassins d'élevage. II commença, en 1891, par établir un vivier de 40 m. de longueur sur 4 m. de largeur et 0i"80 de profondeur, creusé tout près de la rivière et mis en communication avec elle en amont et en aval. Quand ce vivier fut terminé en mars 1892, la saison étant trop avancée pour l'achat d'œufs fécondés, il se procura des alevins de Truite, qu'il plaça dans une auge du système Coste, vers la partie amont de son bassin, attendu que l'écartement des barreaux des grilles posées à l'entrée et à la sortie du bassin (écarlement imposé par le service des Ponts et Chaussées) se trouvait trop grand pour empêcher les jeunes poissons de s'échapper. Malheureusement cette auge avait été instal- lée sur une sorte de glacis, afin que le courant fiit plus vif; par suite d'une baisse subite survenue dans le niveau de l'eau, elle resta à sec et tous les alevins furent perdus. Ce premier déboire devait être suivi de bien d'autres. Pour la campagne 1893, M. Duponchez construit un laboratoire d'incubation, et fait éclore 30,000 œufs achetés chez ditlérenls pisci- culteurs. Il en perd plus de la moitié pendant la résorption de la vésicule vitelline, et il met les 8,000 alevins qui lui restent dans un compartiment établi dans son vivier. Mais la mauvaise chance inter- vient encore, cette fois, sous forme d'une fissure que creuse l'eau dans cet enclos, et un jour il constate qu'il n'a plus d'alevins, ni dans son compartiment ni dans son vivier. Le résultat final de cette opéra- tion, malheureuse pour le propriétaire, fut l'empoissonnement de BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. TEaulne; car à la suite de Taccident on constata la présence d'un plus grand nombre de jeunes truites dans le voisinage. En 1894, nouvel achat d'œufs embryonnés. Toutes les précautions nécessaires sont prises pour éviter les accidents précédents; mais la fonte des neiges trouble l'eau d'alimentation du bac d'alevinage, et, maigre l'emploi de filtres à éponges, entraîne la mort de tous les jeunes poissons. Entre temps, M. Duponchez avait essaye' de faire reproduire en captivité des Truites pêchées en rivière; mais probable- ment à cause du changement de milieu, celles-ci ne fournirent qu'une petite quantité d'œufs qui, toutefois, donnèrent des sujets bien portants. Résolu à réussir à tout prix, M. Duponchez se décide, pour 1895, à faire de nouveaux aménagements. Il se fait autoriser à établir une de'rivation de l'Eaulne dans son jardin, et creuse, tout auprès, un puits de 2"^50 de profondeur; celui-ci lui donne une eau abondante, et ayant une température constante de 9*^. Sur la dérivation, il place une roue hydraulique destinée à faire mouvoir une chaîne à godets de son invention, qui puise l'eau de la source afin d'alimenter le labora- toire d'incubation et deux rangées de bacs d'alevinage. Il achète alors 10,000 œufs embryonnés : 5,000 de Saumon de fon- taine, 2,000 de Truite arc-en-ciel ordinaire et 3,000 de Truite arc-en- ciel à ruban rouge. L'éclosion réussit à merveille; la résorption se fait avec seulement un dixième de perte; il élève ses alevins jusqu'à trois mois dans son laboratoire, puis les verse dans ses bacs d'alevinage. Au mois de septembre, il constate que beaucoup de ses poissons meu- rent. Attribuant celte mortalité à la nourriture composée de sang de bœuf, il y substitua de la rate. Il avait pensé juste, car, au bout d'une huitaine de jours, toute mortalité avait disparu. Les survivants ont aujourd'hui trente mois et servent de reproducteurs. En 1896, M. Duponchez achète encore 6,000 œufs, qui, traités comme les précédents, donnent encore de bons résultats. Enfin, en novembre 1897, il constatait que ses jeunes Saumons de fontaine étaient sur le point de pondre. Les œufs fécondés artificielle- ment et mis dans le laboratoire, éclosent assez bien ; toutefois il se produisit un déchet plus grand que les années précédentes, fait attri- buable sans doute à la jeunesse des reproducteurs. Quoiqu'il en soit, les alevins obtenus sont aujourd'hui bien portants et ne demandent qu'à vivre. Disons en passant que la moitié des œufs obtenus, soit 6,000, ont été expédiés à la station piscicole de Bordeaux, par l'inter- médiaire de M. Morin, pisciculteur aux Andelys. Deux mots maintenant sur les installations. Le laboratoire d'éclosion, situé à droite de la blanchisserie, rappelle un peu la disposition des serres en usage chez les horticulteurs- Après avoir descendu quelques marches, on trouve, de chaque côté d'une allée, les bacs d'éclosion disposés sur des gradins. L'eau fournie par EXTRAITS ET ANALYSES. 103 une dérivation provenant de la source mentionnée ci-dessus, est à une tempe'rature sensiblement constante de IP ; elle coule de bac en bac et se brise en tombant dans une espèce d'entonnoir extérieur, qui l'amène dans la partie inférieure du bac ; elle sort, du côte' opposé, à la partie supérieure. Ce système est préfe'rable au système Gosle, parce qu'il renouvelle l'eau dans toute la profondeur sans nuire aux œufs. Dans un angle du laboratoire sont range'es les terrines servant à la récolte des œufs et à leur fécondation. Les jeunes alevins restent dans le laboratoire jusqu'à l'âge de trois ou quatre mois, puis sont verse's dans les bacs d'élevage. Ces bacs sont disposés perpendiculairement à la dérivation du bras gauche de l'Eaulne faite en 1894. Une roue hydraulique à palettes met en mouvement une pompe à godets puisant l'eau dans le puits creusé prés de là. Cet appareil élévatoire très simple a été imaginé et exécute' par M. Duponchez, il est très solide et ne s'est jamais dérangé. Son de'bit est de 100 litres à la minute. L'eau est reçue dans un petit châ- teau d'eau, d'où elle tombe en mince filet pour s'aérer; de là elle passe dans le premier bac. Une partie peut en être distraite et envoyée au laboratoire d'éclosion. Les bacs d'élevage sont placés sur deux rangées parallèles, séparées par un passage de 1 m. de large. Le bac n*' 1, peu profond, est planté de cresson; son rôle est d'aérer l'eau; il est séparé du n" 2 par une brique de champ ; une grille à barreaux très rapprochés permet le passage de l'eau. Tous les bacs d'élevage ont une profondeur de l^SO; les n^s 2, 3, 4 et 5 sont plus petits que les trois autres, car dans les premiers on met les jeunes poissons, tandis que dans les derniers sont des Truites et des Saumons pesant déjà presque le demi-kilog. Voici quel était le contenu de ces bassins au mois de juin 1897. Dans le n° 2, alevins de Saumon de fontaine et de Truite arc-en- ciel âgés de six mois; dans 3, 4 et 5, Saumons et Truites arc-en-ciel de dix-huit mois; dans le n° 6, Saumons de fontaine, reproducteurs femelles; dans le n'* 7, Truites arc-en-ciel de trente mois; dans le n° 8, Saumons et Truites arc-en-ciel, reproducteurs mâles âgés de trente mois. Dans le vivier situé au fond de l'herbage sont des Truites et des Saumons qui serviront de reproducteurs en temps utile. C'est là que 1 on doit mettre les poissons au sortir des bacs d'élevage, en attendant la vente. M. Duponchez nourrit ses élèves de la façon suivante : les tout jeunes reçoivent des larves de Cousins, qu'on obtient en disposant des baquets remplis d'eau près de la rivière. Plus tard on leur donne de la pulpe de rate dans de petits plats de porcelaine qu'on immerge dans les bacs d'alevinage. Quand les poissons sont assez gros, cette nourriture est remplacée par des boyaux de mouton. BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. Il est curieux de voir distribuer celte nourriture sur laquelle les poissons se jettent avidement et qu'ils dévorent en un clin d'oeil. Dans l'installation de son établissement, M. Duponcbez a fait tout par lui-même; il a été tour à tour arcbitecte, terrassier, maçon, forge- ron, selon les besoins du moment. Cette installation lui aurait coiilé certainement quatre fois plus, s'il ne s'était pas ainsi chargé de la main-d'œuvre. Pendant la nuit tous les bacs d'alevinage sont fermés par des barreaux en fer forgé, et, pour défendre ses poissons contre les maraudeurs, il a inventé des dispositifs qui, au moyen de fils élec- triques, relient son vivier à sa maison d'babitation. La nuit, dans l'obscurité, il serait difficile de passer près du bassin sans déranger un des fils et sans mettre la sonnerie en mouvement. Il faudrait d'ail- leurs, pour arriver au vivier, franchir une palissade de 2 mètres. La propreté étant une condition indispensable du succès en pisci- culture, rien n'a été me'nagé sous ce rapport. Des grillages super- posés empêchent les moindres de'tritus de pénétrer dans les bacs d'ale- vinage. Le nettoyage de ces grilles demande une surveillance conti- nuelle, afin que le courant de l'eau d'alimentation ne soit pas gêné. Pour enlever les déjections, les poissons morts ou pour prendre un alevin au fond des bacs, M. Duponchez a inventé un instrument spé- cial. C'est une sorte de grande pipette en cuivre, dont le réservoir, qui peut contenir 3 litres environ, se prolonge, à la partie inférieure, par un tube recourbé, de 2 centim. de diamètre et long de 50 ceulim. environ; et à la partie supérieure, par un tube droit de même dia- mètre et d'une longueur de 2 mètres, qui forme le manche : on bouche avec l'index l'extrémité' supérieure de ce tube, et l'on plonge dans l'eau l'appareil qu'on approche des de'tritus à enlever; et il suffit de soulever légèrement le doigt pour que l'eau, se précipitant dans la pipette, les y entraîne avec elle. X Le Saumon de Californie a l'École de Viticulture de Beaune. Extrait d'une note de M. J. Voirin, professeur à TÉcole. Il a été beaucoup question, dans ces dernières années^ du Saumon de Californie, ou Saumon quinnat du Pacifique. Cette espèce, qui semble atteindre des dimensions plus fortes que le Salmo salar du bassin de l'Atlantique Nord, présente l'avantage de frayer très tôt, c'est-à-dire aux environs du mois d'août. A la fin de l'année dernière, arrivèrent d'Amérique, par les soins de la Socie'të nationale d'Acclimatation, 100,000 œufs embryonncs de ce Saumon. L'Ecole de viticulture de Beaune ayant eu la bonne fortune EXTRAITS ET ANALYSES. d'en obtenir environ 10,000, nous fûmes à même de suivre de près le développement de ce Poisson. Les œufs dont il s'agit parvinrent à l'École de Beaune le 31 décem- bre 1896 en parfait état, dans une boîte à double paroi, suivant le mode d'emballage adopte par la Société d'Acclimatation. Ils étaient d'une grosseur remarquable, et l'on y pouvait reconnaître les deux points noirs formés par les yeux de l'embryon paraissant à travers l'enveloppe de l'œuf. Mis en incubation immédiatement, leur éclosion commença le 5 janvier 1897 pour se terminer le 26. La mortalité n'a- vait pas dépassé 2 %• En effet, le nombre des œufs envoyés était exactement de 9,750, desquels il faut défalquer 120 morts et 223 qui ont péri pendant l'incubation, ce qui donne un chiffre final de 9,407. Afin d'essayer de nous rendre compte de l'influence de la tempéra- ture sur réclosion, nous avons noté soigneusement chaque jour la température de l'eau ainsi que le nombre d'éclosions, et voici les chiffres que nous avons pu recueillir : 5 janvier G — 8 — , 9 — 10 — 11 — 12 — 13 — . 14 — , 15 — Température Nombre de l'eau, d'éclosions. 10° 150 9° 92 8° 200 10« 400 11° 500 9,5 400 12,5 500 8,5 500 9^^ 600 5.5 200 6,5 400 16 janvier 17 — 18 — 19 — 20 — 21 — 22 — 23 — 24 — 25 — Température Nombre de l'eau, d'éclosions. 5,5 150 5,5 500 6,5 500 8,5 400 lOo 500 10" 550 8*^ 500 140 1083 150 1582 10° 500 Ces chiffres, tout en n'ayant qu'une importance relative, mettent cependant bien en évidence l'influence de la température de l'eau sur réclosion. On remarque, en effet, entre autres chiffres, que le 14, à la température de 5°, 5, il n'y a que 200 alevins d'éclos, tandis que, la veille, avec 9<', il y en a eu 600, et le 24, avec 15°, 1,500. Comme résultat final, nous avions donc, dans notre laboratoire d'incubation, à peu près 9,400 alevins, qui, à l'âge de quatre se- Sr maines, avaient complètement résorbé la vésicule. Dès lors, il fallait songer à la dissémination. Après en avoir donné environ 4,000 à des personnes qui s'étaient inscrites pour en recevoir et chez lesquelles nous savions que les soins ne leur manqueraient pas, il nous en restait 6,000, que nous offrîmes à la ville de Beaune. Ce choix avait le double avantage de les conserver près de nous et, 106 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION- par conséquent, de nous permettre d'en suivre plus facilement le dé- veloppement. En effet, la ville fit aussitôt construire, sur les bords du lac de la Bouzaise, à proximité' de notre laboratoire, un re'servoir d'une surface de 14 mètres environ. Les alevins y furent mis le 4 mai 1897. On les nourrissait avec du sang caille' et un peu de pain. L'eau, sans être courante, s'y renouvelait toutes les six heures environ. Pour rendre l'expérience plus concluante et voir si, comme on le prétend, le Saumon de Californie peut vivre en eau close, nous en avons réservé une trentaine, qui furent mis dans un réservoir situé à l'intérieur de TÉcole. Ce réservoir n'est qu'une sorte de cuve maçon- née, servant d'abri aux fleurs en hiver et de bassin pour l'arrosage en été. Il mesure 6 mètres de long sur 2 de large et l'"50 de profondeur. L'eau n'y est renouvelée qu'à de rares intervalles, et sa température, en été, atteint 25°. Les alevins y furent placés le 4 mai. Leur nourriture consistait en débris de cuisine, hachés finement, qu'on leur jetait tous les matins. Le 3 juillet, voulant savoir ce qu'ils étaient devenus, on fut obligé de vider le réservoir. A notre grand étonnemennt, ou retrouva 26 Sau- mons d'un poids variant de 14 à 25 grammes et d'une taille de 6 à 11 centimètres. Après constatation du résultat, les poissons furent remis soigneusement dans le réservoir et nourris comme précédem- ment. Enfin, le 16 octobre, on vida de nouveau, et l'on retrouva de fort beaux Poissons, dont le plus grand avait 20^'/""45 et pesait 124 grammes, et le plus petit 14^7 et un poids de 62 grammes. Si nous prenons les moyennes, nous arrivons aux chififres suivants : Du l^*" au 3° mois, le poids moyen a été de 19 gr. 5, et la taille moyenne de S'^'^S. Du 3° au 6® mois, ces moyennes atteignent 93 grammes pour le poids, et 17^"'5 pour la taille. Ces chiffres montrent que la croissance est proportionnellement plus rapide dans la seconde période que dans la première. Ce qui donne- rait à penser que le Poisson éprouve une sorte de difficulté à franchir cette première période, au delà de laquelle il croît rapidement et se montre robuste, tandis que, tout d'abord, la mortalité est quelquefois effrayante, malgré tous les soins et toutes les précautions. Pour faciliter la comparaison, nous avons voulu donner à chaque période de croissance un coefficient en prenant comme base l'unité : 1'" PÉRIODE (de 1 à 3 mois), 2« PÉRIODE (de 3 à 6 mois). Taille Poids 1 1 2 4,08 Pendant que nous poursuivions ces expériences à l'École d'Agricul- ture, nous suivions avec autant d'intérêt les Saumons conservés dans EXTRAITS ET ANALYSES. 107 le réservoir de la ville de Beaune, c'est-à-dire en eau courante. Leur développement était loin d'être aussi rapide. En effet, le 3 juillet, vérification du poids et de la taille étant faite, nous avons obtenu un maximum de 10 grammes pour le poids et de pour la taille, et un minimum de 6 à 7 grammes de poids pour 4 centimètres de taille. Au 16 octobre (époque de la pêche des Saumons du réservoir de l'École) , le poids atteignait un maximum de 04 grammes avec 38 grammes pour minimum et respectivement des maxima et des minima de IS^'^S et 6'^'" pour la taille. Ce qui, en résumé, donne des moyennes de 51 grammes pour le poids et de 10'^''^7 pour la taille. Etablissons de même que précédemment les coefficients de croissance, et nous obtenons : l'» PÉRIODE 2*= PÉRIODE (de 1 à 3 mois), (de 3 à 6 mois). Taille 1 2,05 Poids 1 2 Le tableau suivant met en regard les coefficients de croissance des Saumons élevés, les uns en eau fermée, les autres en eau courante : PÉRIODES. T'^ période (de 1 à 3 mois).. .1 1 11 2® période (de 3 à 6 mois)... 2,05 2 2 4,08 D'après ces chifiFres, le Saumon quinnat paraîtrait croître plus rapi- dement en eau fermée qu'en eau courante. Nous avons résolu de pousser plus loin l'expérience. A cette fin, il s'agissait de prendre des Saumonneaux des deux catégories précédentes et de les mettre les uns en eau fermée, les autres en eau courante. Pour cela, d'un côté, il a été mis dans la source de la Bouzaise et dans le lac environ 500 jeunes Saumons, et d'autre part, 1,500 autres ont été jetés dans un réservoir que la ville de Beaune a bien voulu louer d'après nos conseils. Ce réservoir a 15 mètres de long, 8 mètres de large et 1™20 de profondeur. Le fond, très légèrement vaseux, abonde en Crevettes (Gammarus) et autres Crustacés qui fourniront une nourriture abondante aux Poissons. Au mois de mars 1898, il sera procédé à la pêche dans le lac et le réservoir, et il sera alors facile de se rendre compte des résultats et de Toir s'ils confirment les premiers. EAU GOURANTE. EAU FERMEE. Taille. Poids. Taille. Poids. X 408 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. Le Maïs de Szérély. Expériences faites par E. Jouzier, ingénieur-agronome, professeur à l'École nationale de Rennes (1). Ce Maïs nous vient des environs de Udvarhe'ly, en Hongrie. Voici comment il nous est présenté par M. Arpad de Saint-Kirally qui le cultive sur ses domaines. Ce Maïs est, de toutes les variétés agricoles, celle dont la maturité est la plus pre'coce ; sa ve'gétation est si rapide que dans des cultures d'expériences faites par la Société d'agriculture, dans le Comilat de Bihar, on a pu obtenir deux récoltes parvenues à l'état de maturité : un premier semis effectue' le 14 avril donnait une récolte mnvQ et qui a pu être présentée le 16 juillet à l'exposition de Cirand Varadin; une seconde récolte ensemencée ce même jour était présentée le 6 octobre, déjà mûre, à l'exposition de Csabaer. Le Maïs de Székely, le plus précoce de tous les maïs, s'était donc reproduit deux fois dans une seule et même année. Quant à ce que peut atteindre son abondante production, qu'il rr.e soit seulement permis de citer ici, à ce sujet, le rapport de M. Ivan de Nagy, publie dans le journal d'agriculture le Magyar Fold, d'où il résulte que le Maïs de Szekely, dans une expérience comparative, entreprise conformément à mon instruction, près de la forêt de Bakony, a produit 10 hectolitres de semence de première qualité sur 700 toises carrées, tandis que les Maïs hongrois n'ont produit, sur la même sur- face, que 5 hectolitres de grain de moyenne qualité à peine. Je rap- pellerai encore le rapport de l'Académie royale agricole hongroise de Altenbourg, duquel il ressort que dans les expériences qui furent faites à Altenbourg, le produit, par cadastral iocJi, fut le suivant : Maïs de Székely. 2,464 kilog. ou 30 hectol. » (52hectol. 11 par hectare) Cinquanlino 1,713 — 21 — 80 37 — 71 — ) Pignolelto 1,184 — 14 — 80 25 — 70 — ) Voilà évidemment de belles promesses, et si le Maïs de Székely est aussi productif et aussi précoce en France qu'en Hongrie, c'est une variété digne d'être propagée. En eff'et, sa précocité pourrait permettre de semer tard lorsqu'on craint les gelées de printemps, ou bien d'en faire une culture dérobée après fourrages de printemps, ou encore, de le cultiver plus au Nord que les variétés anciennement connues. Avec l'ensemencement hàtif, sous les climats favorables, on pourrait semer (1) Extrait du Journal de l' A fficultic/'e. EXTRAITS ET ANALYSES. 409 plus tôt la culture suivante et profiter, pour la vente du Maïs, des hauts prix qui se pre'sentent souvent un peu avant la récolte des grains. Enfin, sa productivité assurerait un assez grand produit brut. Mais je viens de donner la traduction du prospectus publié en alle- mand par lequel M- Arpad de Saint-Kirally offre ses semences de Maïs. C.est dire que ses affirmations peuvent contenir quelque chose d'exage'ré. J'ai pense' qu'avant de faire connaître le maïs de Székely, il fallait en contrôler l'exactitude. Bien que les essais de culture faits dans ce but ne soient pas absolument concluants, je crois devoir en faire connaître les résultats, ne fut-ce que pour en provoquer de nou- veaux et hâter, autant que possible, le moment où nous saurons quel parti on peut tirer en France de ce nouveau Maïs. Le Maïs de Sze'kely a e'té cultive' en 1894 à Grand-Jouan, à la ferme- école de Puilboreau (Charente-Infe'rieure), à Ronsenac (Charente) et à Fontet (Gironde). A Grand-Jouan, on cultive depuis longtemps diverses variétés de Maïs, dans le champ d'études, et on obtient, avec chacune d'elles, quelques épis (peut-être 10 pour 100 1 qui, récoltés le plus tard possible, rentrés au grenier et suspendus avec soin, parviennent à une maturité suffisante pour fournir les semences. C'est dire que Grand-Jouan est franchement en dehors de la zone où l'on peut cultiver le Maïs prati- quement De plus, l'anne'e 1894 a e'te' des plus défavorables. Après l'ensemencement du Maïs, le 7 mai, le temps a été relativement froid et pluvieux au point de retarder et de rendre difficiles les binap-es. Or, d'après M. Arpad de Saint-Kirally, cette opération est encore plus nécessaire pour le Maïs de Székely que pour les autres variétés. En août, la tem pe'rature a e'té de nouveau froide et tellement pluvieuse que la récolte des céréales n'a pu se faire que dans de mauvaises conditions, tandis que la moyenne des températures maxima a été de 26^8, pour le mois d'août 1893, elle n'a été que de 19*^ 9, soit 7 degrés de moins, pour le même mois en 18;j4. Depuis très longtemps on n'avait pas constaté une température aussi défavorable à la culture du Maïs. Cependant, cultivé sur environ 33 ares, le Maïs de Székely a pu être récolté, dans un état de maturité suffisant, du 22 au 26 octobre II a produit sur cette surface 8 hectolitres de grains, soit 24 hectolitres à l'hectare. Ce rendement est bien au-dessous de celui obtenu à Altenbourg; mais dans les conditions où il a été réalisé, il est très satisfaisant. En effet, la récolte a eu à souffrir, très fortement, du voisinage de grands Chênes plantés sur les bords du champ. Cultivé dans le champ d'expériences de Grand-Jouan, avec le Maïs quarantaiu, le Maïs Székely s'est montré sensiblement plus précoce que celui-ci. Enfin, dans le champ d'études de l'école, sa supériorité à ce point de vue s'est encore affirmée sur toutes les variétés anciennes : ensemencé quelques jou s après le Maïs quarantain, le Maïs à bec et d'autres variétés moins précoces que celles-ci, il a mûri sur place, ilO BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLLMATATION. tandis que les autres Maïs ont dû achever de mûrir en grenier. Il faut noter, d'ailleurs que les Maïs cultivés à Grand-Jouan sont soumis à une sélection naturelle qui en garantit la précocité. En effet, on ne renouvelle pas les semences fre'quemment, on emploie de préférence celles qui ont été récoltées au champ d'études ; or, comme le climat est peu favorable, ce sont les sujets les plus précoces qui font souche, et on obtient bientôt des sous-variétés plus hâtives que les variétés primitives. C'est ainsi que, dans celte année, qui, je le rappelle, a été très défavorable, seul, le Maïs Caragua originaire de Grand-Jouan a donné quelques épis mûrs. Le Maïs Caragua de semence achetée n'a pas mûri. Cette sélection est d'autant plus réelle que la remarque s'en est imposée au jardinier qui cultive le champ d'études. A la ferme-école de Puilboreau, également, la température a été très défavorable; aussi quelques fusées n'ont pas mûri, et, dit M. Boucasse, directeur, le grain a dû souffrir dans son développement. Malgré cela, le rendement a été de 24 hectolitres à l'hectare environ comme à Grand-Jouan. A Ronsenac, dans la Charente, le maïs de Székely a été cultivé par M. Decoux qui avait bien voulu s'engager à en observer le dévelop- pement et à en apprécier rigoureusement la production. Malheureu- sement, une grêle désastreuse, tombée dans la nuit du 26 au 21 août, en a presque complètement anéanti la récolte. Aussi ne peut-il pas être question du rendement. Cependant, il a été possible de comparer cette variété à la variété locale (issue du Maïs des Landes). Du Maïs du pays, semé quinze jours plus tôt que le Maïs de Székely, sur une surface triple et, à part cela, dans les mêmes conditions, a produit trois fois moins que celui-ci. 11 aurait donc rendu neuf fols moins, ce que M. Decoux attribue à la plus grande précocité du Maïs de Szé- kely. Les grains étaient déjà bien formés, lors de la grêle, dans cette variété, et il a pu en mûrir beaucoup, tandis que les grains du Maïs commun n'étaient pas encore développés. Enfin, un dernier essai a été fait à Fontet, par M. Séverin, élève de Grand-Jouan, qui en a dirigé la culture étant à l'école. D'un premier semis effectué le 2 mai, la récolte a été mûre et recueillie le 20 juillet ; déjà le 10 juillet, quelques épis étaient mûrs. Du grain de cette ré- colte, ensemencé le 20 juillet, a donné des produits mûrs le 25 sep- tembre. Enfin, le même jour, le 20 juillet, un second semis était efifec- tué avec des semences de provenance directe et on en obtenait une récolte qui put être faite le 20 septembre. Déjà, le 15 septembre, soit cinquante-sept jours après rensemencement, quelques épis pouvaient être récollés. M. Séverin avait aussi fait faire un semis le 12 sep- tembre, avec des grains venus de Hongrie, et des épis qu'il m'a mon- trés le 11 octobre provenant de cette culture, permettaient, d'après leur développement, d'espérer voir mûrir la récolte en octobre. Mais une assez forte gelée a complètement arrêté la végétation. EXTRAITS ET ANALYSES. 111 Sous le climat de La Reole, M. Se'verin a donc obtenu : 1° D'un semis ellectue' le 2 mai, une récolte miire le 20 juillet ; 2" D'un semis effectué le 20 juillet, avec des graines récoltées le même jour, une récolte recueillie le 25 septembre ; soit deux généra- tions en une seule année ; 3° Enfin, d'un semis effectué le 20 juillet, avec des graines reçues de Hongrie, une récolte entièrement miàre le 20 septembre. Malheureusement M. Séverin n'a pas rapporté à l'étendue cultivée les rendements qu'il a obtenus. En résumé, aucun des essais n'a fourni des renseignements com- plets et obtenus dans les conditions normales, et il ne m'est pas pos- sible d'affirmer la supériorité du Mais de Székely sur les autres varié- tés. Cependant, il semble hors de doute qu'il est plus précoce que le Maïs quarantain et que sa productivité est suffisante. Des essais vont être renouvelés, en vue de s'assurer si ce sont là des faits constants. Mais déjà, dans les cultures que j'ai vues, j'ai pu faire quelques observations. D'après l'aspect du grain de semence, il n'y avait qu'une seule variété, bien pure en apparence ; mais à la vé- gétation on constate des différences sensibles, suivant les plants , au point de vue de la hauteur, de la précocité, et surtout de la pro- ductivité. Il faut en conclure que la semence qui m'avait été fournie n'était pas bien pure, ou bien, et cela serait fort possible, que la va- riété n'est pas encore bien fixée et qu'il est nécessaire d'en poursuivre l'amélioration par une rigoureuse sélection. Peut-être, aussi, par ce moyen, arriverait-on à obtenir une variété plus fourragère que le type dominant actuel, sans, pour cela, voir diminuer la précocité. Ce serait un réel avantage. Voici comment se sont accomplies les diverses phases de la végé- tation pour deux cultures différentes : A PUILBOREAU A NOZAY (Charente-Iaférieure), (Loire-Inférieure) Date du semis 25 mai. 7 mai. Date de la levée 7 juin. 18 mai. Date de l'apparition des pre- mières panicules mâles 20 juillet. 29 juin. Date de l'épanouissement des premières fleurs mâles 1°"^ aoiit. 22 juillet. Date de la maturité 20 octobre (incomplète). 15 octobre. Ces premières expériences ont été faites il y a trois ans environ ; mais M. Jouzier nous confirme aujourd'hui qu'il a fait cultiver depuis^ en Charente, le Maïs de Székely et qu'il a obtenu la corroboration de ce qu'il promettait lors des premiers essais. 412 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. X Le Touille-Ca.nard [Holothîjrus coccinella Gcrvais). Sous le nom bizarre de Touille-Canard^ les habitants de l'île Mau- rice désignent un Acarien de grande taille (5 millimètres de long), de couleur roussatre et entièrement cuirassé, qui n'était guère connu des spécialistes que par les courtes diagnoses qu'en donna, vers 1850, le Professeur Gervais, d'après des exemplaires trouvés dans les réserves du Muséum. M. Mégnin vient d'attirer l'attention sur cette espèce qui jusqu'à aujourd'hui était passée inaperçue mais contre laquelle le médecin et l'éleveur doivent être également prémunis. Le rôle pathogène du Touille-Canard n'est, en efifet, un secret pour personne à l'Ile de France ; « les éleveurs des Oiseaux de basse-cour le savent si bien qu'ils ont renoncé à l'élevage des Canards et des Oies dans les endroits élevés de l'île où cet Acare se trouve en très grand nombre, caché pendant le jour sous les mousses et les pierres des endroits humides, trop fréquentés malheureusement par les Oi- seaux en question que leur genre de vie expose à être généralement victimes de ces dangereux Acares , lesquels le sont même pour l'homme. Les enfants surtout sont principalement exposés à en souf- frir quand, imprudemment, ils portent, à leur bouche, leurs mains qui ont saisi ces Acares. On le trouve communément à Guasipe et dans les lieux froids, alors que son absence est presque totale dans les endroits secs et chauds. Plusieurs cas d'empoisonnement ont eu lieu à Guasipe, causés par l'ingestion de ces Touille-Canards qui déterminent immédiatement une inflammation grave des muqueuses. Le D'' Drouin a signalé dernière- ment un cas curieux de ce genre, sur un enfant de Guasipe : des œdèmes de la langue et de toute la région pharyngienne menaçaient les jours du patient par apoplexie; le D'" Drouin ne s'aperçut de la cause de ces troubles qu'après avoir fait restituer au patient des frag- ments de l'Acare. » (Lettre de M. E. de Ghaunoy, de Port-Louis, à M. Mégnin). Ges faits méritent d'autant plus d'être connus, que probablement cet Acare se trouve également à Madagascar. SUPPLÉMENT AU BULLETIN de la SOCIÉTÉ NATIONALE D'ACCLIMATATION DE FRANCE No de Mars 1898 La Société offre à ses membres : Graines de Polygomm sachalinense, offertes par M. Charles Baltet. Graines de Courgettes d'Egypte, offertes par M. Charles Debreuil (Ces graines conservent très longtemps leur faculté' germinative). Graines à'Aberia cafra, Celastrus edulis (Catha), Cerasus caroUniana^ Cœsalpinia tmctoria, récoltées à Oran, par M. Leroy et offertes par lui à la Société. Graines d'Acacia dealbata, id.: \ar. 2Jrœcox floribunda, Magnolia glauca, Pims strobus, re'colte'es aux îles Borromées (Lac Majeur), par le comte G. Borromeo et offertes par lui à la Société. AVIS. — Le Secrétariat prie les Membres de la Société qui désirent participer à la distribution des graines offertes par M. Charles Naudin et dont la liste a paru dans les numéros du Bulleim de juin et juillet der- niers, de vouloir bien se hàler d'envoyer leurs demandes. Nombre d'espèces sont déjà épuisées, les Palmiers entre autres. Toutefois la Société peut oilrir quelques graines de Phœnix melano- carpa (de Nice), expédiées tout récemment par M. Charles Naudin, de Trachycarpus excelsa, (de la Charente), envoyées par le docteur Lecler, et de Dattiers à fruits rouges récoltés à Oran par M. Leroy. La Société décline la responsabilité des annonces insérées ci-dessous Le Docteur A. Lecler, Rouillac (Charente), offre contre envoi de 1 fr. 50 en timbres-poste des Bulbilles d'Igname de Chincy 50 grammes représentant 60 à 70 bulbilles, suivant grosseur. — • Envoi franco par poste. i Par suite de changement de domicile, on désire se de'faire d'unë Biche âgée de deux ans et parfaitement apprivoise'e. — Prix mode'ré. ~ S'adresser au siège de la Socie'te'. Occasion. — Photo-jumelle Garpentier 4,5 X6, objectif Zeiss, poire, 12 châssis de rechange renfermés dans une boîte spéciale et de plus, un châssis amplificateur pour agrandissement 9/12 et 13/18; le tout absolument neuf, prix 200 fr. (valeur réelle 265 fr.) — La photo-jumelle et ses accessoires, sauf l'amplificateur, 150 fr. (valeur réelle 200 fr.) — Ce dernier appareil seul, 50 fr. (valeur réelle, 65 fr.) — S'adresser au siège de la Société. Un Jardinier, marié, sans enfants, âgd de moins de 40 ans, ayant les meilleures références, cherche à se placer pour s'occuper surtout d horticulture et spécialement de la culture des plantes exo- tiques (serres, orangerie ou pleine terre). Conviendrait comme jardi- nier en chef d'un propriétaire amateur ou d'un jardin botanique. — S'adresser au siège de la Société d'Acclimatation, 41, rue de Lille, à Paris. 1 Charles NAUDIN Membre de l'Institut (Académie des sciences) Directeur du laboratoire de botanique de la Villa Thuret, à Antibes ET le Baron F. Von MUELLER Botaniste du gouvernement anglais à Melbourne. MANUEL DE L'AGCLIMATEUR OU CHOIX DE PLANTES \ RECOMMANDÉES POUR L'AGRICULTURE, L'INDUSTRIE ET LA MÉDECINE Adaptées aux divers climats de V Europe et des pays tropicaux OUVRAGE PUBLIÉ AUX FRAIS ET SOUS LES AUSPICES DE LA Société nationale d'Acclimatation de France Un volume in-S** de prés de 600 pages avec portrait. INTRODUCTION: Considérations générales sur racclimatation des plantes ; Aperçu général des genres de plantes auxquels sont empruntées des espèces déjà utilisées ou qui peuvent l'être ; Description sommaire des familles ou groupes naturels auxquels se rattachent la plupart des plantes indiquées dans ce volume ; Noms vulgaires des plantes et synonymes rapportés aux noms botaniques; Énumération par ordre alphabétique des plantes, leurs usages et leur culture, formant un dictionnaire des végétaux à acclimater dans les diverses régions du globe ; Noms des auteurs cités dans le cours de l'ouvrage avec les abréviations usitées. Prix : 7 francs. Pour les Membres de la Société nationale d'Acclimatation de France, 3 fr. 50 EN VENTE AU SIÈGE DE LA Société nationale d'Acclimatation de France 41, rue de Lille, PARIS. VBRSAILLEB, IMPRIMERIES CERF, 59, RUB DUPLESSIS. Wm DES CULTURES COLONIALES COMITÉ DE PATRONAGE DE LA REVUE MM. ro ô wMf D'ARENBERG. député, -ce-président dn Groupe colorin.l, p vsidrnt dn romiiP ,ie 1 Afrique (rnuq ùse. î '"^O'i'M.ondanr BINGER, ancien gonve- neur d^ Côfe- 1 Colonies ''^'^ ^^'l"i'-e^i«e ''Afrique au Minisière des AUL BOURDE, nurien directeur des conlrà!e< e de l'affri- UREAU. professen. de b()i;iiii.|ur :eu r h rigole des Sciences poli- MAm rc'o';iT;v'''^ "'"''V ^o/on(«/e franraise. I HARLES-ROUX ancien depirv. mrnibre du Conseil s'uuérieur I dn cmuierce. v ice.prés.den i; du Gron„e Colonial. ! ORNU, professeur de culture an Musi^uni EHERAIN niemlM-c de l lnsfinn, professeur de chimie £gri- ADA'r!'',^ '■ol'l''' "-'^^J'^^'-of^ d a-riculture de G-iguon. ve sM^ede 1° n~ ^'^ S'^ogfaphie coioniaie à l'Uni- YBOWSKY, dir.'cteur de I aa:ricultu'e ei ^ i commercer Tnm-, e, p- of s^^eur de cultures olouia.es n l'insiitui natio- 1 al a^ronomiq 16 Moni"nejfe7' 1^™'"^^^^"'' botanique à l'Université de DUlS GRANOEAU. directeur de 'a Station agronomique de BAwn.mco ' 'T ^"f •''^«'■««' (^'Agriculture pratique. RANDIDIER membre de i lustitut. MM. Baro\ Jolfs DE GUERNE, secrétaire général de la Société na- tionale d Acclimatation. D-- HECKEL, professeur à îa Faculté des Sciences, directeur 'le I liislh n colnnia! ilf .Marseille. LE MYRE DE VILERS. (i-pute de la Cochinchine, président de ^<)Clet,e nanoD.ilrf -i AcclirualaHon. M;;;- LEROY, supéiienr général des Missionnaires du Sainl- MiLNE-EDWARDS, membre de l'Institut, directeur du Muséum Ch. NAUDIN, membre de l'Institut. OLIVIER, docteur è.s sciences, directeur de la Revue aé- nerule fies Sciences pures et appliquées. POISSON, assistani au Muséum. RISLER, directeur de l'Iusiiiut national agronomique RIVIERE, ancien pre^ dent de laSocié.é d Azricul.ure d'Alger dire < ur du Jardin d'fcssei du Ham na D' TREILLE, ancien inspecteur eu chef du service de santé des «.oloiiies. VIALA. profes■^eur de viticulture à l'Institut national agrono- nuMiie, directeur de la Ikvue lU Viticulture. H- DE VILMORIN, membre de la Société nationale d'Agricul- ^°h}-^' or(^-e-sp;ir à l'Ecole d'agriculture de Grignon et à l£co,e des sciences politiques. La Revue des Cultures coloniales paraît le 5 de chaque mois. Bureaux : 4'i. rue de la Chaussée d'Antin, Paris. Aàomiemenls : un an : France, 10 francs - recouvré à domicile, 10 fr. 50. ^ Colonies et Union Dstale, 12 francs. PEINTURE IGNIFUGE DITE ANTI-RÉTROLEUR )Au moment où rhorrible désastre du Bazar de Ja Charité est encore présent a louies les mé- loircs, Il coiivicMl d(' s.gi)a:er la découverte récente, par M. de Preux, d'un produit désigné )us !e nom û'Anti-Pélroleur et qui rend les objets traités par lui absolument incombustibles. M. de Preux a fait, il y a peu de temps, à Saullain, près Valentiennes, des expériences déCi- [,ves a ce sujei, Deux baraques de bois biane recouvertes de carton bilUmé et tendues de jute, ine imprégnée du nouxcau produit, l aniie a l'elal naiurel onl été remplies de copeaux imbibés ■etiier. Les copeaux ayant eié allumés. !a liaraque qui avait subi la préparation resta compPîtemcnt tacte. tandis que Tautre était dciruite en quelques instants. Mis en présence d'un chalumeau l^gageanl 1,200 degrés de chaleur, le bois n^est percé qu'après 5^5 minutes et le carton bitumé se Miiracte, mais ne brûle pas et ne se fond pas. Les objets en celluloïd ne s'enflamment pas lors- ,rils ont été traités par VAnti-Pélroleur. Après les mêmes expériences faites en grand à l'Exposition de Bruxelles, au parc du Cinquan- n^aire, le Jury international a accordé, à Punanimité avec ses plus sincères félicitations, ^\Anti-Petrolem% un diplôme de médaille d'or, la plus haute récompense dont il pouvait sposer. Le produit inventé par M. de Preux rendra d'immenses services. W est déjà employé dans un îrtain nombre d'usines et il a été adopté parla Compagnie du Nord qui s'en sert dans ses îpôts de machines. -S'adresser pour les commandes et les renseignements au fégisseuf du château de la Villette Saultain (Nord). « If Charles NAUDIN Membre de l'Institut (Académie des Sciences) Directeur du laboratoire de botanique de la Villa Thuret, à Antibe» ET Le Baron F. Von MUELLER Botaniste du gouvernement anglais à Melbourne m $ MANUEL L'ACCLIMATEUR OU CHOIX DE PLANTES RECOMMANDÉES POUR L'AGRICULTURE, L'INDUSTRIE ET LA MÉDECINE Adaptées aux divers climats de V Europe et des pays tropicaux OUVRAGE PUBLIÉ AUX FRAIS ET SOUS LES AUSPICES DE LA Société nationale d'Acclimatation de France Un volume in-8<* de près de 600 pages avec portrait INTRODUCTION : Considérations générales sur l'acclimatation des plantes ; Aperçu général des genres de plantes auxquels sont empruntées des espèces déjà utilisées ou qui peuvent l'être ; Description sommaire des familles ou groupes naturels auxquels se rattachent la plupart des plantes indiquées dans ce volume ; Noms vulgaires des plantes et synonymes rapportés aux noms botaniques; Enuméralion par ordre alphabétique des plantes, leurs usages et leur culture, formant un dictionnaire des végétaux à acclimater dans les diverses régions du globe ; Noms des auteurs cités dans le cours de l'ouvrage avec les abréviations | usitées. ; Prix : 7 fRANCS j Pour les Membres de la Société Nationale d'Acclimatation de France, 3 fr. 50 EN VENTE AU SIÈGE DE LA Société nationale d* Acclimatation de France, 41, Rue de Lille, PARIS. Le Secrétaire Général, Umi, Jules de GUERNE. Versailles. — Imprimeries Cerf, 59, rue Duplessis. In'lice décimal. 506 581.52 591.52 BULLETIN DE LA l)' JJ DE FRANCE (Revue des Sciences naturelles appliquées) 45« ANNÉE AVRIL 1808 SOMMAIRE ( Charles RIVIÈRE. — Les Progrès de T Apiculture en Algérie (travaux du D*" Reiser) ... 113 RAVERET-WATTEL. — Sur les travaux de Pisciculture de M. Goubert à Rouen 116 C. GHALOT. — Sur la culture du Caoutchoutier de Géara au Congo français 120 Extraits des procès-verbaux des séances de la Société : l'"^ Section: Mammifères. — Séance du 24 Janvier 1898 127 Extraits de la Correspondance'. Les Cantonnements de pêche dans la Méditerranée. — Vœux de la Société Marseillaise àQ ^èc\ie La Lucrèce 129 La théorie et la pratique des Réserves de Pêche côlière. — Le cantonnement d'Endouma ) près de Marseille , -, 132 Extraits et Analyses-. Edouard FOA. — La Mouche empoisonnée Tsé-Tsé 137 r, DYBOWSKI. — Sur une Graminée du Soudan (Paspalum longiflorum) 143 La Société ne prend sous sa responsabilité aucune des opinions émises par les auteurs des articles insérés dans le Bulletin. t \ Un numéro 2 francs ; pour les membres de la Société 1 fr. 50 AU SIÈGE , DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE D'ACCLIMATATION DE FRANCS RUE DE LILLE, -il ] PARIS ET A LA LIBRAIRIE CERF, 12, RUE SAINTE-ANNE Le Bulletin paraît tous les mois. Ch •H 0 u u 0 0 •H GRESYL-JEYES DESINFECTANT A2TTZSEPTZQVE Le seul joignant à son Efficacité, scientifiquement démontrée, l'immense avantage de n'être ni Toxiqxie ni Corrosif- Hémostatique et Styptique puissant. Adopté par les Ecoles Nationales Vétérinaires, le Service de Santé de^ l'Armée, la Préfecture de la Seine et la plupart des Services d'Hygieîte et de Désinfection des Départements. Reconnu indispensable dans la pratique vétérinaire. 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Ce n'est certes pas là un milieu idéal pour la Truite, et c'est cependant ce que M. Goubert a su rendre suffisant pour élever et entretenir couramment, depuis plusieurs années, de la Truite commune, de la Truite arc-en- ciel et du Salmo fontinalls. Ce qui fait surtout l'intérêt de ce petit établissement pisci- cole, c'est qu'on y pratique toutes les opérations usitées en pisciculture : récolte, fécondation et incubation artificielles des œufs ; production de l'alevin; élevage du Poisson jusqu'à l'âge adulte. Sous un kiosque qui surmonte une petite butte, au milieu du jardin, a été installé, en sous-sol, le laboratoire renfermant les appareils d'éclosion. Sur trois de ses côtés, ce laboratoire est occupé par des bacs à parois de glaces, qui en font un très joli aquarium, où se voient des représentants de nos principales espèces de Poissons d'eau douce. D'autres bacs servent à l'élevage de l'alevin. Comme M. Goubert n'obtient généralement les éclosions qu'assez tard en saison, (1) Entrait d'une lettre lue en séance générale le 17 décembre 1837. (2) Ea réalité, le débit est de 3™ * par jour, en hiver, et de 5"* en été, sauf les jours d'urages, où l'on donne une plus grande chasse d'eau, soit environ 10 ou 12™*. La température de l'eau, sortant du compteur, est de 9° à 10" cent. Bidl, Soc. nat. Accl. Fr. 1898. — 9. '114 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. alors que la récolte des Daphnies et autres Entomostracés de- vient facile, il nourrit exclusivement ses alevins avec des proies vivantes, afin de s'épargner l'obligation fastidieuse de la préparation des nourritures artificielles, dont le moindre inconvénient est de nécessiter de très fréquents nettoyages des bacs d'élevage. Pour se procurer des Daphnies en quan- tité suffisante, M. Goubert utilise tout simplement des ton- neaux semblables à ceux qui servent, dans les jardins, à emmagasiner l'eau pour l'arrosage. Chaque tonneau, ayant été rempli d'eau, reçoit un panier à claire-voie, suffisamment lesté avec quelques pierres pour aller au fond, et contenant du fumier d'écurie dont on a retiré toute la paille. Puis, le tonneau est ensemencé avec quelques Daphnies et, au bout de peu de temps, la récolte peut commencer. Tous les ans, M. Goubert élève assez d'alevins (2,000 à 3,000) pour pouvoir en distribuer à quelques personnes, tout en en conservant une certaine quantité pour lui. Dès que ces alevins sont assez forts, ils vont prendre place dans quatre petits ruisseaux d'élevage, d'environ 0"^30 de profondeur. Les distributions de Daphnies sont alors peu à peu supprimées, pour être remplacées par de la viande de Cheval finement hachée. C'est cette même nourriture qui forme également la base de l'alimentation des sujets de deuxième et de troisième année, lesquels ont à leur disposi- tion les parties les plus profondes de la petite rivière, consti- tuant des bassins de 0"^50 à O'^GO de profondeur. La contenance totale de ces bassins et des ruisseaux est d'environ 20^"^, dans lesquels M. Goubert peut élever de 2,000 à 3,000 alevins de première année, comme je l'ai dit ci-dessus, plus 200 ou 300 sujets de 100 à 200 grammes, et une centaine de repro- ducteurs de 250 gr. à 1 kilog. M. Goubert apporte dans toutes ses opérations piscicoles un soin qui explique le succès de ses élevages. Je puis en donner une idée en transcrivant l'extrait suivant d'une lettre qu'il m'écrivait ces jours-ci : « ... Nous savons tous que la durée de l'incubation des œufs de Salmonidés est en raison directe de la température du milieu où ils se trouvent. Mais je n'ai, jusqu'à présent, vu nulle part que le nombre de degrés néces- saire à cette incubation ait été déterminé. » Or, depuis quelques années, en me servant du même thermomètre, j'ai relevé chaque jour, entre neuf heures et TRAVAUX DE PISCICULTURE A ROUEN. 115 dix heures du matin, la température de l'eau servant à Tin- cubation des œufs de Truites, et j'ai constaté, en additionnant les degrés régulièrement inscrits jour par jour, que la pré- sence de l'embryon, dans les œufs de Truites arc-en-ciel, cor- respondait à environ 200 degrés, et que l'éclosion commen- çait entre 310 et 315 degrés, pour se terminer entre 340 et 350 degrés. J'ai également constaté que le nombre de jours avait varié entre 35 — 40 — 42 et 47, suivant que la tempé- rature journalière avait été plus ou moins élevée; mais que le nombre de degrés était resté le même. Ceci est le résultat de quatre années d'observations. » Pour les œufs de Truite commune, l'incubation exige un plus grand nombre de degrés ; ce n'est que vers 240 degrés qu'apparaît l'embryon, et vers 370 ou 380 degrés que com- mence l'éclosion. » M. Goubert compte poursuivre des observations dans ce sens, en y apportant plus de précision encore, afin de réunir des données absolument exactes sur la question. On ne peut, certes, qu'applaudir à des travaux de ce genre, et les résultats déjà obtenus dans un semblable établissement, au milieu d'une ville, et dans des conditions relativement peu favorables, m'ont paru mériter d'être signalés à la Société d'Acclimatation. 29 novembre 1897. 446 LES PROGRÈS DE L'APICULTURE EN ALGÉRIE TRAVAUX DU D-- REISSER par Charles RIVIÈRE, Délégué de la Société d'AcclimatatioD à Mustapha (1). Tous ceux qui visitent l'Algérie au printemps sont tentés de lui appliquer l'exclamation d'Hérodote dans la vallée du Nil : « C'est une mer de fleurs. » Or qui dit fleurs dit Abeilles. Celles-ci, en effet, se rencontrent partout, et principalement dans les zones montagneuses, telles que la Kabylie, grande et petite. Déjà, en 1866, MM. Letourneux et Hanoteau comp- taient, dans ce qui constitue aujourd'hui l'arrondissement de Tizi-Ouzou, jusqu'à 8,480 ruches. Malheureusement la quantité de miel récoltée n'est pas en rapport avec le nombre des colonies d'Hyménoptères, et nous voyons toujours, dans nos possessions Nord -Africaines, Yimportation annuelle de cette denrée osciller entre 200,000 et 250,000 kilos. Pourquoi? Parce que l'indigène, primitif en Apiculture, comme pour tout le reste, ne sait pas exploiter l'exubérance florale du pays. Le sol aussi est riche, et ne rend pas assez entre ses mains. La charrue qu'il manie encore aujourd'hui, figure telle quelle sur les antiques monuments de l'Egypte. Il en est de même de sa ruche, dont nous sur- prenons l'image exacte sur les peintures murales des pre- miers Pharaons. Ajoutez à la défectuosité de l'outillage , l'ignorance absolue de la nature et des mœurs de nos labo- rieux Insectes, et vous comprendrez aisément les causes de notre infériorité vis-à-vis de l'étranger, et du tribut que nous payons au dehors . Cylindre en écorce de Chêne-liège ou parallélipipède en ro- seaux, la ruche indigène est trop petite, même pour la ponte de la reine, sans pouvoir être agrandie pratiquement. Et le cultivateur y porte le couteau pour en extraire miel et cire ! Les Abeilles usent leurs jours à réparer les brèches, quand (1) Communication faite dans la séance générale du 14 janvier 1898. LES PROGRÈS DE L'APICULTURE EN ALGÉRIE. H7 l'année est propice, heureuses encore quand leur mère n'a pas perdu la vie sous la lame inconsciente. Dans ce dernier cas la colonie est détruite; dans l'autre, elle produit fort peu, car, lorsque les bâtisses sont refaites, il n'y a plus rien à butiner. Et les petites populations qui résultent de ces tailles insensées en plein convain ! Et les ravages de la fausse teigne dans ces avortons de ruches, où les ouvrières ne sont plus même assez nombreuses pour veiller à la porte ! Un apiculteur très érudit, M. le D"" Reisser, prêche depuis quinze ans autour de lui, en territoire arabe, la réforme de ce système néfaste ; il a écrit à ce sujet un livre spécial, tra- duit dans la langue du pays ; il a installé ou fait installer des ruchers modèles au milieu des douars : jusqu'à ce jour, le progrès est presque nul. Les quatre cinquièmes des habitants sont totalement illettrés ; l'autre cinquième ne lit pas, et, par morgue aristocratique, ne veut pas mettre la main à la pâte. Nos instituteurs Kabyles seuls — et la Société d'AjjicitUure vient de décerner à l'un d eux une médaille d'argent — arri- veront à changer cet état de choses, en formant la nouvelle génération. Et les colons, dira-t-on? Hélas! ici encore le tableau pré- sente des ombres. Autrefois beaucoup ne voulaient pas lire. Or un apiculteur sans aucune instruction ne comprendra rien à nos préceptes, et commettra journellement des fautes pré- judiciables à lui et à ses élèves. Beaucoup arriveraient à sa- voir ; mais ils ont tous hâte de s'enrichir, et alors, que peut bien un rucher pour gonfler la bourse? Ils se rappellent avoir vu des Abeilles chez leurs parents, sans que ceux-ci en aient retiré autre chose que des piqûres, et à peine de quoi sucrer la tisane des malades. On avait des paniers fort commodes, car ils ne demandaient pas de soin. Ignorance par-ci, non- chalance par-là, ou ce qui pis est, routine invétérée, voilà les obstacles qu'ont rencontrés ceux qui, comme le Reisser, ont voulu voir dans l'Apiculture une utile ressource complé- mentaire pour le colon. Ce n'est que depuis quatre ou cinq ans que l'on commence à accepter des idées plus saines. Et ne croyez pas que ce soit dans la grande masse, les néophytes se recrutant surtout parmi les propriétaires aisés, qui appliquent aux cultures les notions scientifiques, et qui ne prennent pas comme modèles les attelages taillés dans les colonnes de Karnac. rJ\/\S BULLETIN DE LA. SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. Tout leur est offert à cette heure pour marcher de l'avant : Bureau de renseignements toujours ouvert, Bulletin, confé- rences, ruchers-écoles, récompenses aux concours. La pro- pagande s'étend à vue d'œil, et couvrira bientôt toute l'Algé- rie. Déjà quelques adeptes étonnent les voisins par leur foi, et s'ingénient à faire de l'élevage des Mouches à miel une vé- ritable industrie. Les ruchers de quarante à cinquante colo- nies ne sont pas rares, nous en connaissons même un qui en abrite plus de mille. Et tout cela, cette fois, conduit métho- diquement. La ruche à cadres est seule employée ; les ruches arabes ne sont achetées qu'à l'effet de fournir des essaims. Aussi les récoltes ne se sont pas fait attendre, bonnes ou moyennes d'un côté, superbes de l'autre. Gela durera-t-il? Oui, parce que nous n'avons pas ce qu'on appelle de mauvaises campagnes ; parce que l'hivernage, la pierre d'achoppement des éleveurs d'Europe, ne nécessite chez nous aucune atten- tion particulière; parce que notre Abeille est d'une activité extraordinaire : parce que, enfin, il ne tient qu'à l'Apiculture d'avoir ici des fleurs toute l'année. Puis encore, quel produit délicieusement parfumé I Et quelle facilité de l'écouler sur place, puisque nous demeurons tributaires de l'étranger! Aussi croyons-nous fermement à l'avenir apicole de l'Algérie. L'élite de la population immigrée est désormais gagnée à l'Apiculture ; le clergé, dont le chef hiérarchique n'a pas dé- daigné de s'inscrire dans notre phalange ; les instituteurs et même les institutrices, ces pionniers de la civilisation, dont une grande partie font figurer l'Apiculture rationnelle dans leur programme d'enseignement. Le Gouvernement même a tenu à encourager ce mouve- ment utile, et, de concert avec les assemblées départemen- tales élues, ne nous a pas marchandé son précieux appui. « 1/726 ruche à chaque maison » telle est la devise qu'a prise pour l'Algérie le Reisser, de l'Oued-Fodda, à qui l'on doit le réveil de l'Apiculture dans la colonie. Ce très zélé propagandiste a prêché par la parole, par le livre, par l'exemple; il a fondé la Société d'Apiculture algérienne^ créé des ruches modèles, organisé des conférences, etc. . en un mot, par ses effôrts persévérants, il a appelé l'atten- tion sur une production qui serait un sérieux appoint pour le petit colon dont la récolte est quelquefois soumise à bien des aléas climatériques. LES PROGRÈS DE L'APICULTURE EN ALGÉRIE. ' 119 J'appelle tout spécialement l'attention de mes collègues de la Société cC Acclimatation de France sur l'œuYre du D'Reis- ser. En la récompensant, la Société contribuera de la ma- nière la plus efficace au développement de l'Apiculture en Algérie. Les progrès accomplis, recevant une haute sanction, seront d'autant plus remarqués et les bons exemples servi- ront chaque jour davantage. 420 SUR LA CULTURE DU CA.OUTCHOUTIER DE CÉARA {MANIHOT GLAZIOWII Muell.) AU CONGO FRAîsÇAIS (1) par C. CHALOT, Directeur du Jardin d'essai de Libreville. La disparition progressive, mais qui sera à peu près com- plète dans un temps plus ou moins éloigné, des végétaux spontanés fournissant du caoutchouc, a mis au premier rang, depuis que l'on s'occupe d'une façon sérieuse de l'avenir éco- nomique de nos colonies, la question de culture et d'exploita- tion rationnelle des plantes dont le produit peut être utilisé par l'industrie. L'exemple de la Malaisie oii la hache coupable a détruit en un demi-siècle pour ainsi dire complètement V Isonandra gutia a déjà fait chercher un isolant qui puisse remplacer la précieuse substance pour la fabrication des câbles sous- marins ; il ne semble point que l'on y soit parvenu. Dans l'Afrique équatoriale, la cupidité et l'ignorance des indigènes ont également fait disparaître, et dans une grande proportion, les Landoipfna des contrées accessibles, si l'on en juge d'après les quantités considérables de caoutchouc exportées dans ces vingt dernières années. Il est vrai qu'il en existe encore de nombreux peuplements dans les forêts du centre africain ; mais avec les moyens de transport rapides et peu coûteux dont dispose la civilisation moderne et la péné- tration politique et commerciale qui avance de jour en jour, il faut prévoir (car on ne peut songer, à cause des difficultés, à réglementer d'une manière efficace la récolte du caout- chouc), que les différentes plantes qui le produisent dimi- nueront d'année en année. Aussi, arriverait-on fatalement à manquer de caoutchouc, si l'on ne s'occupait dès maintenant de résoudre la question, soit en cultivant certains végétaux (1) Mémoire communiqué par M, Henri Lecomte, membre de la Société et lu à la séance générale du 28 janvier 1898. SUR LA CULTURE DU CAOUTCHOUTIER DE CÉARA. 121 indigènes, soit en introduisant des plantes exotiques recon- nues comme fournissant les meilleurs produits. Il ne faut pas croire en effet qu'une liane à caoutchouc qui a été coupée donnera deux ou trois ans après des pousses assez fortes pour être saignées à leur tour ; il n'en est rien. Ce n'est guère qu'au bout d'une dizaine d'années et même davan- tage, c'est-à-dire lorsque les rejets auront atteint 0"^,15 à 0°',20 de circonférence et plusieurs mètres de longueur qu'ils pourront fournir un rendement sérieux. Souvent la liane qui a été coupée meurt. Nous ne croyons pas que l'on ait expérimenté ailleurs que dans certains jardins coloniaux la culture des arbres à caout- chouc; en tout cas, rien n'a été publié sur les bénéfices que peuvent laisser ces cultures. C'est pourquoi il nous a paru utile de renseigner les personnes qui auraient l'intention d'entreprendre des plantations de ce genre, car en matière de culture coloniale surtout, il n'est pas prudent d'engager des capitaux dans une exploitation agricole dont les résultats sont problématiques malgré les espérances qu'elle peut faire concevoir de prime-abord et sans avoir été étudiée à fond. Dans cette notice, nous allons parler d'un arbre à caout- chouc introduit au Congo français en 1887, dont on s'occupe beaucoup depuis quelques années et qui existe à l'heure actuelle dans plusieurs colonies françaises, le Jardin d'Essai de Libreville ayant fait de nombreux envois de graines, notamment à la Martinique, en Cochinchine, à Madagascar et dans toutes les possessions françaises de la côte occidentale d'Afrique. Cet arbre, appelé Caoutchoutier de Céara, est le Manihot Glaziowii Muell, originaire de la province de Céara (Brésil). Il est cultivé à Ceylan depuis longtemps déjà et a été intro- duit en 1883 à San-Thomé, où il en existe actuellement un certain nombre de plantations. La plus importante est celle du commandeur Jacintho Carneiro de Sousa et Almeïda, sur son domaine de Porto-Alègre. Caractères botaniques. — Le Manihot Glaziowii est un arbre de la famille des Euphorbiacées, tribu des Crotonées ; il atteint de 10 à 15 mètres de hauteur. Ses racines tuber- culeuses, ressemblant à celles du Manioc commun, sont tra- çantes bien que parfois il y ait un semblant de pivot. Son 422 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. tronc s'élève le plus souvent très droit, principalement dan» les sujets venus de graines, jusqu'à environ 1"^,50 du sol, hauteur à laquelle il se divise en deux ou trois branches prin- cipales. L'écorce qui a l'apparence de celle de notre Cerisier d'Europe, se détache facilement. Les feuilles alternes sont palmées, découpées en trois lobes, quelquefois cinq, entiers, obtus, légèrement acuminés ; elles sont glauques sur leur face supérieure et le pétiole brunâtre est long de 0"^,15 à 0'^,20, les stipules sont nulles. Les fleurs, disposées en grappes, possèdent un périanthe verdâtre, plissé, à quatre ou cinq divisions ; une fleur femelle terminale occupe le milieu de chaque cyme; son périanthe est fendu jusqu'au réceptacle ; à l'intérieur se trouve un ovaire à trois loges surmonté d'un style terminé par trois stigmates divisés. Les fleurs mâles, en plus grand nombre, ont un périanthe divisé seulement jusqu'au milieu de la hauteur, renfermant dix étamines dont cinq longues et cinq plus courtes. L'ovaire est formé de trois coques contenant chacune une graine brune mouchetée de noir, à deux faces convexes et à arêtes médianes. A la matu- rité, le fruit s'ouvre en faisant entendre un bruit sec sem- blable à une crépitation, et les graines sont projetées sur le sol. Conditions climatériqiies.^ A notre avis, le Caoutchoutier de Céara se développera parfaitement dans les pays où la température moj^enne est de 26° ; peut-être même pourrait-il s'accommoder d'une température inférieure. En ce qui con- cerne la quantité de pluie annuelle, il n'y a rien d'absolu ; au Gabon, où elle est d'environ 2"^, 40 répartis sur une moyenne de 220 journées, le ManUioi Glazioioii vient bien, mais seu- lement sur les pentes et dans les terrains pierreux ou très perméables. Par-dessus tout, il redoute l'excès d'humidité dans le sol. Préparation des graines. — Si le Caoutchoutier de Céara produit des graines en abondance, et cela à partir de la pre- mière année de plantation, on a cru pendant longtemps qu'il faudrait s'en tenir au bouturage comme moyen de multiplica- tion. En eff'et, le périsperme de la graine est entouré d'une coque tellement dure et cornée que dans les semis on consta- tait rarement des cas de germination. Aussi, au début, l'arbre fut-il propagé seulement par boutures. Mais l'on sait que les SUR LA CULTURE DU CAOUTCHOUTIER DE CÉARA. 123 hontiires ne donnent jamais naissance à des plantes aussi vigoureuses que celles provenant de graines, et pour le Gaout- choatier de Géara, on se rendit compte que les arbres venus de graines donnaient du latex en plus grande quantité que ceux provenant de boutures. C'est pourquoi nous avons cher- ché un moyen pour faire germer les graines. Il est connu depuis quelques années déjà et a été signalé dans plusieurs publications spéciales. Voici en quoi il consiste : Nous avons dit qu'à la maturité les fruits éclatent en fai- sant entendre un bruit sec et que les graines sont projetées sur le sol. Ces graines sont ramassées, et une à une on les casse de quelques millimètres, à l'aide d'un couteau assez fort au hile, extrémité de la graine où il y a une légère dépression. Un homme un peu habile peut en préparer ainsi plusieurs centaines par jour. En les usant légèrement sur une meule, on obtiendrait le même résultat. Les graines, préparées de cette façon et mises en terre de suite, germent dans la pro- portion de 90 à 95 pour cent. Culture. — Une fois en possession d'un certain nombre de graines préparées, on les sèmera en pépinière sans attendre, caries Fourmis et autres Insectes pourraient venir en manger l'albumen. Le sol de la pépinière sera plutôt incliné pour éviter que les eaux n'y séjournent, surtout si l'on effectue le semis au plus fort de la saison des pluies. Après avoir été bêché et fumé s'il était trop pauvre, on le divisera par planches de 1"^,30 de largeur séparées par des sentiers de 0'",40. On tracera dans les planches de petits sillons dis- tants les uns des autres de 0"^,20 et profonds de 0"^,02 à 0"\03 seulement, dans lesquels on placera les graines à 0'n,15 les unes des autres ; on recouvrira légèrement au râteau et on paillera les planches. La germination aura lieu dix à douze jours après le semis. Si le temps était sec, il faudrait arroser chaque soir. Après un mois et demi ou deux mois de pépinière, les plants seront assez forts pour être mis en place. Comme nous l'avons dit, le Caoutchoutier de Céara craint l'excès d'humidité dans le sol. Le Manihot Glaziotvii paraît mieux venir dans les sols sablo-argileux que dans les sols où l'argile domine. Le terrain destiné à la plantation ne devra donc être ni maréca- geux, ni même trop humide. L'arbre étant assez cassant, il 124 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLLMATATION. ne faudrait pas que la plantation fût exposée aux grands vents. Les pentes abritées seront par conséquent choisies de préférence pour la culture qui nous occupe. On peut planter en plaine, car ce Caoutclioutier n'est pas très exigeant sur le choix du sol et ne demande pas, comme beaucoup d'autres plantes cultivées dans les pays chauds, à être garanti du soleil par des arbres protecteurs. Après avoir été nettoyé, le terrain sera jalonné de 4 mètres ou 5 mètres en tous sens, suivant la fertilité du sol, en lignes et en quinconces comme pour toutes les cultures, bien entendu. Cette distance, qui pourrait sembler insuffisante, étant don- nées les dimensions qu'atteint le Manihot Glaziowii, est ren- due nécessaire par ce fait déjà signalé, que les arbres, étant assez fragiles, ont besoin de se soutenir les uns les autres, pour pouvoir résister aux grands vents et aux tornades de la saison des pluies. Des trous d'un mètre de côté sur autant de profondeur seront creusés et remplis au bout d'une quinzaine de jours pour que le sol ait le temps de se raffermir et de se bonifier. Les plants, enlevés soigneusement en motte de la pépinière, seront mis en place, arrosés et entourés de deux feuilles de Palmier qu'on laissera pendant quelques jours seulement pour faciliter la reprise des plants. On choisira un temps cou- vert ou pluvieux pour effectuer ce travail. Au bout d'un cer- tain temps, on remplacera les plants qui pourraient manquer. Comme dans les pays chauds, les mauvaises herbes envahis- sent rapidement les terrains qui ont été débroussés, nous ne conseillons pas le semis direct en place. L'entretien de la plantation consiste en binages pendant la première et la seconde année seulement, car les herbes de- viennent de plus en plus rares au fur et à mesure que les arbres se développent. Au Gabon, le Caoutchoutier de Céara, comme beaucoup d'autres arbres, d'ailleurs, se laisse quelquefois envahir par des plantes parasites (Loranthacées) ; il n'y a qu'à couper les branches qui en sont garnies, car les parasites en se multi- pliant épuiseraient rapidement les Caoutchoutiers. Le Manihot- G laziowii est bien plus vigoureux en saison des pluies qu'en saison sèche. C'est pourquoi nous croyons que la récolte du latex devrait être faite pendant la saison pluvieuse qui est celle de la végétation dans les pays chauds. SUR LA CULTURE DU CAOUTCHOUTIER DE CÉARA. 125 Dès que la saison sèche est bien prononcée, les Caoutchou- tiers perdent une partie de leurs feuilles et celles qui restent deviennent grises pour la plupart et ont leur face iaférieure souvent couverte par une sorte de Puceron lanigère ; mais au retour des pluies, ils se couvrent d'un feuillage abondant, bien vert, et les Pucerons, dont le grand ennemi est l'eau, ne tardent pas à disparaître. On ne pourrait d'ailleurs songer dans une plantation d'une certaine étendue, à combattre les Pucerons par un des moyens employés en France; ce serait trop coûteux. Données moyennes sur le développement du Manihot Glaziotoii AU Jardin d'essai de Libreville. 1 an . 2 — 3 — 4 — Hauteur totale de l'arbre. 3°^,'I0 5'", 25 8"\25 10°^, 00 Hauteur à laquelle commencent les branches. 1"\60 Circonférence moyenne. 0"',20 0'^,45 0'^,55 o"S'ro Gomme la plupart des arbres à croissance très rapide, le Caoutchoutier de Céara ne semble pas devoir fournir une longue carrière, mais cet inconvénient ne saurait être un obs- tacle à sa culture, étant donnée la facilité avec laquelle on peut le multiplier. Récolte. — C'est habituellement pendant la saison sèche que les indigènes récoltent le caoutchouc, car ils sont parfois obligés de s'éloigner assez loin de leurs villages et la marche dans les forêts est alors beaucoup moins pénible que dans la saison des pluies. Pour le cas particulier du Manlhot-Gla- ziowii, nous pensons que les arbres devraient être saignés en saison des pluies car, nous l'avons dit, ils sont alors plus vigoureux que pendant la saison sèche. Après avoir essayé différents procédés, les noirs ont trouvé plus pratique pour la récolte du latex, de se servir des valves d'une sorte d'Huître assez commune sur certains points du littoral de la colonie . Voici comment ils procèdent : La première écorce de l'arbre, qui se détache facilement, ayant été enlevée, la partie coupante de la coquille est enfon- 426 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. ' cée suffisamment pour que cette dernière tienne seule sur le tronc ou sur les grosses branches du Gaoutchoutier. Un cer- tain nombre de ces petits récipients sont disposés de cette façon, puis des incisions de 0,10 à 0,20 centimètres de lon- gueur sont pratiquées au-dessus d'eux; le latex alors s'écoule. Au fur et à mesure que les valves s'emplissent, on les vide dans un vase plus grand et on les replace ensuite sur les différentes parties de l'arbre qui n'ont pas encore été saignées. Coagulation du latex. — Dès qu'on a une certaine quan- tité de latex, il faut le coaguler immédiatement par la cha- leur, mais à une température pas trop élevée, car on obtien- drait un produit poisseux, si on attendait par exemple (six à huit heures suivant le temps), il se coagulerait seul et ne don- nerait qu'un mauvais caoutchouc, car il renfermerait de nombreuses poches contenant du liquide, ce qui amènerait une fermentation et de la moisissure et communiquerait une odeur désagréable au caoutchouc. Rendement. — En opérant dans une plantation de Caout- choutiers âgés de cinq et six ans, et sur cinq ou six arbres à la fois, un homme a récolté en moyenne, par journée de dix heures de travail, 550 grammes de latex, lesquels four- nissent environ n7 grammes de caoutchouc; expériences faites en novembre, c'est-à-dire en saison des pluies. D'après nos propres essais, nous estimons qu'un arbre, après la quatrième année de plantation et dans de bonnes conditions ne pourrait produire annuellement plus de 150 à "200 grammes de caoutchouc. Ce chiffre doit être tenu pour vrai, car jusqu'à ce jour, le manque de données sérieuses a fait exagérer le rendement du Manihot Glaziowu et des €aoutchoutiers en général. 127 EXTRAITS DES PROCÈS-VERBAUX DES SÉANCES DE LA SOCIÉTÉ. l'-^ SECTION (MAMMIFÈRES). SÉANCE DU 24 JANVIER 1898. PRÉSIDENCE DE M. DEGROIX, PRÉSIDENT. , M. Loyer, secrétaire adjoint, s'excuse de ne pouvoir assister à la séance. Il est proce'dé à la nomination du Bureau et d'un Délégué à la Com- mission des Re'compenses. Sont élus : Président : M. E. Decroix ; Vice-Président : M. D"" Trouessart ; Secrétaire : M. Ch. Mailles ; Secrétaire adjoint : M. Loyer; Délégué à la Commission des Récompenses : M. le D"^ Trouessart. La question de l'Éléphant d'Afrique e'tant à Tordre du jour, M. P. Bourdarie demande à insister sur un fait déjà cité par lui et qu'il considère comme très important ; il s'agit de l'emploi à Oudh, dans les États du Maharadjah de Kapurthala (Indes anglaises), de deux Éléphants d'Afrique qui sont utilisés pour toutes sortes de travaux en même temps que des Éle'phants d'Asie. Au point de vue de l'exécution des diverses besognes qu'on leur impose, les Africains ne se distin- guent en rien de leurs congénères d'Asie. Telle est du moins l'affir- mation de M. Mertens, l'agent à Paris du Maharadjah de Kapurthala. M. Mertens ajoute seulement que la période du rut est un peu plus difficile chez les Éléphants africains. M. le D'" Trouessart fait observer que les défenses des Éléphants captifs, tout au moins dans les ménageries, sont généralement usées par les animaux eux-mêmes. M. Bourdarre répond que les faits signalés par M. Trouessart sont exacts et qu'il les a lui-même contrôlés et envisagés au point de vue de la production de l'ivoire. Mais si l'on veut en chercher la cause vé- ritable, on verra que l'ivoire n'est pas en péril. En efifet, si l'on consi- dère par exemple, les trois Éléphants du Muséum, on voit qu'ils sont enfermés seuls et libres de leurs mouvements dans des boxes de pierre (rotonde du Muséum) et entourés de grilles et de portes en fer. Ces animaux, désœuvrés et livrés à eux-mêmes dans un espace restreint 128 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION- font mauvais usage de leur force. Les deux jeunes pour jouer, et Sahib pour manifester ses sentiments plus ou moins violents, se précipitent contre le mur, essaient de soulever les lourdes portes, et parfois de démolir les grilles. A ces jeux, les défenses s'écaillent et peuvent même se briser. Que ces Éle'pbants, au contraire, soient employés dans la journe'e à des travaux varies, et que, le soir venu, on les atta- cbe par une patte à un poteau, ils auront toutes raisons pour rester calmes et tranquilles ; leurs de'fenses se développeront normaletnent. C'est le cas pour Sam du Jardin d' Acclimatation qui circule en trans- portant des visiteurs. A vrai dire, les animaux attacbés sont sujets à prendre des tics. Mais en Afrique tous ces inconvénients disparaî- tront. En effet : P On ne bâtira pas aux Éléphants de boxes en pierre et en fer; 2^^ Ils seront enfermés dans des enceintes simplement palissadées ; 3*^ Ils seront occupés à divers travaux ; Dans les intervalles de ces travaux, ils pourront m^me être laissés en liberté, car on est certain de les voir revenir aux heures où l'on aura pris l'habitude de leur donner à manger. Les choses se pas- sent de cette manière en Asie. Au surplus, il y a intérêt à sauvegarder par tous les moyens la crois- sance normale des défenses, puisque celles-ci aident l'animal dans les travaux qu'ils auront à effectuer. C'est même là un usage de Tivoire qu'il convient de ne point passer sous silence. En terminant, M. P. Bourdarie exprime le désir de voir le question- naire rédigé par les soins de la Section et du Comité de l'Éléphant, imprimé et répandu partout en nombreux exemplaires. A propos du questionnaire concernant l'Éléphant d'Afrique, M. le Secrétaire général, d'accord avec M. Milne-Edwards, pense qu'il serait utile de remanier un peu ce questionnaire, dont l'allure actuelle semble être trop scientifique. MM. Trouessart, Bourdarie et Mailles, membres de la Commission spéciale de rédaction du Questionnaire, promettent de revoir le travail à ce point de vue et d'examiner s'il est possible de le modifier dans ce sens. La Section à l'unanimité émoi le vœu que la Société fasse le néces- saire pour obtenir une audience particulière de S. M. le Roi des Belges afin de l'intéresser effectivement à l'œuvre de protection et de domestication de l'Éléphant d'Afrique. Ce vœu sera également soumis à l'approbation de la Section co- loniale. M. le Secrétaire général présente une photographie d'un magasin de défenses d'Éléphants dans les docks d'Anvers (arrivages du Congo) ; cette présentation impressionne visiblement les membres de la Sec- lion, en montrant d'un coup d'œil pour ainsi dire, le massacre extraor- dinaire d'Éléphants qui s'accomplit sans cesse. EXTRAITS DE LA CORRESPONDANCE. i29 M. le Trouessart fait une communication sur les Zèbres vivants et éteints. Notre collègue veut bien promettre de re'diger ce travail pour le Bulletin. Un membre, qui désire garder l'anonyme, proteste contre l'emploi, que fait M. Trouessart, du mot espèce. Cette observation amène une discussion ge'ne'rale sur l'emploi et la définition du mot espèce. L'ac- cord ne pouvant s'e'tablir, la Section décide de reprendre cette discus- sion lors de la prochaine séance. Il sera également traité à cette séance, du dressage des Zèbres et de l'Éléphant d'Afrique. M. le Secrétaire général fait remarquer combien la réunion qui s'achève a présenté d'intérêt, tant à cause des sujets traités, que de la manière dont ils l'ont été. M. de Guerne ajoute que les travaux de la Section des Mammifères seront heureusement complétés, à l'avenir, par ceux de la Section coloniale, beaucoup de sujets d'étude leur étant communs. En conséquence, il invite les membres présents à assister à la première séance de la Section coloniale, le 31 janvier prochain. Cette séance aura lieu dans la grande salle du rez-de- chaussée, sous la présidence de M. Le Mjre de Vilers, président de la Société. Le Secrétaire^ Ch. Mailles. EXTRAITS DE LA CORRESPONDANCE. Les Cantonnements de pêche dans la Méditerranée. — Vœux DE LA Société Marseillaise de pêche La Lucrèce. Noie de M. Macha.do de Carvalho (1). En 1894, sur les indications de notre collègue M. le professeur Ma- rion et de M. le P. Gourret, directeur et sous-directeur de la Station zoologique de Marseille, l'Administration de la Marine décida d'établir dans la rade de Marseille un cantonnement où toute la pêche devait être interdite ; la tolérance fat accordée dans la suite de pêcher à la canne et à la palangrote. Ce cantonnement, qui devait être perma- nent, fut établi pour une période de trois années à titre d'essai. Cette année, les résultats ayant été satisfaisants, une nouvelle prolongation allait être prononcée. [1) Communiquée dans la Séance générale du 26 novembre 1897. Bull. Soc. nat. Accl. Fr. 189S. — 10. 130 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. Une agitation ne tarda pas à se produire à cette nouvelle, agitation fomentée par quelques pêcheurs amateurs et quelques professionnels, mais surtout par de nombreux propriétaires de villas et commerçants du quartier qui pre'tendirent que cette re'serve nuisait à leurs recettes. Des réunions eurent lieu où l'on vota la suppression du cantonnement. Devant ces re'clamations, M. le Ministre de la Marine dele'gua M. Bobet, Commissaire de l'inscription maritime à Marseille, avec mission de se livrer à une enquête, et de fournir un rapport détaille'. Les Syndicats de pêcheurs ont, paraît- il, été consultés; nous igno- rons leur réponse, mais nous devons rappeler ici qu'au Congrès de la pêche côtière, tenu à Marseille en 1893, ou se prononça en faveur de l'établissement des cantonnements sur le littoral. Quant à l'opinion de la Station zoologique, nous avons la cerlitude qu'elle n'a pas changé. Il serait peut-être utile, puisqu'on entend les intéressés par trop directs, d'écouter aussi la voix des autres pêcheurs pour lesquels la pêche n'est point une question financière; ces habitants de la ville se pre'occupent plus de l'avenir des eaux provençales que des intérêts particuliers de ces quelques protestataires. A ce sujet, la Société de pêche La Lucrèce ayant été priée, par un de ses membres, de vouloir bien faire connaître son avis, a rédigé les vœux suivants que je communique à la Société d'Acclimatation, en priant son secrétaire de les faire insérer s'il est possible dans le plus prochain bulletin. « La Société de pêche La Lucrèce^ dans ses séances des 26 octobre » 2 et 9 novembre 1897, présidées par MM. Coste, président, et De- » grais, vice-président, consultée sur la question du maintien ou de- » la suppression du cantonnement de pêche dit de Bonneveine, décide,. » après discussion et à l'unanimité de ses membres présents moins » une voix : » 1° Considérant que le dépeuplement des eaux du littoral provenço- » languedocien est malheureusement un fait certain ; que la principale » cause de ce dépeuplement est sans contredit la pêche intensive à » laquelle on s'est livré depuis de trop longues années. » ^'^ Considérant qu'il faut par tous les moyens s'efforcer d'atténuer » le mal présent et prévenir la disparition du Poisson en vue d'as- » surer aux générations futures une existence que la continuation de » pareils ravages menacerait. » Considérant que l'établissement de cantonnements ou réserves » est un des moyens efficaces d'aider à la reproduction, et par consé- » quent de concourir au repeuplement des eaux ; » La Société de pêche La Lucrèce émet le voeu que le cantonnement » de pêche, dit de Bonneveine soit, sinon agrandi jusqu'à la Pointe » Rouge, du moins maintenu pour une nouvelle période minima de » trois années ; EXTRAITS DE LA CORRESPONDANCE. 13i » Sollicite également la création de re'serves placées sur des points » du littoral propices à la reproduction du Poisson. V 3° Considérant qu'une autre cause de la disparition des Poissons » est l'apport des résidus ou déchets fourni par les diverses usines » établies sur la côte ; » Que ces usines sont soumises à des règlements qu'elles n'obser- » vent pas en ge'néral; » La Société de pêche La Lucrèce émet le vœu que les usines et » fabriques soient rappelées à l'observation des lois et décrets en » vigueur ; qu'elles utilisent puisards et bassins de décantation néces- » saires à la filtration des eaux impures qui proviennent de leurs fabri- » ques, avant de les envoyer à la mer soit directement, soit indirecte- » ment ; » Demande que certains fonds, déjà frappe's de stérilité pour d'autres » causes naturelles, soient affectés par l'autorité et réservés aux jets » de résidus provenant des savonneries, des boues retirées par les » dragues, immondices des ports et des villes; » Réclame une répression sévère des pratiques signalées plus haut » et l'application, dans les eaux salées, du texte de la loi de 1867, » ainsi conçu : « Quiconque aura jeté des substances de nature à » détruire le Poisson sera puni d'une amende de 30 à 800 francs, et » d'un emprisonnement de 1 à 3 mois. » Nous avons la certitude que, s'il a connaissance de cette opinion librement émise par des personnes désintéressées, des amateurs cepen- dant privés d'aller pêcher dans ce cantonnement dont ils comprennent toute l'utilité, M. Bobet voudra bien joindre à son rapport les vœux formulés par la Société de pêche La Lucrèce, afin de lui permettre de prouver en haut lieu avec quelle satisfaction elle approuve cette louable tentative à laquelle elle souhaite un réel succès. Marseille, 11 novembre 1897. La question des cantonnements de pêche, traitée par M. Machado de Carvalho ayant soulevé diverses discussions, il paraît utile de repro- duire ici, à titre de document, un article sur le même sujet publié dans le Moaiteur maritime du 21 novembre 1897. m BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. La théorie et la pratique des réserves de Pêche côtière. — Le Cantonnement d'Endoume, près de Marseille. par Albert Dubout (1). En 1893, le premier Congrès national de la Pêche côlière, réuni à Marseille, sous la pre'sidence de M. Antide Boyer, demanda : « la création à titre d'essai, entre le fortin de l'île des Pendus et Toctroi de Bonneveine, d'une part, et la partie de la côte comprise entre Bon- neveine et le marégraphe, d'autre part, d'un cantonnement de pêche permanent dont la surveillance serait exerce'e par un garde-pêche sous la direction du personnel de la Station zoologique d'Endoume ». Ce vœu fut émis à l'unanimité sur un rapport présente' par M. le D"" Gourret, sous-directeur de cette Station. En outre, les délégués de divers centres de pêche demandèrent que la création de réserves semblables « fût e'tendue aux autres quartiers maritimes du littoral français mëditerrane'en, sauf impossibilité maté- rielle, et que les cantonnements fussent, autant que possible, per- manents». L'ide'e de combattre par les cantonnements la dépopulation des eaux côtières répond à une conception empirique assez confuse des conditions dans lesquelles se perpe'luent naturellement les espèces. Sans entrer dans aucun détail à ce sujet, nous pouvons dire que les cantonnements purement littoraux ne sauraient protéger autre chose que du fre'lin, venu sur les fonds côtiers sous l'influence de causes di- verses et d'ailleurs mal de'termine'es. Ils ne sauraient donc être consi- dérés autrement que comme des sortes de re'scrvoirs, ouverts du côté du large, et préservant les jeunes Poissons contre l'industrie humaine — contre l'industrie humaine seulement — pendant les quelques mois où ils demeurent en stabulalion près des rivages. Sans doute, on peut croire que la protection ainsi accordée à d'in- nombrables jeunes Poissons doit fournir, pour le peuplement des régions voisines, des résultats plus avantageux que l'immersion de larves produites par des piscifactures ; mais, comme à l'égard de celles-ci, on n'est nullement renseigne' sur les chances de survie des jeunes êtres qui ont crû dans l'intérieur des réserves. Pour TAdministration, l'idée de créer des cantonnements ne pouvait manquer de paraître très séduisante. Elle lui permettait d'espérer, en effet, qu'elle pourrait se borner à concentrer sa surveillance sur quelques points bien choisis — au lieu de la disséminer comme elle le fait actuellement sur toute l'étendue du littoral, et dans des conditions de débilité que tout le monde connaît. (1) Extrait àn Moniteur maritime du 21 novembre 1897. EXTRAITS DE LA CORRESPONDANCE. 133 Pour la Marine donc, le cantonnement parut un moyen éminemment pratique d'assurer le peuplement — ou le repeuplement, comme on voudra — des fonds. Mais la de'termination des points où devaient être crée'cs des réserves n'allait pas sans soulever de réelles difficultés. En somme, les gens qui les demandent admettent, en principe, que les pêcheurs littoraux d'une région donnée doivent, en un nombre d'anne'es quelconque, tirer plus de béne'fices de l'exploitation d'une partie seulement de leurs eaux que de leur totalité. Réciproquement, ils admettent que le travail de l'homme s'exerçant sur la totalité de ces eaux doit en pro- voquer, au bout d'un nombre d'années quelconque, la stérilisation. A ce sujet, il n'est peut-être pas inutile de remarquer que, quelle que soit l'intensité du chalutage exercé dans la baie de Seine ou dans la baie de Somme, les pêcheurs y trouvent à peu près tous les ans les mêmes quantités de frétin dans leurs filets, ce qui peut bien nous faire induire que les sources productives de ce flux de vie ne sont point taries ni même appauvries dans leur débit. Quoi qu'il en soit, de nombreux problèmes se posent à l'esprit lorsque l'on voit l'autorité passer de l'hypothèse à l'action et créer une réserve. Pour que celle-ci soit utile, il faut ne'cessairement que les êtres provenant, soit des frayères qui j sont contenues, soit des ter- rains de stabulation qu'elle comprend, se diffusent dans les eaux avoisinantes, La productivité de la surface soustraite à l'action de l'homme doit compenser la destruction faite par l'industrie sur les terrains dont la réserve doit assurer le repeuplement. Or, cette des- truction est fonction du nombre de bateaux et de l'activité du travail des pêcheurs. L'étendue d'un cantonnement doit donc être inversement proportionnelle à sa productivité et directement proportionnelle à l'ac- tivité professionnelle des gens de mer. . . ou au coefficient de destruc- tion dans les eaux libres. Malheureusement, la Productivité d'un ca7itonnemenf, le Coefficient de destruction dans les eaux libres ne sont que des mots. Nous n'avons aucun critérium pour apprécier la valeur de ces termes. D'ailleurs le travail dans une région de pêche est multiforme, et, sous toutes ses formes, il est inévitablement, quoique inégalement, destructeur : le chalutage de la Crevette, la pêche des Oursins au Gangui, la pêche aux Bœufs, détruisent, c'est entendu, de grandes, d'énormes, d'inappréciables quantités de frétin; mais la pêche au Palangre ou à V Entremail ne détruit- elle pas, par contre, d'effrayantes proportions de femelles rognées, qui n'ont pas encore pondu? le Thtjs ne capture-t-il pas des femelles de Langoustes grainées ? Si le Tartanon s'est attiré la réputation d'être un filet inutilement destructeur parce qu'il capture beaucoup de jeunes Bogues et d'mfîmes Rascasses, que devons-nous penser de la Boguière — réputée inotfensive — et qui, à certaines époques, capture des banquées de femelles œuvées? Que 434 BULLETIN DE LA. SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. devons -nous penser également de la pêche de la Rascasse sur « les Moutons » qui détruit ces Poissons sur leurs frayèros ? Il ne suffit donc pas, pour apprécier l'intensité' du travail destruc- teur d'un quartier détermine', de savoir les proportions de bateaux qui y sont arme's pour la pêche aux arts traînants. Et, à la vérité', il est matériellement impossible de connaître le coefficient de destruction aËférent à un centre de pêche. Que conclure de cela si ce n'est que l'on ne peut savoir, même d'une manière très approximative, l'étendue qu'il convient de donner à une réserve afin qu'elle soit assez grande pour assurer le peuple- ment des eaux voisines, sans être cependant trop large ? Dès lors, nous sommes plongés dans l'empirisme le plus pur. Par des tâtonnements seuls, que guident les connaissances incertaines des naturalistes, on peut faire le choix et la délimitation des réserves. Alors surgissent de nouvelles difficultés. La population pêcheuse n'accepte pas, en bloc et sans murmure, l'imposition d'une mesure qui fatalement, la lèse dans ses intérêts immédiats et la gêne dans ses habitudes. En admettant qu'il soit passé outre à leurs récrimina- tions, les pêcheurs s'efforcent de tirer parti individuellement de la région cantonnée et où ils supposent que le Poisson doit grouiller. Quand le bruit s'est répandu qu'un marin a travaillé impunément dans une réserve, on peut être sûr que tous les bateaux du quartier y travailleront à brève échéance, de nuit surtout — alors que les gardes maritimes, dans leurs coquilles de noix, ne peuvent s'aventurer sans danger à la mer. Avec les meilleures intentions du monde, l'Administration n'arrive donc, en créant une réserve qu'à susciter des tentatives de fraude — généralement couronnées du plus grand succès, et qui font consi- dérer ses décisions avec quelque ironie par les intéressés. Néanmoins, nous concevons que, en présence du vœu si ferme émis par le premier Congrès de la Pêche cotiére, la Marine ait cru devoir seconder ce qu'elle ne pouvait manquer de prendre pour un bon mouvement des pêcheurs en vue de combattre le dépeuplement de leurs eaux — dépeuplement dont ils se lamenteut si fort et depuis si long- temps. De plus, un savant professeur de Marseille, M. Marion, avait exposé dans un long et intéressant rapport les conditions que devaient rem- plir, pour produire d'utiles effets, les réserves de pêche marines. Il avait indiqué également la région d'Endoume comme réunissant toutes les conditions nécessaires au succès d'un cantonnement. La variété des fonds, la nature des eaux, la multiplicité des espèces zoo- logiques fréquentant ces eaux, tout concourait là, à former un centre de peuplement remarquablement productif pour la baie de Marseille et, par conséquent, pour les pêcheurs qui l'exploitaient. De plus, M. Marion pensait que l'on pourrait améliorer encore les EXTRAITS DE LA CORRESPONDANCE. 135 avantages naturels offerts par cette région marine. Il conseillait d'y faire des enrochements artificiels pour augmenter la surface de fixa- tion des animaux qui vivent attachés au sol et qui, par eux-mêmes, ou par les infiniment nombreuses larves qu'ils produisent, servent à l'alimentation des jeunes Poissons comestibles. Par ailleurs, la création de ces enrochements devait singulièrement faciliter la sur- veillance de la réserve en s'opposant i'p&o facto à l'usage des engins traînants sur toute son étendue. Enfin, M. Marion proposait également d'utiliser le cantonnement comme centre d'expérimentation pour la propagation artificielle des espèces comestibles importantes — le Homard, entre autres, qui est actuellement disparu des eaux marseillaises; après y avoir été abon- dant autrefois, paraît-il. Mais l'adoption de ce très intéressant projet n'allait pas sans néces- siter des dépenses assez considérables. Les services techniques mari- times s'opposèrent, du reste, à la création d'enrochements artificiels dans la crainte que ceux-ci ne constituassent des dangers pour la navigation des petits navires — des torpilleurs, par exemple. Néan- moins, les zoologistes marseillais admirent que la seule interdiction ■de pêcher dans les eaux du cantonnement qu'ils proposaient ne pou- vait manquer de produire d'utiles effets. Les marins, d'autre part, appuyèrent cette manière de voir, en grande majorité, et, se rangeant à ces avis, la Marine fit décréter l'interdiction de travailler avec quelque engin que ce fût dans la réserve d'Endoume, pendant une •durée de trois années, à partir de septembre 1894, je crois. Or, les gens, qui se tiennent au courant des questions intéressant les pêches maritimes françaises ont pu croire que le cantonnement de Marseille avait parfaitement répondu aux espérances de l'Adminis- tration et des pêcheurs. Au dernier Congrès delà Pêche côtière, tenu à Cette, en février 1897, les délégués marseillais, en effet, ont fait adopter un vœu tendant à maintenir la réserve d'Endoume et à géné- raliser sur les côtes de Provence et de Languedoc la création de réserves du même genre. Les journaux nous ont appris toutefois que les congressistes s'en étaient remis à la Marine pour déterminer les points où elles devaient être établies. On pouvait donc induire de ceci que les pêcheurs marseillais s'étaient convaincus de l'efficacité de leur cantonnement. Tous ceux qui connaissent bien les gens de mer n'ont cependant point accueilli cette idée sans restrictions. Bien des raisons qui n'ont rien à voir avec le souci de protéger les espèces marines peuvent inciter les pêcheurs, en effet, à demander le maintien ou le retrait Td'un cantonnement. De plus, il faut avouer que le hasard eût répondu d'une manière inespérée aux tentatives de la Marine, si, par une ^éserve à peine surveillée et limitée, en somme, d'une façon toute 136 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. empirique, elle avaU pu, du premier coup, effectuer le repeuplement des eaux de Marseille. Mais voici que, comme pour donner raison à notre scepticisme, la Prud'homie de Marseille a émis au mois de mars ou d'avril le vœu suivant : « Conside'rant que, dans le cantonnement d'Endoume aucune recherche scientifique n'a clé faite ; » Conside'rant que dans ces conditions il ne sera pas possible de connaître les re'sultats acquis par le cantonnement; » Conside'rant que le nouveau règlement local sur la pêche côtière sauvegarde le frai et protège les richesses sous-marines des eaux ; » Par ces motifs, la Commission demande à M. le Ministre de la Ma- rine le retrait 'pur et simple du Décret. » Ainsi, nous ne sommes pas plus fîxe's qu'il y a quatre ans sur le rôle que peut jouer un cantonnement en Me'diterrane'e. De mauvaises langues affirment — et il pourrait se faire que ces mauvaises langues disent méchamment la ve'rité — que la demande de cantonnement, formulée parle premier Congrès de la Pêche côtière, avait pour unique but d'empêcher l'usage d'une puissante senne à petite maille, le Bourgin sur la seule plage où cet engin soit pratique- ment utilisable. Les pêcheurs au Bourgin e'taient d'une origine napolitaine ou gé- noise plus fraîche que leurs collègues, leurs filets étaient plus puis- sants que ceux de ces derniers : rivalité' de race, rivalité de métier, concurrence commerciale, sont autant de facteurs qui ont concouru — beaucoup plus siirement que les travaux des hommes de science, soucieux uniquement du bien général — à faire demander aux pê- cheurs la cre'alion du cantonnement de Marseille. Comme aujourd'hui le Bourgin n'est probablement plus employé dans les limites de leur circonscription prud'hommale, les pêcheurs marseillais renoncent au cantonnement qu'ils ont demandé. Ils pensaient, il y a quatre ans, que l'Administration ne se résou- drait pas à s'associer à leurs querelles professionnelles et qu'elle recu- lerait devant l'interdiction absolue de l'emploi du Bourgin- Par un moyen détourné — et d'ailleurs habile — ils sont arrivés à leur fin. Et, maintenant, dans le projet de Règlement local, auquel il est fait allusion dans le vœu que j'ai cité plus haut^ la Commission marseil- laise se borne à insérer le petit article qui suit : « Art. 79. — Les Bregins (Bourgins) Ganguis, Petits ganguis. . . etc., sont prohibés. » Comme nous voici loin des conside'rations théoriques que nous rap- pelions au début de cet article, et des recherches ou préoccupations des gens de science qui étudient la fixation et la limitation des ré- serves ! Hélas ! il est à prévoir que, sous une forme plus ou moins différente, EXTRAITS ET ANALYSES. 137 ce qui s'est passé à Marseille est susceptible de se produire dans tous les quartiers de notre littoral provençal languedocien... et même ponantais. EXTRAITS ET ANALYSES. La Mouche empoisonnée Tsé-Tsé, par Edouard Foa (1). Tout autour du Transvaal, et sur les confins des pays voisins, les cartes marquent d'un pointillé un espace d'environ 50 milles de lar- geur. C'est le district de la Tsé-Tse' ou Mouche venimeuse dont j'ai de'jà parlé à plusieurs reprises et que j'essayerai de décrire ici de mon mieux. Je n'ai jamais pu découvrir, malgré de nombreuses recherches, pourquoi on l'a appelée ainsi. Les Zoulous, dont le langage a servi évidemment à former la langue bautou, la nomment Enzouezelana ou Isiba. Les Magandjas du sud du lacNyassa, les Maravis, les Angouins et Mpesenis, la désignent sous le nom de Kamzemba ; les Yaos disent 3Iemba\ les Magandjas du Sud disent Memba, Mzaba ou Bouboula; enfin toutes les populations riveraines du Zambèze sans exception, de l'Océan aux deuxièmes cataractes, disent Pepsi, en parlant de la ter- rible Mouche empoisonnée. Livingstone, et après lui Gapello et Ivens, parlent de cet Insecte sous le nom de Tsé-isé. Il faut croire que le voyageur a adopte' ce mot pour avoir mal prononcé ou entendu le mot Pepsi qui se prononce P'hepsi, l'A étant aspiré comme dans le mot hâter. Au temps de l'expédition anglaise en Abyssinie, la Mouche fit des ravages tels parmi les Chevaux et les bestiaux que l'attention fut appelée sur elle. Peut-être, d'ailleurs, Tse'-Tse' est-il le mot abyssin. En tout cas, il est inconnu dans l'hémisphère austral : celui de Zimb, que certains auteurs indiquent, m'est également inconnu. Quoi qu'il en soit, va pour Tsé-Tsé. Ce Diptère est déjà classe par les naturalistes dans la famille des Muscidés, genre Olossina^ sous le nom de Glossina morsîtans. Les Anglais on fait quelques expériences sur son venin et une étude som- maire sur sa conformation; mais la plus grande partie du public ignore encore ce qu'est ce redoutable Insecte ; aussi docnerai-je ici quelques détails sur ses mœurs. (1) Extrait, avec l'autorisation des éditeurs, MM. Pion et Nourrit, du livre de M. Ed. Foa : Du Cap au lac Nyassa, Paris, 1897. 138 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. La Tse'-Tsé a la taille et les proportions de notre Mouche domes- tique ; son abdomen est raye transversalement de brun et de noir, le reste du corps est noirâtre ou gris foncé ; les ailes, lorsqu'elle est posée, ne sont pas l'une à côte' de l'autre, comme dans notre Jlusca domestica, mais bien superposées ; en avant de la lèie, elle possède de petits tentacules raides, au nombre de trois, ressemblant à Tsé-Tsé [G lossinamorsitans) bouquet de poils. Son aspect n'a rien de de grandeur naturelle (1). repoussant ni de particulier pour celui qui ne la connaît pas. Elle vole avec une extrême vitesse, et il est presque impossible de la distinguer dans l'espace quand elle est à jeun ; lorsqu'elle a l'abdomen gonfle' de sang, son vol s'a- lourdit et elle se cache immédiatement pour dige'rer en paix ; en toute * autre occasion, on ne la voit que juste au moment où elle se pose. Son agilité' fait qu'il n'est pas possible de l'attraper comme une Mouche ordinaire. Il y a d'autres moyens que j'indiquerai plus loin. Quand elle se pose, elle le fait avec tant de délicatesse qu'on ne la sent pas; elle reste ainsi de quinze à vingt secondes immobile, son aiguillon dirigé en avant^ dans une altitude méfiante, prête à s'envoler. Lors- qu'elle croit être en sécurité, elle abaisse lentement son dard, écarte ses pattes de façon que son ventre soit sur la peau, et elle pique la chair sans produire aucune douleur au début, comme le Moustique. La prévoyante nature a voulu faire sécréter par ces Insectes un liquide qui insensibilise momentane'ment la piqûre qu'ils font, de sorte qu'ils peuvent se nourrir avant d'être chassés : sans ce liquide ils mour- raient infailliblement de faim. Au moment où la Tsé-Tsé pénètre dans la chair, elle indique sa satisfaction par un petit bruit to, bz... répété cinq ou six fois, et qu'on ne peut entendre que lorsqu'elle pique sur l'épaule ou dans le voisinage de l'oreille ; son arrivée près de la tête est également signalée par le frou-frou d'ailes que l'on connaît chez la Mouche domestique, mais de très courte durée, vu la vitesse avec laquelle la Tsé-Tsé arrive et se pose. Ces légers bruits sont les seuls avertissements que reçoive la victime, dans la chair de laquelle disparaît complètement l'aiguillon, qui a au moins un tiers de centi- mètre. La bestiole reste ainsi, immobile, suçant le sang, tandis que son abdomen grossit, grossit, devenant par transparence rose d'abord, puis rouge foncé. Ce n'est qu'au moment où elle a déjà pris une grande partie de sa nourriture qu'on ressent une légère douleur ou plutôt une démangeaison à laquelle on ne fait, le plus souvent, aucune attention. La plupart du temps, on porte distraitement la main (1) Cliché obligeamment prêté à la Société par MM. Asselin et Houzeau, édi- teurs du Traité de Zoologie médicale et agricole du Professeur Railliet dont il a été tiré. EXTRAITS ET ANALYSES. 439 au point piqué, et les doigts rencontrent la Mouche repue qui s'échappe aussitôt. Lorsqu'on y fait attention, il est facile de tuer l'Insecte, ce qui est toujours une vengeance agréable. Il faut ajouter que le corps de la Tsé-Tsé est beaucoup plus re'sistant que celui de la Mouche ordinaire ; en frappant souvent de toute sa force, et assez vite pour l'atteindre, on ne parvient pas toujours à l'empêcher de s'échapper. Lorsqu'elle a le ventre plein, il est encore fort difficile de l'attraper avec la main parce que, au lieu de s'élever en volant, elle s'esquive rapidement de côte'. Les indigènes m'ont enseigné à la prendre d'une autre façon : on place la lame d'un couteau à plat, à 30 centimètres de la Mouche, sur le bras ou sur la partie où elle est posée ; ou fait glisser lente- ment cette lame qui vient rencontrer et saisir l'aiguillon de la Mouche, encore dans la chair, et on fait ainsi celle-ci prisonnière. Sans cesser de presser, on relève la lame, on la retourne et on tue la Mouche, ou bien on la saisit avec les doigts ; on a, naturellement déjà e'té pique' par elle; on se console, en pensant que c'est toujours un ennemi de moins parmi les milliers qui voltigent autour de vous. Cette façon de la prendre avec la lame d'un couteau semble prouver qu'elle n'y voit ni devant ni dessous. Examinée au microscope, d'après une note du docteur May Fi- guerra, publiée par MM. Capello et Ivens, la Tsé-Tsé oQre les carac- tères suivants : les yeux, dits composés à trois facettes, occupent la plus grande partie de la tête et sont disposés en ovale au nombre d'environ trois mille de chaque côté. Les ailes sont un peu plus longues que celles de la Mouche domestique. L'abdomen est formé de six segments et couvert de poils durs, ainsi que les pattes. Celles-ci sont terminées par deux petits crochets très aigus, auxquels s'oppose un troisième tentacule qui fait piuce et sert à la Mouche pour s'accrocher sur le poil et sur la peau des animaux. La trompe ou aiguillon n'est pas seulement un etui souple protégeant la pointe ou dard qui fait la blessure ; elle sert également de suçoir à l'animal. De chaque côte' de la trompe, sont deux légères antennes ou papilles avec lesquelles rinsecte tâte les tissus avant de les piquer ; cette particularité existe aussi chez le Moustique. Le docteur May Figuerra ajoute qu'il n'a pu découvrir les glandes à venin ; mais MM- Capello et Ivens ne lui avaient donné à étudier que de spécimens avariés (1). J'arrive maintenant aux effets de la piqûre sur les animaux domes- tiques en ne citant parmi ces derniers que ceux que l'on est appelé à posséder en Afrique : le Bœuf, le Chien, le Cheval, l'Ane, le Mulet, le Mouton, le Porc et la Chèvre. (1) J'ai rapporté dans mes collections plusieurs centaines de Tsé-Tsé, par- faitement conservées, afin de les soumettre à l'examen de personnes curieuses d'étudier l'Insecte et qui voudraient chercher l'antidote du venin. no BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLlMATATlOxV. Livingstone dit que cette dernière, et quelquefois l'Ane, sont exempts des suites de la piqûre, tandis que toutes les autres bêtes en meurent. Je puis dire, en ayant fait plusieurs fois l'expérience, qu'aucun des animaux que je viens de citer ne survit à un nombre de piqûres suffisamment grand. La faune locale est inoculée dès sa jeunesse par le venin de la Mouche ; c'est d'ailleurs sur elle que cette dernière prend sa nourriture. Mais lorsque, accidentellement, la Tsé-Tsé rencontre des animaux domes- tiques, elle s'acharne à leur poursuite d'une façon particulière. La bête sent d'instinct le danger qui la menace; elle fait des bonds, des écarts et, après la première piqûre, le bruit seul de la Mouche l'afifole littéralement : elle perd la tête, s'enfuit, espérant ainsi distancer l'Insecte meurtrier qui bourdonne autour d'elle. Que sa vue soit per- çante ou son odorat exceptionnellement délicat, toujours est-il que la Mouche venimeuse vient de fort loin sur sa proie. Je pencherais plu- tôt pour la dernière hypothèse ayant remarqué que le Diptère arrive toujours dessous le vent et qu'il pique, en général, plutôt de ce côté. Il se tient sous les feuilles, et non dessus, car on ne le voit jamais, et il préfère l'ombre au soleil. Il craint particulièrement l'odeur des excréments ; par exemple, dès qu'on tue une Antilope, la Tsé-Tsé couvre littéralement gibier et chasseurs; eh! bien, pour s'en débar- rasser, on n'a qu'à ouvrir le ventre de l'annimal et à vider les en- trailles : l'Insecle cesse aussitôt de vous harceler. Les premiers symptômes qui caractérisent l'animal piqué sont les suivants : première phase, œil larmoyant, fatigue et lassitude gé- nérales, tristesse, tête basse, nez ou naseaux brûlants ; deuxième phase, abattement plus prononcé, chassie abondante, humeur vis- queuse jaunâtre découlant des naseaux, faiblesse, manque d'appétit, peau chaude, engorgement des glandes sous maxillaires, poil terne, muscles flasques ; troisième phase, maigreur prononcée, aspect très abattu, cornée de l'œil jaune; quatrième et dernière phase, humeur visqueuse des naseaux plus abondante et découlant également des lèvres en écume jaunâtre , urines mélangées de sang, diarrhée et enfin mort dans un état méconnaissable. Cet exemple est pris sur des Bœufs : il reproduit les diagnostics que les autres voyageurs indiquent et que j'ai vérifiés moi-même de point en point. Souvent, on ne les observe pas tous chez le même animal; mais ils sont tous causés par la Tsé-Tsé. Il y a un élément très important à considérer au point de vue de la marche de la maladie : c'est le nombre des pi- qûres qui ont été faites ; une seule suffit pour amener la mort du Bœuf le plus robuste ; cinquante piqûres le tuent en une semaine, mille en quelques jours. Les symptômes augmentent d'intensité dans les mêmes circonstances. J'ai vu de mes yeux (et ceci est l'expérience dont je parlais plus haut), un magnifique Bouc apprivoisé, que j'avais avec moi lors de EXTRAITS ET ANALYSES. 141 mon voyage dans la Maravie, mourir en une heure, deux ans plus tard. Ayant lu que la Chèvre était indemne, je m'intéressai d'autant plus à cet événement. Nous étions dans le lit d'une rivière à sec, où la Tsé-Tsé bourdonnait par nuées ; ce fut un tel martyre pour nous, que je levai le camp aussitôt le repas terminé, laissant mon pauvre Bouc déjà raide et froid, écumant, l'œil hors de la tête, le corps contracté. Pour asseoir plus solidement ma conviction, j'ai renou- velé cette expérience à une autre époque, en menant une Chèvre en magnifique état dans un district où la Tse'-Tse' était particulière- ment abondante, et où j'avais l'habitude d'aller chasser; j'attachai l'animal à un piquet et l'y laissai toute la journée; le soir venu la bête était littéralement folle; elle s'élançait sur nous, sur des arbres; elle se roulait par terre : l'inoculation ayant été moins grande que lors démon autre expérience, elle mourut, non pas ce jour-là, mais le lendemain soir. Une humeur abondante découlait de ses yeux et de ses naseaux, et l'intérieur du corps était presque en décomposition trois heures après la mort. 11 est à supposer qu'il en est de même pour l'Ane. Il se pourrait bien que la Tsé-Tsé n'aimât pas l'odeur de la Chèvre, du Mulet, de l'Ane et qu'elle leur préférât les autres animaux domes- tiques ; mais, à défaut de ceux-ci, elle pique aussi bien les premiers, qui peut-être aussi sont moins vulnérables, en ce sens qu'une piqûre ne suffit pas pour les tuer ou les incommoder ; mais le résultat qu'une seule est impuissante à obtenir, mille finissent par l'atteindre. L'autopsie sommaire d'un Bœuf mort par la Tsé-Tsé présente des signes de désordres internes extraordinaires : le cœur, le foie, les pou- mons tombent en morceaux sous la moindre pression du doigt ; leurs particules se désagrègent, les intestins sont pleins d'une humeur jau- nâtre et collante, et ils ne contiennent rien d'autre ; la vésicule bi- liaire, rebondie, atteint trois ou quatre fois son volume ordinaire ; le peu de graisse qui reste ressemble à de la corne jaune et transparente ; l'ensemble exhale une odeur sut generis indescriptible. Il n'y a plus ou presque plus de sang dans les veines. Les tissus musculaires semblent se décoller des parties charnues ; on constate quelquefois (je n'ai pu vérifier cette assertion) des hémorragies intercellulaires locales. On prétend que les animaux au poil blanc sont piqués de préférence par la Mouche ; il faut comprendre par là qu'ils succombent les pre- miers, car ceux de couleur noire n'échappent pas plus qu'eux à leur terrible destinée, dans les districts infestés. Il n'y a, selon moi, aucun doute à avoir concernant l'innocuité de la piqûre pour les animaux sauvages. Qu'elle leur soit désagréable, comme toute Mouche aux Quadrupèdes, j'en conviens ; mais je n'ai jamais vu ou entendu parler d'une bête sauvage qui en éprouve autre chose qu'une tracasserie. Et néanmoins, la Tsé-Tsé suit le grand gibier : on peut être certain qu'elle existe partout où on la trouve. 142 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. Quand les animaux sauvages sont exterminés dans un endroit, la Tse'- Tsé en émigré. Elle affectionne particulièrement le Buffle et les grandes Antilopes ; aussi peut-on être certain qu'on trouve ces animaux par- tout où l'on rencontre la Tsé-Tse, tandis que, dans certains districts de petit gibier, on ne la voit pas. Aujourd'hui, dans toute l'Afrique du Sud, au fur et à mesure que la civilisation, les armes à feu et les chasseurs s'avancent dans l'in- térieur, le gibier déserte ou recule, emmenant la Tse'-Tsé ; le jour où l'on aura détruit l'un, l'autre disparaîtra. A l'appui de mon dire, voici les districts principaux où la Tsé-Tsé (el la faune locale par consé- quent), se trouve confinée aujourd'hui, d'après les derniers renseigne- ments : limites nord et est du Transvaal, sud du Matabelé et ouest du pays de Gaza, Kalahari, bassin nord et sud du Zambéze, ouest du Mashonaland. On a essayé de plusieurs remèdes : le dégoût de la Tsé-Tsé pour les excréments a donné l'idée d'en frotter les animaux qu'on veut pré- server ; VAssa fœtida a été expérimentée également, ainsi que la téré- benthine. J'ai moi-môme fait oindre de pétrole, tous les quarts d'heure, par un homme chargé de ce travail, un Chien que je voulais faire passer indemne à travers un district de Tsé-Tsé; il est mort un mois après. Tous ces remèdes sont impuissants. Quelle immense reconnaissance ne devront pas les voyageurs de l'avenir à celui qui aura trouvé le préservatif contre la piqûre de la Tsé-Tsé et leur permettra de voyager à Cheval, d'avoir des Chiens et des bestiaux dans tout le pays ! Et l'Homme, maintenant, que ressent-il après la piqûre de l'Insecte venimeux? L'impression de la démangeaison se change au bout de quelques secondes en un prurit douloureux qui dure à peu près un quarc d'heure ; la partie piquée, rougit, enfle légèrement et continue à gêner pendant un moment. Un grand nombre de piqûres peuvent jeter incontestablement du désordre dans l'organisme ; elles ont surtout le don de surexciter outre mesure ; un sentiment de rage s'ajoute à la souffrance. Les parties que la Mouche affectionne chez l'homme sont généralement celles qui sont à découvert : mains, bras, cou, jambes, joues, toujours à l'ombre autant que possible. Pendant mes nombreuses chasses et mes marches continuelles, il m'est arrivé d'être pris, à la suite d'innombrables piqûres, d'un accès de rage froide ; dans ce cas, pour me calmer, j'avais coutume de m'as- seoir, de prendre mon couteau et de capturer les Mouches; sortant ensuite d'une petite trousse de poche de minuscules ciseaux, je m'a- musais à les torturer en leur coupant les pattes par petites tranches, ainsi que l'aiguillon, les ailes et les antennes ; après cette opération, je me gardais bien de les tuer comme les Noirs, qui leur arrachent la tête. Je faisais durer le supplice en les plaçant simplement au soleil sur quelque pierre. Après une dizaine d'exécutions, nous repartions EXTRAITS ET ANALYSES. ainsi, continuant avec des paquets de feuilles, à nous battre par tout le corps pour claquer le maudit Insecte. J'ajouterai comme dernier renseignement, que les effets de la piqûre sont particulièrement rapides sur les animaux domestiques, au mo- ment des pluies. Une autre particularité qui aurait été observée, c'est que les petits à la mamelle ne souffrent pas de l'empoisonnement ; ils doivent néanmoins s'en ressentir ; car le lait d'une mère malade , sans appétit, subissant de grandes souffrances, ne peut être ni sain, ni nourrissant. X Sur une Graminée du Soudan {Paspalum longiftorum], par J. Dybowsk:. Les indigènes du Soudan ne font pas entrer, comme on le sait, dans leur alimentation les céréales cultivées en Europe. Celles-ci sont rem- placées par d'autres produits et particulièrement par le Maïs, le Sorgho et le Riz de montagne. A ces graminées dont l'usage est depuis long- temps connu, il faut en ajouter une autre qui, bien que d'un emploi très répandu, n'avait pas encore été classée parmi les céréales alimen- taires. Il s'agit d'une herbe aux rameaux ténus, aux épis grêles et qui ce- pendant produit un grain très recherché par les indigènes du Soudan, auxquels elle fournit un appoint important dans l'alimentation cou- rante. Cette Graminée est désignée sous les noms botaniques de Digitaria longîfLora à.Q Persoon, ou sous celui de Paspalum longiflorum de Retz (1). Elle croît à l'état spontané dans toute la région tropicale et subtropi- cale de l'ancien monde où elle couvre parfois de vastes plaines. Mais nulle part elle n'a été signalée comme alimentaire en dehors du Sou- dan occidental. Le capitaine Binger, dans la relation de son remar- quable voyage, dit qu'elle concourt à l'alimentation des indigènes du Soudan central. En Guinée française, dans le Fouta-Djalon, où elle est connue sous le nom indigène de Foundounié, elle est l'objet d'une culture réguliè- rement pratiquée. La plante cultivée diffère du type sauvage par ses achaines plus gros et surtout plus ovoïdes ; elle offre en même temps cette particu- (1) Ex Hooker, Fl. ind., t. IV, p. 17. 144 BULLETIN BE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. laritc d'être complètement glabre, alors qu'à l'état spontané' elle est hispide. De plus, les glumes sont peu adhérentes et le grain se moud avec la plus grande facilité. En Guinée française, la culture se fait en répandant la graine sur le sol que l'on a débarrassé de la brousse par l'incendie. En trois mois, la plante se développe et porte graines. Celles-ci se séparent facilement par le battage : on les moud en les triturant dans un mortier en bois. La semoule que l'on obtient ainsi constitue un aliment d'une très haute valeur nutritive. L'analyse chimique montre en effet que la composition de ces graines les rapproche de beaucoup du Riz ; cependant elle s'en dis- tingue par une abondance plus grande de matières grasses, qui se trouvent être en quantité sensiblement égale à celle que renferment les graines de Millet. Composition chimique des graines de Paspalum longiflorum Retz.^ comparées aux autres Graminées. PASPA- Mtr.MîT Bî.É SKlr.f.E ORGE M Al-; RIZ SAH- LUM HAZIN Eau 9,20 11,66 13,63 15,06 13,77 13,02 13,11 11,93 7,67 9,?5 12,3o 11,52 11,14 9,85 7,85 10,30 Matières grasses, . . . 5,34 3,50 1,75 1,79 2,16 4,62 0,88 2,81 Amidon et dextrine. 73,33 6a, 9o 67,91 67,81 66,93 68,41 76,52 55,81 '>,56 7,29 2,53 2,01 3,31 2,49 0,63 16,43 3,90 2,3o 1,81 1,81 2,69 1.51 1,01 2,72 Le son est relativement peu abondant. Il représente 9,75 % du poids de la graine. L'examen microscopique montre que les grains d'amidon du Paspa- lum longiflorum ont une grande analogie avec ceux du Maïs dont ils se distinguent cependant avec facilité par leurs dimensions plus faibles, puisqu'ils ne mesurent jamais plus de 19 millièmes de millimètre. Tous les grains sont de volume sensiblement uniforme et l'on n'en rencontre que peu mesurant moins de 12 millimètres. La forme du bile établit également un caractère optique très net; il est, en effet, large et présente une forme anfractueuse. Par ses qualités nutritives et la facilité de sa culture, cette Gra- minée mérite d'être rangée au nombre des plus utiles céréales, il peut être intéressant d'en encourager la culture dans nos colonies (1). (1) Compt. rend. Acad. des Sciences, Paris, séance du 7 mars 1898. REVUE DES CULTURES COLONIALES Directeur : A. MILHE-POUTINGON, Docteur en droit. Directeur du Service de l'Afrique et des Antilles à VUmo?i coloniale française, Vice-Président de la Seciion coloniale à la Société Nationale d'Acclimatation de France. Créée sous les auspices de l'Union coloniale française, cette nouvelle publication a pour but défaire mieux connaître, en France, les diverses cultures et les productions coloniales ; de vulgariser dans les colonies les meilleurs procédés de culture, d'y provoquer l'introduction des meilleures variétés des plantes françaises actuellement cultivées et l'acclimatation de plantes nouvelles. COMITÉ DE PATRONAGE DE LA REVUE MU. Le prince D'ARENBERG. député, vice-président du Groupe colonial, président du r,omité de l'Afrique française. Le commandant BINGER, ancien gouverneur de la Côte- d'Ivoire, directeur des affaires de l'Afrique au Ministère des Colonies. PAUL BOURDE, ancien directeur des contrôles et de l'agri- culture en Tunisie, ancien secrétaire général à Madagascar. BUREAU, professeur de botanique au Muséum. J. CHAILLEY-BERT, professeur à l'Ecole des Sciences poli- tiques, secrétaire général de ÏUnion coloniale française. CHARLES-ROUX, ancien député, membre du Conseil supérieur du commerce, vice-président du Groupe colonial. CORNU, professeur de culture au Muséum. DEHERAIN, membre de l'Iostitut, professeur de chimie agri- cole au Muséum et à l'Ecole d'agriculture de Grignon. MARCEL DUBOIS, professeur de géographie coloniale à l'Uni- versité de Paris. DYBOWSKY, dirocteur de l'agriculture et du commerce en Tunisie, profi^sseur de cultures coloniales à l'insiitul natio- nal agronomique. H. FLAHAUT, professeur de botanique à l'Université de Montpellier. LOUIS GRANDEAU. directeur de la Station açironomique de l'Est, rédacteur en chef du Journal d'Agriculture pratique. GRANDIDIER, membre de l'Institut. MM. Baron Joles de GUERNE, secrétaire général de la Société na- tionale d'Acclimatation. Dr HECKEL, professeur à la Faculté des Sciences, directeur de l'Institut colonial de Marseille. LE MYRE DE ViLERS, député de la Cochinchine, président de la Société nationale d'Acclimatation. Mgr LEROY, supérieur général des Missionnaires du St-Esprit. MILNE-EDWARDS, membre de l'Institut, directeur du Muséum CH. NAUDIN, membre de l'Institut. OLIVIER, docteur ès sciences, directeur de la Revue flé- nérale des Sciences pures et appliquées. PRILL1EUX, sénateur, inspecteur géuéral de l'Enseignement asricole, profes>- de Botanique à l'Institut National agronom. POISSON, assistant au Muséum. RISLER, directeur de l'Institut national agronomique. RIVIÈRE, ancien président de laSociélé d'Agriculture d'Alger direi ieur du Jardin d'essai du Hamma. D'" TREILLE, ancien inspecteur eu chef du service de santé des Colonies. VIALA, professeur de viticulture à l'Institut national agrono- mique, directeur delà Revue de Viticulture. H. DE VILMORIN, membre de la Société nationale d'Agricul- ture. ZOLLA, professeur à l'Ecole d'agriculture de Grignon et à l'Ecole des sciences politiques. La Revue des Cultures coloniales paraît le 5 de chaque mois. Bureaux : 44, rue de la Chaussée d'Antin, Paris. Aàonnemejits : un an : France, 12 francs — recouvre à domicile, 12 fr. 50. — Colonies et Union postale, 15 francs. — Payement d'avance. PEINTURE IGNIFUGE DITE ANTI-PÉTROLEUR Au moment où l'horrible désastre du Bazar de la Charité est encore présent a toutes les mé- moires, il convient de signaler la découverte récente, par M. de Preux, d'un produit désigné sous le nom d'Anti-Pétroletir et qui rend les objets traités par lui absolument incombustibles. M. de Preux a fait, il y a peu de temps, à Saultain, près Valenciennes, des expériences déci- sives à ce sujet. Deux baraques de bois blanc recouvertes de carton bitumé et tendues de jute, Tune imprégnée du nouveau produit, l'autre à l'état naturel, ont été remplies de copeaux imbibés d'éther. Les copeaux ayant été allumés, la baraque qui avait subi la préparation resta complètement intacte, tandis que l'autre était détruite en quelques instants. Mis en présence d'un chalumeau dégageant 1,200 degrés de chaleur, le bois n'est percé qu'après 25 minutes et le carton bitumé se contracte, mais ne brûle pas et ne se fond pas. Les objets en celluloïd ne s'enflamment pas lors- qu'ils ont été traités par VAnti-Pétroleur. Après les mêmes expériences faites en grand à l'Exposition de Bruxelles, au parc du Cinquan- tenaire, le Jury international a accordé, à l'unanimité avec ses plus sincères félicitations, à VA7iti-Pétroleur, un diplôme de médaille d'or, la plus haute récompense dont il pouva'it disposer. Le produit invente par M. de Preux rendra d'immenses services. Il est déjà employé dans un certain nombre d'usines et il a été adopté par la Compagnie du Nord qui s'en sert dans ses * dépôts de machines. S'adresser pour les commandes et les renseignements au régisseur du château de la Villelte > à Saullain (Nord). i — ^ ^ ^ . — ^ — _ Charles NAUDIN Membre de l'Institut Académie des Sciences) Directeur du laboratoire de botanique de la Villa Thuret, à Autibes ET Le Baron F. Von MUELLER Botaniste du gouvernement anglais à Melbourne MANUEL L'AC CLIMAT EUR OU CHOIX DE PLANTES RECOMMANDÉES POUR L'AGRICULTURE, L'INDUSTRIE ET LA MÉDECINE Adaptées aux divers climats de V Europe et des pays tropicaux OUTRAGE PUBLIÉ AUX FRAIS ET SOUS LES AUSPICES DE LA Société nationale d'Acclvnatation de France Un volume in-8° de près de 600 pages avec portrait INTRODUCTION : Considérations générales sur l'acclimatation des plantes; ■ Aperçu général des genres de plantes auxquels sont empruntées des espèces déjà utilisées ou qui peuvent Têtre ; Description sommaire des familles ou groupes naturels auxquels se rattachent la plupart des plantes indiquées dans ce volume ; Noms vulgaires des plantes et synonymes rapportés aux noms botaniques, Enumération par ordre alphabétique des plantes, leurs usages et leur culture, formant un dictionnaire des végétaux à acclimater dans les diverses régions du globe ; Noms des auteurs cités dans le cours de l'ouvrage avec les abréviations usitées. Pbix : 7 Francs Pour le3 Membres de la Société Nationale d'Acclimatation de France, 3 fr. 50 EN VENTE AU SIÈGE DE LA Société nationale d'Acclimatation de France, 41, Rue de Lille, PARIS. I Le Secrétaire GéBéral, géraot, Jules de GUERNE. Versailles. — Imprimeries Cerf, 59, rue Duplessis. I In dice décimal. 506 'Ô8I.52 591.52 BULLETIN DE LA LI 0' DE FRANCE (Revue des Sciences naturelles appliquées) 45« ANNÉE MAI 18Q8 SOMMAIRE THIÉBAUX. — Essais d'Acclimatation du Rossignol du Japon aux environs de Paris. 14'5 A. DELAVAL. — La Jacinthe d'eau [Piaropus crassipes] cultivée à Saint-Max-les- Nancy (Meurthe-et-Moselle) 151 A. MILHE-POUTINGON. — Allocution prononcée à l'ouverture de la section de colo- nisation dans la séance du 3t janvier 1898 . 154 Extraits des procès-verhaux des séances de la Société : "2® Section : Ornithologie. — Séance du 31 Janvier 1898 159 3® Section : Aquiculture. — Séance du 7 Février 1898 160 Extraits de la Correspondance : G. A. BLOM. — Mammifères apprivoisés au Congo français 163 A. PETTIT. — Manière d'envoyer des Poissons malades, etc 164 Edq. TRIGANT-GENESTE. — Les attelages de Chiens 163 J. CLARTÉ. — Appel aux enfants pour la protection des Oiseaux utiles. — L'Acclima- tation à Coquimbo (Chili) de Faisans importés d'Angleterre 171 Extraits et Analyses: LACAUX. — La culture de l'Olivier en Tripolitaine 175 La Société ne prend sous sa responsabilité aucune des opinions émises par les auteurs des articles insérés dans le Bulletin. Un numéro 2 francs ; pour les membres de la Société 1 fr. 50 AU SIÈGE DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE D'aCGLIMATATION DE FRANCE 4:1, RUE DE LILLE, 4rl PARIS ET A LA LIBRAIRIE CERF, 12, RUE SAINTE-ANNE Le Bulletin paraît tous les mois. CRÉSYL-JEYES Ch •H 0 u u 0 0 •H DESINFECTANT AITTISEPTIQUE Le seul joignant à son Efficacité, scientifiquement aémontrÉe, l'immense avantage de n'être ni Toxiqn© ni Oorrosif. Hémostatique et Styptîque puissant. 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Voici, tout d'abord, quelques renseignements sur les con- ditions dans lesquelles j'ai fait cet essai. Ma propriété comprend environ 34 hectares d'un seul tenant, entièrement clos de murs et limités par quatre routes; sur une des faces s'étendent des friches et des taillis qui se relient aux bois de Meaux, distants de 300 mètres; sur deux autres des terres en culture, céréales et prairies artificielles vont rejoindre également des bois peu éloignés; enfin, sur la quatrième se trouve un petit hameau riverain de la Marne. La propriété est divisée en deux parties assez distinctes : d'un côté, 5 hectares environ en parc à l'anglaise avec pe- louses, massifs, pièces d'eau, maison d'habitation et maison de jardinier, communs, serre et potager ; de l'autre, environ 29 hectares entièrement boisés, sauf une petite plaine cen- trale de près de 2 hectares au milieu de laquelle une maison- nette sert d'habitation à un bûcheron. Peu de temps après l'acquisition de ma propriété, je fus frappé par l'absence presque complète de petits Oiseaux et le manque de vie et de gaieté qui en résultait. Par contre, les Insectes, surtout les Taons, pullulaient au point d'incommoder les maçons et autres ouvriers qui, pendant un été, travail- lèrent à la maison d'habitation. Désireux de remédier à cet état de choses, je fis faire la (1) Lettre lue à la séance de la Section d'Ornithologie, le 2 mai 1898. Bîdl. Soc. nat. Accl. Fr. 1898. — 11. U6 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. guerre aux nombreux Ecureuils qui contribuaient à la dépo- pulation en saccageant les nids ; je fis détruire une cinquan- taine de bêtes puantes, Putois, Fouines ou Belettes, quelques Chats sauvages, une douzaine de Buses, des Corbeaux, des Pies et autres Oiseaux malfaisants; enfin, je fis amener au centre du bois, dans une grande vasque plate en ciment, un courant d'eau vive, coulant hiver comme été. Les effets de ces différentes mesures furent satisfaisants et rapides : dès la deuxième année, les petits Oiseaux, devenus nombreux, égayaient la propriété de leurs chants et de leurs ébats et ramenaient à une proportion normale l'affluence d'Insectes que j'avais remarquée l'année précédente. Pendant que je me préoccupais de la reconstitution de mes richesses en Oiseaux insectivores, un petit fait, qui ne m'eût peut-être pas frappé en tout autre moment, vint me faire penser aa Rossignol du Japon, comme appoint intéressant. J'avais, en cage à Paris, un de ces Rossignols. Un jour, une Mouche étourdie eut la malheureuse idée de vouloir traverser en volant un angle de la cage, l'Oiseau se trouvant à l'autre extrémité ; la Mouche avait bien peu à faire pour se mettre en sûreté, elle n'en eut pas le temps, le Rossignol se précipita sur elle avec une telle impétuosité, qu'il la cueillit au voî, avec la rapidité de l'éclair. L'Oiseau avait bien choisi son moment pour accomplir cette petite prouesse; étant donné mon état d'esprit, l'idée d'essayer chez moi l'acclimatation de sa race en découla tout naturellement. Je vous demandai, à cette époque, si vous aviez connais- sance que des essais eussent été faits dans cette voie, votre réponse négative ne me fît pas renoncer à mon projet, et je me promis de le mettre à exécution au retour de la belle saison. En mars 1897, je choisis, pour préparer mon expérience, une des faces de la maisonnette du bûcheron exposée au midi : profitant d'un retrait d'une partie de la construction qui for- mait un angle abrité, je fis installer, à cet endroit, une volière adossée, d'environ 4 mètres sur 1 mètre; quelques poteaux montant jusqu'à la toiture, prolongée pour la circonstance avec des planches posées à recouvrement, formaient la car- casse que recouvrait un grillage fin; une vieille porte gril- lagée fermait la volière; plantés dans le sol, deux petits chênes, encore garnis de leurs feuilles sèches, servaient de ESSAIS D'ACCLIMATATION DU ROSSIGNOL DU JAPON. U7 perchoirs naturels; enfin, tout à fait sous le toit, y touchant presque, de petits bamhous formaient, pour la nuit ou pour les mauvais temps, des perchoirs mieux abrités. A la fin de mars, j'apportai dans cette volière quinze Ros- signols du Japon, dont six mâles et neuf femelles; j'avais donné à mon bûcheron, par écrit, des instructions précises sur la façon de préparer la nourriture de mes Oiseaux, en mélan- geant intimement de la mie de pain rassis, du chènevis écrasé et des feuilles de choux hachées très menu. Du pain trempé dans du lait et fréquemment renouvelé, quelques pommes et des oranges coupées en deux et posées dans les enfourchures de branches des deux petits chênes variaient ce menu ; sur le sol finement sablé un abreuvoir syphoïde rempli d'eau com- plétait l'installation. Je revins à la propriété quinze jours plus tard; deux fe- melles étaient mortes, peut-être de froid, car la période avait été peu clémente et mes Oiseaux devaient être plus chaude- ment logés chez l'oiseleur qui me les avait vendus ; ceux qui restaient étaient vifs et paraissaient en excellente santé. Ayant eu l'occasion d'entrer dans la volière pour déplacer l'abreuvoir qui, se trouvant sous un des arbres, pouvait être souillé par les déjections des Oiseaux, je fus frappé de les voir aussi peu sauvages, plusieurs restaient sur leurs perchoirs à la portée de ma main, sans paraître effrayés de ma présence. Cette familiarité, chez des Oiseaux que je voulais abandonner à eux-mêmes, me contraria un peu, j'aurais préféré les voir plus farouches. Mon intention était de les conserver deux à trois semaines dans la volière pour les habituer, par une liberté relative, à leur indépendance future; j'avais aussi l'espoir qu'ils s'atta- cheraient un peu à leur nouvelle maison et reviendraient la visiter, au moins les premiers temps, pour y chercher leur nourriture habituelle. Dans mon esprit, la petite maison du bûcheron devait être le point de ralliement de mes pen- sionnaires. Les mauvais temps qui régnèrent pendant presque tout le mois d'avril et le commencement de mai me firent différer, beaucoup plus que je ne l'aurais désiré, l'ouverture de la vo- lière. J'aurais voulu mettre les Rossignols en liberté assez tôt au printemps pour leur permettre de faire leurs nids, c'était le plus sûr moyen de les attacher à la propriété; mais, d'autre 448 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ Û'ACGLLMATATION. part, il fallait me préoccuper de leur subsistance, et je ne croyais pas prudent de les lâcher avant que les chaleurs n'eussent ramené les Insectes dont ils devaient faire leur nourriture. Ce n'est donc que vers le 15 mai qu'une température un peu plus clémente permit d'ouvrir un matin toute grande la porte de la volière : les Oiseaux partirent par petits groupes, et deux d'entre eux hésitèrent longtemps avant de quitter leur abri. J'avais fait préparer, sur le toit de planches de la vo- lière, des provisions appétissantes qu'on continua, pendant plus de quinze jours, à renouveler régulièrement. Plusieurs des Rossignols revinrent à la maisonnette manger les provi- sions préparées, puis leurs visites s'espacèrent; enfin, elles devinrent si rares, que les vivres furent supprimés, ainsi que la volière. A l'une de mes visites à la propriété, au milieu de juin, mon jardinier me signala que la veille, la pluie aj^ant amassé un peu d'eau dans un petit creux d'une vallée en face de sa maison, deux Rossignols du Japon étaient venus s'y baigner et avaient passé là quelques instants à faire leurs ablutions en sa présence. Mon bûcheron, de son côté, continuait à voir de temps en temps un ou deux de ses élèves, et très souvent il distinguait leur chant qu'il avait appris à connaître pendant qu'ils étaient dans la volière; malgré ses recherches, il ne put découvrir de nid. A la fin de juin, j'eus l'occasion de passer dans ma pro- priété quelques jours de vacances, mais ni ma femme, ni mes enfants, ni moi, ne fûmes assez heureux pour retrouver nos Oiseaux; deux fois cependant, de grand matin, j'entendis leur chant, facile à reconnaître. L'été se passa, puis l'automne, je n'eus pas souvent l'occa- sion d'aller à la campagne, j'oubliai les Rossignols. Le jour de Noël, je me trouvais à la propriété par une belle journée ensoleillée; le jardinier avait ouvert largement les châssis de la serre tempérée ainsi que la porte qui la fait communiquer avec la serre chaude; ma femme, en entrant dans la serre où elle allait cueillir quelques fleurs, vit s'envoler devant elle un Rossignol du Japon qui se réfugia dans la serre chaude ; heu- reuse de cette découverte, elle ferma la porte de communica- tion entre les deux serres et vint me prévenir qu'elle avait emprisonné, pour me le montrer, un des Rossignols. C'était ESSAIS D'ACCLIMATATION DU ROSSIGNOL DU JAPON. 149 la première fois qu'il nous était donné, à ma femme et à moi, de les revoir; je trouvai, en effet, perché sur des Passiflores qui tapissent le mur de la serre chaude, un très beau Rossi- gnol du Japon mâle. J'admirai quelques minutes son joli plumage aux teintes vives et d'une netteté qu'on ne rencontre pas toujours dans les cages, puis je rouvris la porte de la serre tempérée, et l'Oiseau s'envola, mais sans témoigner trop de frayeur. Cette apparition me causa une grande satisfaction, elle permettait de supposer que le Rossignol du Japon est un Oi- seau sédentaire, qui n'émigre pas l'hiver ; je dis penneitait d'espérer, car il est très possible que le changement d'exis- tence qui résultait pour les miens d'une acclimatation en pays inconnu et aussi leur petit nombre aient modifié temporaire- ment leur instinct habituel. Dans le courant de janvier, mon jardinier trouva un jour, dans l'orangerie dont les portes sont ouvertes quand il ne gèle pas, trois Rossignols du Japon, qui, perchés sur les Orangers, paraissaient y chercher des Insectes; ils s'en- fuirent à sor>. entrée, mais toujours sans paraître, à beaucoup près, aussi effrayés que le seraient des Oiseaux de notre pays surpris dans les mêmes conditions. Quelques jours après, en février, en ouvrant le matin les portes de l'orangerie, un Rossignol s'envola, il avait dû y passer la nuit. Le bûcheron a souvent, cet hiver, entendu le chant de nos Rossignols, surtout à l'aube, par les matinées ensoleillées; il en a vu quelquefois un, mais le plus souvent deux voltiger dans de grands Epicéas qui avoisinent sa maisonnette. Je n'ai pas entendu dire que, dans le village, personne ait remarqué mes Oiseaux; mais, comme je n'ai mis personne au courant de mon essai et que j'y connais très peu de monde, je ne puis tirer de cela aucune conclusion. En somme, sur treize Rossignols du Japon mis en liberté en mai 1897, on en a revu, en janvier 1898, jusqu'à trois ensemble; il en reste peut-être un plus grand nombre, mais on ne doit régulièrement faire état que de ce qui a pu être rigoureusement constaté. Trois de ces Oiseaux, au moins, ont donc passé l'hiver en liberté, sans émigrer dans les pays chauds, et cela en Seine-et-Marne, à quelques lieues de Paris, L'expérience est encourageante et donne lieu d'espérer qu'en- treprise sur une plus large échelle, elle aurait pour résultat 450 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. de nous doter d'un Oiseau des plus utiles et des plus agréables. Avant de terminer, je crois devoir signaler, dans la façon dont j'ai procédé, deux points faibles. Mes Oiseaux ont été mis en liberté un peu tard pour faire leurs nids dans l'année m^me; il n'y aurait probablement pas d'inconvénient à les lâcher dès le commencement d'avril, étant donné qu'ils ont su trouver leur subsistance même en hiver, et aussi qu'ils se sont montrés très rustiques. D'autre part, j'avais dans la pro- priété au moins quatre Chats domestiques, tous plus ou moins chasseurs; je crains bien que plusieurs de mes petits hôtes aient payé de leur vie leur douce familiarité. J'ai l'intention de recommencer cette année un nouvel essai, en tenant compte de l'expérience acquise ; s'il se pro- duisait quelque fait nouveau qui puisse vous intéresser, je ne manquerai pas de vous mettre au courant. J'ai déjà promis à mon bûcheron et à mon jardinier une forte prime, pour celui qui pourra me signaler un nid de Rossignols du Japon. Je faisais plus haut quelques réserves au sujet de l'émigra- tion possible en hiver du Rossignol du Japon, il est un fait qui laisse supposer que nous avons affaire à un Oiseau migra- teur. Tous les ans, à une époque de l'année qui varie peu (décembre, je crois), les marchands d'Oiseaux reçoivent d'im- portantes cargaisons de cet Oiseau, importées du Japon. N'y a-t-il pas là un indice indiquant de fortes captures de cette espèce, opérées sans doute au moment des passages; cela ne fait-il pas penser aux captures par milliers des Cailles et autres Oiseaux migrateurs à l'époque de leurs pérégrina- tions? Je laisse à de plus compétents le soin de trancher cette question, qui, de toute façon, n'est que secondaire, puisque l'émigration en hiver des Hirondelles et autres Oiseaux insectivores ne nous empêche pas de jouir de leurs services pendant la saison où ils sont le plus intéressants. 454 LA. JACINTHE D'EAU [PIAROPUS CBASSIPES Mart.) CULTIVÉE A SAINT-MAX-LES-NANCY (MEURTHK-ET-MOSELLE) par A. DELA VAL (1). Eii lisant sous ce titre : « Une acclimatation fâcheuse » l'intéressant article de M. Herbert J. Webber sur la Jacinthe d'eau [Pontederia crassipes des catalogues des fleuristes) paru dans le Bulletin de la Société nationale d'Acclimatation de France, (octobre 1891), la pensée m'est venue de vous présen- ter cette curieuse plante sous un aspect plus favorable et de vous dire le parti que j'en tire pour la décoration des bassins de serre des aquariums et des appartements. Nous n'avons pas à craindre ici sous notre rigoureux cli- mat de l'Est où elle n'est pas rustique, les méfaits que sa pro- pagation rapide et son envahissement ont mis à son actif : entrave à la navigation et au flottage, obstruction et rupture des ponts par son amoncellement. Les essais que j'ai tentés pour la faire végéter et fleurir dans un bassin en plein air ont échoué jusqu'à présent. N'envisageant ici la question qu'au point de vue pitto- resque, je ne ferai aucune description scientifique, qui, du reste, ne serait pas de ma modeste compétence. Je dirai seulement que la Jacinthe d'eau flotte librement à la surface de l'eau, soutenue par le développement considéra- ble du pédoncule de ses feuilles qui ressemblent à des vessies natatoires et la rendent insubmersible. La plante est d'ail- leurs lestée par des racines longues et toufiùes, composées de filaments blanchâtres à extrémité noire, hérissés de fins suçoirs assez courts, qui vus à travers les glaces limpides d'un aquarium produisent un charmant eff'et. ' Le renflement du pédoncule est terminé par une feuille ar- rondie, bien faite, d'un tissu ferme et d'un vert brillant. De la touffe des feuilles surgit brusquement une tige florale, de la grosseur d'un crayon, garnie d'un nombre variable de fleurs (1) Commuuication faite en séacice générale le 25 mars 1898. 152 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. qui ne rappellent la Jacinthe que par leur disposition, car elles ont les dimensions et l'aspect d'une fleur de Rhododendron, d'un tissu plus léger encore et d'une délicieuse teinte lilas pâle avec une tache rouille. Cet épanouissement rapide dure rarement deux jours, et quand la fleur se flétrit, le pédoncule se plie mécaniquement par le milieu, pour rabattre en quel- ques heures sa partie florale et la plonger dans Feau où doivent mûrir les graines. Ici, aux environs de Nancy, les graines ne se sont jamais formées et c'est par cinq ou six stolons dirigés dans tous les sens que la plante se propage avec une grande rapidité ; ces tiges , lancées dans toutes les directions tout autour d'elle, en forment à leur extrémité de nouvelles qui s'enra- cinent et peuvent être séparées. Le Piaropus peut prospérer longtemps en appartement, mais il se déforme et « file » quand il ne reçoit que la lu- mière oblique des fenêtres. Pour jouir pleinement de sa luxuriante végétation et de sa splendide floraison, il vaut mieux apporter dans l'aquarium ou dans une large coupe de cristal remplie d'eau limpide pour en laisser voir les racines, la plante prête à fleurir qu'on remplace successivement quand elle se fane. Plusieurs pieds fleuris, artistement groupés dans une cor- beille de cristal teinté et décoré en couleurs de plantes et d'animaux aquatiques, tel que sait le créer le génie fertile de nos célèbres verriers nancéens MM. Daum et Gallé, forment un milieu de table qui rivalise avec les plus belles Orchidées et qui aurait de plus le mérite de la nouveauté. Les récipients doivent mesurer plus de 20 centimètres de profondeur. La culture qui permettra de jouir d'une constante floraison de mai à octobre est des plus simples si l'on dispose d'une petite serre bien éclairée ou de simples coffres à châssis. Voici comment je procède : dans une serre chauffée au thermo - siphon, mais où la température s'abaisse souvent à + 40, j'ai établi sur la banquette autour du foyer un petit coffre recouvert d'un châssis où, dans des bacs de terre ver- nissée, garnis au fond d'un lit de terre de 5 centimètres et remplis d'eau que je ne fais pas renouveler, les plantes pas- sent tant bien que mal l'hiver : j'ai pu même en conserver dans des cuveaux placés sous les tablettes. LA JACINTHE D'EAU. 153 Au mois de mars, on enterre dans une couche chaude les hacs dont on a renouvelé la terre et l'eau, on y installe les plantes pour les mettre en végétation. Elles poussent avec vi- gueur, et dès le mois de mai on les répartit dans les bassins ou dans des récipients préparés pour les recevoir dans la partie de la serre la plus exposée au soleil. Les plus écono- miques sont des tonneaux sciés en deux. On dispose un lit de 5 centimètres de bonne terre, et on remplit d'eau qu'il est inutile de renouveler, il suffit de remplacer celle qui est ab- sorbée par l'évaporation. Assez rapidement la surface est couverte par une végéta- tion luxuriante d'où jaillissent brusquement, sans discontinuer de mai à octobre, ces belles hampes garnies de fleurs éphé- mères, qui se succèdent rapidement. Dès l'apparition des bou- tons on peut transporter la plante en appartement où elle achèvera sa floraison. Cette plante vigoureuse n'est pas atta- quée par les Insectes, le Puceron l'envahit difficilement. Elle supporte l'action directe des rayons du soleil à travers le verre, elle végète dans l'eau pure, mais la plante s'y déve- loppe moins que quand une couche de terre végétale enrichit l'eau de son engrais. Si les racines ne sont pas éloignées de la terre par une couche d'eau suffisante (15 à 20 centimètres), elles s'y en- foncent et la plante n'est plus flottante. Quelques Lymnées, des têtards de Grenouilles empêchent l'invasion des Gonferves, surtout avant que la surface de l'eau ne soit couverte par le feuillage qui, en interceptant la lumière, arrête le développement de ces Algues. Le PontederHa crassipes fait le plus bel ornement des bas- sins, où j'élève de nombreux Poissons télescopes, elle en pu- rifie l'eau, sans toutefois suffire à elle seule pour l'aérer. Les détritus de ses tiges charnues, en se décomposant, ai- dent au développement des Infiisoires tout en fournissant une nourriture végétale aux alevins qui s'ébattent dans ses racines protectrices. A condition que les demandes ne soient pas trop nom- breuses, je me ferais un plaisir d'ofl'rir quelques pieds de Pm- ropus à ceux de mes collègues de la Société Acclimatation ^ui m'en feraient la demande à partir du mois d'août. 454 ALLOCUTION PRONONCÉE A L'OUVERTURE DE LA SECTION DE COLONISATION Bans la séance du SI janvier 1898 par A. MILHE-POUTINGON, Vice- président. Monsieur le Président, Messieurs, L'honneur d'ouvrir les travaux effectifs de la nouvelle Section coloniale de la Société d'Acclimatation revenait à un plus digne que moi. Il appartenait au savant botaniste, à l'infatigable explorateur que vos suffrages viennent d'élever à la présidence de cette Section et que l'état de sa santé re- tient aujourd'hui loin de nous. C'est au service de la cause de l'acclimatation que M. Eaoul l'a récemment compromise. Chargé par le Ministère des Colonies d'une mission qui doit se prolonger environ durant trois ans et embrasser l'étude économique de la flore tropicale du globe entier, M. Raoul a dû interrompre son voyage au bout de la première étape, vaincu par les fatigues qu'il a endurées pendant l'explora- tion des forêts de Sumatra. Il est rentré en France, mais rap- portant avec lui une abondante moisson de plantes les plus précieuses, qu'il a confiées aux soins si expérimentés de notre collègue M. le docteur Heckel. Puis il est allé demander à son pays natal, la Bretagne, le rétablissement de sa santé. Nous avons eu récemment de lui de bonnes nouvelles, et aux re- grets que nous cause aujourd'hui son absence, s'associe du moins l'espoir de le voir bientôt, complètement rétabli, venir prendre )a -directiqrL d^ nas t;'ayaux. En attendant, et certain d'interpréter fidèlement les sentiments de tous ici, je vousf propose d'adresser à M. Raoul l'expression, et de ces regrets, et de cet espoir. . S'il eût été à cette place, il aurait, avec toute l'autorité né- cessaire, exprimé les remerciements du Bureau de la nouvelle ALLOCUTION DE A. MILHE-POUTINGON. 155 Section, au Conseil delà Société qui en a décidé la création. Le Conseil a bien voulu déléguer auprès d'elle un de ses membres, qui, dans la belle Revue qu'il dirige, rend journel- lement à nos colonies un des plus utiles services, celui de vulgariser la connaissance de leurs ressources (1). Nous de- vons remercier également le Conseil d'avoir bien voulu nous proposer à vos suffrages , comme nous vous remercions , Messieurs, de nous en avoir honorés. Notre gratitude doit aller enfin, d'une façon toute particu- lière, à M. le président Le Myre de Yilers, dont le nom restera attaché à la création de cette Section, et qui a bien voulu ap- . porter à son inauguration le précieux encouragement de sa présence et de ses conseils. C'est un nouveau gage de son dé- vouement pour cette France d'outre-mer qu'il a contribué à étendre, dont il a si souvent au loin défendu et fait triompher les intérêts. La récente conquête de Madagascar, préparée par la sa- gesse et l'habileté de notre diplomatie, semble devoir clore définitivement la période d'expansion de ces vingt dernières années. L'ère de mise en valeur de notre empire colonial est maintenant ouverte et la Société d'Acclimatation est, dans cette voie, en mesure de rendre à nos colonies d'inapprécia- bles services. Depuis longtemps, d'ailleurs, Elle leur a témoigné sa solli- citude et j'ai à peine besoin de rappeler le rôle éminemment utile qu'ont rempli ici trois groupes formés des spécialistes les plus autorisés et qui ont commencé à fonctionner au sein de la Société voici plus de trente ans, sous le titre de Com- missions permanentes de l'Algérie, des Colonies, de l'Étranger. Il suffit, du reste, de parcourir nos Bulletins pour y voir traités, presque à chaque page, des sujets se ratta- chant aux questions coloniales. Et actuellement encore, la Société n'a-t-elle pas pris en mains, avec une activité et un intérêt tout à fait exceptionnels, cette étude de la domestica- tion de l'Eléphant, d'une si réelle importance pour la mise en valeur de l'Afrique équatoriale, et que notre collègue M- Paul Bourdarie a fait progresser avec un dévouement et une persén vérance que vous avez trop souvent appréciée et applaudie,; pour qu'il me convienne d'en reprendre l'éloge? t ^ ' (i) M. L. Olivier, directeur de la Revue générale des Sciences^ a été délégué par le Conseil auprès de la Section coloniale. 456 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. La Société (f Acclimatation a donné encore d'autres marques d'intérêt aux questions coloniales; elle a réservé à diverses reprises sa plus haute distinction, la médaille d'or grand module, pour récompenser les services rendus au titre colonial. C'est ainsi que dès 1882, elle l'attribuait au haut fonctionnaire chargé alors du Gouvernement général de notre belle Cochinchine française, et sous l'administration duquel cette colonie résolvait ce problème, longtemps inso- luble chez nous, de solder toutes ses dépenses et de verser en outre dans la caisse de la métropole un contingent relative- ment élevé. C'est un souvenir que j'ai d'autant plus à cœur d'évoquer, Messieurs, qu'il m'est permis de saluer dans le Président de la Société cC Acclimatation, qui nous honore de sa présence, le lauréat de la grande médaille d'or de 1882. Plus récemment encore, à deux années consécutives, en 1895 et 1896, la médaille d'or a eu pour titulaires deux hommes qui ont rendu à l'étude économique et à l'acclimatation des plantes tropicales des services inestimables : M. le docteur Heckel et M. Raoul, le président môme de notre nouvelle Section. Entre ces manifestations et la création d'une Section colo- niale, il n'y avait qu'un dernier pas; il est aujourd'hui fran- chi. En fondant cette Section, la Société d'Acclimatation n'a donc fait que s'adapter, comme elle l'a toujours fait dans le passé, aux besoins nouveaux ; et ceux de nos colonies sont, à cet égard, véritablement infinis. Les énumérer, c'est tracer en quelque sorte le programme des travaux de la Section. — Qu'il me soit permis de le faire sommairement. Nous avons un domaine colonial, qui représente huit ou neuf fois la superficie de la France, et dont la plus grande partie se trouve dans la région tropicale, si différente des nôtres comme climat et productions. Pour tirer parti de nos possessions, pour qu'elles nous dédommagent des sacrifices qu'elles nous ont coûtés, il nous faut y envoyer des colons, des planteurs, même sur certains points de la main-d'œuvre, et aussitôt vous entrevoyez, Messieurs, quel champ nous est ouvert au point de vue des études concernant l'acclimatation ou plutôt de l'acclimatement de l'homme. Que d'études aussi, au point de vue de la faune, de l'intro- duction, de l'acclimatation des animaux utiles à l'homme, des ALLOCUTION DE A. MILHE-POUTINGON. 157 bêtes de somme dont l'Afrique équatoriale est complètement dépourvue, en dehors de TEléphant inutilisé ! Au point de vue de la flore, le champ est, à vrai dire, il- limité. Nous demandons à l'étranger presque toutes les productions coloniales nécessaires à notre alimentation ou à notre indus- trie : café, cacao, tabac, coton, quinquina, caoutchouc, gutta- percha, alors que certains de ces produits croissent spontané- ment dans nos colonies ou prospèrent dans des pays ana- logues comme sol et climat. Un pareil état de choses, infiniment regrettable au point de vue du commerce d'expor- tation et du mouvement maritime a pour conséquence une infériorité marquée vis-à-vis de nos concurrents étrangers, et nous avons vu les principaux marchés de produits co- loniaux s'établir presque tous au dehors. C'est à Liverpool, à Anvers, à Hambourg que va se vendre le caoutchouc des colonies françaises, à Anvers, leur ivoire, à Liverpool, leurs bois. Par contre, nous achetons en Amérique, en Angleterre, le coton que manufacturent nos industries. Ces matières premières sont transportées par des bateaux américains ou anglais, qui, en retour, rapportent, dans nos propres colo- nies, avec des prix de fret que notre navigation ne peut concurrencer et qui avantagent le commerce étranger, les produits manufacturés de la Grande-Bretagne et des Etats- Unis. Le remède, ou tout au moins l'un des meilleurs remèdes à cette situation , consisterait manifestement à développer les productions naturelles et les exploitations agricoles dans nos colonies, afin d'y récolter d'une part et d'y exporter de l'autre les produits et les marchandises que nos colonies et la métro- pole tirent actuellement de l'étranger, Mais pour accroître notre production, pour développer nos cultures coloniales, il faut que nous introduisions, que nous multipliions dans nos colonies les végétaux, les variétés de plantes industrielles, alimentaires, médicinales, qu'elles ne possèdent pas et qu'elles auraient intérêt à acquérir ; nous de- vrons en un mot faire de l'acclimatation. C'est à cette étude que la Société cC Acclimatation con- vie cette nouvelle Section coloniale. Elle nous y aidera par ses puissantes relations, par la vieille expérience qui s'est accumulée et comme cristallisée dans ses publications et dans ses traditions. Sous la direction du savant éminent que vous 158 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. avez placé à la tête de la Section, avec l'appui, le concours des correspondants de la Société, de ses amis d'outre-mer, de tous ceux, enfin, qui contribuent par leurs études, par leurs travaux et par leur dévouement à faire progresser cette belle et utile science de l'acclimatation, nous allons, Messieurs, entreprendre avec ardeur cette tâche, heureux de coopérer dans la mesure de nos moyens, à la prospérité de notre empire colonial. 159 EXTRAITS DES PROCÈS-VERBAUX DES SÉANCES DE LA SOCIÉTÉ. 2« SECTION (ORNITHOLOGIE. — AVICULTURE). SÉANCE DU 31 JANVIER 1898. PRÉSIDENCE DE M. OUSTALET, PRÉSIDENT. Il est procédé au renouvellement du bureau et à Télection d'un dé- le'gué à la Commission des récompenses. Sont nommés : Président : M. Oustalet ; Vice- Président : M. le Comte de Chabaunes La Palice ; Secrétaire : M. le Comte d'Orfeiiille ; Secrétaire-adjoint : M. Félix Mérel ; Délégué aux récompenses : M. Wuirion. La correspondance imprimée comprend un certain nombre d'ou- vrages et de spe'cimens de journaux d'Aviculture dont l'e'cbange est pro- posé à la Société. Ces demandes sont renvoyées à l'examen du Conseil. Parmi les ouvrages, il convient de signaler un important traité de Colombophilie publié en espagnol par M. Castello, de Barcelone, et le beau volume de M. André' Sucbetet sur les Oiseaux hybrides observés à l'état sauvage. Lecture est donne'e d'une lettre adressée par M. le Ministre du Commerce au Pre'sident de la Société d' Acclimatation, lui annonçant l'ouverture d'umi Exposition internationale d'Oisellerie à Saint-Péters- bourg dans le courant de l'anne'e 1898 ; M. le baron de Morenheim, ambassadeur de Russie, a informé M. le Ministre des Affaires étran- gères que le Gouvernement impérial verrait avec plaisir la participa- tion de la France à cette Exposition. La Section est toute disposée à prêter son appui à l'entreprise, mais il lui paraît utile, afin d'agir d'une manière efficace, de de- mander à M. le Ministre du Commerce communication de quelques détails pouvant intéresser les exposants en ce qui concerne notam- ment les frais de transport et de douane. En conséquence, la Section prie le bureau de la Société' de vouloir bien agir auprès du Ministère pour obtenir en temps utile tous les renseignements ne'cessaires. La Société d'Horticulture de Villemomble (Seine), désirant joindre une Exposition d'Aviculture à son Exposition annuelle, demande com- munication de programmes d'expositions et concours analogues dont l'étude puisse l'aider dans la circonstance- 160 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. Lecture est donnée d'une lettre de M. le Ministre de l'Agriculture adressée au Président delà Société d' Acclimatation concernant l'importa- tion directe des Nandous en France. Les agents du Gouvernement fran- çais dans rUruguay et la République Argentine recevront des instruc- tions à ce sujet par l'entremise du De'partement des Affaires étrangères. M. Leroy écrit d'Oran qu'il a vu dans cette ville, le 7 janvier 1898, une Hirondelle à ventre blanc voltiger au-dessus de son jardin. Cf* la première fois que pareille observation a e'te' faite. Il s'agit Sf^' doute d'Hirundo urbica. ^' M. Blaauw adresse de S'graveland (Hollande), quelques dé 'ils complémentaires sur l'élevage du Tinamou roux. D'après lui, k' cli- mat de l'Algérie pourrait convenir à cet Oiseau. M. Oustalet croit utile de faire quelques réserves à ce propos, la sécheresse ne semblant pas devoir être favorable au Tinamou. Une discussion s'engage au sujet de cet Oiseau. MM. Debreuil, de Guerne et Wuirion citent divers élevages de Tinamou réussissant bien dans des conditions assez diffé- rentes. En résumé, il convient surtout de veiller à la bonne alimenta- tion, en ayant soin d'y introduire toujours une notable quantité de ma- tières animales. M. Debreuil fait une communication sur l'élevage des Nandous dans sa propriété de Melun. Ces Oiseaux sont en pleine prospérité et pa- raissent très rustiques. Il est toutefois regrettable qu'ils appartien- nent tous au sexe femelle. M. Debreuil, secondé d'ailleurs par la Société^ a fait de vains efforts pour se procurer un mâle, et c'est à son grand regret qu'il s'est trouvé forcé de distribuer les œufs pon- dus en grand nombre, mais dont aucun produit ne pouvait être ob- tenu, faute de fécondation. Le Secrétaire^ Comte d'Orfeuille. 3e SECTION (AQUICULTURE). SÉANCE DU 7 FÉVRIER 1898. PRÉSIDENCE DE M. EDMOND PERRIER (dE l'iNSTITUt), PRÉSIDENT. Il est procédé à la nomination du bureau pour la session de 1898. Les membres en fonctions sont réélus à l'unanimité ; le bureau se trouve donc composé comme suit : MM. Edmond Pérrier, président ; G. Roché, vice-président ; J. de Claybrooke, secrétaire ; A. Boigeol, secrétaire-adjoint. PROCÈS -VERBAUX DES SÉANCES DE LA SOCIÉTÉ. 161 M. R. Blanchard, délégué aux récompenses, est. également maintenu dans ses fonctions. M- le Secrétaire géne'ral rappelle que M. Raveret-Wattel est déle'gué par le Conseil auprès de la Section. Lecture de la correspondance. Une série de lettres concernent la, distribution d'œufs d'Ombre-Chevalier récemment annonce'e. Cette distribution est chose terminée. Vingt-cinq mille œufs ont été répartis 5 février par les soins de M. le Secrétaire général grâce à la géné- sité de M. Berthoule. i ce propos M. le Président dit que des remerciements tout parti- c ers sont dus par la Section à M. Berthoule, sans préjudice de ceur: que lui adressera le Bureau de la Société. M. le Secrétaire général présente, de la part de M. Zenk, une notice publiée il y a une quinzaine d'années par M. Vander Snickt sur l'Établissement de pisciculture de Seewiese en Bavière et dont un certain nombre d'exemplaires sont destinés à être distribués aux Membres de la Société. Il en est de même d'une plaquette de M. E. Humbert Claude, curé de Taintrux (Vosges), et intitulée : Rémy inventeur des procédés prati- ques de la pisciculture. A propos de ce mémoire, M. le Secrétaire géné- ral fait observer que l'auteur pose un peu trop en victimes le pisci- culteur Rémy et ses descendants. A plusieurs reprises, en effet, depuis 1855, et sur la proposition du D"* Haxo, la famille de Rémy a reçu par les soins de la Société d'Acclimatation et grâce à son initiative, des secours qui se sont élevés à la somme de 8,385 francs. Lecture est donnée d'une notice sur l'Établissement de pisciculture d'Ancourt, près Dieppe où M. Duponchez élève diverses espèces de Salmonidés, notamment le Salmo fontinalis (1). M. A. Boigeol décrit l'Etablissement de pisciculture organisé par lui aux étangs de la Motte-Rouge, près Randonnai (Orne) et présente une série de photographies prises dans l'Établissement et aux envi- rons. M. Boigeol se livre surtout à l'élevage de la Truite arc-en-ciel et de la Carpe. Un mémoire détaillé sera publié ultérieurement à ce sujet dans le Bulletin. M. G. Roché, récemment nommé secrétaire du Comité d'admis- sion et d'installation de la classe 53 pour l'Exposition universelle de 1900 (Engins, instruments et produits de la pêche, aquiculture), pense qu'il est utile de stimuler le zèle des Membres de la Section pouvant prendre part à cette Exposition. La concurrence étrangère sera certai- nement très vive; raison de plus pour montrer que la pêche et la pis- ciculture sont en grand progrès chez nous. La France est actuellement le premier pays d'Europe pour l'Ostréiculture ; il faut maintenir cette situation et éviter de laisser s'installer sur nos marchés les produits (1) Voir ci-dessus, page 101. Bull. Soc. nat. ÂccL Fr. 1898. - 12. m BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. ostréicoles étrangers. La Société d'Acclimaéaiion est la seule Société française qui, depuis son origine en 1854 et avec une persévérance souvent heureuse et en tous cas des plus méritoires, ait fait quelque chose pour l'aquiculture aussi bien dans la théorie que dans la pra- tique ; elle devra donc avoir une place privile'giée à l'Exposition uni- verselle de 1900, dans cet ordre d'idées. Pour cela il est nécessaire qu'elle prenne dès maintenant l'engage- ment d'exposer; il faut qu'elle fasse connaître à tous ses membre'-' l'organisation de la classe 53 et qu'elle guide les exposants qui vo draient être renseignés. Comme suite à la communication de M. ^ - Roche, la Section émet le vœu suivant qui sera soumis au Conseil^" La 3° Section (Aquiculture) émet le vœu que la Société d'Âcclfhia' tation prenne part à l'Exposition universelle de 1900 et qu'elle incite, par tous les moyens en son pouvoir, ceux de ses Membres s'occupant d'aquiculture à exposer les plans de leurs installations, les appareils en usage, produits ou travaux quelconques dans la classe 53, groupe IX, de l'Exposition universelle de 1900. M. E. Ccvobeux parle de l'Exposition internationale de pêche de Bergen, qui promet d'être fort intéressante. Ace propos, M. le Secré- taire général annonce que la Société (V Acclimatation compte exposer en Norvège divers documents. Un vœu pourrait être formulé invitant les Membres de la Société^ à prendre part à l'Exposition de Bergen ; les éléments de cette exposition seraient réunis, expédiés et présentés par les soins de la Société- Ces envois ne devront présenter aucun caractère commercial ; des médailles de collaboration seraient décer- nées aux exposants. Le vœu suivant est adopté à l'unanimité. M. le Secrétaire général veut bien se charger de le transmettre au Conseil. La 3*^ Section (Aquiculture) émet le vœu que les Membres de la Société d' Acclimatation participent autant que possible à l'Exposition internationale de pêche de Bergen, dont l'ouverture doit avoir lieu en mai 1898. Il est à désirer que les envois dépourvus de carac- tère commercial soient groupés sous le vocable de la Société, expédiés et présentés collectivement par ses soins. 11 est désirable que des médailles de collaboration soient décernées aux exposants. M. A. Boigeol parle de la conservation des Poissons dans l'aldéhyde formique et demande des renseignements à ce sujet. Divers échantil- lons de la faune ichtyologique belge ou congolaise, présentés dans ce liquide à l'Exposition de Bruxelles, semblent démontrer que le formol ne doit pas être spécialement recommandé pour l'étude des Poissons. J. DE Claybrooke, Secrétaire de la Section, 463 EXTRAITS DE LA CORRESPONDANCE. Mammifères apprivoisés au Congo français. Extrait d'une lettre de 31. G. -A. Blom (1). Poste de Carnot (Congo français), 29 mai 1897. «Depuis longtemps, les indigènes et notre chasseur se'négalais doi- vent, quand l'occasion se présentera, amener dans un des postes ua jeune Éléphant. Il ne s'agit pas pour nous d'inaugurer un nouveau mode de trans- port de marchandises, mais d'ajouter celte bête si intéressante à la collection d'animaux sauvages qui vivent déjà avec nous. En elfet, c'est notre distraction de recueillir et d'élever toutes les bêles de la brousse que les indigènes nous apportent. Nous en avons eu des quantite's. Beaucoup sont mortes, d'autres retournent dans la forêt. Ce que nous avons de plus intéressant actuellement est un cou- ple de Cochons sauvages qui vivent au poste et vont se promener aux environs en pleine liberté. Ils mangent dans la main et suivent comme des Chiens. J'attends avec impatience le jour prochain oii nous aurons une niche'e de marcassins, parce que les Cochons domestiques amenés de Brazzaville n'ont pas réussi. Nous avons un Chacal, des Mangoustes, de petits Rongeurs, une collection de Singes et enfin un jeune Chat-tigre gros comme les deux poings, qui fait la loi à tous les autres, et qui à ce moment même, mord le bout de mon porte-plume. Pas un seul de ces animaux n'est enfermé, le Chacal seul est encore à l'attache, mais il suit déjà, et ce qu'il y a de plus extraordinaire, c'est de les voir tous vivre en bonne intelligence, mangeant et dor- * mant ensemble avec les Chiens et les Chats domestiques. Il a cepen- dant fallu séparer les inoffensifs Cochons d'Inde qui souffraient trop de la vie en commun. (Ceux-ci viennent du Nord, par les Haoussas.) Le plus curieux spécimen de la me'nagerie est un grand Singe jaun"e qui s'est proprio motu institué Chien de berger. Il mène paître les Moulons avec toutes les allures des Chiens de France, mordant rageu- sement les jambes de ceux qui s'e'cartent du troupeau. Lorsque tout marche à sa guise, il enfourche le premier Mouton venu, se laisse porter et se met à chercher sa nourriture. C'est là le secret de son assiduité'. Si je réussis à le photographier dans l'exercice de ses fonctions, je vous enverrai une épreuve. (1) Lue en séance géoerale le 26 novembre 1897. 164 BULLETIN DE LA. SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. Nos Chiens plus ou moins métissés de races indigènes, sont de bons compagnons, mais ne rendent pas de services sérieux. A mon passage à Brazzaville, M. Greshoff, de la Maison hollandaise, a bien voulu me donner trois superbes Coqs et nous avons déjà des poussins qui ont des plumes aux pattes, ce qui me console un peu d'avoir manqué au moment du départ l'offre du correspondant de la Société d' Acclimatation à Bordeaux. Si j'ajoute que nous avons ici un troupeau de quarante bêtes à cornes qui augmente tous les jours, que sur huit Chevaux il y a trois juments dont deux pleines, qu'une pouliche née en novembre dernier se porte très bien et mangerait à table si on la laissait faire, que les bourriquots croissent et multiplient, vous verrez que le poste de Carnot n'est pas de ceux où l'on s'ennuie. Croyez-moi, Monsieur, votre très respectueusement dévoué. » G.-A. Blom. X Manière d'envoyer des Poissons malades au point de vue DE LA recherche DES M YXOSPORIDIES. Monsieur le Secrétaire général, J'ai examiné les deux Carpes (1) que vous m'avez remises, au point de vue de la présence des Myxosporidies dans les tissus de ces Pois- sons ; l'état de conservation, absolument défectueux, des viscères de ces Carpes ne permet pas de se prononcer; il m'a semble toutefois que le rein d'un de ces Poissons renfermait quelques-uns de ces parasites, mais je le répète, les matériaux qui m'ont été confiés sont trop mal conservés pour autoriser une réponse catégorique. Il est nécessaire de refaire un examen sur des Poissons convenablement traités. Dans le cas où votre correspondant désirerait un second examen, je . suis à sa disposition et voici la façon dont il devrait procéder : 1° Il devrait m'envoyer un ou deux échantillons (la taille n'a pas d'importance), choisis parmi les Poissons qui lui paraissent malades et les adresser de telle sorte qu'ils me parviennent dans les vingt- quatre heures (trente-six heures au maximum) après leur capture; il suffirait d'emballer ces animaux dans des herbes fraîches et de les expédier tels quels. (1) Ces Poissons provénant du réservoir de Grosbois, [Côte-d'Or] onl été présentés à la Section d'Aquiculture dans la séance du \\ avril 1897. Ils ont été adressés à la Société par M. Voillard, conducteur des Ponts et Chaussées sur l'ordre de M. Fontaine, ingénieur en chef du canal de Bourgogne. Voir Bulletin \^Ti. EXTRAITS ET ANALYSES. 465 2° Dans le cas où cela serait impossible, il faut procéder ainsi : pré- lever dans les divers organes (foie, rate, rein, branchies, muscles, tube digestif) des fragments larges comme une pièce de deux francs et e'pais de 1/3 de centimètre environ. Ces fragments doivent être coupés avec une lame bien aiguisée, sans comprimer les tissus ; ils seront plongés le plus tôt possible dans l'alcool fort à 90<* ou à 95°. Ils peu- vent séjourner plusieurs semaines dans ce dernier liquide. Veuillez agréer , etc. A. Pettit, Docteur ès sciences, attaché au Muséum, (Laboratoire d'Anatomie comparée). EXTRAITS ET ANALYSES. Les attelages de Chiens en France (1) par Edg. Trigant-Geneste, Secrétaire général du département de la Vienne. La voiture ou charrette atlele'e de Chiens n'est pas un moyen de locomotion nouvellement invente en France; cependant, alors que la circulation des vélocipèdes, de date relativement récente, est régle- mentée par des arrêtés, identiques sur toute l'étendue du territoire, pris par les Préfets, à la date du 29 février 1896 et du 15 juin 1897; alors que la circulation des voitures automobiles va être, à bref délai, re'glemente'e uniformément dans tous les départements, puisqu'une commission vient d'être chargée, par le Ministre des Travaux publics, d'étudier la rédaction d'un règlement à ce sujet, la circulation des voitures attelées de Chiens se trouve, suivant les départements, les communes même dans certains départements, ou bien implicitement autorisée, — à défaut d'arrêté réglementant ou interdisant ce mode de locomotion, — ou bien régie par une réglementation ayant pour prin- cipe l'interdiction, tempérée par des autorisations accordées à titre exceptionnel, ou bien enfin, absolument interdite. Les départements dans lesquels il n'existe aucun arrêté interdisant ou réglementant la circulation des attelages de Chiens sont les sui- vants : Ain, Aisne, Allier, Basses-Alpes, Hautes-Alpes, Alpes-Maritimes, (1) Extrait de la Hevue générale d'Administration. 1897. 466 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. Ardèche, Ariège, Aube, Aude, Bouches-du-Rhône. Cantal, Cher, Corse, Côte-d'Or, Doubs, Drôme, Gard, Gers, Gironde, Hérault, Isère, Jura, Landes, Loire, Lot-et-Garonne, Manche, Haute-Marne, Mayenne, Nièvre, Oise, Orne, Pas-de-Calais, Puy-de-Dôme, Basses-Pyre'nees, Hautes-Pyrenées, Pyre'nées-Orientales, territoire de Belfort, Rhône, Saône-el-Loire, Savoie, Haute-Savoie, Seine, Seine-et-Oise, Somme, Tarn, Var, Vaucluse et Vosges. Dans ces départements, la circulation des voitures à Chiens, n'e'tant pas interdite, est tolérée. Dans quelques-uns elle est presque nulle, dans quelques autres elle est très active. Trois déparlements n'ont pas d'arrêté interdisant la circulation des attelages de Chiens dans l'étendue de leur territoire, mais des arrêtés pris par certains maires l'interdisent ou la réglementent dans cer- taines communes. Ce sont les Ardennes, les Deux-Sèvres et la Seine- Inférieure. Des arrêtés préfectoraux re'glementent la circulation des attelages de Chiens dans les départements ci-après : " Côtes-du-Nord, Creuse, Indre, Loire-Inférieure, Loiret, Lozère et Vienne. Ces arrête's portent les dates des années 1894, 1895 et 1896. Ils sont conçus généralement comme celui de la Vienne, dans les termes sui- vants : Arrêté relatif aux attelages de Chiens. Nous, Préfet du déparlement de la Vienne, chevalier de la Légion d'honneur, Vu l'article 99 de la loi du 5 avril 1884; Vu les articles 471, 474, 475 et 478 du Code pénal; Vu les avis de MM. les sous-préfels ; Considérant que les attelages de Chiens peuvent occasionner des accidents et donner lieu à des abus; qu'il y a lieu de réglementer ce genre de locomotion; Arrêtons : Art. l^''. — Il est interdit d'atteler des Chiens à des véhicules de quelque manière que ce soit. Art. 2. — Exceptionnellement, des autorisations d'atteler un ou plusieurs Chiens peuvent être accordées, lorsque les personnes qui les sollicitent justifient de la nécessité où elles se trouvent d'employer ces attelages, en raison de leur situation nécessiteuse ou d'infirmités. Art. 3. — Ces autorisations, essentiellement révocables, sont accor- dées ou retirées par les maires. Les autorisations ou retraits ne sont valables qu'après avoir été' visés par le préfet, sur avis favorable des sous-préfets pour les arron- EXTRAITS ET ANALYSES. 167 dissements autres que l'arrondissement chef-lieu. Elles peuvent être accordées ou retirées d'office par le préfet. Art. 4. — Les autorisations donnent droit de circulation dans tout le département. Art. 5, — Les conducteurs des voitures attelées de Chiens sont tenus de s'arrêter lorsqu'à leur approche un cheval manifeste des signes de frayeur. Ils doivent d'ailleurs se conformer à toutes les obligations imposées aux conducteurs d'autres véhicules. Art. 6. — MM. les sous-préfets, maires, commissaires de police, la gendarmerie, les gardes-champêtres et les agents de l'autorité sont chargés d'assurer l'exécution du présent arrêté, qui sera publié et affiché dans toutes les communes du département. Fait à Poitiers, le 22 mai 1896. Le Préfet de la Vienne^ Juillet Saint-Lager. Pour assurer l'exécution de cet arrêté, le Préfet de la Vienne a fait établir des modèles d'arrêtés municipaux ainsi conçus : Police municipale. Nous, Maire de la commune de , Vu l'arrêté préfectoral du 22 mai 1896 relatif aux attelages de Chiens; Considérant que le sieur demeurant à , nous a demandé l'autorisation de bénéficier des dispositions de l'article 2 de cet arrêté et que sa demande nous a paru justifiée ; Autorisons le sieur à se servir d'une petite voiture attelée' de Chiens. La présente autorisation sera immédiatement retirée en cas d'abus. Fait à la mairie de , le Le Maire^ Vu à Poitiers, le Le Préfet, Loi Grammont Punissant ceux qui exercent de mauvais traitements envers les animaux domestiques (2 juillet 1850). Article unique. — Seront punis d'une amende de 5 à 15 francs et pourront l'être d'un à cinq jours de prison, ceux qui auront exercé publiquement et abusivement de mauvais traitements envers les ani- 468 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. maux domestiques. — La peine de la prison sera toujours appliquée en cas de récidive. La circulation des attelages de Chiens est formellement interdite par des arrêtés préfectoraux dans les de'partements ci-après : Aveyron, 1887; Calvados, 1852; Charente, 1887; Charente-Infé- rieure, 1854; Corrèze, 1891; Dordogne, 1887; Eure, 1851: Eure-et- Loire, 1878; Finistère, 1874; Haute-Garonne, 1894; llle-et- Vilaine, 1861; Indre-et-Loire, 1894; Loir-et-Cher, 1861; Haute-Loire, 1895; Lot, 1896; Maine-et-Loire, 1890; Marne, 1890; Meurthe-et-Moselle, 1867; Meuse, 1865 ; Morbihan, 1856; Nord, 1876; Haute-Saône, 1853;- Sarthe, 1891; Seine-et-Marne, 1853; Tarn-et-Garonne, 1895; Vendée, 1880; Haute-Vienne, 1882; Yonne, 1875. La plupart de ces arrêtés visent la loi Grammont; nous verrons, cependant, que le fait d'atteler des Chiens à Une voiture ne constitue pas une contravention à cette loi; quelques-uns s'appuient sur ceci : que les attelages de Chiens font peur aux Chevaux; d'autres sont mo- tive's par le danger de la rage ; d'autres enfin invoquent la ne'cessité d'assurer la se'curité publique. Du coup d'œil que nous venons de jeter sur les régimes divers aux- quels sont soumis, en France, les attelages de Chiens, il nous paraît résulter ceci : que, dans la majorité' des de'partements (59), la circula- tion est permise d'une façon générale ou tout au moins exceptionnelle (49 sans règlements, 7 ayant des règlements et 3 dans lesquels il existe des arrêtés municipaux), et que, dans 28 départements seule- ment, on trouve des arrêtés préfectoraux qui interdisent cette circula- tion d'une façon formelle. Il y a lieu de remarquer que les arrêtés réglementant la circulation des attelages de Chiens, dans le sens d'une interdiction, tempérée par des autorisations accordées à titre exceptionnel, sont de date très récente, puisque, comme nous l'avons déjà indiqué, ils ont été pris pendant les années 1894, 1895 et 1896, tandis que les arrêtés d'inter- diction absolue sont, à l'exception de cinq, antérieurs à 1893 et remontent jusqu'à 1853. 11 semble donc qu'il existe une tendance vers la réglementation dans le sens de l'interdiction générale avec certaines exceptions . Nous pensons que cette tendance est excellente et que la réglemen- tation est désirable. Les motifs invoqués dans les divers arrêtés d'interdiction totale ne nous paraissent pas, en eflfet, décisifs. Les uns sont basés sur la loi Grammont; or, il a été jugé depuis longtemps par la Cour de cassation que le fait d'atteler un Chien à une voiture chargée de marchandises ne constituait pas une violation de la loi Grammont (arrêt du 10 nov. 1860. Balloz, 62, 5, 18) et cette jurisprudence a été appliquée très fréquemment par les tribunaux de EXTRAITS ET ANALYSES. 469 simple police; nous ne citerons qu'un jugement récent du tribunal de simple police de Saint-Palais du 22 avril 1895. [La Loi, 1895, p. 860.) Des âmes sensibles disent que les Chiens ne sont pas faits pour traîner des voitures, ignorant sans doute qu'il existe des races de Chien de trait, aussi bien que des races de Chien de chasse. La plu- part des personnes qui s'apitoient sur le sort des Chiens atlele's sont des personnes aimant la chasse et qui trouvent naturel de ramener, après une journée de chasse, leurs Chiens exte'nués et souvent les oreilles et la queue en sang, comme elles ont trouvé tout simple de torturer horriblement leurs Chiens avec le collier de force pour les dresser à la chasse et au rapport. Les Chiens se font à la traction des voitures, lorsqu'ils y sont habitue's de la même façon que les Che- vaux, les Anes et les Mulets, comme ils s'habituent h la chasse, quelque fatigue que cet exercice leur cause souvent. Les autres arrêtés s'appuient sur la ne'cessité qu'il y a de prévenir les cas de rage. Or, il est démontre' maintenant, de façon indiscutable, par les travaux de Pasteur, que la rage n'éclate pas spontanément, mais qu'il faut, pour la déterminer, une inoculation. Par conséquent, on peut atteler un Chien, le fatiguer, il ne deviendra point enragé si quelque autre animal atteint de rage ne lui inocule pas le virus rabique. Un aatre argument mis en avant, en faveur de l'interdiction des voitures à Chiens, c'est que ces véhicules font peur aux Chevaux. Cet argument n'est plus soutenable aujourd'hui, où les routes sont sillon- ne'es de bicyclettes, d'automobiles, et où les Chevaux sont expose's, en circulant sur les routes, à longer ou à croiser des lignes de chemins de fer et à rencontrer des trains. Les Chevaux, qui étaient très effrayés par les trains de chemins de fer, par les automobiles et les véloci- pèdes, se sont faits à ces véhicules, et ils s'habitueront de même aux attelages de Chiens s'ils en rencontrent fréquemment. Reste la question des accidents à éviter, la question de sécurité' publique. Il est certain que les personnes qui circulent dans des voi- tures attelées de Chiens ne conduisent pas leurs équipages avec la même précision que les conducteurs de Chevaux, et on j)out craindre que les voitures à Chiens ne soient culbutées dans une descente rapide, ou jetées dans des fossés, ou lancées sous des voitures à Che- vaux, par le fait du manque de précision dans la direction de ces attelages. On signale, d'ailleurs, peu d'accidents de cette nature, et en arrivât-il, les personnes qui en seraient victimes, tombant d'une hau- teur minime, ne risqueraient pas de se faire grand mal. Mais ce motif seul suffît à expliquer l'intérêt qu'il peut y avoir à ne pas laisser ce mode de circulation prendre une trop grande extension et à le régle- menter afin qu'il ne soit utilisé que par les gens auxquels il rend des services qu'ils ne pourraient pas se procurer autrement. Les voitures attelées de Chiens permettent à de pauvres gens, à de malheureux infirmes, qui ont à transporter des marchandises ou à se BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. transporter eux-mêmes, d'avoir à bon marché un moyen de locomotion pratique. Il est bon de s'apitoyer sur le sort des Chiens qui prennent de la peine à tirer des voitures, mais il est permis aussi de prendre en pitié les gens qui, ayant à promener de la marchandise pour gagner leur vie et celle de leur famille, sont obligés de traîner une charrette chargée des objets qu'ils vendent : le'gumes, poissons ; ou de ceux qu'ils achètent : chiffons, peaux de lapins, etc., etc. Quand je vois, suant entre les brancards de sa petite charrette, une marchande des quatre saisons, qui croise uu énorme Chien étendu sur le trottoir et se chauffant les membres au soleil, je n'éprouve aucune répugnance à penser que le Cbien pourrait aider la pauvre femme à traîner son véhicule et gagner, en travaillant, lui aussi, le pain qu'il mange. Depuis que des autorisations sont accordées, dans le déparlement de la Vienne, pour atteler des Chiens, une centaine de malheureux — dont un tiers de femmes — ont demandé à en bénéficier. Aucune plainte n'est parvenue à la préfecture au sujet de la circulation des attelages de Chiens, et il est certain que ce moyen de locomotion rend de grands services aux marchands de denrées, aux chififonnicrs et autres petits commerçants qui parcourent les campagnes pour l'exer- cice de leur profession. Ce qui est regrettable, c'est que ce mode de locomotion, libre dans les Deux-Sèvres, où il n'y a pas d'arrêté préfectoral d'interdiction, soit restreint dans la Vienne, où des autorisations sont accordées excep- tionnellement, et soit complètement interdit dans le département d'Indre-et-Loire. De sorte qu'une personne qui partirait de Niort avec un attelage de Chiens voyagerait librement dans les Deux-Sèvres (à la condition cependant de ne pas traverser de commune dans laquelle les attelages de Chiens sont interdits par les maires — comme la commune de Thouars), se verrait dresser procès-verbal dans la Vienne pour n'avoir pas d'autorisation et serait complètement arrêtée dans Indre- et-Loire. 11 est difficile de faire comprendre aux gens que ce qui est permis dans un département puisse être interdit dans le département voisin. Cela est difficile, parce qu'en réalité on n'a guère de bonnes raisons à donner de la diversité dans les réglementations de cette nature. Des prescriptions uniformes régissent la circulation des vélocipèdes dans toute la France; il en sera de même, sans doute, avant peu, pour les voitures automobiles, si la commission nommée par le Ministre des Travaux publics mène à bonne fin la mission qui lui a été confiée. Cette étude vient donc à son heure et pourra avoir quelque utilité si elle attire l'attention des pouvoirs publics sur l'intérêt qu'il y aurait à réglementer la circulation des attelages de Chiens d'une façon uni- forme pour toute la France. EXTRAITS ET ANALYSES. 171 Ce qui lui donne aussi quelque actualité, c'est qu'une commission vient d'être nommée, par décret du 24 novembre 1896, pour reviser la loi Grammont, et que cette commission pourrait, peut-être, utilement étudier la question des attelages de C biens. Si cette question lui était soumise, nous sommes convaincu qu'elle émettrait im avis favorable aux attelages de Chiens. La loi Grammont n'en serait pas moins res- pectée, les Chiens n'en seraient pas moins protégés; car, de même qu'on dresse des procès-verbaux contre les cochers qui maltraitent abusivement leurs Chevaux, Anes, etc., de même on verbaliserait contre les gens qui maltraiteraient abusivement leurs Chiens attelés. Si ces quelques pages avaient pour résultat de faciliter à beaucoup de malheureux, qui en sont maintenant privés, l'emploi des attelages de Chiens qui les soulageraient dans l'exercice de métiers pénibles, nous considérerions que nous aurions fait un usage utile du temps que nous avons mis à les écrire. A notre avis, en effet, être utile aux Chiens est bien, mais être utile aux hommes est mieux. X Appel aux enfants pour la protection des Oiseaux utiles (1). par Joseph Clarté. Baccarat (Meurthe-et-Moselle). « Aimez les petits Oiseaux, enfants, respectez-les, protégez-les ; ce ne sera que de la réciprocité. Lorsque, les jours de congé, vous allez courir par monts et par vaux, dans la campagne et dans les forêts, quand, le printemps revenu, la nature en fête a secoué la couverture de neige qui la tenait endormie depuis de longs mois, que le soleil a reparu et, avec lui, toutes les harmonies de la nature, partout, sur votre chemin, les fleurs s'épa- nouissent pour charmer vos regards, les prairies reverdissent, les forêts reprennent leur magnifique feuillage, puis, par la puissance de l'astre bienfaisant, partout renaît la vie, la joie et le bonheur de vivre. Quand, courant à travers les splendeurs de celte grande et sublime nature, vous foulez de vos pieds légers ce grand livre ouvert à vos regards et sur lequel, en lettres d'or, de rubis, d'émeraude, de îur- quoise, d'azur et de topaze est écrite l'histoire de cette terre qui, sans (1) Extrait d'un mémoire communiqué à la Section d'Ornithologie dans la séance du 3 mai 1897; le travail complet de M. Joseph Clarté a été adressé par les soins de la Société d'Acclimatation au Congrès omilLologique tenu à Aix en Provence, du 9 au 14 novembre 1897. m BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. cesse, produit pour vous tout ce qu'il y a de plus beau et de meilleur, suspendez de temps en temps votre course et observez ce qui se passe autour de vous ; vous y verrez partout le réveil de la vie ; vous y ver- rez des quantités prodigieuses de petits êtres qui, à peine sortis de leur sommeil hivernal, courent, affaire's, chacun à son travail, au réta- blissement de leurs demeures, à la recherche de leur nourriture, à la reproduction de leur espèce. Car tous obe'issent aux lois auxquelles ils sont soumis et auxquelles ils n'ont jamais essayé de se soustraire ; vous puiserez là l'exemple du travail et de l'obéissance aux lois iné- luctables de la^nalure. Continuant votre promenade et vos observations, vous verrez les petits Oiseaux, courant, volant, voletant, avec une ardeur fébrile, occupe's, sans perdre un instant, à la construction de leurs nids. Ah ! c'est que, dans la vie de l'Oiseau, c'est le travail le plus important, celui auquel il donne tous ses soins. C'est le berceau de la petite famille qui va bientôt y éclore. Aussi, voyez quelle attention, quels soins il apporte à la confection de ce nid qui, chez bien des es- paces, est un véritable petit chef-d'œuvre d'architecture, composé le plus souvent de mousse, d'herbes sèches, de menues écorces, de radi- celles, de fines bûchettes, tout cela entrelacé avec un art charmant, et à l'intérieur duquel la prévoyance maternelle a ménage un lit plus doux de plumes, de bourres de laine, de crin, du duvet cotonneux qui entoure les graines de certaines plantes ; et aussitôt ce petit ber- ceau moelleux terminé, commence la ponte, puis l'incubation, à laquelle, pour nombre d'espèces, le mâle prend part alternativement avec la femelle et, quand éclosent les jeunes oisillons, voyez de quelle sollicitude, de quels tendres soins les entourent le père et la mère, ne les abandonnant pas un instant, les abritant de leurs ailes, les réchauf- fant de leur corps, leur apportant une nourriture choisie, les défendant souvent contre leurs ennemis, dont les plus terribles hélas ! sont les enfants; puis, lorsque ces petits oisillons se sentent assez forts, ils viennent au bord du nid essayer leurs ailes, surveillés avec tendresse, avec amour, par le père et la mère ; après quelques timides essais, ces jeunes Oiseaux, impatients de liberté, prennent leur essor, surveillés et nourris quelque temps encore par leurs parents, puis arrive un jour où, pouvant se suffire à eux-mêmes, ils vont continuer la chaîne des générations de leur espèce. Respectez-les, enfants, les nids des petits Oiseaux ! n'en approchez que pour en admirer l'ingénieuse organisation, mais n'y touchez ja- mais, car ce sont des choses sacrées, car c'est la prévoyante nature qui a inspiré aux Oiseaux l'instinct de la construction des nids pour la reproduction et la perpétuation de leur race. Poursuivant vos promenades et vos observations quand l'été est arrivé, vous les verrez, ces oisillons, grands maintenant comme leurs EXTRAITS ET ANALYSES. 473 parents, dont on ne les distingue plus que difficilement, faire une chasse acharnée à tous ces vilains Insectes, qui, eux aussi cependant tiennent leur place dans l'harmonie universelle et dans Téquilibre ge'néral de notre globe, bien que le plus grand nombre soit nuisible aux besoins de l'homme; mais leur rapide et prodigieuse reproduction fera que toujours ils résisteront à la destruction qu'en pourront faire les petits Oiseaux. Leur nombre s'accroîtra dans des proportions d'au- tant plus formidables à mesure de la trop grande diminution de leurs ennemis naturels, et cela à notre grand de'lriment. Puis, quand arrive l'automne, à l'approche des frimas, quand l'homme a rentre' ses moissons, a rempli ses caves et ses greniers, quand le triste hiver nous menace de nouveau, que lë soleil redevient avare de ses rayons; que les Insectes vont disparaître et se replonger dans leur sommeil léthargique, que va manquer la nourriture, vous observerez un des phénomènes les plus remarquables qu'offre la classe des Oiseaux : les migrations. A une époque de'terminée, et qui est presque toujours la même, vous verrez des troupes nombreuses se réunir à un même endroit, puis prendre leur volée d'un commun accord, généralement sous la conduite d'un chef, afin d'aller dans des climats plus hospitaliers, retrouver une nouvelle patrie qui leur four- nira une abondante nourriture. Ces voyages souvent sont longs et semés de périls ; beaucoup se font à travers les mers, et chose remarquable, c'est toujours la même contrée que les Oiseaux savent retrouver; le retour s'opère de la même façon. Après six mois d'absence, ils savent aussi retrouver le pays qu'ils ont quitté ; leur instinct les dirige à travers d'immenses espaces. Je vais , enfants , pour compléter ces explications générales , vous parler, plus particulièrement, de quelques espèces de petits Oi- seaux, essayer de vous faire comprendre le rôle de chacun d'eux dans la nature et vous démontrer leur incontestable et absolue utilité- Je ne parlerai que de ceux qui se reproduisent dans notre région lorraine, et que j'ai pu observer ; j'en ferai une description très sommaire pour qu'on puisse les reconnaître ; je parlerai aussi de leur nidification et sur- tout de leur genre de nourriture, car c'est parleur façon de s'ali- menter que les Oiseaux rendent à l'homme plus ou moins de services.» X L'acclimatation a Coquimbo (Chili) de Faisans importés d'Angleterre. ! Voici quelques détails complémentaires sur l'acclimatation aux 174 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. environs de Coquimbo, du Faisan commun [Phasianus colchicus L.) signalée dans le Bulletiti de 1897 (page 280) et au sujet de laquelle M. Lataste, Membre de la Société (V Acclimatation, avait entrepris, avant de quitter le Chili, une enquête auprès de M. Ghauvelet. Le passage suivant est extrait d'une lettre de ce dernier re'cemment publiée par la Société scientifique du Chili : « Voici les renseignements que j'ai pu recueillir sur l'acclimatation du Faisan à Coquimbo. Je les dois à l'obligeance de M. Gage, de la maison Palassis et Lesté de Coquimbo. » Les Faisans ont été importe's d'Angleterre, il y a environ deux ans par M. C.-J. Lambert, au cours d'un voyage qu'il faisait autour du monde sur son yacht Wanderer. » Les essais de reproduction ont été malheureux dans le début. Par suite d'une maladie dont M. Lambert n'a probablement pas pu se rendre compte, les Faisans mouraient et il n'en resta bientôt que deux paires qu'il ordonna de lâcher dans son parc, La Comipania, situé à 6 kilomètres environ de la plage de la baie de Coquimbo. >> On lâcha, en même temps, dans ledit parc, des Perdrix anglaises importées en même temps que les Faisans. Pendant quatre ans on n'avait plus entendu parler de ceux-ci, lorsque quelques chasseurs si- gnalèrent leur présence. » On leur a fait depuis une chasse très active, et les hauts faits qui nous ont été raconte's par les disciples de saint Hubert prouvent que les Oiseaux se sont reproduits abondamment. Le foyer principal de la reproduction est à une dizaine de kilomètres de Serena. » Une remarque faite par les chasseurs, c'est qu'après avoir par- couru une certaine étendue de terrain, soit environ 7 ou 8 kilomètres sans rencontrer aucun Faisan, on en trouve tout à coup ; et cepen- dant le terrain est partout le mêoie ; il n'y a donc pas éparpille- ment. » Dans leurs excursions, les Faisans ne pe'nètrent pas plus avant que 20 à 25 kilomètres dans l'inte'rieur, depuis la côte. » M. Tilla qui m'a donne' ces renseignements est un passionné chas- seur. Il a chez lui sept Faisans, entre coqs et poules. Ses essais de re- production n'ont pas été non plus bien heureux. Il a fait couver depuis bientôt un an nombre d'œufs et n'a obtenu que trois poussins. » M. Tilla n'est pas le seul qui possède des Faisans. Nous savons qu'il y en a dans plusieurs maisons de Serena et de Coquimbo. » La reproduction aurait pris un plus grand développement si elle n'avait été enrayée par les gamins des haciendas qui, en vrais van- dales, prennent ces animaux avec des pièges et en détruisent les œufs sans profit. » Quant aux Perdrix anglaises, personne jusqu'à ce jour, n'en a plus entendu parler. » EXTRAITS ET ANAI^ySES. 175 La. culture de l'Olivier en Tripolitaine. [Extrait d'un Rapport adressé à M. le Ministre des Affaires étrangères par M. LacauT, Consul général de France à Tripoli de Barbarie, 1897.) « Les progrès remarquables accomplis en Tunisie dans cette branche de l'agriculture, ont e'ié suggestifs pour les Tripolitains, car c'est de- puis quinze ans seulement que la culture de l'Olivier en Tripolitaine a pris une certaine extension. Auparavant on se contentait de conserver à peu près les anciennes plantations qui remontent à trois siècles, dit-on. Jadis la disposition en quinconce, l'observation des distances entre les arbres, la taille à e'poque fixe, le choix des emplacements, l'orien- tation, étaient à l'e'tat de lettre morte. On évalue à un million le nombre des Oliviers existant actuellement dans ce pays. Les travaux d'amélioration les plus importants au point de vue de la plantation et des soins donnés aux arbres ont été faits dans une localité du nom de Mcssellata, située à trente-cinq heures à l'Est de Tripoli. L'on y compte environ 80,000 vieux Oliviers et une cinquantaine de mille plante's au cours de ces dernières années. D'ail- leurs, c'est, de toute la Tripolitaine, l'emplacement le plus favorable à la culture de cet arbre. Dans presque toutes les autres régions, les cultivateurs n'Ont aucun soin de leurs Oliviers et laissent h la nature le soin d'agir à son gré, aussi, à peine s'ils bénéficient d'une récolte à peu près satisfaisante une fois tous les cinq ou six ans. Les plantations nouvelles sont traitées de la manière suivante en terrain argileux. Des drageons, auxquels adhère une tige assez longue, sont plantés dans des trous au fond desquels on a disposé un lit de fumier animal aussi riche que possible. Ou bien encore l'on enterre en pépinière à une profondeur approximative de 14 centimètres des tronches de vieux arbres d'une longueur de 33 centimètres environ. Elles y sont arrosées régulièrement pendant un an, puis trans- plantées et mises en alignement à une distance de 13 à 15 mètres l'une de l'autre. Elles continuent, dans ces conditions, à être soumises à un arrosage régulier durant trois ou quatre ans, et la superficie du terrain sur le- quel elles se trouvent est labourée trois ou quatre fois Tan. Vers la dixième année, l'arbre se développe à vue d'œil et produit. Dans les terres sablonneuses, l'arrosage se fait dix ans cpnsécuti- vement et alors l'on obtient de beaux arbres donnant de beaux fruits. La taille, le labourage et la fumure ont lieu au moins tous les deux ans. Dans les localités où il n'y a pas de puits, on pratique autour de BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. chaque arbre une tranchée de 2 mètres de profondeur que remplis-i sent les eaux de pluies durant la saison hivernale et que l'on comble une fois que les eaux ont été absorbées. Il existe deux varie'tés d'Oliviers, VEnduriet le Gheiani. La première donne beaucoup plus de fruits : ceux-ci sont petits, ronds et d'une longueur de 10 millimètres. Le fruit du Gheiani est gros, rond et long de 14 millimètres. Une autre variété dénommée Jlelaki n'est repré- sentée que par fort peu d'arbres : elle donne un fruit gros, rond et long de 15 à 20 millimètres, ne rendant pas d'huile et bon seulement ppur être confit. La récolte se fait au moyen de gaules quand l'arbre est de haute taille, et à la main lorsque les fruits sont à portée. Aucune huilerie européenne n'a été fondée soit à Tripoli même, soit dans l'intérieur de la province. Deux systèmes sont employés pour la fabrication de l'huile. Les olives en entier, noyaux compris, sont triturées dans des moulins jusqu'à ce qu'elles soient réduites en pâte. Cette pâte est jetée ensuite dans un bassin rempli d'eau où les femmes la pétrissent : l'huile remonte alors à la surface et est enlevée au fur et à mesure. Le second système consiste à mettre cette pâte dans des coufFes que l'on écrase sous un poids considérable. On se sert aussi de pressoirs rudimentaires. Chaque Olivier est soumis à une redevance de 0 fr. 30. 10 0/0 sont perçus sur la récolte, le droit de marché est de 0 fr. 10 par 12 kilog. d'huile; enfin, le droit d'exportation s'élève à 1 0/0. Lorsque la récolte est bonne, l'exportation des grignous est en moyenne de 2,500 tonnes, à destination de la France, de l'Italie et de la Tunisie. Ces résidus mêlés à du son servent aussi à l'alimentation des bestiaux. En résume, la culture de l'Olivier en Tripolitaine est loin d'être soignée, aussi son rendement n'est-il jamais assez considérable pour que l'on puisse exporter de l'huile. Ce qu'elle en donne no suffit même pas à la consommation locale et l'on doit en importer chaque année en moyenne jusqu'à concurrence de 150 à 200 barils. Les huiles importées viennent de Crète et de Tunisie. » REVUE DES CULTURES COLONIALES irecteur : A. MILHE-POUTINGON, Docteur en droit. Directeur du Service de l'Afrique les Antilles à V Union coloiiiale française, Vice-Président de la Section coloniale à la Société ■ionale d'Acclimatation de France. .'éée sous les auspices de l'Union coloniale française, cette nouvelle publication a pour but défaire mieux aaître, en France, les diverses cultures et les productions coloniales ; de vulgariser dans les colonies meilleurs procédés de culture, d'y provoquer l'introduction des meilleures variétés des plantes françaises tellement cultivées et l'acclimatation de plantes nouvelles. COMITÉ DE PATRONAGE DE LA REVUE m. 3rince D'ARENBERG, député, vice-président du Groupe lonial, président du Comité de l'Afrique française, commandant BINGER, ancien gouverneur de la Côte- voire, directeur des affaires de l'Afrique au Ministère des •lonies. L BOURDE, ancien directeur des contrôles et de l'agri- Iture en Tunisie, ancien secrétaire général à Madagascar. EAU, professeur de botanique au Muséum. HAILLEY-BERT, professeur à l'Ecole des Sciences poli- lues, secrétaire général de l'Union coloniale française. .RLES-ROUX, ancien député, membre du Conseil supérieur I commerce, vice-président du Groupe colonial. INU, professeur de culture au Muséum. IIERAIN, membre de l'Institut, professeur de chimie agri- 'le au Muséum et à l'Ecole d'agriculture de Grignon. » ICEL DUBOIS, professeur de géographie coloniale à l'Uni- irsité de Paris. '.OWSKY, directeur de l'agriculture et du commerce en inisie, professeur de cultures coloniales à l'Institut natio- il agronomique, j FLAHAUT, professeur de botanique à l'Université de antpellier. I l\S GRANDEAUi directeur de la Station agronomique de î 'ist, rédacteur en chef du Journal d'Agriculture pratique. 1^ iNDIDIER, membre de l'Institut. ^a Revue des Cultures coloniales paraît le 5 de chaque mois. MM. Baron Jules de GUERNE, secrétaire général de la Société na- tionale d'Acclimatation. Dr HECKEL, professeur à la Faculté des Sciences, directeur de l'Institut colonial de Marseille. LE M'YRE DE VILERS, député de la Cochinchine, président de la Société nationale d'Acclimatation. Mgr LEROY, supérieur général des Missionnaires du St-Esprit. MILNE-EDWARDS, membre de l'Institut, directeur du Muséum. CH. NAUDIN, membre de l'Institut. OLIVIER, docteur ès sciences, directeur de la Hevue gé" nérale des Sciences pures et appliquées. PRILLIEUX, sénateur, inspecteur géuéral de l'Enseignement agricole, profesr de Botanique à l'Institut National agronome POISSON, assistant au Muséum. RISLER, directeur de l'Institut national agronomique, RIVIÈRE, ancien président de laSociété d'Agriculture d'Alger directeur du Jardin d'essai du Hamma. D'' TREILLE, ancien inspecteur en chef du service de santé des Colonies. VIALA, professeur de viticulture à l'Institut national agrono- mique, directeur de la lievue de Viticulture. H. DE VILMORIN, membre de la Société nationale d'Agricul- ture. 20LLA, professeur à l'Ecole d'agriculture de Grignon et à l'Ecole des sciences politiques. Sureaux : 44, rue de la Chaussée d'Antin, Paris. ibonnements : un an : France, 12 francs — recouvré à domicile, 12 fr. 50. ~ Colonies et Union stale, 15 francs. -- Payement d'avance. PEINTURE IGNIFUGE DITE ANTI-PÉTROLEUR Ui moment où l'horrible désastre du Bazar de la Charité est encore présent a toutes les mé- , 'ires, il convient de signaler la découverte récente, par M. de Preux, d'un produit désigné is le nom û'Anti-Pétroleur et qui rend les objets traités par lui absolument incombustibles. I. de Preux a fait, il y a peu de temps, à Saultain, près Valenciennes, des expériences déci- es à ce sujet. Deux baraques de bois blanc recouvertes de carton bitumé et tendues de jute, ,iie imprégnée du nouveau produit, l'autre à l'étal naturel, ont été remplies de copeaux imbibés ther. Les copeaux ayant été allumés, la baraque qui avait subi la préparation resta complètement acte, tandis que l'autre était détruite en quelques inslants. Mis en présence d'un chalumeau 'gageant 1,200 degrés de chaleur, le bois n'est percé qu'après 25 minutes et le carton bitumé se Uracte, mais ne brûle pas et ne se fond pas. Les objets en celluloïd ne s'enflamment pas lors- ils ont été traités par VAnti- Pélroleur. iprès les mêmes expériences faites en grand à l'Exposition de Bruxelles, au parc du Cinquan- |aire, le Jury international a accordé, à l'unanimité avec ses plus sincères félicitations, 'Anti-Pétroleur, un diplôme de médaille d'or, la plus haute récompense dont il pouvait poser. iC produit inventé par M. de Preux rendra d'immenses services. Il est déjà employé dans un ■tain nombre d'usines et il a été adopté par la Compagnie du Nord qui s'en sert dans ses )ôts de machines. 'adresser pour les commandes et les renseignements au régisseur du château de la Villette, aultain (Nord). ET MANUEL DE L'ACGLIMATEUR "recommandées pour L'AGRICULTURE, L'INDUSTRIE ET LA MÉDECINE Adaptées aux divers climats de V Europe et des pays tropicaux OUVRAGE PUBLIÉ AUX FRAIS ET SOUS LES AUSPICES DE LA Société nationale d'Acclimatation de France Un volume in-8^ de près de 600 pages avec portrait Considérations générales sur l'acclimatation des plantes ; j Aperçu général des genres de plantes auxquels sont empruntées dj espèces déjà utilisées ou qui peuvent Fêtre ; Description sommaire des familles ou groupes naturels auxquels rattachent la plupart des plantes indiquées dans ce volume ; Noms vulgaires des plantes et synonymes rapportés aux noms botanique Enumération par ordre alphabétique des plantes, leurs usages et le culture, formant un dictionnaire des végétaux à acclimater dans les divers régions du globe ; Noms des auteurs cités dans le cours de l'ouvrage avec les abréviatioi Pour les Membres de la Société Nationale d'Acclimatation de France, 3 fr. 50 OU INTRODUCTION : usitées. Prix : 7 Francs EN VENTE AU SIÈGE DE LA Société nationale d'Acclimatation de France, 41, Rue de Lille, PARIS. laSacrétaire Géséral, géi'aat, Jules de GUERNE. Versailles. — Imprimeries Cerf, 59, rue Duplessis. BULLETIN 591.52 DE LA mwi \m\ï\\ mmmwi DE FRANCE (Revue des Sciences naturelles appliquées) 45« ANNÉE JUIN SOMMAIRE Charles NAUDIN. — Réflexions au sujet d'une plante hybride extraordinaire de la famille des Campanulacées 177 V. PERRET. — Cultures de la Vanille, de la Vigne, du Caféier et du Mûrier, combinées avec l'élevage du Ver à soie en Nouvelle-Calédonie 180 'Extraits des procès-verbaux des séances de la Société : Procès-verbal de la Séance générale du 26 Novembre 1897 ' 183 3® Section : Entomologie. — Séance du 14 Février 1898 197 Extraits de la Correspondance : L. CHAZA.L. — L'amputation de l'oreille externe n'empêche pas les Chats de chasser les Oiseaux 199 D'' CROS. — Cultures dans le département des Pyrénées-Orientales 199 D"^ HECKEL. — Encouragement à donner aux entreprises coloniales 201 Extraits et Analyses: DE CLERMONT. — Le Pigeon voyageur est-il un animal domestique? 202 E. BERTAINCHAUD. — Notes sur les cires d'Abeilles de Tunisie 205 Accidents produits par la piqûre des Acariens du genre Argas 207 La Société ne prend sous sa responsabilité aucune des opinions émises par les auteurs des articles insérés dans le Bulletin. Un numéro 2 francs ; pour les membres de la Société 1 fr. 50 AU SIÈGE DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE D'aGGLIMATATION DE FRANGE RUE DE LILLE, 41 PARIS ET A LA LIBRAIRIE CERF, 12, RUE SAINTE-ANNE Le Bulletin paraît tous les mois. liwk m^ m%\ CBËSYL-JEYES DESINFECTANT ANTISEPTIQUE é ''Ch^ Le seul joignant à son Efficacité, scientifiquement démontrée, rimmense avantage de n'être ni Toxiquo 2li Oorrosif- Hémostatîque et Styptique puissant. Adopté par les Ecoles Nationales Vétérinaires, le Service de Santé de l'Armée, la Préfecture de la Seine et la plupart des Services d'Hygiène et de Désinfection des Départements. Reconnu indispensable dans la pratique vétérinaire. Envoi franco sur demande de Rapports scientifiques et Prospectus '. SOCIÉTÉ FRANÇAISE de PRODUITS SANITAIRES et ANTISEPTIQUES 35, Rue des Francs- Bourgeois (ci-devant 31, Rue des Petites-Ecuries), Paris. ^ ET CHEZ TOUS LES DROGUISTES ET PHARMACIENS. Pour è>r»>,3r les nombreuses Contrefaçons exiger rigoureusement sur tous les emballages les Marques, Cachets et le Nom CRÉSYL-JEYES. M«la»B f«n«6o mm 1919 PIN i« m léhillu «t 12 Prii rkiiMir Mkilli i'N, Prli d'iiiiikli, hrli Itll VOtTELLIERàHANTES(S.-iO. COUVEUSES ARTiriOIBLLU MATÉRIEL BtLITAH ▼olalllea de R«e« GEUFS À COUVKR pare «o H«adan CHIENS à» êhass0 drêtiâê. taTti fruu *i Ctttl«{M ilIuM. MAISON A PAMt Lits, Fauteuils, Yoitures et Appareils Mécanipes Pour MAIjJfiJDES et BLESSÉS DUPONT Fab' breveté s.g.d.g. Fournisseur des Hôpitaux à F»-A.RIS 10, Rue Hautefeuille au coiii lie la rue Serpente ( près l'EcolB-cie-Médecine) VOITURE mue au moyen de 1 ou 2 levjers. Snr demande envoi franco du Catalogne Les plus ÏLautes Eécompenses ati lipo"» françaises et Etrangères TELEPHONE BA V MIHTÉBA IjE GAZEUSE, déclarée d'INTJERET FUBLIC ( Décret du 7 Avril 189$} BUSSANG ANEMIE, GASTRALGIE, COLIQUES NEPHRÉTQUES, GRAVELLE, ARTHRITISME REGONSTITUANTEjDdiquéedaDstouteslesGONVALESGENGES RÉFLEXIONS XV SUJET D'UNE PLANTE HYBRIDE EXTRAORDINAIRE DE LA FAMILLE DES CAMPANULACÉES (1) par Charles NAUDIN (de rinstilut). Membre honoraire de la Société. Tout le monde connaît anjonrd'liui les merveilleux résultats que les horticulteurs obtiennent chaque jour des croisements entre espèces et variétés. Ordinairement les produits de ces croisements sont intermédiaires entre les espèces ou variétés productrices, mais, ainsi qu'on va le voir, il peut apparaître des formes qui ne rentrent plus dans les types paternel et maternel, et sont comme une nouvelle création de la Nature. En voici un exemple : Dans ces dernières années un horticulteur anglais, M. Wil- liam Mitten ayant croisé, dit-il, deux espèces distinctes de Campanules, les Campamda îsophylla et fragilis, vit naître à sa grande stupéfaction, une plante qui, non seulement n'é- tait pas intermédiaire entre les espèces croisées, mais qui constituerait un nouveau genre et même n'appartiendrait plus à la famille des Campanulacées. Rappelons sommairement que les caractères saillants de cette famille, très naturelle et très homogène, consistent principalement en un ovaire infère surmonté de cinq petits appendices, ou sépales, en une corolle monopétale et en cinq étamines libres, qui entourent un style terminé par un stig- mate à trois lobes. Dans quelques genres de Campanulacées ces parties de la fleur sont plus nombreuses, mais leur dispo- sition générale reste la même. Or, dans l'hybride dont il est question ici, et que M. Mitten (1) Communication faite en séance générale, le 11 lévrier 1898. Bull. Soc. nat. Accl. Fr. 1898. — 13. ^MS BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLLMATATIOxN. a nommée Campanula Balchiniana, le calice est transformé en un yerticille ou rosace de cinq feuilles pétiolées, à large limbe, étalées et toutes semblables aux autres feuilles de la plante; du centre de ce verticille s'élève la corolle mono- pétale, conforme au type normal et renfermant en outre, les cinq étamines, l'ovaire entièrement libre, comme l'est, par exemple, celui d'un Lis ou d'une Tulipe, en un mot dégagé de toute adhérence. Les botanistes morphologistes sont fort embarrassés pour expliquer cette métamorphose d'un type floral si bien arrêté dans les nombreuses espèces de Campanulacées, et, naturelle- ment, les hypothèses vont leur train. La plus en vogue se ra- mène à l'atavisme, et consiste à supposer que la première Campanulacée sortie du sein de la Nature avait, au lieu de calice, une rosace de cinq feuilles pétiolées et étalées, avec un ovaire supère et libre, et que, dans le cours des siècles, qu'il faudrait compter ici par milliers, l'évolution aidant, ce type primordial s'est insensiblement modifié pour devenir celui des Campanulacées actuelles. L'hypothèse est ingé- nieuse, mais dénuée de toutes preuves. Il est cependant à peu près certain que, chez les animaux et chez les plantes, on voit quelquefois reparaître, dans la série des générations, des traits qui rappellent des ancêtres plus ou moins éloignés; mais de là à conclure au type pre- mier des espèces, il y a loin. Si l'atavisme avait le pouvoir de ressusciter, par des à-coups en arrière, les formes disparues, nous pourrions légitimement nous attendre à voir renaître un jour le Singe antique dont certains savants prétendent que nous descendons. Avouons que cette preuve de notre ori- gine ne nous flatterait guère. Malgré tous nos efforts d'imagination nous ne pouvons nous faire la moindre idée du commencement de la vie sur la planète que nous habitons. Les données du problème nous font absolument défaut. D'un autre côté, une expérience séculaire et jamais dé- mentie nous montre les espèces se conservant identiques à elles-mêmes dans le cours des générations , sans autres changements que de légères variations qui n'altèrent point ce qu'il y a de fondamental dans les caractères spécifiques, tant qu'il n'y a pas eu de croisement entre les espèces, et que la fécondation a été normale. Dans les cas de fécondations illé- RÉFLEXIONS AU SUJET D'UNE PLANTE HYBRIDE. 179 gitimes, les variations sont naturellement plus profondes, mais nous ignorons jusqu'à quel point elles peuvent s'étendre. Ici, d'ailleurs, se présente un autre problème, celui de la sexualité, que la science est impuissante à résoudre. Pourquoi des mâles et des femelles dans tous les êtres vivants des deux règnes ? Pourquoi cette dualité d'éléments sans laquelle toute vie s'arrêterait sur la terre ? Cette question est d'ordre méta- physique et échappe à la science positive dont l'objet n'est autre que d'expliquer le mécanisme des phénomènes, et non d'en découvrir les causes. 180 CULTURES DE LA VANILLE, DE LA VIGNE, DU CAFÉIER ET DU MURIER COMBINÉES AVEC l'ÉLEVAGE DU VER A SOIE EN NOUVELLE-CALÉDONIE {\) par V. PERRET, Vice -président de la Chambre d'Agriculture de Nouméa. L'association de la Vanille, du Mûrier et de la Vigne au Caféier se justifie par les considérations suivantes : 1« Le Mûrier ne se plaît que sur les sols privés de calcaire, c'est le cas de la Nouvelle-Calédonie. 2° La température moyenne de la colonie est exactement celle que l'on s'efforce de maintenir dans les magnaneries, celle des paj^s d'où le Ver à soie est originaire, dans la saison où se fait l'éducation. 3° Par une heureuse coïncidence, cette température, qui ne dépasse pas celle que le Ver à soie peut supporter, est néan- moins suffisante pour la Vanille qui trouve encore dans la colonie la chaleur suffisante pour la maturation de ses gousses. C'est un fait sur lequel l'expérience s'est prononcée d'une manière décisive. 4° D'après Delteil, un des auteurs les plus compétents en la matière, aucun autre support ne plaît autant à la Vanille que le Mûrier; aucun n'en favorise davantage la production. 5° La valeur de la soie et celle de la Vanille sont telles, par rapport au poids ou à l'encombrement, que le prix du trans- port disparaît en comparaison; on peut le regarder comme une quantité négligeable. 6° Les marchés de la Vanille et de la soie appartiennent à la France, et néanmoins c'est de l'étranger que vient, au moins en partie, l'approvisionnement, faute d'une production nationale suffisante. 7° L'éducation des Vers à soie, la récolte et la préparation (1] Résumé d'une communication faite à la Section coloniale dans la séance du 31 janvier 1898. CULTURES DE LA VANILLE, DE LA VIGNE, DU CAFP:IER. 181 de la Vanille, la fécondation de ses fleurs, se font dans l'inter- valle qui sépare deux cueillettes de café l'une de l'autre, c'est- à-dire de septembre à janvier. La Vigne mûrit de janvier à février. La récolte du café commence en avril et finit en août. 8° Les mêmes hangars, appentis, vérandas, abris quel- conques, installés pour la dessiccation du Café, peuvent ser- vir à l'éducation des Vers à soie et aux manipulations de la Vanille. Les mêmes cadres sur lesquels le Café a été mis à sécher serviront pour recevoir et déliter les cocons. 9^ Le Mûrier est un arbre à racines traçantes, et la Vanille vit à fleur de terre. La fraîcheur qu'il faut maintenir au pied des Vanilliers, les fumures que nécessite un produit de si haute valeur profite- ront au Caféier, si la plantation est faite en mélange. 10° C'est en effet l'avantage de cette association. Une plan- tation par rangs alternés de Caféiers et de Mûriers, chacun de ces derniers supportant, soit un pied de Vanille, soit un pied de Vigne, à la convenance du propriétaire et suivant la situation, réunira toutes les conditions de sécurité, de durée et d'intensité productive. Lorsque les unes ou les autres de ces plantes laisseront apercevoir un peu de fatigue ou d'épuisement, on remplacera successivement un rang de Caféiers par un rang de Mûriers et réciproquement. Le Caféier trouvera un sous-sol vierge, une couche arable enrichie par les engrais et les détritus de la Vanille et du Mûrier, tandis que ceux-ci n'auront pas à souffrir de l'épuisement du sous-sol par le Caféier, par cette raison qu'ils n'y pénètrent pas. 12° Les appréciations élogieuses des Chambres de Com- merce de Paris et de Lyon (condition des soies) sont de nature à rassurer sur le placement des produits. Voici, pour terminer, les conclusions d'un rapport adressé au Ministre par la Commission des délégués des Colonies à l'Exposition permanente, il y a quelques années, et très encou- rageant comme on pourra juger: « De ces divers essais, il s'est dégagé ce fait que les Vers à soie se comportent parfaitement, même dans les plus mau- vaises conditions, que leur éducation n'exige aucune précau- tion particulière et qu'on peut la renouveler plusieurs fois 482 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. sans inconvénient, même pendant les plus grandes chaleurs. En 1886, des éducations successives ont été faites avec un égal succès pendant près de dix mois. Cependant les époques les plus favorables sont les mois de septembre, octobre, no- vembre et décembre. Les Mûriers perdent leurs feuilles en juillet, ils doivent être taillés en août ; les bourgeons naissent dans les premiers jours de septembre. Pour déterminer la qualité de la soie obtenue en 1887, des échantillons de cocons et de soie filée ont été communiqués par l'Exposition permanente des Colonies au Conservatoire des Arts et Métiers, ainsi qu'aux deux Chambres de Commerce de Paris et de Lyon. Il résulte de leur examen que les cocons paraissent de bonne qualité et que, si la soie est irrégulière, cela tient à ce que le dévidage a été fait par des personnes inexpérimentées et avec un outillage tout à fait rudimentaire . Malgré cela, elle rappelle les grèges de Canton et offre une apparence meilleure en ce qu'elle a moins de duvet et de bouchons. Les Chambres de Commerce de Paris et Lyon ont déclaré qu'il y avait lieu d'encourager sérieusement les ten- tatives d'introduction de la sériciculture en Nouvelle-Calé- donie, où cette industrie paraissait appelée à un grand avenir, surtout si l'on substituait à celles du Japon, des graines de race française dont le rendement est supérieur et la qualité meilleure. Rien donc ne semble devoir s'opposer au succès le jour où les colons trouveront dans un établissement public, les graines, les plantes, l'exemple, les renseignements qui leur manquent actuellement. » 183 EXTRAITS DES PROCÈS-VERBAUX DES SÉANCES DE LA SOCIÉTÉ SÉANCE GÉNÉRALE DU 26 NOVEMBRE 1897. PRÉSIDENCE DE M. RAVERET" WATTEL, VICE-PRÉSIDENT PUIS DE M. LE MYRE DE VILERS, PRÉSIDENT. Le procès-verbal de la séance du 21 mai 1897 ayant été, suivant l'usage, soumis à l'approbation du Conseil, il n'en est point donné lecture. — M. le Président prononce une courte allocution, et relate divers faits intéressant la Société qui se sont produits pen- dant les vacances. (Voir ci-dessus, page 1). Il adresse les félicitations de la Société à M. le D'" Raphaël Blanchard, membre du Conseil, et qui a été nommé Professeur à la Faculté de Médecine de Paris par arrêté en date du 25 juillet 1897. — M. le Président, au nom de la Société, remercie le bureau de la Société d'Horticulture des invitations envoyées pour l'Exposition des Chrysanthèmes qui vient d'avoir lieu au Jardin des Tuileries; enfin, M. Raveret-Wattel donne lecture d'une lettre du Ministère de l'Agriculture annonçant qu'une subvention de 1,500 francs a été attribuée comme les années précédentes à la Société d'Acclimatation. M. le Ministre de FAgriculture a bien voulu en outre, par une lettre en date du 22 novembre, accorder à la Société dC Acclimatation une mé- daille d'or, grand module, qui sera décernée au nom du Mi- nistre parla Société cC Acclimatation, avec ses autres récom- penses, dans la prochaine séance publique annuelle. Getti^ médaille doit être attribuée à des travaux de pisciculture pratique. M. Raveret-Wattel ajoute qu'il est particulièrement heureux, en l'absence de M. Le Myre de Vilers, de signaler l'intervention active de celui-ci pour obtenir cette médaille de M. le Président du Conseil. [Applaudissements.) DÉCISIONS DU CONSEIL, PROCLAMATION DE NOUVEAUX MEMBRES. Outre la décision concernant les médailles reçues de Russie 484 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. et dont il sera question tout à l'heure, M. le Président an- nonce que, dans sa séance du 29 octobre, le Conseil a décidé la création d'une Section coloniale, au sujet de laquelle M. le Secrétaire général donnera tout à l'heure quelques détails. Enfin, un vœu, adopté sur la proposition de M. Imbert, et concernant l'application stricte de la loi pour la répression du braconnage, a été transmis aux pouvoirs compétents. La Section d'Aquiculture aura d'ailleurs à s'occuper ultérieure- ment de ce sujet. — Feu James Jackson, décédé à Paris le 17 juillet 1895, a légué à la Société d' Acclmiatation et à huit autres Sociétés par parts égales (c'est-à-dire par neuvième), une somme de cent mille francs. Toutes les formalités exigées par la loi ayant été remplies, la Société a été autorisée, par un décret en date du 16 juillet 1897, à accepter le legs. L'encaissement en sera fait par les soins de M. Imbert, trésorier, en vertu de la délibération prise par le Conseil dans sa séance du 29 octobre 1897. Le montant du legs s' élevant à 9,834 francs, frais déduits, devra être immédiate- ment employé en rente 3 0/0 suivant un des articles du décret autorisant l'acceptation. M. Brunet, avoué conseil de la Société, a bien voulu se charger à titre gracieux de toutes les démarches nécessaires pour le règlement du legs Jackson et le Bureau croit devoir lui exprimer ici, au nom de la Société tout entière, ses biens sincères remerciements. — M. le Président proclame les noms des membres admis par le Conseil depuis la dernière séance générale : Delamarre - Debouteville , ingénieur, [ E. Cacheux. 51, rue d'Elbeuf, Rouen ( Seine-Infe'- ] Baron J. de Guerne. MM. PRÉSENTATEURS. rieure). Imbert. EspiNASSE (Mademoiselle), 13, rue de Calais, à Paris. Baron J. de Guerne. Milne-Edwards. Fritsch-Estrangin (Henri), 4, rue Las- Cases, à Paris. Le Myre de Vilers. Ed. Blanc. Baron J. de Guerne. Imbert. PROCÈS -VERBAUX DES SÉANCES DE LA SOCIÉTÉ. 1 Lamarche (C. de), secrétaire de la ré- daction du journal Étangs et Rivières, 21, rue de Vaugirard, Paris. MiLHE-PouTiNGON, directeur de la Revue des Cultures coloniales, 44, rue de la Chaussée-d'Antin, Paris. Picard (Henry), conseiller général de TI- sére, Saint-Jean-de-Bournay (Isère). Boigeol. Baron J. do Guerne. Imbert. Bourdarie. Baron J. de Guerne. Le Myre de Vilers. Comte de Galbert. Baron J. de Guerne. Raveret-Wattel. , ^ ( Ed. Blanc. Pré de Saint- Maur (René du), 50, ^^^^^ ^^^^^^^ avenue de Ségur, à Paris. / Rapfalovigh (Arthur), conseiller d'État f actuel de S. M. l'Empereur de Russie, \ correspondant de l'Institut, 19, avenue j Hoche à Paris et à Gif (Seine-et-Oise). ' Rebourgeon-Ryon, ne'gociant, 23, rue de \ Portugal, Tunis. ) Imbert. Ed. Blanc. Baron J. de Guerne. Edmond Perrier. Baron J. de Guerne. Milne-Edwards. Le Mvre de Vilers. ■D fc^ \ ■ (Ed. Blanc. Refuge (S. de Gourio de), ancien rece- \ ^ t , ^ Baron J. de Guerne. veur des finances, 32, rue Ribera, Paris. Rousset (Alexis -Constant), chef de station de classe au Congo français, en congé à Lons-le-Saunier (Jura). Ségur-Lamoignon (Vicomtesse de) , 5, ave- nue Hoche, Paris et château de Me'ry, (Oise). Thomas- Pietri, (Hérault). à Poussant- le -Haut, Vafpier, enseigne de vaisseau, château des Correaux, par Mâcon (Saône-et- Loire). Le Myre de Vilers. Bourdarie. Baron J. de Guerne. Le Myre de Vilers. Baron J. de Guerne. Le Myre de Vilers. d'Orval. Ed. Blanc. Baron J. de Guerne. Imbert. Baron J. de Guerne. De Mar cilla c. Raveret-Wattel. Est également inscrit comme membre de la Société le Centro agrigola Vargem-Alégre, État de Rio (Brésil). Bajac. Baron J. de Guerne. Imbert. 486 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. LECTURE DE LA CORRESPONDANCE. — M. Caustier, Secrétaire des séances, s'excusant de ne pouvoir assister à la réunion, M. le Secrétaire général pro- cède au dépouillement de la correspondance. Toutefois, avant d'entreprendre ce long résumé, car l'acti- vité de la Société a été considérable pendant les vacances, M. de Guerne croit devoir déclarer que la médaille du Mi- nistre de l'Agriculture, ne sera pas la seule récompense sup- plémentaire décernée en 1898 par la Société (TAccUmatalion. En effet la Société a reçu un Brevet, trois Médailles de bronze grand module et trois Diplômes correspondant à ces médailles , qui lui sont adressés par la Société impériale d" Accliynatalion de Russie, pour être remis à diverses per- sonnes ayant participé à l'Exposition de pisciculture de Moscou, Exposition qui a suivi celle dont la Société avait pris l'initiative à Paris, en février dernier. On sait que la Société d'Acclimatation s'était chargée, d'ac- cord avec la Société centrale d'Aquiculture et de Pêche, de grouper un certain nombre d'objets exposés rue de Lille, afin de les envoyer à Moscou. Les médailles et diplômes, offerts par le Ministère de l'Agri- culture et des Domaines de l'Empire de Russie à la Société impériale d'Acclimatation de Russie, à l'occasion de son Expo- sition, ont été attribués par celle-ci : A M. Raveret-Wattel, pour ses bacs flottants destinés à l'élevage des Salmonidés; A MM. Japy frères, industriels à Beaucourt (territoire de Belfort), pour leurs auges d'éclosion en tôle émaillée ; Et à M. VergnioUe, de Reims (Marne), pour ses incubateurs en zinc perforé d'un modèle nouveau (1). Enfin le Brevet est également attribué à M. Raveret-Wattel pour : Son activité utile pendant de 7ionibreuses années con- cernant la pisciculture, (traduction littérale du texte russe) ; le Brevet devait être accompagné du Jeton de la Section d'Ichtyologie, sorte de petit insigne en émail cloisonné poly- chrome, disposé pour être porté en breloque et que la Société (1) Les appareils exposés à Moscou par MM. Raveret-Waltel, Japy et Ver- gnioUe, ont été offerts par eux, à Tissue de l'Exposition, au Musée des Sciences appliquées de Moscou. PROCÈS-VERBAUX DES SÉANCES DE LA SOCIÉTÉ. 187 de Moscou décerne très rarement. Le nom du titulaire doit être émaillé sur le Jeton et celui-ci n'est pas encore terminé. II arrivera sans doute en temps utile pour être remis à M. Ra- yeret-Wattel à la séance de distribution des récompenses en même temps que les médailles. Le Conseil a décidé en effet, dans sa séance du 12 novembre, que ces récompenses venues de Russie seraient jointes à celles dont l'attribution est faite par la Société elle-même. {Applau- dissements.) Notifications, renseignements, avis divers, généra- lités. — Depuis la dernière séance générale (mai 1897) \di So- ciété a reçu avis du décès des Membres dont les noms suivent : Le duc d'Aumale, Gaillard de la Dionnerie, Azarian, D»" Tliolozan, Bezançon, Vuillier. Doumet-Adanson, Plusieurs d'entre eux faisaient partie de la Société depuis de nombreuses années et lui avaient rendu, tant en France qu'à l'étranger» des services signalés. — Le D'' Tholozan, dont l'influence fut si grande auprès du Shah de Perse, était dé- légué de la Société à Téhéran. Remercient de leur admission M^'^la vicomtesse de Ségur- Lamoignon, MM. Delamare-Deboutteville et Vaffier. — M. Albert Bouvaist, d'Abbeville, et M. Elisée Escande, missionnaire évangélique, à Ambositra, (Madagascar), deman- dent des renseignements sur le fonctionnement de la Société. — M. Gay, instituteur à Aïn-Taya, appelle l'attention de la Société sur l'Association Algérienne des Musées scolaires et des Jardins d'Ecoles, fondée par lui, il y a deux ans, dans le département d'Alger. Il sollicite les encouragements de la Société et envoie divers documents à Tappui de sa demande. Celle-ci sera examinée par le Conseil. Mammifères. — M. le Ministre du Commerce avise le Président de la Société d'Acclimatation (19 juin 1897) qu'une ordonnance prohibant l'importation des Chiens en Grande- Bretagne a été promulguée à Londres, le 7 mai 1897. La traduction de ce document, qui comprend 13 articles, est jointe à la lettre du Ministre. Cette ordonnance entrera en vigueur à partir du 15 septembre 1897. 488 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. — - M. le D"" Vogt (Mb) adresse une lettre sur un procédé employé en Haute-Savoie pour empêcher les Chats de vaga- bonder et de détrmre les petits Oiseaux. Ce procédé consiste dans l'amputation des oreilles. L'auteur émet à ce sujet quelques réflexions et demande des renseignements complé- mentaires. (Voir Bulletin 1897, p. 365.) — M. G. Blom adresse du poste de Carnot (Congo français), à la date du 29 mai 1897, une série d'observations concernant la domestication de l'Éléphant d'Afrique, domestication dont il n'est point partisan. La notice rédigée par M. Blom est renvoyée à l'examen du Comité de l'Éléphant. La communi- cation de M. Blom renferme en outre des renseignements sur divers animaux que l'on a réussi à apprivoiser au poste de Carnot. (Voir Bulletin, ci-dessus page ]63.) — M. Favez-Verdier, Directeur de l'Etablissement d'Avi- culture et d'Acclimatation de Royallieu, près Compiègne, annonce qu'il a reçu, dans les premiers jours d'août, un certain nombre de Mammifères, provenant de la République Argentine, Lamas, Guanaco, Maras, Tatous, etc. Ornithologie, Aviculture. — M. Blauw (Mb) envoie quelques détails sur les Tinamous {Rhynchoiiis ?mfescens) dont il poursuit l'élevage à S'graveland (Hollande) et au sujet desquels il a publié une notice dans le Bulletin de la Société (décembre 1896). M. Blauw annonce également l'envoi de quelques extraits de la Monographie des Grues qu'il vient de publier. Le texte anglais pourra être traduit pour le Bulletin. — M. Ch. Sibillot adresse divers programmes et projets de concours internationaux de Pigeons voyageurs. L'auteur se préoccupe surtout de la sélection des sujets au point de vue de la Colombophilie militaire. L'étude de ces propositions est renvoyée à l'examen de la Section d'Ornithologie qui trans- mettra ensuite son avis au Conseil. — M. A. Rozet (Mb) proteste contre la qualification d'Oiseau utile donnée au Moineau dans le Bulletin de juillet 1897 et signale les dégâts commis dans son jardin par ces Oiseaux. (Voir Bulletin 1897, p. 365.) — M. de Lépinay (Mb) adresse quelques détails sur les Oies d'Embden, dont l'élevage semble devoir réussir et se développer dans le département de la Vienne. PROCÈS -VERBAUX DES SÉANCES DE LA SOCIÉTÉ. 189 — Outre les Mammifères mentionnés ci-dessus, M. Favez- Verdier signale comme arrivés récemment à Royallieu divers Oiseaux de la République Argentine : Palmipèdes ou Galli- nacés et deux Nandous blancs, qui sont particulièrement remarquables. — Le président de la Ligue ornitophile française, M. Louis Adrien Levât, invite la Société à prendre part au Congrès ornithologique international pour la protection des Oiseaux utiles à l'Agriculture, qui doit se réunir à Aix, en Provence, du 9 au 14 novembre 1897. La Société n'ayant pu se faire représenter au Congrès, a adressé, par les soins de M. le Secrétaire général, à la Ligue ornithophile, une série de travaux publiés dans ses Bulletins, depuis 1888, concernant les Oiseaux utiles ; en outre, un mémoire original lui a été remis, celui de M. Joseph Clarté, de Baccarat (Mb), commu- niqué â la Section d'Ornithologie le 3 mai 1897 et intitulé Appel aux enfants pour la prolection des Oiseaux utiles. — M. le Baron d'Hamonville (Mb) et M. Machado de Car- valho (Mb) adressent diverses observations concernant le Congrès d'Aix et la nécessité qu'il y a de prendre des mesures énergiques pour la protection des Oiseaux utiles. — Le Président de la Société V Acclimatation sérinophile adresse ses remerciements pour une médaille que la Société d'Acclimatation a bien voulu lui accorder pour son concours annuel. Aquiculture. — M. Morin adresse diverses notes sur l'élevage des Salmonidés , aux Andelys (Seine-Inférieure) . (Voir Bulletin 1897, p. 307.) — M. F. Zenk (Mb), écrit de Wurtzbourg qu'il compte se fixer prochainement en Italie, dans une localité où il lui serait possible de s'occuper de pisciculture; il donne quelques dé- tails sur ses projets. (Voir Bulletin 1897, p. 36r). — M. A. Pettit, docteur ès sciences, fait connaître le ré- sultat de l'examen des Carpes provenant du réservoir de Grosbois (Côte-d'Or), où une grande mortalité s'est produite sur ces Poissons. (Voir à ce sujet le procès-verbal de la Sec- tion d'Aquiculture, séance du 5 avril 1897.) La note de M. Pettit sera publiée au Bulletin, voir ci-dessus, p. 164. — A l'occasion d'un article de M. Raveret-Wattel (Bulletin 190 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 1897 p. 304), M. de Lépinay (Mb) et M. F. Hottinguer (Mb) de- mandent des renseignements sur l'usage de la farine de viande Liebig pour la nourriture des Salmonidés. — M. Ledoux, adresse de Blois, à la date du 22 septembre, quelques détails sur la Société de Pisciculture dont il est le Secrétaire. Il demande si cette Société pourrait participer aux distributions gratuites d'œufs de Salmonidés et en parti- culier, de Saumons de Californie faites par la Société d'Ac- climataii07i. La Société de Pisciculture de Loir-et-Cher n'é- tant pas affiliée à la Société d'Acclimatation, cette demande, appuyée par M. le marquis de Cliauvelin (Mb), est renvoyée à l'examen du Conseil. — M. Machado de Carvalho (Mb), adresse de Marseille à la date du 11 novembre, une série d'observations sur les can- tonnements de pêche dans la Méditerranée. Il transmet les vœux que la Société Marseillaise de Pêche, la Lucrèce a cru devoir émettre à ce sujet. (Voir ci-dessus p. 129.) Entomologie. — M. E. Caustier, secrétaire des séances écrit de Monthenault (Aisne), à la date du l^^ octobre, qu'il recueille des documents sur l'Apiculture dans le nord de la France. — M. G. Coutagne(Mb), directeur delà Station séricicole de Rousset (Bouches-du-Rhône), adresse à la date du 30 octobre, quelques renseignements sur l'Etablissement qu'il dirige et sur l'action utile que celui-ci pourrait avoir au point de vue du dé- veloppement de la Sériciculture dans les Colonies françaises. — M. E. Cacheux (Mb) adresse plusieurs fragments de poutres rongées par des Fourmis et qui proviennent d'une maison de Neuilly-sur- Seine. Les dégâts étaient tellement graves qu'il a paru préférable de démolir l'immeuble plutôt que de chercher à le consolider. Les bois rongés ont été sou- mis à l'examen de M. Marchai qui exprime le regret de n'a- voir trouvé aucun Insecte à étudier dans les échantillons. Il est donc impossible de déterminer avec certitude l'auteur des dégâts. — M. le D"" Lecler (Mb) adresse de Rouillac (Charente), des échantillons de racines d'Erable attaquées par un Insecte. Communication en a été faite à M. le D"" Marchai. (Voir Cor- respo7îdance.) PROCÈS-VERBAUX DES SÉANCES DE LA SOCIÉTÉ. 191 , Botanique. — M. de Lépinay (Mb) donne quelques rensei- gnements sur la culture des Topinambours, qu'il pratique sur une grande échelle dans le département de la Vienne. Il espère pouvoir envoyer ultérieurement à la Société une no- tice détaillée à ce sujet. — M. G. d'Augy (Mb) demande des renseignements sur le Tussilage odorant ou Héliotrope d'hiver. — M. Haffner, directeur du Jardin botanique de Saigon, adresse le Catalogue des graines que ce Jardin offre en échange à ses correspondants. — M. Ign. Solis, de Guatemala, désirant faire connaître dans son pays l'histoire du Téosinté [Rsana luxurimis) écrit, à la date du 19 septembre, pour demander à la Société tous les renseignements qu'elle pourra lui procurer sur cette plante et sur les conditions divei»ses où elle a été cultivée. Cheptels. — Distribution de graines. — Dons en na- ture. — M. Jean Dybowski, Directeur de l'Agriculture et du Commerce de la Régence de Tunis, accuse réception (à la date du 24 juillet 1897) de l'envoi de graines du Turkestan rapportées par M. Edouard Blanc et qui lui ont été adressées par les soins de la Société. « Je vous prie d'en agréer mes vifs remerciements, les graines seront semées au Jardin d'essais de Tunis où il en sera pris le plus grand soin. >j — A la suite des envois de graines très importants adres- sés de la Villa Thuret en juin et juillet 1897, après la clôture de la session, par M. Charles Naudin, membre honoraire de la Société, un nombre considérable d'expéditions ont été faites, et il est impossible de mentionner au procès-verbal les noms de tous les membres de la Société qui y ont pris part. Les remerciements adressés par eux ne sauraient également trouver place au procès-verbal. — M. G. Coutagne, deRousset (Bouches-du-Rhône) (Mb) de- mande des graines de Sorgho sucré du Turkestan, remises à la Société par M. Edouard Blanc. — M. Clos (Mb) adresse à la Société, pour être distri- buées, des graines de Ginlio et de Jujubier de Chine, ré- coltées au Jardin des Plantes de Toulouse. (Voir Correspon- dance.) 492 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLLMATATION. — - M. Debreuil (Mb), grâce auquel ont été distribuées di- verses graines de Gucurbitacées africaines, qui ont très bien réussi chez plusieurs de nos collègues, adresse diverses re- cettes pour accommoder les Courgettes d'Egypte. Il offre à la Société une photographie représentant ces Courgettes dans son potager, à Melun. — M. G. d'Augy (Mb) remercie des graines qui lui ont été adressées et annonce un prochain envoi de graines d'Epinard rouge. — La Société a reçu pendant les vacances un certain nombre de dons en nature, qui ont été répartis entre ses membres. M. Charles Naudin a fait (en juillet) un envoi de Dattes mû- ries à Nice, chez M. de Cessole et dont il a été plusieurs fois question dans le Bulletin ; M. le Secrétaire général s'est em- pressé de répartir ces fruits entre plusieurs collègues pré- sents à Paris, qui ont pu apprécier leur qualité. M. Fran- cisque Sarcey en a également goûté; les noyaux de ces Dattes ont été soigneusement conservés et semés, car ils appartiennent à un arbre unique jusqu'ici et le seul qui fournisse des Dattes mûrissant en France. Plus récemment (en octobre), M. Charles Rivière, directeur du Jardin d'essai du Hamma, a remis au siège de la Société un petit régime de Bananes obtenues dans l'établissement. Ces fruits, résultat d'une sélection prolongée depuis long- temps déjà, sont excellents pour la table et l'on ne peut in- voquer à ce sujet un témoignage meilleur que celui de M. Le Myre de Yilers, Président de la Société. Pendant ses nom- breux voyages et ses longs séjours aux colonies, il a pu com- parer entre elles les qualités si diverses des bananes. Celles, du Hamma dont il a pu goûter grâce à M. Rivière, ont été. déclarées par lui très supérieures à la moyenne. Si la race- créée par M. Rivière peut être fixée et qu'on puisse la culti- ver largement en Algérie, il n'est pas douteux qu'elle n'ob- tienne un réel succès non seulement en Algérie, mais aussi en France où il sera possible de l'amener très rapidement. — M. Berthoule, Secrétaire général honoraire de la Société^ a bien voulu faire récolter en Auvergne, sur les bords du lac Pavin, de la mousse d'excellente qualité qu'il offre à la So- ciété pour emballer les œufs de Salmonidés lors de la pro- chaine distribution qui sera faite par elle. PROCÈS-VERBAUX DES SÉANCES DE LA SOCIÉTÉ- 193 — M. Félix Mérel adresse à la Société une série de sacs con- tenant un produit nouveau inventé par lui pour l'alimentation des Oiseaux de basse-cour, de chasse et de faisanderie. Ce produit désigné sous le nom de Provende armoricaine est mis à la disposition de la Société par son inventeur qui dé- sire le voir soumettre à l'expérimentation chez les personnes que le Conseil croira devoir; désigner comme particulièrement compétentes pour en bien juger la valeur. Parmi les dons faits à la Société durant les vacances, il con- vient de signaler encore une soixantaine d'œufs de Nandous, pondus chez M. Debreuil, à Melun par des Oiseaux placés chez lui en cheptel par la Société. M. Debreuil donnera lui-même des détails circonstanciés sur ces Nandous et la production de leurs œufs. COMMUNICATIONS ORALES. — M. le Secrétaire général donne quelques détails sur la création d'une Section coloniale que le Conseil a cru devoir réaliser selon la demande d'un certain nombre de Membres de la Société. M. Louis Olivier a bien voulu accepter les fonc- tions de délégué du Conseil chargé d'organiser les travaux de cette nouvelle Section. La présidence en sera offerte à M. Raoul, pharmacien en chef des Colonies, et qui vient de rentrer en France après avoir accompli en Malaisie une mission des plus intéressantes pour l'agriculture tropicale. M. Milhe-Poutingon, de l' Unioyi colordale française, a bien voulu accepter d'être proposé comme vice-président et M. Bourdarie comme secrétaire. Déjà des témoignages de sympathie et de hautes approba- tions sont arrivés à la Société au sujet de la création de cette Section. M. le Secrétaire général cite diverses lettres adres- sées à la Société et qui doivent être dès maintenant ren- voyées à la Section coloniale. (Lettres de MM. les professeurs Heckel, de Marseille, Louis Olivier, Caustier, P. Chappel- lier, etc.) — M. le Secrétaire général rend compte très brièvement de la part que ]a. Société d' Accliynatation a prise : 1^ au Congrès de l'Association française pour l'avancement des Sciences réuni à Saint-Etienne du 5 au 12 août 1897 , au Congrès international colonial de Bruxelles du 16 au 19 août. Bull. Soc. nat. Accl. Fr. 1898. — 14. 494 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. Au Congrès de Saint-Etienne, le Conseil avait désigné pour représenter la Société MM. Ed. Blanc, de Guerne et Raveret- Wattel. Un grand nombre de communications ont été faites sur des sujets intéressant la Société dans les sections d'Agro- nomie, de Botanique ou de Zoologie. La section de Botanique était présidée par M. Cornu, Membre de la Société. M. de Guerne avait été élu Vice-Président de la section de Zoologie. Au Congrès international colonial de Bruxelles, d'impor- tantes discussions ont eu lieu, dans le domaine des travaux de la Société, sur les cultures coloniales et sur la protection de l'Éléphant d'Afrique. Ce sujet a été traité par M. Paul Bourdarie que le Conseil avait spécialement délégué pour re- présenter la Société d'Acclbnatation au Congrès de Bruxelles avec M. le Secrétaire général. — M. le Secrétaire général donne quelques détails sur les excursions faites par la Société depuis la dernière séance. Trois excursions ont eu lieu. La première, le 23 mai, à Saint- Lambert, dans la vallée de Chevreuse, pour visiter l'Etablis- sement de Pisciculture créé par M. Philipon, Membre de la Société. Le 30 mai, une visite a été faite aux ruchers du Jar- din du Luxembourg et du Parc de Montsouris. Enfin, le di- manche 13 juin, la Société s'est réunie à la faisanderie de Mériel (Seine-et-Oise). L'ordre du jour étant très chargé, M. de Guerne ne peut que signaler ces excursions, sur lesquelles il y aura lieu de revenir. Mais il importait dès aujourd'hui d'appeler l'atten- tion sur cette manifestation nouvelle de l'activité de la So- ciété d'Acclimatation dans l'ordre pratique. Il convenait également de remercier toutes les personnes qui ont bien voulu prêter leur concours à la Société dans ces circon- stances, M. Philipon, M. Galichet, de Mériel, le Bureau de la Société d'Apiculture, et en particulier, M. Clément, président de la Section d'Entomologie. En outre de ces excursions générales, un certain nombre de Membres du Bureau et du Conseil se sont rendus à Melun, sur l'invitation de M. Debreuil, pour examiner les élevages poursuivis parleur collègue et notamment ceux des Nandous qu'il a reçus en cheptel de la Société. Une autre course a été faite à l'Etablissement de Royallieu» près Compiègne où plusieurs Membres de la Société, aux- quels s'était joint M. Francisque Sarcey, sont allés voir les PROCÈS-VERBAUX DES SÉANCES DE LA SOCIÉTÉ. 195 animaux, récemment importés de la République Argentine, par M. Favez-Verdier et qui ont été énumérés ci-dessus. — A propos de la lettre de M. le D"" Vogt sur l'amputation des oreilles chez les Chats pour empêcher ces animaux de va- gabonder et de se livrer à la chasse des petits Oiseaux, M. L. Chazal (Mb) présente quelques observations. Il a lui-même expérimenté cette méthode et ne croit pas à son efficacité. — M. E. Cacheux (Mb) annonce que la Société V Enseigne- ment technique et professionnel des Pêches maritimes s'est chargée d'organiser une section française à l'Exposition inter- nationale des pêches qui doit avoir lieu à Bergen (Norvège), durant Tété de 1898. M. Cacheux montre, par quelques exemples, l'intérêt qu'il y a pour la France à développer ses relations commerciales avec les pays Scandinaves, où l'in- dustrie des conserves de Poisson se développe sans cesse, où l'on use entre autres choses de plus en plus d'huile d'olive et de sel. Ces produits peuvent être très largement fournis par le midi de la France et par la Tunisie. — A propos de la lettre de M. Blaau^v, sur l'élevage des Ti- namous»en Hollande, et dont il a été question à la correspon- dance, M. le Secrétaire général dit que cette lettre sera lue dans une prochaine séance qu'il espère voir entièrement con- sacrée à l'étude du Tinamou. On s'occupe beaucoup en ce moment d'introduire en France cet Oiseau qui semble pouvoir fournir un nouveau gibier, de chasse et de goût agréables. Des demandes de renseignements au sujet du Tinamou par- viennent chaque jour à la Société, et c'est pourquoi il semble utile de résumer, dans une séance spéciale, les notions scien- tifiques et pratiques acquises sur ces Oiseaux. MM. Blaauw, Milne-Edwards, Galichet, Oustalet, etc., enverront pour la circonstance des documents du plus haut intérêt. — M. le Secrétaire général présente un paquet d'épis de Blé du Soudan envoyés par M. de Trentinian, Gouverneur de cette colonie. A ce propos, M. Milhe-Poutingon (Mb) donne quelques détails sur la production et la culture du Blé au Soudan. — M. Le Myre de Vilers insiste sur l'intérêt de ces cultures ; et montre qu'il s'agit là d'une véritable richesse. Du jour où, dans nos colonies, l'on pourra récolter surplace le Blé indis- 196 BULLETL\ DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. pensable à l'alimentation des Européens, il en résultera une économie considérable sur le prix d'une denrée de faible va- leur dont les frais de transport sont parfois décuples. — M. Paul Bourdarie (Mb) ajoute que le Maïs pourra rendre également de grands services aux colonies, surtout si l'on s'applique à en bien choisir les races. Il communique à ce propos les résultats d'une expérience faite par M. .Glialot, di- recteur du Jardin d'essai de Libreville, avec quelques grains de Maïs, dit préhistorique et que M. Bourdarie a pu envoyer au Congo grâce à la Société d'Acclimatation. Ce Maïs a poussé très vite, atteignant rapidement de grandes proportions. — M. Debreuil a cultivé le même Maïs à Melun et en a obtenu aussi de très beaux pieds dont la photographie sera pré- sentée à la Société dans une prochaine séance. — Une discussion s'engage entre MM. Bourdarie, Decroix, Lejeune, Trouessart, de Guerne, sur le point de savoir si l'on peut ou non admettre comme authentique l'origine du soi-di- sant Maïs préhistorique. — Lecture est donnée d'un mémoire de M. le professeur N. de Zograf (Mb), sur les Problèmes de l'Acclimatatîon en Russie (voir Bulletin, novembre 1897). — Lecture est donnée d'un mémoire de M. Charles Rivière (Mb), directeur du Jardin d'Essai du Hamma, à Alger, sur le Manioc en Algérie et dans le bassin méditerranéen (voir But- letin, novembre 1897). Le Secrétaire général de la Société, Jules de Guerne. 197 4« SECTION (ENTOMOLOGIE). SÉANCE DU 14 FÉVRIER 1898. PRÉSIDENCE DE M. A.-L. CLÉMENT, PRÉSIDENT. Il est procédé au renouvellement du bureau ; sont élus : MM. Cle'ment, président. Decaux, vice-président. Marchai, secrétaire. R a t h e 1 o t , sécréta ire-adjo in t . M. Clément est en outre choisi, comme de'Ie'gue"à la Commission des re'compenses (M. Edouard Blanc e'tant délégué du Conseil auprès de la Section). Dépouillement de la correspondance. Elle renferme justement une lettre de M. F. Decaux, retenu depuis longtemps à la chambre par une indisposition et qui s'excuse de ne pouvoir prendre une part ac- tive aux travaux de la Section. A l'unanimité', il est décidé qu'une lettre signée du Président et du Secrétaire sera adressée à M. Decaux pour l'informer que la Section tient à le conserver dans son bureau comme vice-président et pour lui exprimer les vœux que forment ses collègues pour le prompt rétablissement de sa santé. Diverses demandes d'œufs ou de cocons de Vers à soie sont adres- sées à la Société, notamment du Tonkiu. A ce propos M. le Secrétaire général rappelle la notice récemment publiée dans le Bulletin (août 1897) par M. Charles Naudin : Sur un nouveau Mûrier de Tonfiin et signale une lettre de M. G. Coutagne, Directeur de la Station séricicole de Rousset (Bouches-du-Rhôno) où il est également question de la sériciculture aux colonies. Lecture est donnée de l'extrait d'un rapport de M. de Trentinian, Gouverneur du Soudan français, concernant la production de la soie dans cette colonie. M. le Secrétaire général fait observer que, dès son origine, vers 1855, la Société d' Acclimatation s'est occupée de cette soie du Soudan. Le fondateur de la Société^ Isidore Geoffroy Saint-Hilaire, avait remis précisément à notre collègue M. Naudin, un fragment d'un arbrisseau de Sénégambie sur lequel vit une chenille dont la soie passait pour être utilisable. L'arbrisseau en question est un Zizijphus et M. de Guerne donne lecture d'une note publiée à ce sujet dans le n° 7 de la Revue des Cultures coloniales . Cette note sera reproduite dans le Biilletin, Une discussion s'engage sur l'intérêt qu'il y aurait à développer la production de la soie dans les colonies françaises, afin d'alimenter le marché du pays, en ayant le moins possible recours à l'étranger. II convient de signaler parmi les colonies pouvant fournir à bref délai BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ L'ACCLIMATATION. une quantité notable de soie, la Nouvelle-Calédonie; M. Perret, qui a longtemps dirigé les travaux agricoles du pénitencier de Nouméa et qui est aujourd'hui vice-président de la Chambre d'Agriculture de cette ville, a exposé devant la Section coloniale les résultats des essais d'acclimatation tentés et réalisés dans la colonie depuis une quinzaine d'années. La culture combinée de la Vanille et du Miirier, celui-ci servant de support à la première, est des plus recommandables. La récolte de la Vanille se fait sans préjudice de celle des feuilles du Mûrier et à des époques telles que le même personnel peut s'occuper successivement de la Vanille et de l'élevage des Vers à soie. Il est d'ailleurs possible de planter des Caféiers dans l'intervalle des lignes de Miiriers porteurs de Vanille. La récolte du café ne nuit aucune- ment à celle des cocons et les mêmes inslallalions, hangars ou véran- das, établies pour la dessiccation du café, peuvent servir à l'éducation des Vers à soie. La Section examine un lot de cocons provenant de la Nouvelle-Ca- lédonie et offerts à la Société par M. Perret. M. le Secrétaire général rappelle à ce propos une notice de M. Ra- veret-Wattel publiée dans le Bulletin de la Société d'Acclimatation en 1874 et intitulée : De Vutilité d'introduire la sériciculture à la Nou- velle-Calédonie. On y trouvera, bien qu'elle date déjà de près de vingt- cinq ans, nombre d'indications pouvant être encore utilement suivies. M. le Secrétaire général rend compte de l'excursion organisée par la Société aux ruchers du Jardin de Luxembourg et du Parc de Mont- souris. Grâce à l'obligeance du bureau de la Société centrale d'Apicul- ture qui a bien voulu en prendre la direction, l'excursion a pleinement réussi. Elle a eu lieu le dimanche 30 mai par un très beau temps et a été suivie avec un vif intérêt par une nombreuse assistance. M. de Guerne adresse les remerciements de la Section à M. Clément et le prie d'être son interprête auprès de ses collègues de la Société centrale d'Apiculture. M. Clément présente un cadre extrait d'une ruche appartenant jus- tement à cette Société et qui renferme un nid de Guêpes ayant atteint des proportions considérables au milieu même des Abeilles. La première observation concernant ce fait exceptionnel a été relevée précisément au cours de la visite faite par la Société d'Acclimatation le 30 mai 1897 au Rucher de Montsouris. Depuis lors, et contre toutes prévisions, le nid de Guêpes a continué à se développer jusqu'au jour où il a paru prudent de détruire ces Insectes devenus par trop nom- breux pour la sécurité des Abeilles et même des promeneurs. Une notice détaillée sera publiée à ce sujet. Pour le Secrétaire empêché, Jules de Guerne, Secrétaire général. 199 EXTRAITS DE LA CORRESPONDANCE. L'amputation de l'oreille externe n'empêche pas les Chats de chasser les oiseaux. Monsieur le Secre'taire général, Vous m'avez témoigné le désir de voir consignée au Bulletin la très modeste observation que j'ai faite dans la séance du 26 novembre, au sujet de l'amputation de l'oreille externe pratiquée sur les Chats pour les empêcher de chasser les petits Oiseaux, J'ai vu opérer cette mutilation pendant cinq années, environ vers 1850-1855, sur tous les Chats du domaine de la Brosse-Saint-Ouen (canton de Rebais, arrondissement de Coulommiers, Seine-et-Marne). Cela ne les empêchait en aucune façon de chasser; c'est pourquoi on y a renoncé. J'ai vu moi-même les Chats aux oreilles coupées chasser à toutes les heures de la journée, dans les prés et dans les cultures : Blés, Avoines, Légumineuses à tout degré d'avancement de végétation. Il n'y a que sous bois que je n'en ai pas rencontré, sans doute parce que les prés et les cultures du parc leur suffisaient. Curieux de saisir la raison de celte mutilation, je n'ai eu d'autre réponse que celle-ci : « Que les Chats ayant les cornets des oreilles coupés, la rosée leur tombait dans la conque de l'oreille et les dégoû- tait d'aller aux champs. » Comme les Chats ne m'ont pas paru choisir précisément l'heure de la rosée pour se mettre en chasse, la raison m'a paru bien spécieuse, et l'expérience m'a démontré qu'elle ne valait rien. J'ai par cette réponse même été amené à observer plus attentivement les heures de chasse de cet ennemi acharné des petits Oiseaux et de leurs couvées ; c'est l'après-midi, et surtout vers le coucher du soleil, qu'on trouve les Chats en chasse dans les champs. Veuillez agréer, etc. L. Chazal. X Cultures dans le département des Pyrénées-Orientales. Perpignan, le 28 janvier 1898. Monsieur le Secrétaire général. J'ai l'honneur de vous faire connaître le résultat des semis faits avec 200 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. les graines que la Société d'Acclimatation a bien voulu m'adresser dans le courant de 1897. l'' Graines de Coton blanc et fauve du Turkestan, rapporte'es par M. Edouard Blanc, semées dans la plaine à Perpignan ou à la mon- tagne, à Vernet-les-Bains, à 780 mètres d'altitude ; les graines ont levé, quelques plantes se sont de'veloppe'es, d'autres ont fondu ; deux sujets à coton fauve ont fructifié. Les graines avaient été semées au pied d'un mur exposé au Midi. Il y a eu là peut-être des conditions de trop forte chaleur; pendant l'année courante, les graines seront semées en plein champ comme dans la culture du Turkestan, où la température générale, eu égard aux produits qu'y récolte la Russie, doit se rap- procher de celle du Roussillon. 2° Zizyphîis mucronafa. — Semis réussi. Les jeunes plantes ont atteint 20 centimètres de hauteur environ, elles sont couvertes de piquants et ont perdu leurs feuilles d'assez bonne heure. 3° Chamaerops excelca^ du docteur Lecler, de Rouillac (Charente), ou Trachycarpus excelsa. Ces graines ont été semées, bien que mes Chamaerops, de 5 à 6 mètres de hauteur, se multiplient d'eux-mêmes, dans mon jardin. J'arrache chaque année nombre de jeunes sujets qui poussent un peu partout. 4^^ Mimosa lophanta. — Encore un arbuste commun en Roussillon, les sujets obtenus avec les graines de la Société d' Acclimatation ont atteint déjà, avec les semis de printemps 1897, une hauteur de 1 m. 80; à la date d'aujourd'hui (28 janvier LS98), ils ont toutes leurs feuilles, mais n'ont pas fleuri. 5*^ Acacia pycnantTia^ paraît devoir être une bonne acquisition, arbre intéressant par ses petites feuilles composées et bipinées au début, qui sont remplacées ensuite par de larges phyllodes, ressemblant à des feuilles de Camélias ; les sujets ont de 0,30 à 0,80 centimètres de hauteur sans ramification aucune; les feuilles paraissent persistantes. 6° Dattier. — Douze dattes m'ont été adressées sans aucun rensei- gnement relatif à leur nom, à leur pays d'origine. Proviennent-elles du PJiœnia) melanocarpa, de la villa Cessole, à Nice (Sauvaigo et Naudin), ou bien viennent-elles de Kairouan ? Le fruit était brun rougeâtre, la chair dure et sèche, pas trop sucrée et rappelant comme ensemble» sauf la couleur, les dattes du Hodna , de la province de Cons- tantine. Naturellement, je serais très content de savoir quel nom je dois donner aux jeunes plantes venues de ces dattes. La précocité du JPhcenix melanocarpa (Dattier de Nice), est trop intéressante et c'est une chose trop rare pour justifier mon désir. En terminant, j'ajouterai que la plaine du Roussillon possède d'assez beaux spécimens delà flore si richement représentée à la villa Thur et, [1) Les fruits dont il est ici question sont les Dattes rouges envoyées d'Oran à la Société par M. Leroy {Note de la Réd.]. EXTRAITS DE LA CORRESPONDANCE. 201 grâce aux soins assidus de Dotre éminent collègue, M. Naudin ; on trouve à Perpignan, dans divers jardins : PJiœnix canariensis de 5 à 6 mètres Brahea glauca. de haut et 0 m. 80 de diamètre. Ph. senegalensis. Pk. Sylvestris. Cocos campestris. Faux Poivriers, [Schinus molle). Camphriers, Brythrina en arbre, etc. Jubœa, spectalilis, très forts sujets réellement beaux. Washingtonid robusta. — australis. Pritchardia filifera. J'ai quelques graines de mon jardin que je puis vous adresser si elles doivent faire plaisir à nos collègues : Encouragement a donner aux entreprises coloniales. Questions de botanique appliquée à mettre à l'étude. Monsieur le Secrétaire général, « Je ferai mon possible pour vous adresser des articles coloniaux, mais je suis absorbe' par mes propres Annales qui me donnent beau- coup de mal. L'ide'e coloniale est naissante à peine, et il faut se démener beaucoup pour la faire progresser. Qu'on ne perde pas de temps ; nos colonies forment aujourd'hui un capital mort, et quand des bonnes volontés se dressent pour le faire fructifier, il faut le crier bien haut et forcer la modestie de ces pion- niers inconnus dans leur dévouement. Il appartient à la Société d'Accli- matation de faire cette œuvre de justice dans le beau domaine qui est le sien- En ce qui concerne les questions qu'on pourrait mettre à l'ordre du jour, je ne saurais trop insister sur l'urgence des deux suivants : 1° Etude et culture des Lianes à Caoutchouc (Vahea, Landolphia) dans les colonies françaises tropicales^ valeur de leurs produits. — On a pre'- tendu que les Lianes sont réfractaires à la culture ; les Allemands viennent de prouver le contraire, dans leur colonie du Cameroon ; il faut suivre cette voie trace'e largement par nos voisins du Congo, faire re'colter des graines et des fruits de Landolphia ou de Yahea et les envoyer dans nos colonies de l'Indo-Chine, de la Guyane et des An- tilles. Je ne parle pas du Congo où les cultures sont tout indiquées. Cassia marylandica. — farnesiana . Chamœrops excelsa. Chamœrops humilis. Pliysianthus albens. D»- Gros. X 202 BULLETIN LE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. 1 es LandolpMa de la côte occidentele d'Afrique donnant un des meil- leurs caoutchoucs connus. D'autre part, il faudrait une étude sérieuse de ces Lianes sauvages et de leurs produits, afin d'en sélectionner Tac- climatation et de ne propager que les meilleures espèces. 2° ^tude des végétaux donnant des graines grasses mal ou peu connues dans les colonies françaises, de leur difusion et de leur acclimatation dans les colonieSy valeur de leurs matières grasses ou des tourteaux qu'elles donnent, — C'est là un grand désideratum pour l'industrie nationale des huileries, des savonneries et des stéarineries : on ne sort pas des Coprah, des Arachides, des Palmistes et des Se'saraes, il faut évidem- ment trouver mieux comme corps gras ou comme végétaux pro- ducteurs. Si la Société attache des prix de quelque valeur à la solution par- tielle ou totale de ces deux grosses questions, elles seront rapidement abordées, et ce sera la mise en train d'un capital colonial capable de rendre de grands services à l'industrie métropolitaine. Agréez, je vous prie, etc. E. Heckel, Directeur du Musée et de l'Institut colonial de Marseille. EXTRAITS ET ANALYSES. Le Pigeon voyageur est-il un animal domestique? par Raoul de Clermont, Ingénieur agronome, Avocat à la Cour d'appel (1). Un problème qui intéresse vivement l'agriculture a été posé, il y a quelques mois, à la Cour de Cassation. Il s'agissait de savoir si le Pigeon domestique était un Oiseau et quel Oiseau. De longs débats se sont élevés, en effet, sur le point de savoir : « Si le Pigeon voyageur était vraiment un animal domestique ou s'il fallait l'assimiler aux hôtes sauvages de nos forêts, à un gibier. » Le Pigeon voyageur est-il un animal domestique? » Celui qui le lue ou le blesse se rend passible des peines e'dictées par les articles 454 et 479 du Code pénal. (1) Communication faite à la Section d'Agronomie au Congrès de lAssocia- tion française pour l'avancement des sciences, Saint-Etienne, 1897. EXTRAITS ET ANALYSES. 203 Celui qui « le soustrait frauduleusement commet un vol ». Si, au contraire : Le « Pigeon voyageur est un gibier », les lois et les règlements de chasse lui deviennent applicables et, notamment aux termes des ar- ticles 9 et 11 de la loi du 3 mai 1844, modifiée par celle du 8 janvier 1874, les Préfets peuvent prendre des arrête's réglementaires pénale- ment sanctionnés par l'article 471, § 15 de notre Code pénal. Les Tribunaux de paix des re'gions du Nord et de l'Est, que le voisi- nage de la frontière rend essentiellement colombophiles, se sont pro- nonce's invariablement pour la première solution : « Le Pigeon voya- geur est un animal domestique. » Mais la Cour de Paris, dans son arrêt du 15 février 1898, les Chambres criminelles et civiles de la Cour de Cassation, ont affirmé qu'il n'en était rien et que le « Pigeon voyageur était un gibier ». Il appartenait k la Cour de Cassation, toutes les Chambres re'unies, de trancher définitivement la controverse : condamnant le système adopté par les Chambres criminelles et civiles, elle vient de décider, par un arrêt du 8 décembre 1896, à propos duquel on a beaucoup écrit que le « Pigeon voyageur est un animal domestique ». Les partisans de la négation, au mépris des enseignements de la Zoo- logie, de la Zootechnie, nonobstant les traditions de notre législation, n'invoquent, en somme, qu'un seul argument et, pour édifier longue- ment leur pe'nible argumentation, ils invoquent littéralement, textuel- lement, l'article 9 de la loi sur la chasse, qui autorise les Préfets à prendre des arrêtés pour interdire la destruction des Oiseaux. Ils insistent sur le mot « Oiseau ». Le Pigeon voyageur, disent-ils, « est un Oiseau ». Or, l'article 9 vise, sans exception, tous les Oi- seaux. Donc il s'applique aux Pigeons voyageurs. Mais pour e'carter cette interprétation, à mon sens erronée, de la loi de 1844, il suffit de lire l'un des considérants favorables à la négative de l'arrêt de la Cour de Cassation du 24 avril 1896, considérant qui précise la définition de l'Oiseau auquel s'applique la loi de 1844. Il s'agit d'Oiseaux susceptibles d'un fait de chasse, d'Oiseau consti- tuant un gibier. Les travaux préparatoires sont formels en ce sens; ils établissent expressément, nettement, que les Oiseaux visés sont uniquement des « Oiseaux utiles à l'agriculture, sauvages et insecti- vores ». Au cours de la discussion, un député ayant voulu faire mentionner le Pigeon dans le texte de la loi, le Garde des Sceaux et le rapporteur s'y sont formellement opposés en faisant observer que les Pigeons sont essentiellement granivores, qu'ils ne sont pas sauvages, que dans cer- tains cas ils peuvent même devenir nuisibles à Tagriculture. Du reste, deux circulaires ministérielles, l'une en date du 30 jan- vier 1874, émanant du Ministre de l'Intérieur, l'autre du 6 juillet 1875, émanant du Ministre de la Justice, confirmant cette interprétation des 204 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ L'ACCLIMATATION. arrêtés préfectoraux ne concernant que les petits Oiseaux essentielle- ment insectivores. Les Pigeons ne sont pas des petits Oiseaux, ne sont pas insectivores, ne sont pas des Oiseaux sauvages susceptibles de chasse. Sans insister davantage sur des arguments d'ordre physiologique, je me bornerai à rappeler que la tradition juridique, maintenue depuis l'époque romaine jusqu'à nos jours, affirme, au point de vue légal, cette définition du Pigeon. A Rome, à Byzance, les textes du droit barbare d3 l'époque féodale, les ordonnances royales de 1338, 1607 et 1613 et^ depuis la Révolu- tion, l'article 2 du décret du 7 août 1789, reproduit par le Code rural, la loi du 4 avril 1889, l'article 524 du Code civil et le décret du 15 septem- bre 1885, ordonnant le recensement des Pigeons voyageurs en France, considèrent à l'unanimité le Pigeon comme un animal domestique. Qu'on ne vienne pas dire maintenant que les Pigeons voyageurs cons- tituent, à raison de leurs aptitudes, une espèce particulière, récem- ment constituée et qu'il faut écarter les arguments tirés de la législa- tion ancienne. Tout d'abord, le Pigeon proprement dit est « un Pigeon de colombier », est attaché à un colombier, il a un domicile. Ensuite, dès la plus haute antiquité, on a utilisé les facultés voya- geuses du Pigeon, et l'histoire nous raconte que ce fut César, pendant sa guerre en Gaule, qui l'employa, le premier, comme messager de guerre. Celte aptitude s'est développée, grâce à une éducation plus parfaite, les services rendus se sont multipliés et c'est pourquoi, dans une pensée de protection à l'égard de ces intéressants volatiles et non pas en vue de rendre la chasse plus facile en torturant les textes, on a cherché à assimiler le Pigeon voyageur à un gibier pour permettre aux Préfets de prendre des arrêtés de protection à leur égard. Je suis loin de mentionner les immenses services, qu'ont rendus et que sont appelés à rendre les Pigeons voyageurs. En 1870, ces vaillants messagers qui, bravant les balles, échappant aux grifïes des Faucons que les Allemands lançaient à leur poursuite, ont assuré la communication entre Paris et la Province. L'un d'entre eux, notamment, qui n'avait pu franchir les lignes en- nemies, fut envoyé par le prince Frédéric-Charles à sa mère et traité comme un hôte de distinction et fut enfermé dans une volière du parc de Potsdam. Au bout de quatre ans de détention, il parvint à tromper la vigilance de ses gardiens et, prenant son vol, il regagna directe- ment la France, sa patrie. Aussi, tout en considérant le Pigeon voyageur comme un animal do- mestique, nous pouvons formuler des vœux ardents pour qu'une loi spéciale intervienne, assurant à cet auxiliaire, aujourd'hui indispen- sable, la protection qui lui est due. X EXTRAITS ET ANALYSES- 205 Note sur les cires d'Abeilles de Tunisie. La quantité de cire d'Abeilles produite en Tunisie est des plus va- riables; elle suit, comme on le conçoit aisément, l'influence des sai- sons; les années où les folicios sont précoces et par suite, la floraison abondante, sont les plus propices pour la production du miel et de la cire. Il est assez difficile de connaître exactement la totalité de la pro- duction tunisienne; l'éloignement des centres de production, l'imper- fection des voies et moyens de communication, l'indifférence des indi- gènes sont actuellement autant d'obstacles à l'établissement de chiffres précis. Dans ces conditions, les seuls éléments statistiques qui soient à notre disposition nous sont fournis par les déclarations annuelles de l'Administration des Douanes, lesquelles ne concernent que l'expor- tation. Le relevé annuel, qui nous a été' obligeamment fourni par cette Ad- ministration nous donne les chiffres suivants : DESIGNATION DES MARCHANDISES. PAYS d'exportation. PRIX quantités. de l'unité. Cire brute, jaune, ' brune ou blanche. 5G,883 3,394 980 550 9,980 426 Allemagne. . . . 25,213 2,715 81,120 1,75 64,545 1,713 5,940 1,715 963 17,465 745 44,123 4,751 141,960 D'autre part des renseignements que nous avons pu nous procurer sur place chez les principaux exportateurs de cire noire fournissent les données suivantes : Dans une année de re'colte moyenne, l'exportation de la cire donne lieu à un chiffre d'affaires de 300,000 francs. En 1897, un des grands négociants de Tunis a exporté, à lui seul, pour une valeur de 120,000 fr. de cire représentant un poids de 42,000 kilos. Le prix moyen de cette même année était de 2 fr. 80 le kilo; ce prix a été sujet à des fluctuations qui se sont produites à la suite de l'emploi industriel 206 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. de la paraffine et de cires végétales qui ont donné les résultats suivants : En 18G9 le prix moyen était de 4 fr. 50 le litre. 1887 — 2 » _ 1894 — 3 15 — 1898 -- 3 » — 1897 — 2 80 — La plus grande partie de la cire produite dans la Re'gence est expor- tée en France où elle est frappée d'un droit d'entrée de 8 francs par 100 kilos; l'Allemagne vient ensuite et ce produit y acquitte un droit d'entrée de 6 fr. 25 par 100 kilos. De tous les pays qui font usage de la cire d'Abeille, c'est la Russie qui tient le premier rang, quant à l'importance de cette consommation, et les cours se basent entièrement sur les demandes de ce pays. Les cires les plus apprécie'es sont celles de Smyrne et de Tunisie; viennent ensuite celles d'Algérie et du Maroc, cette dernière se vend 25 francs par 100 kilos, par suite des fraudes auxquelles elle est sou- vent soumise. Enfin les cires de Tripoli et de Zanzibar sont assez peu connues sur les marchés européens. Usages. — La cire d'Abeilles servait presque exclusivement jadis à la confection des bougies; mais depuis la découverte de la stéarine et de la paraffine qui sert à la fabrication des bougies dites transpa- rentes, son usage a beaucoup diminué; elle sert surtout aujourd'hui, à la confection dos cierges et des bougies du culte; on l'emploie égale- ment, en moins grande quantité, pour les modelages; la pharmacie l'utilise pour la préparation de certaines pommades ou cérats, elle entre aussi dans la confection des encaustiques. Bien que ses usages soient assez limités, il se produit de nos jours peu de cette substance; aussi estrclle bien demandée et sa production serait plus importante qu'elle trouverait de faciles débouchés. Le climat de la Tunisie, la flore abondante, la facilité d'exploitation de ce produit en rendent la production économique; il serait à désirer que celte industrie fut développée d'une manière plus complète, la qualité supérieure de la cire tunisienne eu assurant la vente avant tout autre produit similaire. E. Bertainchaud, Directeur de la Station agronomique de la Régence [1]. (1) Bulletin de la Direction de l' Agriculture et du Commerce de Tuniaie, n° 7, 15 avril 1S0S. EXTRAITS ET ANALYSES. 207 Accidents produits par la piqûre des Acariens DU GENRE « ArGAS ». Dans une communication récemment faite par lui à la Société entomologique de France (1), M. II. du Buysson donne d'intéressants détails sur les dangers que peut présenter la piqûre des parasites du genre Argas, et en particulier de VArgas 7'eflexus (Latr.) A. mraginatus (Fabric), assez commun en France. En se faisant piquer expérimentalement par un Argas ^\iv un point quelconque du corps, surtout à un endroit dépourvu de vaisseaux sanguins, on peut ne ressentir qu'une simple de'mangeaison plus ou moins vive, n'observer qu'une ecchymose violacée et une exsudation de sérosité incolore quand on comprime fortement le point piqué ; mais trop souvent, lorsque le venin s'est répandu immédiatement dans le sang on est exposé à des accidents beaucoup plus graves. L'i. rejlexus se trouve surtout dans les colombiers, oii il vit en parasite des Pigeons. Dans un colombier du château de Vernet (Allier), où se trouvait réunie une fort belle collection de Pigeons et qui était entretenue avec le plus grand soin, M. du Buysson constata la présence à'ArgaSy qui se multiplièrent bientôt avec une rapidité extraordi- naire. Le dessous des nids en terre ou en paille tressée en recélait un nombre considérable et les jeunes Pigeons, épuisés par ces suceurs de sang, ne tardaient pas à mourir. Afin de se débarrasser des parasites, on eut recours à un moyen radical ; on supprima le colombier, toutes les boiseries furent démontées ; on opéra un grand nettoyage et l'on poursuivit partout la vermine. Cependant, quelques individus échap- pèrent au massacre. Ils pénétrèrent dans les chambres voisines et tour- mentèrent les domestiques, dont quelques-uns durent changer de chambre. Un jour, l'un d'eux fut piqué par un Argas entre le pouce et l'index. Ses lèvres devinrent très enflées et il éprouva par tout le corps une vive démangeaison. Quelques années après, M. du Buysson fut piqué lui-même sur le dessus de la main ; il la sentit s'engourdir et ses doigts offraient de la raideur lorsqu'il essayait de les fermer. L'ammoniaque liquide appliqué sur la piqiire ne produisit aucun effet; ses lèvres et ses paupières enflèrent beaucoup, et en peu de temps tout son corps était brûlant. Il fut pris d'atroces démangeaisons, surtout dans dans la région lombaire et sur la poitrine ; sa peau était couverte de taches rouges surélevées, comme dans une violente urticaire. Un seul remède lui réussit, ce fut l'éther pris à l'intérieur. Dés qu'il en eut absorbé, une sorte de détente eut lieu ; il se remit au lit et finit (1) Annales de la Société entomologique de France, vol. 63, p. 217, 1897, paru en avril 1897. — Noie communiquée à la Section d'Knlomologie dans la séance du 17 mai 1897. 208 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. par s'endormir. Le lendemain, il ne ressentait qu'un peu de lassitude et un petit point are'olé rouge marquait seul la place où il avait été' piqué. A plusieurs reprises et à des intervalles assez éloignés, M. du Buysson fut encore piqué par des Argas et les suites de ces piqûres furent identiques à celles que nous venons d'indiquer. En 1883 {Ann. Soc. ent. Fr., p. xcviii), le D'' Laboulbène cite plusieurs accidents analogues survenus à la suite de la piqûre du même Acarien et observe's dans les environs de Charleville par le Dr Châtelain. Le colombier qui recelait ces Ai^gas était de'truit depuis six ans lorsque les effets produits par leur piqûre furent constale's. La vitalité de ces parasites est très grande. Des Argas., conservés pendant quatre ans par M. Laboulbène, étaient encore vivants au bout de cette période. De l'ensemble des faits relevés par lui, M. du Buysson conclut que les piqûres de V Argas peuvent être, dans certains cas, très dangereuses. Il n'a jamais observe' que des piqûres uniques pour une même fois ; les accidents auraient sans doute été beaucoup plus sérieux s'ils avaient été le résultat de piqûres multiples. V Argas rejlexus mesure de 5 à 6 millimètres ; son corps est ovalaire, la bouche est placée en avant et tout à fait à la partie inférieure du corps ; les palpes sont formés de quatre articles et les pattes de six. Sa couleur est grise, à reflets rougeâtres avec les bords blanchâtres. Il acquiert un grand développement lorsqu'il est gorgé de sang et prend alors une couleur noirâtre. La femelle est d'une excessive fécondité ; lorsque cet Acarien s'est établi dans un colombier, il est extrêmement difficile de s'en débarrasser. REVUE DES CULTURES COLONIALES Directeur : A. MIL.HE-POUTINGON, Docteur en droit. Dii ectr nr du Service de l'Afrique ; et des Antilles à V Union coloniale française, Vice-Président de la S( ciion coloniale à la Société Nationale d'Acclimatation de France. Créée sous les auspices de l'Union coloniale française, cette nouvelle publication a pour but défaire mieux . connaître, en France, les diverses cultures et les productions coloniales ; de vulgariser dans les colonies i les meilleurs procédés de culture, d'y provoquer l'introduction des meilleures variétés des plantes françaises I actuellement cultivées et l'acclimatation de plantes nouvelles. \ COMITE DE PATRONAGE DE LA REVUE MM. Le prince D'ARENBERG, député, vice-président du Groupe coionia); président du Comité de l'Afrique française. Le commandant BINGER, ancien gouverneur de la Cote- d'ivoire, directeur des affaires de l'Afrique au Ministère des Colonies. PAUL BOURDE, ancien directeur des contrôles et de l'agri- culture en Tunisie, ancien secrétaire général à Madagascar. BUREAU, professeur de botanique au Muséum. J. CHAILLEY-BERT, professeur à l'Ecole des Sciences poli- tiques, secrétaire général de l'Union coloniale française. CHARLES-ROUX, ancien député, membre du Conseil s'upérieur du commerce, vice-président du Groupe colonial. CORNU, professeur de culture au Muséum. DEHERAIN, membre de l'Institut, professeur de chimie agri- cole au Muséum et à l'Ecole d'agriculture de Grignon. MARCEL DUBOIS, professeur de géographie coloniale à l'Uni- versité de Paris. DYBOWSKY, directeur de l'agriculture et du commerce en Tunisie, professeur de cultures coloniales à l'Institut natio- nal agronomique. H. FLAHAUT, professeur de botanique à l'Université de Montpellier. LOUIS GRANDEAU. directeur de la Station afironomique de l'Est, rédacteur en chef du Journal d'A(jricultûre pratique. GRANDIDIER, membre de l'Institut. La Revue des Cultures coloniales paraît le 5 de chaque mois. Bureaux : 44, rue de la Chaussée d'Antin, Paris. Abonnements : un an : France, 12 francs — recouvré à domicile, 12 fr. 50. — Colonies et Union postale, 15 francs. — Payement d'avance. MM. Baron .Jules DE GUERNE, secrétaire général de la Société na- tionale d'Acclimatation. Dr HECKEL, professeur à la Faculté des Sciences, directeur de l'Institut colonial de Marseille. LE MYRE DE VILERS, député de la Cochinchine, président de la Société nationale d'Acclimatation. Mgr LEROY, supérieur général des Missionnaires du St-Esprit. MILNE-EDWARDS, membre de l'Institut, directeur du Muséum. CH. NAUDIN, membre de l'Institut. OLIVIER, docteur ès sciences, directeur de la Uevue gé- nérale des Sciences pures et appliquées. PRILL1EUX, sénateur, inspecteur général de l'Enseignement atrncole, profesi- de Botanique à l'Institut National agronome POISSON, assistant au Muséum. RISLER, directeur de l'Institut national agronomique. RIVIÈRE, ancien président de laSociété d'Agriculture d'Alger direcieur du Jardin d'essai du Hamma, D'' TREILLE, ancien inspecteur en chef du service de santé des Colonies. VIALA, professeur de viticulture à l'Institut national agrono- mique, directeur de la Bévue de Viticulture. H. DE VILMORIN, membre de la Société nationale d'Agricul- ture. ZOLLA, professeur à l'Ecole d'agriculture de Grignon et à l'Ecole des sciences politiques. PEINTURE IGNIFUGE DITE ANTI-PÉTROLEUR Au moment où l'horrible désastre du Bazar de la Charité est encore présent a toutes les mé- moires, il convient de signaler la découverte récente, par M. de Preux, d'un produit désigné sous le nom A'Anti-Pétroleur et qui rend les objets traités par lui absolument incombustibles. M. de Preux a fait, il y a peu de temps, à Saultain, près Valenciennes, des expériences déci- sives à ce sujet. Deux baraques de bois blanc recouvertes de carton bitumé et tendues de jute, l'une imprégnée du nouveau produit, l'autre à l'état naturel, ont été remplies de copeaux imbibés d'éther. Les copeaux ayant été allumés, la baraque qui avait subi la préparation resta complètement intacte, tandis que l'autre était détruite en quelques instants. Mis en présence d'un chalumeau dégageant 1,200 degrés de chaleur, le bois n'est percé qu'après ^5 minutes et le carton bitumé se contracte, mais ne brûle pas et ne se fond pas. Les objets en celluloïd ne s'enflamment pas lors- qu'ils ont été traités par YAnti-Pétroleur. Après les mêmes expériences faites en grand à l'Exposition de Bruxelles, au parc du Cinquan- tenaire, le Jury international a accordé, à l'unanimité avec ses plus sincères félicitations, à VAnti-Pétroleur, un diplôme de médaille d'or, la plus haute récompense dont il pouvait disposer. Le produit inventé par M. de Preux rendra d'immenses services. Il est déjà employé dans un certain nombre d'usines et il a été adopté par la Compagnie du Nord qui s'en sert dans ses dépôts de machines. S'adresser pour les commandes et les renseignements au régisseur du château de la Villette, à Saultain (Nord). Charles NAUDIN Membre de l'Institut (Académie des Sciences) Directeur du laboratoire de botanique de la Villa Thuret, à Antibes ET Le Baron F. Von MUELLER Botaniste du gouvernement anglais à Melbourne MANUEL L'ACGLIMATEUR OU CHOIX DE PLANTES RECOMMANDÉES POUR L'AGRICULTURE, L'INDUSTRIE ET LA MÉDECINE Adaptées aux divers climats de V Europe et des pays tropicaux OUVRAGE PUBLIÉ AUX FRAI^ ET SOUS LES AUSPICES DE LA Société nationale d'Acclimatation de France Un volume in-8° de près de 600 pages avec portrait INTRODUCTION i Considérations générales sur l'acclimatation des plantes ; Aperçu général des genres de plantes auxquels sont empruntées des espèces déjà utilisées ou qui peuvent Têtre ; Description sommaire des familles ou groupes naturels auxquels se rattachent la plupart des plantes indiquées dans ce volume ; Noms vulgaires des plantes et synonymes rapportés aux noms botaniques. Enumération par ordre alphabétique des plantes, leurs usages et leui culture, formant un dictionnaire des végétaux à acclimater dans les diverse.' régions du globe ; • Noms des auteurs cités dans le cours de l'ouvrage avec les abréviations usitées. , Prix : 7 Francs ^ Pour les Membres de la Société Nationale d'Acclimatation de France, 3 fr. 50 ' ; EN VENTE AU SIÈGE DE LA Société nationale d" Acclimatation de France, i 41, Rue de Lille, PARIS. ] l» Secrétaire GéBéral, gérant, Jules de GUE R NE. Versailles. — Imprimeries Cerf, 59, rue Duplessis. Indice décimal. 506 581.52 591.52 BULLETIN DE LA. D' DE FRANCE (Revue des Sciences naturelles appliquées] 45« ANNEE JUILLET 1»98 ^ SOMMAIRE A. BENGIN. — Noies sur les Zébus de la plaine de Bône 2(9 Paul WACQUEZ. — Sur la possibilité de conserver des Hirondelles pendant l'hiver sous le climat de Paris 214 Charles MAILLES. — Domestication du Lézard des murailles 218 J. VILBOUGHEVITGH. — UAtriplex semibaccatum (Salt-bush d'Australie), d'après les documents communiqués par le Professeur E.-W. Hilgard 221 Extraits de la Correspondance : Paul LABBÉ. — Lettre sur l'Elevage, l'Apiculture et la Pêche dans le gouvernement de Semipalatinsk 227 Extraits et Analyses: P. GERMAIN. — Observations sur les Llamas domestiques des hauts plateaux du Boni, en Bolivie 23i» D'' K. KISHINOU YE. — L'industrie des Pêches au Japon 233 La Société ne prend sous sa responsabilité aucune des opinions émises par les auteurs des articles insérés dans le Bulletin. Un numéro 2 francs ; pour les membres de la Société 1 fr. 50 AU SIEGE DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE D'aCGLIMATATION DE FRANCS 41, RUE DE LILLEi 41 PARIS ET A LA LIBRAIRIE CERF, 12, RUE SAINTE-ANNE Le Bulletin paraît tous les mois. CRESYL-JEYES Ch •H (D 0 U U 0 0 •H DÉSINFECTANT AITTZSEFTIQT7E Le seul joignant à son Efficacité, scientifîguement démontrée, l'immense avantage de n'être ni Toxiquo ni Corrosif. Hémostatique et Styptîque puissant. Adopté par les Ecoles Nationales Vétérinaires, le Service de Santé de l'Armée, la Préfecture de la Seine et la plupart des Services d'Hygiène et de Désinfection des Départements. Reconnu indispensable dans la pratique vétérinaire. Envoi franco sur demande de Rapports scientifiques et Prospectus*. SOCIÉTÉ FRANÇAISE de PRODUITS SANITAIRES et ANTISEPTIQUES 35, Rue des Francs -Bourgeois (ci-devant 31, Rue des Petites-Ecuries), Paris. ET CHEZ TOUS LES DROGUISTES ET PHARMACIENS. Pour è>.».or les nombreuses Contrefaçons exiger rigoureusement sur tous les emballages les Marques, Cachets et le Nom CRÉSYL-JEYES. > •H riM «• M liaiiiN «t il Prii rteM •Mullli i'H, Prli 4'iiiMkk, hrli Itif VOiTELLIERiM&NTES(S.-tO. COUVEUSES kvsnxmvÊUM MATÉRIEL D'ÉLITAH ¥olalllM«« llae« QBUPt A COUVBR pur* «• M««4an CHIENS à* $hmiê0 àrêêiêê, M fniM * Cital»|w iUuM. MAISON A PARU 4n.duTbéitn.riifiç« Lits, Fauteuils, Voitures et Appareils Mécaniques Pour MA.IjA.DES et BLESSÉS DUPONT Fab' breveté s.g.d.g. Fournisseur des Hôpitaux à P^RIS 10, Rue Hautefeuille au coin de la rue Serpente ( près l'Ecole de-Médecine) Les plus hautes Récompenses aniIxp»°»frsDfaitesetEtraBfèrej. VOITURE mue au moyen de 1 ou 2 leviers. Snr demande envoi franco du Catalogue — TELEPHONE BA VmiNMnA TjE gazeuse, déclarée d'INTXRET PUBfjICr Décret du 7 A rrll 1889) BUSSANG ANEMIE, GASTRALGIE, COLIQUES NEPHRETQUES, GRAVELLE, ARTHRITISME RECONSTITUANTE.iDdiquéedanstouteslesCONVALESCENCES NOTE SUR LES ZEBUS DE LA. PLAINE DE BONE (î par A. BENGIN, Propriétaire-cukivateur à Randon, Président du Comice agricole de Bûne. En 1890, M. Maxime Rabon, grand éleveur de la plaine de Bône, fit venir de l'Hindoustan un couple de Zébus de taille moyenne et de couleur blanche. Le Zébu mâle lâché ao mi- lieu d'un troupeau de Vaches indigènes d'une centaine de tètes, engendra des demi-sang mâles et femelles. Ces demi-sang, remarquables par l'élégance de leurs- formes et dépourvus de la bosse caractéristique du Zébu, furent pour ainsi dire laissés à l'état sauvage; ils mangeaient ce qu'ils trouvaient dans des terres de pacage, des sols maré- cageux en hiver, les versants de dunes sablonneuses au bord . de la mer. Ces pâturages, pourvus de bonnes herbes pendant la saîson^^ humide, ne portent en été et en automne que des joncs ou des plantes sèches, desséchées, grossières, dédaignées par les Bo- Aàdés de race indigène. Les demi-sang, tenus la nuit en plein air dans des parcs formés de grilles en fer, ne furent mis à l'abri de la pluie, sou^ des hangars ouverts, que pendant les gros mauvais temps ; ils ne reçurent comme nourriture supplémentaire qu'un peu de paille longue de Céréales ou de Lin. Doués d'un appétit remarquable, peu dilïîciles sur le choix de leurs aliments, ces animaux croisés grandirent et gros- sirent rapidement ; ils se maintinrent en parfait état au cœur de l'été, alors que les Bovins de race indigène pure, soumis; au môme régime, maigrissaient fortement ; ils furent complè- tement épargnés par la cachexie, la fièvre bilieuse, l'altéra- tion du foie, le charbon symptômatique, maladies qui en- lèvent annuellement 5 pour cent des effectifs de la race de Guelma. Ces demi-sang mâles ont pesé, en moyenne, à un mo]>., (1) Communication faite en séance générale, le 17 décembre 1897. BulL Soc. nat. Accl. Fr. 1898. — 15* 210 '"^^ BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION- 40 kilogrammes, à trois mois, 81 kil., à six mois, 120 kil., à un an *^31 kil., à deux ans, :}56 kil., à trois ans, 430 kil., à quatre ans, 470 kil., à cinq ans, 500 kil., alors que le Bœul" indigène pèse 200 kil. à sa troisième année, 300 kil. à la qua- trième, 350 à la cinquième. M. Rabon a vendu quarante de ces demi-sang à Marseille ; les bouchers de cette ville ont déclaré que le rendement en viande nette était de 58 à 62 pour cent, alors que 48 à 52 pour cent forment les rendements ordinaires du Bœuf algérien. La chair du demi-sang n'est pas chargée en suif comme celle du Bœuf algérien engraissé, elle donne un poid« propor- tionnellement plus élevé en morceaux de premier choix. Les bouchers de Marseille achetèrent la viande nette des demi-sang à raison de 148 francs les 100 kilogrammes, alors qu'ils n'offraient que 130 francs des 100 kilogrammes de viande nette du Bœuf algérien. On peut donc considérer le demi-sang comme une bête de boucherie avantageuse pour Téleveur. Les Bœufs demi-sang ont été attelés, leur dressage est fa- cile à condition de ne pas les brutaliser; ces Bœufs sont plus forts, plus résistants, plus rapides dans leur marche que les Bœufs indigènes. Dans les fermes de M. Rabon, de la Banque de l'Algérie, où •on les emploie depuis deux ans au labourage et aux trans- ports, on estime que six Bœufs demi-sang font beaucoup plus de travail que huit Bœufs indigènes. La Vache demi-sang ne donne journellement que 6 à 8 litres de lait très riche en crème ; elle est très féconde et donne souvent deux jumeaux ; cette Vache pèse ordinairement 100 kilogrammes à six mois, 207 kil. à un an, 237 à deux ans, 310 à trois ans. Plusieurs génisses couvertes à six mois ont donné à quinze mois un produit bien viable ; les mères et les veaux ne sem- blent pas avoir soutfert de cette parturition trop précoce. M. Rabon et son beau-frère, M. Paulin, poursuivent dans leurs exploitations agricoles des Dunes, de Bordj Anna, de Sidi Ranern, une série d'études méthodiques en faisant varier la proportion du sang zébu ; ces Messieurs, possesseurs d'une grande fortune acquise par trente-cinq années de travaux agricoles en Algérie, ne font pas du produit de leurs recherches une spéculation; ils ont livré, au prix du cours des bêtes NOTE SUR LES ZÉBUS DE LA PLAINE DE BONE. 211 indigènes, quelques Zébus pur sang, des Taureaux et des Vaches demi-sang. Ces livraisons ont été faites à divers propriétaires, à des maires, à des groupes d'indigènes, à la condition que les ré- sultats des croisements, effectués au gré de chacun, seraient portés à leur connaissance. M. Boulineau, M. Soual, éleveurs dans la région de B(jne, MNf. Abbo et Hirzel, directeurs des exploitations agricoles de la Banque, ont acheté des reproducteurs à M. Rabon ; ils ont fait venir en 1895 et en 1896, des Zébus de l'Indo-Ghine. Ces Zébus, sous poil noirâtre et de plu/s petite taille que ceux de l'Hindoustan, semblent devoir donner par leur croisement avec la race indigène des résultats satisfaisants mais moins bons que ceux obtenus par M, Rabon ; les produits sont trop Jeunes encore pour qu'on puisse actuellement les bien juger. L'élevage du Bovidé, ayant dans ses veines 3/4 de sang de Bovin indigène ou 3/4 de sang de Zébu, est considéré comme moins avantageux que l'élevage des demi-sang. Le Zébu de race pure a une taille moins élevée que le demi- sang, il est moins docile, beaucoup plus difficile à dresser; il paraît souffrir du froid et de l'humidité même dans la plaine de Bône où très exceptionnellement le thermomètre descend à 5*^ au-dessus de zéro, la température en hiver variant de -f 10° à -f 20°. Plusieurs éleveurs de l'arrondissement de Bône ont prié M. Rabon de se rendre dans l'Hindoustan et à Madagascar pour examiner et juger les meilleures races de Zébus ; M. Ra- bon achèterait, pendant le cours de son voyage, un certaiu nombre de taureaux et de femelles pour le compte des pro- priétaires de notre région. M. Rabon a accepté cette mission, car il prévoit qu'il est utile de varier les Zébus reproducteurs de façon à éviter la dégénérescence de la race des demi- sang par abus de la consanguinité ; il attend pour se mettre en route que la peste bubonique ait complètement cessé ses ravages dans les troupeaux de l'Inde anglaise. Nous espérons que MM. les Mi- ,nistres de l'Agriculture et des Affaires étrangères voudront bien le recommander aux Consuls de France en Orient. 212 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. Les Français cultivant le littoral algérien ont cherché, mais sans succès, à acclimater toutes les races bovines de France, de Suisse et d'Italie ; les croisements de ces races avec les Bo- vins de l'Algérie n'ont pas donné des résultats bien avanta- geux; ces métis, plus forts que les Bœufs algériens, sont moins rustiques et surtout peu résistants à la chaleur, à l'humidité, aux maladies. La partie nord de l'Afrique française produit sponta- nément beaucoup d'herbes, mais les prairies sont peu soi- gnées en général et infectées par beaucoup de mauvaises plantes. Nos fourrages ordinairement grossiers renferment une assez forte proportion d'herbes non comestibles ; il faut ajouter quelques litres d'Orge ou d'Avoine à la ration jour- nalière des animaux de travail. On ensemence en moyenne chaque année dans l'Algérie entière : 1,300,000 hectares en Blé, 1,400,000 hectares en Orge, 700,000 hectares en Avoine. Les deux tiers des pailles de Céréales, jugées sans valeur sont abandonnées sur le sol. Nos Bovins n'acceptent de manger la paille qu'en petite quantité et seulement pendant l'hiver; ils trient les foins secs, refusent généralement les fourrages ensilés, ne se nour- rissent volontiers que de grains ou des herbes tendres et vertes de la saison pluvieuse ; tous nos Bovins s'engraissent au printemps et maigrissent en été, en automne ; ils sont en somme d'un entretien assez coûteux. L'Arabe, possesseur de vastes communaux, fait l'élevage sans soin, il arrive à tirer un revenu net de ses jeunes bêtes qu'il amène, presque sans frais, jusqu'à l'âge de quatre ou cinq ans. L'élève d'un Bovin mâle vendu 100 francs à sa quatrième année ou d'une Vache du même âge qui vaudra 60 francs au marché, ne constitue pas une opération lucrative pour l'agri- culteur européen ; les frais de garde, de nourriture à Tétable de location des terrains de pacage, les pertes provenant des mortalités, couvrent à très peu près les prix de vente. Les excellents produits de cette race de demi-sang obtenue par M. Rabon permettent au cultivateur français de pratiquer NOTE SUR LES ZÉBUS DE LA PLAINE DE BONE. ^i13 avantageusement l'élevage sur la terre algérienne, de tirer bon parti de pailles et d'herbages inutilisés, d'obtenir des fu- miers à bas prix, de rendre rémunérateur le travail agricole. L'œuvre accomplie par M. Rabon est donc très importante pour le succès de la colonisation. Beaucoup de Français quittent chaqne année la Métropole pour aller cultiver les terres de la République Argentine. II faut les renseigner et leur donner des conseils profitables pour les retenir sur le sol national. C'est seulement la certitude de gagner largement son exis- tence qui décidera l'agriculteur de France à se joindre aux colons du nord de l'Afrique pour transformer l'Algérie en une possession de plus en plus prospère et utile à la France. 244 SUR LA POSSIBILITÉ DE CONSERVER DES HIRONDELLES PENDANT L'HIVER, SOUS LE CLIMAT DE PARIS (1) par Paul WACQUEZ, Secrétaire j^énéral du Standard avicole cie France. La Société nationale d' Acclimatation de France s'étant tout particulièrement occuiiée en 189G et en 1897 de la ques- tion des Hirondelles — aucun de ses Membres n'a oublié les articles de MM. Magaud d'Aubusson et Rogeron au sujet de leur hibernation en nos pays — je crois devoir signaler à l'attention de mes collègues en ornithologie, une occasion d'observer et peut-être de retenir dans l'Ile de France, pen- dant les mois d'hiver, un couple de ces petites et charmantes messagères des jours ensoleillés. Dans la maison que j'habice à Villemonble (Seine), j'ai fait exécuter en février et mars 1896 divers travaux de maçon- nerie; c'est ainsi que dans la salle à manger, dont la figure I reproduit le plan, a été construite une porte gothique. Pendant que les plâtres séchaient, les fenêtres — principa- lement la porte-fenêtre donnant sur la cour et le jardin — restèrent ouvertes jour et nuit; des Hirondelles entrèrent dans la pièce et au-dessus de l'ogive de la porte gothique bâtirent un nid ! [Fig. 2.) Elles mirent à construire ce nid une dizaine de jours, n'y travaillant régulièrement toutes deux que le matin, de cinq à neuf heures environ. Les Oiseaux faisaient de fréquents voyages, entrant et sortant par la porte-fenêtre, ils apportaient de petites mottes de terre qu'ils posèrent d'abord doucement sur le plâtre de l'ogive et enfoncèrent ensuite fortement avec le bec; je relevai même une petite cavité faite par le mâle dans le but de bien tasser la terre, elle mesurait 17 millimètres de profon- (1) Communication faite en séance générale le 13 mai 1898. lOSSIBILITÉ DE CONSERVER DES IIIRONDELLES PENDANT L'HIVER. 215 Fig. i. deur et gardait, quoique la terre fût dure, l'empreinte du bec et un peu de la tête de l'Oiseau. Le nid fait, les Hirondelles Fig. 2. BULLETIiN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. apportèrent des plumes de Pigeons, qu'elles allaient prendre Jusque sur le dos de mes Volants (1). Vers la fin de mai, la femelle pondit cinq œufs et le couple 'éleva cinq petits, qui abandonnèrent le nid et la pièce vers le 15 juillet pour aller se percher sur un Prunier, à quelques mètres de la maison, dans la cour. Jusqu'à l'émigration annuelle, les parents seuls rentrèrent quelquefois dans la pièce, mais simplement pour y pratiquer la chasse aux Mouches. Le 11 avril de l'année dernière, une de nos Hirondelles revint. Nous lui ouvrîmes la porte ; elle entra, se posa sur le liîd et fut plusieurs jours seule à aller et venir, puis ramena «ne compagne. Je crus m'apercevoir que cette compagne (n'était pas la même que celle de l'année précédente. La pre- imière se tenait, excepté pendant la période d'incubation, per- •€hée sur un plat en faïence ancienne accroché au mur près du nid et sortait peu. La nouvelle se posait toujours sur le aid et était très coureuse. Le couple se réinstalla au-dessus de la porte gothique, net- toya le nid, en emportant dans le bec, au dehors, toutes les impuretés qui le souillaient, puis livra de grandes batailles ^our garder ses prérogatives, car d'autres couples — peut- -être des jeunes élevés précédemment dans ce nid — voulurent ïsliistaller dans la pièce et commencèrent la construction d'un nouveau nid sur le côté gauche de l'ogive. Nous eûmes jusqu'à six Hirondelles qui avec un bruit assourdissant se battaient au-dessus de nos tètes. Le couple le plus ancien resta maître de la place. La femelle pondit quatre œufs, le couple éleva trois petits •et toute la famille émigra en octobre. Dans le courant de ce dernier hiver, je fis poser au-dessus ée ia porte donnant sur la cour, une marquise vitrée. Cette marquise, de 1 m. 80 de large, a une inchnaison de 20 degrés et cache la partie haute de la porte. En plus, pour éviter Tin- wasion des Chiens dans la salle lorsque la porte est ouverte, 's(ij Lorsqu'un de mes Volants blancs volait seul assez haut dans le ciel, les €liroadeUes d'alealour se réunissaient en troupe autour de lui et le plumaient. he Pigeon portait encore, à la poitrine, des traces du larcin et je trouvais de ^eiiies plumes de Volaut blanc dans le nid de mes Hirondelles. POSSIBILITÉ DE CONSERVER DES HIRONDELLES PENDANT L'HIVER. 21' j'ai fait mettre dans le bas une ciaie en bois de 1 m. 15 de haut. [Fig. o.) Je craignais que ces différents obstacles n'empêchassent les Hirondelles de revenir à leur nid, ou qu'elles ne voulussent passer à travers la vitre de la marquise. Mes craintes ne furent pas justifiées, car le 17 avril, le mâle était de retour et la femelle venait le rejoindre le 23. Comme l'année dernière, les Oiseaux nettoyèrent le nid qui contient quatre œufs à la date oii j'écris (7 mai 1898). Je ferme la fenêtre et les volets qui produisent l'obscu- rité — ceux de l'autre fenêtre n'étant presque jamais ouverts — aussitôt les Hirondelles rentrées, à cette époque entre six et sept heures, et je ne les rouvre qu'à sept heures du matin. J'ai même, par curiosité, gardé mes prisonnières jusqu'à dix heures sans les incommoder. Les jours où nous recevons à déjeuner, quel que soit le nombre des convives, les Hirondelles vont et viennent libre- ment au-dessus de nos têtes ; à diner, malgré une grosse lampe et un petit lustre allumés, malgré la fumée des cigares ou des cigarettes de mes amis, elles reposent paisiblement sur les bords de leur nid. Je crois donc que, dans ces conditions, il serait facile de garder ces Insectivores pendant la saison de l'émigration et que la seule difficulté qu'on rencontrerait proviendrait de la nourriture à leur donner et de la façon de la présenter. C'est sur ce point que j'appelle l'attention de mes collègues s'ils estiment que ma communication peut être intéressante. H- Clos des Boulants, le 7 mai 1898. 218 DOiMESTICATION DU LÉZARD DES MURAILLES (i) par Charles MAILLES. Le travail publié par notre collègue M. Rollinat (2) m'a in- téressé d'ime façon toute spéciale. Depuis plus de quinze ans, j'élève des Lézards, et, notamment, Lacerta muralis. J'ai publié une courte note relative à la ponte des L. muraliSy stirpinm, viridis et vivipara [•^]. Depuis cette époque, je n'ai cessé de poursuivre mon rêve: domestiquer le Lézard des murailles et ses belles variétés. Jusqu'en 1894, je n'ai guère éprouvé que des déboires; mais, enfin, la réussite a été complète. En attendant que je publie un manuel comi)let de ce genre d'élevage, je vais indiquer, brièvement, quelques faits parti- culièrement intéressants. Depuis l'année 1886 j'ai pu constater que toutes mes fe- mellesde Lacerta muralis (i///?^), comme aussi celles de L. stir- pium, effectuent normalement une double ponte annuelle (la variété napolitaine fait, souvent, une troisième ponte). Je pense être le premier ayant constaté ce fait, contraire à la croyance générale, qui n'admet qu'une reproduction par an. Le nombre des œufs diminue à cbaque ponte. L'incubation se fait sans difficulté. Le moyen qui me réus- sit le mieux consiste à récolter les œufs, aussitôt pondus, et à les placer sous cbâssis, dans du terreau de bois, ou de la terre de bruyère, à deux ou trois centimètres de profondeur. Il faut les entretenir légèrement humides, et le châssis doit recevoir un peu d'ombre et être aéré, comme s'il s'agissait de semis ou de boutures. La durée de l'incubation est variable ; deux mois, environ, pour les œufs de la première ponte; un peu moins pour ceux de la seconde. Pendant les premiers jours qui suivent l'éclosion, les jeunes sont assez difiiciles à nourrir, à cause de la petitesse nécessaire des proies qu'ils (1] Extrait d'une lettre adressée à M. le Secrétaire géuéral, lue en séance générale le 14 janvier 1898. (2) Bull, de la Soc. d'Acclimatation, juillet 1897, page 281. (3) Ibid., mars 1887, p. 193. DOMESTICATION LU LÉZARD DES MURAILLES. 21^ doivent avaler, et qui consistent surtout en Pucerons verts, chenilles de Microlépidoptères, très jeunes Araignées, etc. . . Chez la variété t3'pe, il est habituellement facile de recon- naître les sexes, dès la naissance ; cette distinction est plus difficile pour les jeunes de la variété napolitaine. La croissance a lieu d'une façon aussi variable que chez la plupart des autres Vertébrés inférieurs. Nourriture, tenipé^ rature, le milieu, en un mot, influent beaucoup. Dans les con- ditions les plus favorables, ces Reptibles sont aptes à la re- production vers ràge de dix-huit mois à deux ans. Les Lézards, et particulièrement l'espèce qui nous occupe, vivent bien en captivité, pendant la belle saison ; ils y repro- duisent très volontiers, même dans des cages de petites di- mensions. Il suffit de leur fournir une alimentation variée, de l'eau pour boire, et de les garantir de la trop grande ardeur du soleil ; beaucoup d'air. Un garde-manger constitue une cage économique et pra- tique. La vraie difficulté consiste à leur faire passer l'hiver. Tous ceux qui ont tenté ce genre d'élevage seront de mon avis. Ce n'est que depuis 1894, et après de nombreux et infructueux essais, que j'ai pleinement réussi. Je laisse de côté, ici, l'hivernage naturel, peu praticable dans les villes; il n'est bon à conseiller que dans les cas ok l'on peut réellement imiter ce qui se passe à l'état de liberté. Il est donc question de garder nos animaux dans les ap- partements, dans de petites cages vitrées latéralement, et soumis à la température ordinaire de 10 à 15'>. Les Lézards adultes, en hiver, refusent ordinairement toute nourriture, ou à peu près, même soumis à l'influence d'une chaleur assez forte ; par contre ils boivent volontiers. Il faut donc les nourrir en les abreuvant. Durant la mauvaise saison, l'estomac de ces Sauriens ne fonctionne que très imparfaitement; surchargé de nourriture, il ne peut la digérer, les aliments se corrompent, et la mort survient bientôt. Les jeunes de l'année mangent un peu l'hiver. Les uns et les autres seront exposés aux rayons du soleil, autant que possible, pendant l'hivernage. Il résulte de tout ceci qu'il ne faut pas songer à ingérer de force la nourriture. Quant aux boissons, le lait, pur ou coupé 220 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. d'eau, ne m'a pas donné de bons résultats ; le bouillon ordi- naire, salé, non plus. Le sel ne vaut rien pour ces Reptiles. En désespoir de cause, j'ai songé aux extraits de viande ; ayant sous la main du Liebig , je m'en suis servi. Succès com- plet ! Depuis trois hivers, aucun décès. Le bouillon doit être léger, couleur infusion de Tilleul. Trop fort, il y a risque d'empoisonnement, comme il est dit plus haut. (Renouveler cette préparation tous les jours.) Bien entendu, cette préparation remplace l'eau, de novem- bre à mars, seulement, et, lorsque le soleil brille, on peut of- frir des Vers de farine aux petits captifs, surtout vers la fin de l'hiver; les Lézards, ainsi entretenus en bon état, man- gent plus tôt que de coutume, et ne souffrent nullement de l'hivernage. Comme moyen de capture, l'emploi de petites nasses en toile métallique, que je fabrique moi-même, me satisfait plei- nement ; amorcées avec des larves de Ténébrion, les Lézards gris, très curieux, y pénètrent sans défiance, et il n'y a pas de ruptures de queues à craindre. Pour terminer, je dirai que les nombreuses variétés du Lézard des murailles se croi- sent entre elles, à volonté (1). (1) Je suis, en attendant un travail plus détaillé, à la disposition de mes col- lègues, pour tous renseignements concernant cet élevage. 221 L'A TRIPLEX SEMÎBA CCA TUM SALT-BUSH D'AUSTRALIE EECOMMANDÉ POUR LES TERRAINS SALANTS EN CALIFORNIE par J. VILBOUGHEVITCH (1). Cette plante, sur laquelle feu le baron F. von Mueller a été le premier à attirer l'attention des agronomes californiens et dont il leur a fait parvenir les premières graines, éveille en ce moment en Californie de si grandes espérances que les Membres de la Société Acclimatation nous sauront proba- blement gré de leur donner quelques détails sur cet A iriplex et sur l'expérience, d'ailleurs très courte, dont elle vient d'être l'objet en Californie. Dans une lettre à un ami, datée du 3 décembre 1895, M. Hilgard écrivait : « A triplex semibaccatiim occupe chez nous déjà 4,000 acres; des milliers d'acres déplus au- raient été d'ores et déjà consacrés à l'essai de cette plante si nous avions pu mettre à la disposition du public les graines nécessaires. Nous en avions récolté 200 livres anglaises; une quantité relativement considérable en a été adressée par nous à la maison Vilmorin. » Le Bulletin 109 de la Station de Berkeley, paru en novem- bre 1895 sous la signature de M. E.-J. Wickson, directeur- adjoint, donne la photographie d'un exemplaire de huit mois qui a une taille de plus de 4 pieds anglais, et, dans la partie supérieure, une épaisseur d'environ 2 pieds, toutes les pousses étant ramenées dans la même direction pour les besoins de la figuration; une autre photographie, donnée dans le même Bulletin, faite dans les conditions naturelles, donne du port de notre Salt-bush une idée plus conforme à la vérité. M. Jaffa, premier assistant de la Station, le décrit dans le Bulletin 105, du mois d'octobre 1894, comme un buisson étalé, à branches (1) Comrauaicalion faite à la séance générale du 25 mars 1898; d'après les documents communi jués par le professeur E.-W. Hilgard, directeur de la Station agroaomicjuo de Berkeley [Californie). 222 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. graciles extrêmement nombreuses, abondamment garnies de petites feuilles, courtes et étroites (longueur un demi-pouce à trois quarts de pouce sur 1/8 à 3/16 de pouce de large); la touffe forme sur le sol une couche circulaire verte, épaisse de 8 à 10 pouces; l'exemplaire de la photographie ci- dessus men- tionnée, semble recouvrir un espace d'environ 5 pieds de diamètre; des individus, mis à demeure sur des terrains sa- lants caractérisés, à l'état de jeunes plants, i)araissent avoir atteint, vers la fin de la saison, jusqu'à 16 pieds de diamètre. Les fleurs sont fort modestes, par opposition aux fruits, cordiformes, longs d'environ. 1/10 de pouce, d'un rouge bru- aâtre. La plante est vivace. Les agronomes de Berkeley calculent le rendement d'une coupe, d'après une expérience faite sur une petite parcelle d'es- sai (la dimension de cette parcelle d'essai n'est pas indiquée, ce qui est regrettable) à 20 tonnes par acre en fourrage vert, correspondant au taux de 75 «/o d'eau, à 5 tonnes de matière sèche. M. Wickson émet l'espérance que deux pareilles coupes pourront être faites chaque saison. En composant la ration de trois unités de Salt-bush à l'état vert et d'une unité de foin ordinaire, les Chevaux et le gros bétail s'en trouvent, parait- il, à merveille; les Moutons et les Porcs consomn-ient tel quel sans difficulté, le Salt-bush vert. « A en juger par les essais faits dans le courant de 1895, dit M. AVickson dans le Bulletin de novembre 1895, cité plus haut, tant sur les terrains salants de Tuiare appartenant à la Station que dans les propriétés d'une foule de particuliers auxquels la Station avait fourni des graines ou de jeunes plants, la résistance de ce Salt-bush au salant est au-dessus de tout éloge. . . Nos cultivateurs de la région à salants sont tellement impressionnés par notre nouvelle introduction, que des correspondants enthousiastes nous écrivent qu'à elle seule, elle suffirait à justifier tout l'argent que la Station a coûté à l'État depuis sa fondation. » M. Wickson, sans re- prendre pour son compte ce langage hyperbolique et peut- être quelque peu prématuré, pense tout de même que l'in- troduction en Californie de la culture de VAtripLex semi- haccutum semble devoir marquer un jour une phase des plus honorables dans l'histoire de la Station de Berkeley. Si la culture de cette plante doit réellement s'établir dans te pays à titre définitif; si l'accueil chaleureux du premier L'ATRIFLEX SEMIB.VCCATUM. 223 moment ne se change pas quelque jour en désappointement, comme cela a eu lieu dans de nombreux cas analogues, pré- sents â la mémoire de tous ceux qui s'intéressent à l'acclima- tation, le jour du premier semis de VA triplex semibaccalum à la Station de Tulare pourrait bien, en effet, devenir une date mémorable dans l'histoire de l'agriculture des terrains salants, et c'est à von Mueller, qui, pendant plus de quinze années, ne s'est pas lassé de distribuer des graines d'un nombre assez con- sidérable d'espèces de Salsolacées fourragères d'Australie, à tous les établissements botaniques du monde (1), que revien- drait, en première ligne, l'honneur de cette belle conquête; en seconde ligne, de bon droit, à la Station de M. Hilgard, dont l'organisation pour la distribution des nouveautés, en matière d'acclimatation de végétaux (2), est tout à lait excellente. Comme {»rocédé de culture, M. Wickson recommande pro- visoirement de préférence le semis en caisse ou sur piate- bande, avec couverture très mince; la transplantation à demeure sur le salant peut être faite aussitôt que les jeunes plantules se seront tant soit peu constituées; en raison de la propriété du Salt-bush de s'étaler, on mettra des plants à quelques pieds de distance les uns des autres. Pour le semis direct sur place, il suffirait de répandre les graines sur le salant, tout superficiellement, pourvu qu'une pluie vienne immédiatement après et que la température ne soit pas trop basse ; cependant cette seconde manière serait quelque peu risquée. Une fois que le Salt-bush a pris possession du terrain, il se ressème abondamment tout seul. Il y a quelques années, nous avons déjà parlé, dans la Revue des Sciences naturelles appliquées, des essais que la Station de Berkeley avait fait faire alors par certains de ses (1) Jean Vilbouchevitch. Les plantes miles des terrains salés. (Mém. de la Soc. nat. d'Agriculture de France, T. CXXXIV, 1890, p. 653). — La question des « Salt-buskes )). (Rev. des Sciences nat. appliquées. Bulletin de la Soc. nat. d'Acclimatation de France, 20 tév. 1893). — Renseignements sur les plantes des terrains salants (Ibidem, 20 avril 1893). — Les pâturages du Cap de Bonne- Espérance (Ibidem, 20 sept. 1893). — La question des Salt-bushes. — Z'Atriplex nummularia (Ibidem, o décembre 1894). — E. W. Hiigard. Considérations sur les terrains salants et alcalins (Bull, des séances de la Soc. nat. d'Afriicul- ture de France 1893, p. 237). (2) Voy, E. W. Hiif^ard. Les Stations agricoles et d'acclimatation en Cali- fornie Revue des sciences naturelles appliquées. Bulletin de la Soc nat. d'Ac- climatation de France, 1893, 1" semestre, p. i33]. 22 i BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. correspondants avec VAiriplex nummidaria, et qui parais- saient assez satisfaisants ; les différents Bulletins de 1894 et de 1895 n'en parlent plus, ce qui est mauvais signe. Au cha- pitre « Sait-Bush » du Bulletin 106 (décembre 1894), M. Wickson se borne à dire : « Depuis douze ans, nous avions essayé, en profitant d'envois de graines de la part du baron von Mueller, différents A triplex — vulgo « Salt-bushes » — nous en avions distribué, en quantité limitée, des graines et des plants ; mais l'essai fait à notre succursale de Tulare avec VAtripleoo semibaccatum est le premier qui ait donné des résultats pratiques d'une réelle importance. . . » Dans le Bulletin 109, il est question d'un autre Atri- plex encore, VA. leptocarpa, originaire de l'est de l'Aus- tralie, provenant également du baron von Mueller, et qui va être expérimenté comparativement avec 1'^. semibacca- tum à la succursale de Tulare et chez plusieurs correspon- dants de la Station ; de même — d'une plante du Chili, introduite on ne sait comment sur des salants du Kern County et dont un certain M. A. B. Leckenby, de Bakersheld, aurait adressé des spécimens à Berkeley, avec prière de les déter- miner, en ajoutant que la plante végète d'une manière luxu- riante sur des terrains salants caractérisés, sans irrigation ; que les Moutons la broutent avidement, que les Chevaux paraissent s'en trouver aussi bien que de la Luzerne ; que les Vaches la préfèrent à cette dernière et donnent à ce régime davantage de lait. La plante se trouva être le Modiola decumbens ; une analyse chimique révéla une richesse en matières albumi- noïdes égalant presque celle de la Luzerne. En s'appuyant sur ce qui a été observé dans le Kern County, M. Wickson pense que cette plante pourrait bien avoir de la valeur pour les sols secs et désertiques, fussent-ils fortement salants ; mais, en même temps, il met ses lecteurs en garde contre le danger que le Modiola présente par la faculté qu'ont ses bran- ches, étalées comme celles de 1'^. semibaccatum, de s'enra- ciner au contact du sol — caractère qui menace de le rendre inexpugnable, une fois introduit ; la Station de Berkeley dis- tribue quand même des graines, à titre d'expérience, en aver- tissant ceux qui voudraient en faire l'essai de ne le tenter qu'en des endroits inutilisés et éloignés des terres cultivées. Nous aurons terminé l'exposé de ce qui concerne, dans ces L'ATRIPLEX SEMIBACCATUM. 225 récentes publications de la Station de Berkeley, les plantes pour terrains salants, si nous mentionnons encore que le Bulletin 105 contient une étude chimique fort détaillée de VA. semibaccatum, par M. Jaffa, dont les résultats concordent plus ou moins avec ce qui a été trouvé pour différents Salt- bushes par M. Dixon, le chimiste australien, dont les chifïres ont été donnés par E. Raoul dans le P'" volume du Manuel des cultures tropicales. * ■* * P. S, — Les documents qui ont servi à composer cette notice datent de 1894 et 1895, ce qui, pour une nouvelle intro- duction, est déjà un peu inquiétant ; on pourrait se demander si le temps n'a pas donné un démenti aux belles espérances des agronomes de Berkeley. J'ai donc cru prudent de me renseigner encore auprès de M. Hilgard et voici ce qu'il m'écrivit, à la date du 24 novembre 1897 : « Je n'ai rien de nouveau à dire sur notre Salt-bush ; sa culture continue à s'étendre; le seul reproche que lui font des personnes négligentes est que les graines sont difficiles à faire lever. Je conseille donc de semer en caisses, au premier printemps; pour la transplantation à demeure, il faut espacer de 6 ou de 8 pieds en tous sens, selon le climat et le sol. Généralement le sol se trouve couvert en une seule année, et s'il reste des endroits dénudés, ils se comblent par ressemage spontané. Aucun de nos correspondants ne nous a signalé de difficultés pour le faire manger aux bêtes, ni de mauvais efîets de cette alimentation. Nous nous sommes aper- çus que notre Salt-bush prospère même, en dehors des ter- rains salants, dans des sols sablonneux ou légers et profonds; nous sommes en train de faire analyser les cendres de cultures faites dans ces conditions et nous nous attendons à constater que notre plante ne fait que supporter le salant sans en avoir besoin autrement que comme moyen pour traverser plus facilement les époques de sécheresse, le salant diminuant l'évaporation ; cette année, nous avons vu le Salt-bush résister à six mois de sécheresse continue, dans des terrains dépourvus d'irrigation artificielle. Nous avons expérimenté beaucoup de Salt-bushes aus- Bull. Soc. nat, Accl. Fi\ 1898. — 16. 226 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'AGCLIMATATIOiV. traliens, et je comptais même beaucoup sur deux d'entre eux : les il. lepiophylla et A. vesicaria ; mais aucun ne vaut I'^. semibaccaia (nous adoptons pour Atriplex le féminin en dépit du baron von Muellerj. Les uns lui sont inférieurs comme rendement; les autres ont un port défectueux, des tiges trop épaisses ou trop dures ; aucun n'est mangé en vert aussi volontiers que le semibaccaia que nos cultivateurs manient presque comme si c'était de la Luzerne. Quant au foin, il peut, parfois, être trop salé même pour les Vaches lorsque le Salt-bush provient d'un terrain salé, à prédominance de sel marin (chlorure de sodium), mais les terrains salants ordi- naires de la Californie, alcalins, à prédominance de sel de Hauber (sulfate), fournissent un foin absolument pareil au foin ordinaire. Aucun des autres Salt-bushes ne se prêtait à ce genre d'utilisation. Des botanistes du Ministère ont voulu nous imposer des Salt-bushes indigènes — plusieurs espèces qui croissent entre la Sierra Nevada et les Montagnes Rocheuses, dans la Région du Grand Rassin, — mais les éleveurs de cette région ne les considèrent pas comme un bon fourrage. Cependant, sur le A^ersant californien de la Sierra, nous avons une Salsolacée très recherchée par le bétail de toute espèce et que nous avons mise en essai, mais je ne crois pas qu'elle vaille VA, semibaccaia. » EXTRAITS DE LA CORRESPONDANCE. Sur l'Élevage, l'Apiculture et la Péghe dans le gouvernement DE SeMIPALATINSK. Lettre de M. Paul Labbé (1). Saint-Pétersbourg, 24 novembre 1897. « Je voudrais aujourd'hui dire quelques mots des occupations popu- laires dans les districts que j'ai traverse's : je prendrai comme type le Gouvernement de Semipalatinsk, J'ai de nombreux chiffres, car partout où j'ai passe, les Gouver- neurs ont bien voulu me communiquer les comptes rendus annuels et officiels dressés par leurs chancelleries. Ce qui m'a surtout intéressé pendant mon voyage, c'est l'étude des Kirghizes et avant tout les Kirghizes nomades. Pour ceux-ci, l'élevage du bétail est la seule préoccupation de la vie. Le Kirgliizo n'est plus un homme, mais une chose qui vit et se meut d'après les nécessités du bétail. C'est tellement vrai que jamais un Kirghize ne vous répond s'il fait beau temps ou mauvais temps : pour lui, beau temps ne signi- fie pas soleil, mauvais temps ne veut pas dire pluie ou vent ; on m'a souvent dit chez les nomades : aujourd'hui nous avons beau temps quand il pleuvait. Pour le Kirghize beau temps signifie temps favo- rable au troupeau. Une autre et bien curieuse preuve de la façon dont le Krrghize n'est que, pour ainsi dire, la chose de son be'tail, est la suivante. J'avais remarqué que la langue kirghize était peu riche, mais que par contre chaque brin d'herbe avait un nom : je pouvais rassembler trente ou quarante herbes dilïéreales et toujours le Kirghize interrogé par moi m'en disait le nom. Un jour cependant, j'eus beau interroger tout le village, même les vieux, nul ne put me dire comment s'appelait une plante que j'avais ramassée- J'eus l'explication de ce fait quelques jours plus tard : un juge de village me dit : kNous savons le nom des plantes utiles ou nuisibles au troupeau, mais une plante que nos bêtes ne mangent jamais, comme celle-ci, à quoi bon lui donner un nom ! » Le Cheval kirghize connaît à peine l'Avoine et le gros bétail ne se /nourrit presque jamais de foin. La place qu'occupent les bêtes pen- dant l'été dépend surtout de la nature de la flore. Ainsi dans les vo- losles du district de Karkaralinsk, le gros bétail est au Nord, les Che- vaux et les Moutons au Sud; dans les endroits couverts par l'Absinthe, la Stipe et par ce que les Kirghizes nomment tchi et kokpek, se trou- vent les Chameaux. (1) Communiquée par la Société de Géographie. BULLETLN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. Le Cheval kirghize « pur sang » a du train et de l'endurance ; il est peu sujet aux influences atmosphériques. Les derniers chiffres relatifs au bétail ont e'té donnés cette année, |}Our Tannée 1895, parle Comité de statistique de Semipalatinsk: Chevaux 549.834 21 « 'o Gros bétail 291.369 11 «/o Petit bétail 1.709.404 65 °/o Chameaux 61.602 2,3 <=/o On voit que dans Toblaste de Semipalatinsk, le gros bétail et les Chameaux sont peu nombreux. L'année 1895, la dernière dont les résultats seront publiés dans les Oouvernements de la steppe et du Turkestan, fut très favorable au b'C'tail, elle fat épargnée par la famine à l'automne et au printemps, t>Gnheur rarement réservé au bétail. Le nombre des bêtes se répartissait ainsi dans chacun des districts, — des ouièzdes : TABLEAU DISTRICTS. NOMBRE. COMPARATIF. Semipalatinsk 688.627 26,3 °/o ^Zaïsane 384.243 14,2 °/o Oustkamienogorsk 301.224 11,5 °/o Paoladar 571. C64 21,8 -^/o Karkaralinsk 666.351 25,» «/o On peut constater de suite, que de beaucoup, le bétail est en plus grand nombre sur la rive gauche de l'Irlych. La peste, venue deux fois du Semiretché, désola les districts de Se- mipalatinsk, de Zaïsane et de Karkaralinsk. Rien qu'en la ville de Semipalatinsk, 174 bêtes succombèrent. Une loi du 3 juin 1879 or- -donne d abattre tout animal atteint. On m'a cite' telle année où dans 'Certains endroits 60 0/0 du bétail mourut. Les autres maladies que j'ai notées dans mon exploration sont la morve, la peste sibérienne, la congestion pulmonaire, et surtout, pour les Brebis, la gale. Eu outre, le bétail a des ennemis nombreux, les Loups et certains lasectes. L'Araignée, appele'e Karakourto pique le Chameau qui en meurt. On donne comme chitfres des bêtes mangées par les Loups en l'an 1895, 48,112; et ce chilire est un minimum; en voici la répartition : Chevaux 8.693 17,9 « o Gros bétail 4.239 8,7 «/o Petit bétail 31.848 71,9 °/o % Chameaux 632 1,8 Vo EXTRAITS DE LA CORHESPONDANCE. Les cbiflfres que m'ont donne's les Kirghizes nomades au sujet du bétail mangé par les Loups sont beaucoup plus élevés. Certain Sultan m'a parlé de vingt à trente Chevaux sur mille, quinze à vingt-cinq Bœuis, et sur mille Moutons, quelquefois jusqu'à deux cents. Dans les nuits sombres où les Loups nous entouraient nombreux, j'admirais le calme et le sang-froid des maîtres qui ne bougeaient pas. entendant les bêles, crier. « Pourquoi me tourmenter, me dit un jour l'un d'eux, je sais- combien de têtes je dois au Loup, il n'en prendra pas davantage. Voilà aussi pour chaque tente, le chitfre moyen donne par les vété- rinaires. Il y a dans les districts suivants la moyenne suivante pour chaque yourte : DISTRICTS. CHEVAUX. GROS BÉTAIL. PETIT BÉTAIL. CHAMEAUX. TOTAL Semipalatinsk .... 6,8 2,8 18,4 0,6 28,8 4,3 2,5 28,4 0.4 35,8 Oustkamiénogorsk 4,5 1,9 11,3 0,1 18 4,8 6,3 11,6 0.2 23,2 3 1,4 18,2 0.8 23,5 En moyenne un Chameau coûte 30 roubles, un Cheval 20, un Mou- ton 2, une Chèvre 1,50, une tête de gros bétail 10. 11 est, à mon avis, certain que l'élevage est dans le Gouvernement tout entier, surtout à l'est de l'Irtych, en décadence déjà appréciable. Il serait trop long de vous donner aujourd'hui les raisons de celte dé- cadence, qui dépend de raisons économiques et des habitudes primi- tives des propriétaires. Un mot d'une autre richesse du pays qu'à Baïau-Aoul j'ai pu étu- dier : l'apiculture. C'est à la fin du siècle dernier que les Abeilles furent apportées du-. Gouvernement de Kiev dans le district d'Oustkamienogorsk. Là, grâce à l'excellence de la flore de l'Altaï, les résultats furent brillants. Le miel est apporté aux foires d'Irbit et de Nijni-Novgorod. Ce sont sur- tout les Cosaques qui s'occupent d'apiculture. DISTRICTS. RUCHES. MIEL. CIBE. Poids en pouds. Oustkamiénogorsk 14.662 4.770 1/2 353 1/2- Zaisane 424 122 3/4 10 1/2 Semipalatinsk 204 95 3/3 1 1/2: Paoladar 10 5 1/2 1 230 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. On voit qu'il n'y a pas de ruches dans le disirict de Karkaralinsk, et je crois que dans celui de Paoladar, il n'y a d'apiculture que dans deux endroits à Baïau-Aoul et le bord de l'Irtych à lamychevsky. Quant au Poisson, qui est une richesse aussi pour le pays, voici les reaseigncments que jai pu rassembler. Les KiruLizes ne mangent pas de Poisson, j'ai souvent demandé si telle rivière et tel lac sur les bords desquels je passais en pleine steppe kirghize, contenaient du Poisson. Le Kirgbize me répondait : Dieu sait ! Ce sont les Cosaques qui s'occupent du commerce du Poisson sur les bords du lac de Zaisau, du lac Balkacli, des fleuves de l'Irtych et du Tchou (le district de Karkaralinsk va au Sud jusqu'à cette rivière). Une Société, depuis 1886, donne le droit de prendre le Poisson. 11 y a trois périodes (1^'' avril-l^'"^ juillet, puis l'^'" juillct-1'^'' novembre, puis P" novembre- J avril). Pour la première période on paie 5 roubles par homme, 10 roubles pour la seconde, et enfin pour la troisième quelques légères taxes s'ajoutent à ce dernier prix. Les grands centres de commerce pour le Poisson sont Oustkamie- nogorsk, Semipalatinsk et les stations de Dolousky et de Sémia^sk sur rirtych. Les Poissons conservés sont dirigés vers la Russie et sur- tout vendus aux foires d'irbit et de Xijui-Novgorod. Les Poissons pris dans le Balkach et le Tchou au sud du Gouverne- ment sont dirigés vers Aoulié Ata. Les chiffres qui chaque année prouvent que le commerce augmente, font présumer que ce trafic est pour l'aveoir d'une importance inap- préciable pour le pays. » Paul Labbé. EXTRAITS ET ANALYSES. Observations sur les Llamas domestiques des hauts plateaux DU Béni, en Bolivie (1) par P. Germain. L'Indien Aymara est presque exclusivement pasteur. On le ren- [1] Extrait de la relation d'un voyage d'Asuncion (Paraguay \ à Molendo (Pérou), publiée en avril 1898, dans les Actes de la Scciétc' scientilUiue du Chili, vol. VU, 1897. I/orthograpbe du mot Llama est conlorme à celle du texte ori- ginal. Toute la responsabilité des opinions émises est naturellement laissée à Tauteur. EXTRAITS ET ANALYSES. 231 contre à peu près exclusivement sur les hauts sommets des montagnes où, sous le nom de Ahijaderos, il fait pâturer d'immenses troupeaux de Moutons et de Llamas. C'est lui qui a la spécialité de l'e'levage de ces derniers et lui seul sait s'en servir comme bêtes de somme. Jamais il ne les frappe ; à peine leur parle-t-il. Leur demandant toujours la même chose, il les pousse un peu avec la main ; la force de l'habitude fait le reste. Il est à remarquer que les mâles seuls travaillent. Quant aux femelles, elles restent constamment et rigoureusement sous la garde des femmes, qui, seules, ont le droit de les approcher. Je pourrais donner l'explicalion de cette coutuilic, mais il me faudrait parler latin Le Llama, on le sait, est un Ruminant du genre Chameau, mais sans bosse. Les animaux de ce genre, qui sont ainsi faits, forment un ^îToupe propre à l'Amérique du Sud et composé de quatre espèces : le Guanaco, la Vigogne, l'Alpaca et le Llama. Cette dernière n'existe nulle part à l'état sauvage ainsi du reste que l'Alpaca, et j'ai usé ma sagacité de naturaliste pour tâcher de découvrir son origine. J'ai tout lieu cependant de supposer que cet animal vient du Guanaco et que les différences qu'il pré- sente avec celui-ci sont simplement le résultat de la domestication, laquelle a du être opérée à une époque très reculée par les Péru- viens Les principales différences auxquelles je fais allusion consistent d'abord dans la livrée qui, au lieu d'être d'un fauve uniforme, est blanche, fauve, noire, rousse, grise et même souvent bariolée ; en outre, la taille est plus forte, le corps plus trapu, les jambes et le cou plus courts et enfin les extrémités des oreilles sont, par moments, crochues en dedans et presque contiguës. Tous c^s caractères peuvent néanmoins varier et présenter des tran- sitions, ainsi il existe dans les troupeaux de Llamas des individus si semblables à des Guanacos que je me demandais en les voyant si ce n'était pas quelques-uns d'entre eux qui s'y étaient joints. Enfin j'ajouterai, à l'appui de ma thèse, cette circonstance singu- lière que les organes génitaux du mâle sont faits de telle sorte que, à l'état de liberté, ces animaux ne se reproduiraient pas. D'après les Indiens, il faut absolument leur aide pour que le coït puisse avoir lieu. L'e'poque désignée pour cette copulation est, pour les tribus, le sujet de grandes fêtes. Rien n'est curieux comme la vue d'un troupeau de Llamas, ma- nœuvrés par leurs conducteurs dans les vallées de ces hautes mon- tagnes. Chez ces animaux, l'expression dominante est la curiosité unie à une douceur extrême. Un tout petit bêlement, bien plus court et moins bruyant que celui du Mouton. C'est tout ce qu'ils se permettent 232 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. pour faire connaître leur opinion. Cependant ils se mettent parfois en colère ; alors ils crachent sur vous, comme c'est l'habitude chez tous les animaux de ce groupe. Quand ils ont perdu toute mesure, ils vous donnent un coup de pied, et ce coup de pied est tel que celui qui en a reçu un n'en demande pas deux ; une ruade de Mule n'est rien en comparaison de celle du Llama. Ces animaux sont d'une docilité dont on n'a pas d'idée- Quand leurs conducteurs veulent les charger, ils les réunissent en un groupe serré sur un point quelconque de la prairie. Trois ou quatre Indiens suf- fisent pour une cinquantaine de Llamas, et ils enveloppent ce groupe d'une corde de laine grosse comme le doigt ; mais on m'a assuré qu'un fil serait suffisant. Puis avec la main, on leur fait tourner le derrière en dehors; cette opération s'exécute avec une telle facilite' que l'on dirait des jouets de carton que l'on arrange suivant son caprice. Cela fait, le cou de tous les Llamas étant à l'intérieur, on les enlace tous au moyen de deux autres cordes semblables à celle du dehors que Ton croise en faisant une suite de 8 ; chaque cou occupe l'une des boucles. Pas un cri, pas un mouvement ne vient déceler une velléité d'insu- bordination ou même d'impatience. Toute idée de révolte semble inconnue à ces animaux et tous attendent avec résignation ce qu'il plaira au Destin de faire d'eux. L'espèce humaine ferait bien de venir prendre un peu exemple sur ces bêtes-là. On procède alors à leur chargement. La première fois que j'y assistai, c'e'taient des Pommes de terre que les Llamas devaient transporter. Les Indiens les avaient placées par 25 à 30 kilos dans des sacs allongés qui e'taicnt loins d'être remplis ; ils en plaçaient un sur chaque Llama en l'arrangeant en forme de besace, mais sans aucune espèce de bat, puis l'attachaient, toujours au moyen d'une corde de laine, — tout est en laine ici — faisant cinq ou six tours autour du corps. Quands ils étaient chargés, ils sortaient ge'ne'ralement du groupe, s'accroupissaient et ruminaient tranquillement. Pour s'accroupir, ces animaux s'agenouillent aussi bien des jambes de derrière que de celles du devant ; ils se couchent sur le ventre et jamais sur le flanc. Les Llamas ont beaucoup de laine. Quand elle est ancienne, elle se feutre et pend sous le ventre en longues stalactites ; mais on les tond souvent, car les Indiens font de leurs toisons non seulement leurs habits, mais encore leurs frondes, cordes, lazos, ainsi que les harnais de leurs Mulets. Beaucoup ne les tondent que partiellement comme nous le faisons aux barbets, puis les ornent de rubans rouges, jaunes, verts, etc. X EXTRAITS ET ANALYSES. 233 L'Industrie des Pêches au Japon par le D'' K. Kishinouye, Membre du Bureau Impérial des Pêches à Tokio. L'Empire du Japon est constitué par un grand nombre d'îles for- mant une très longue chaîne qui borde le continent et s'c'tend entre le 29° et le 51'' de latitude Nord et le 119'^ et le 157« de longitude Est (méridien de Greenwich). En raison du développement consi- dérable des côtes du Nord au Sud, la tempe'rature varie beaucoup suivant les régions. Je crois devoir indiquer ci-dessous la moyenne dans les trois principales villes de l'Empire : Kushiro (Hokkaido). . . . Tokyo (capitale) Naba (Loo Choo) PRINTEMPS. ÉTÉ. 2°,8' 16°, 8* 19%7' 26^6' AUTOMNE. HIVER. 8«,2' — ^^3' 13«,9' S'',S' 23M' 16«,1' Deux millions et demi d'habitants sont occupés par l'industrie de la pêche qui emploie environ quatre cent mille lâtiments. Ce chiffre peut paraître exage're', mxais si l'on considère le nombre d'îles de'pendant de l'Empire et l'étendue de la ligne des côtes, longue de plus de trente mille kilomètres, on reconnaîtra qu'il n'est certainement pas trop élevé. Les côtes du Japon sont extrêmement poissonneuses ; elles offrent une faune et une flore des plus variées. Les produits de la mer rap- portent annuellement au Trésor plus de 300,000 yen (1). Les Poissons que l'on pêche dans les mers du Japon sont aussi nom- breux que variés. Il en est de même de leur mode de pêche. En général, dans la partie orientale de l'Empire, la mer atteint très près des côtes une profondeur considérable, variant de 100 à 1,000 brasses. Entre les îles et le continent, elle est relativement peu pro- fonde ; dans la plus grande partie du Tong-Hai, elle n'atteint pas 200 brasses. Un courant chaud, appelé ^?^ro5^nyo, baigne toute la côte, à laquelle il apporte, en même temps que la chaleur, une grande quantité de Pois- sons comestibles; ceux de la famille des Maquereaux, par exemple. En été, ce courant est très fort et s'approche tout près des cotes. Sa vi- tesse est de 30 à 50 milles par jour. Un courant froid, appelé Ogashiioo^ baigne la côte Nord-Est et lui apporte la Morue, le Hareng et le Sau- mon. Ce courant est très fort en hiver. Dans la Setouchi-umi (mer intérieure) et dans quelques baies, la mer est relativement peu profonde. Les fonds sont favorables à la pêche aux filets traînants et à la culture d'un grand nombre de (1) Le yen vaut un demi-dollar = environ î2 kroner = 4 fr. 80. 234 BULLETIN DE LA. SOCIÉTÉ D'ACCLLAIATATION. Mollusques et d'Algues. Les rivières et les lacs donnent également beaucoup de Poissons comestibles et de Mollusques. Cependant la pêche en eau douce est loin de présenter la même importance que la pêche en mer. La faune et la flore marines du Japon peuvent être divisées en trois i^roupes principaux, ceux du Nord, de la mer intérieure et du Sud. Le tableau ci-dessous indique les produits les plus importants de chacun d'eux : HÉGION DU NORD. MER INTÉRIEURE. RÉGION DU SUD. MAMMIFiiRES, Mnhjdris lîiiris. * Oiaria nrsina. Balœnoptera arctica. POISSOXS. Âripenser sp. Maja Kenosei. Ciiirus octar/rami/ius. Trichodon Slelhi-i. ^adiis Brandtii. Gadus chalchogrammiis. Hippoglossns vulfjaris. Qndiorynchiis Baben. » Ferriji. Osmci'vs eperlanus. Hy pG'iuesîis olidiis. Chipea karenipis. Peîromyzon sp. MOLLUSQUES. (jmmastrephrs pacifîcus. Maclra sachaliiiensis. .Pecten jessoenms. CRUSTACÉS. Inochns sp. Lithodes camchaîica. ALGUliS. Lo min a ri a joponica. Id. astre aria. (!ào7idrus crisptis. POISSONS. Mustelus manazo. Trygon pastinaca. Percalabrax japonicus. Pafjrus major. • cardinalis. Ploiycephalus insidiator. Trifjla kumu. Lepidotrigla Buergeri. Sillar/o japoiiica. Sricena sina. Trichiu rus jnponic us . Cybium niphomcnm. Gohius flavimanus. Lnphius sctiycrus. Centronotns nebulosus. Mugit ccphalotus. Ammodytes sp. Pseudcrhombus oiivaceus. Pleurunectes Yokoamœ. Saurida argyrophanes. Hemtramphus Sajori. Ciupea rnelanosticta. A ng a i lia bnKton icnsis . Conger vuigaris. Mtitœnesox cinereus, MOLLUSQUES. Sepia esculenta. Sej.tella Marndroni. Cytiterea meretrix. Arca granoka. Aviciiia Martensii. Ostrta sp. CnuSTACÉS. Penceus (plusieurs esp.). ALGUES. TJlnpieryx pinnatifida. Porphyra laciniata. MAIVIMIFÈRES. Delphinus longirostris. Physeter macrocephalus. Megaptera boops. Balœna japonica. REPTILES. Ckelonia viridis. » imbricata. P0IS.<0NS. Zggœna malleus. Lamna glauca. Sphyrœna obtusata. Snotnber coflias. Thynnus pelamys. Orcynmis sibi. Auxis Roche i. Coryphœna hippuris. Caranx iVîtroadi. Mngil hœmatochylus. Scombrfsox saira. Exocœtî(S agoo. Engraulis japonicus. Hiiratellvides gracilis. Jiirumeus micropus. MOLLUSQUES. Loligo sinen-us. Sepiotcuthis lessoniata. Turbo oicarius. Maliotis gigaiitea. Avicula tnargarxtifera. C.aUSTAGlîS. Palimirus japonicus. ALGUES. Ecklonia bycyclis. Gelidinm cornenm. Sarcodia montagneana. EXTRAITS ET ANALYSES. 235 c o eu o C3 Cl, ^ O • I ce -r;; o o ÎT .i. ^ i ^ -a s o ^ Ci rîse -TS 3 o 1 i "s I: m o 2 ^ -eu a _ o o O O 236 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. L'industrie des pêches maritimes au Japon remonte à une époque très recule'e. On trouve souvent, au milieu d'amas de coquilles, des restes de Poissons, des e'cailles., des débris d'instruments de pêche, mêlés à des ustensiles primitifs de l'âge de pierre et à de gros- sières poteries. Dès l'c'poque où on se servait d'instruments de pierre, les populations se livraient à la pêche, soit en vue de leur nourriture, soit pour différents au'res usages particulièrement pour se procurer des ornements de toilette et, depuis une époque bien lointaine, ils utilisaient les produits de la mer comme le prouve le tableau ci-dessus. Ce qu'il y a de plus remarquable dans l'industrie de la pêche au Ja- pon, c'est l'utilisation des Algues. Ces ve'gétaux produisent en abon- dance une matière gélatineuse, employée pour la fabrication d'une sorte de colle ou gelée d'excellente qualité. Comme je l'ai déjà dit, la mer est très profonde sur la côte orientale et les pêcheurs sont, par conse'quent, obligés d'aller chercher le Pois- son à de grandes profondeurs. La ligne peut être employée sur les fonds qui ne dépassent pas 300 brasses. Comme les espèces de Pois- sons sont très nombreuses et les fonds très différents, il en résulte que les appareils destinés à la capture des Poissons doivent être très va- riés, suivant les espèces et les fonds sur lesquels a lieu la pêche- On emploie les lances et les harpons, les hameçons, les appâts et les mouches artificiels, les filets, les dragues et autres instruments desti- nés à prendre les Poissons en traînant sur le fond, les filets plongeants, les filets traînants, des filets montés sur un cercle, des pièges, des filets fixes ou flottants, etc., etc. Il existe quelques engins spéciaux à certaines régions et qui méri- tent d'être cités en raison de leur construction particulière et de leur mode d'emploi. Tels sont les lances au moyen desquelles on prend THaliotide à une profondeur d'environ 7 brasses, les hameçons sans barbillon, destinés à capturer les Poissons qu'on veut conserver pen- dant un certain temps et qui sont attachés à de très longues lignes, différentes sortes d'appâts artificiels pour la pêche des Poissons péla- giques, les hameçons garnis de mouches artificielles pour la pêche en eau douce, des lignes pour les pêches à une profondeur de 300 brasses, des Bôkê-ami, Nisôbari^ sortes de filets plongeants pour la pêche des petits Poissons pélagiques, des nasses dont le Poisson, une fois entré dans l'intérieur, ne peut plus sortir. La conservation du Poisson a lieu par les procédés suivants : La dessiccation. — On emploie ce procédé pour les Anchois entiers, pour les Harengs ouverts et leurs rognes, les Morues ouvertes et dont on a enlevé l'arête, les Poissons plats, les A//ii, espèce de petits Sal- monidés, les Congres ouverts, les Tetrodon vides et partagés en trois EXTRAITS ET ANALYSES. 237 morceaux suivant leur longueur, les Octojms, Crevettes, elc, ; ce mode de conservation est surtout usité pour les trois premières espèces. Poissons salés et sécJiés. — Cette méthode est surtout appliquée aux Sardines entières, aux Congres ouverts, aux Requins découpés en pe- tits morceaux rectangulaires, à la Morue, au Maquereau, aux Latitus, aux Seriola et aux Mulets gris- Je dois signaler ici un procède' particu- lier employé pour la conservation de ces deux derniers Poissons. On ouvre le ventre de l'animal et on en extrait les entrailles. On l'immerge pendant deux heures environ dans la saumure ; ensuite on le plonge dans de l'eau douce; on enlève la tête, et le corps est partage', suivant sa longueur, en trois morceaux ; deux de ces morceaux com- prennent les flancs et le troisième le dos et la colonne vertébrale, cinq ou six entailles sont pratiquées sur les côtés. Le Poisson est alors de'- posé dans le sel pendant environ une semaine, puis on le lave et on le met sécher à l'ombre pendant deux mois. Enfin, on le recouvre d'une couche de sel fin blanc et on l'enveloppe dans du papier ou de la paille hermétiquement retenue par des liens pour le soustraire au contact de l'air. On le place ainsi prépare' dans des chambres bien ventilées et il s'y conserve pendant de longs mois. Cependant, comme cette méthode exige beaucoup de temps et de soin, on ne l'applique généralement qu'aux Poissons ayant une certaine valeur. Poissons salés. — Le Saumon, la Morue, le Maquereau, le Hareng, le Mulet gris, se conservent par cette méthode. Le Tai, sorte de Brème de mer, peut se conserver pendant deux ou trois jours au milieu de l'été €n Tarrosant de saumure chaude. Poissons bouillis et sécJiés. — On fait bouillir les Sardines, les Equilles, les Crevettes dans l'eau additionnée de sel et ensuite on les fait sécher. Je dois mentionner ici la préparation de la pute de viande de Pois- son. On choisit de beaux morceaux de chair maigre de Poisson, eu prenant cette chair de couleur aussi blanche que possible, on les lave puis on les plonge dans l'eau bouillante. On les met dans un sac puis on les presse pour en exprimer ensuite l'eau, on les sort du sac et on les fait chauffer dans un four et on les divise en petits morceaux en les écrasant avec la main pendant qu'ils sont encore chauds. Ce produit ainsi préparé se conserve très longtemps dans des pots bien herméti- quement bouchés. On emploie principalement pour cette préparation le Tai, la Morue, les Poissons plats, les Crevettes, elc. Poissons fumés. — On conserve par ce procède le Hareng, le Saumon, les Poissons plats, le Maquereau, le Thon, etc. On emploie au Japon une méthode particulière pour fumer le Poisson. On met de côté les petits Poissons, les plus gros, comme le Thon, sont partagés suivant leur longueur en doux ou quatre morceaux, au moment où ils viennent d'être péchés. On les fait bouillir dans l'eau ; on enlève soigneusement toutes les arêtes, puis on les fume et on les fait s^'cher. Lorsqu'ils sont 238 BULLETIN LE L.\ SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. à moitié desséchés, on gratte les morceaux avec un couteau pour enle- ver les parties rugueuses, puis on achève la dessiccation. Ainsi prépare le Poisson porte le nom de Fushi et peut se conserver pendant plu- sieurs années. Poissons bomllis dans le Sohiju (sorte de sauce faite de blé fermenté, de fèves et de sel, improprement appelé Soja par les étrangers). — Cette me'thode est très répandue. On emploie pour cette préparation les petits Poissons et les petits Crustacés qui peuvent ainsi se conser- ver très longtemps dans des récipients bien clos ; on les assaisonne ordinairement avec du Gingembre. Poissons conserves dans le vinaigre. — Ou emploie les petites e>:pèces et les Crevettes ; on commence par les vider et on les met ensuite dans des bocaux de verre remplis de vinaigre auquel ou ajoute quelques condiments ; ils peuvent se conserver ainsi deux ou trois mois. Poissons conservés dans le Koji (Riz fermenté). — On prépare ainsi le Saumon, le Carassin, etc. On fait d'abord, bouillir le Poisson dans l'eau salée, puis on le met dans un vase avec du Riz et de la levure ; on retarde la fermentation en agitant de temps en temps. Les vases sont bien bouchés. L'eau contenue dans le Poisson provoque bientôt la fermen- tation du Riz; le Poisson s'imprègne des produits de cette fermen- tation, dextrine, sucre, alcool, et, ainsi prépare', prend un goiit très de'licat. Poissons conservés dans la lie de Saké (vin préparé au Japon avec le Riz). — On conserve par ce procédé le Tai, VAt/u, etc. La méthode est exactement la même que pour la préparation qui précède. Poissons pilés, cuits à la vapeur ou au four. — On conserve par ce moyen les l'ai, Saurus, Sillayo, Poissons plats. Congres. Requins, Cre- vettes, etc. On prend le Poisson frais, on enlève les arêtes, on le pile dans un mortier de pierre, en y ajoutant une certaine quantité de sel, de la fleur de farine, du vin doux, des blancs d'œufs et une décoction d'une Algue saccharifère [Laminaria). Lorsque le mélangea pris la consistance d'une pâte assez épaisse, on en fait des pains de ditfé- rentes formes, cylindriques, semi-cylindriques ou discoïdes ; on les fait cuire sur un feu de charbon, à la vapeur ou au four. Cette prépa- ration se conserve de trois à cinq jours en été, de dix à vingt jours en hiver. Poissons conservés en boîte. — Ce mode de conservation a été intro- duit au Japon il y a une trentaine d'années. Aujourd'hui le Saumon, la Sardine, l'Anchois, le Thon, le Maquereau, la Tortue verte, la Tortue à carapace molle, l'Anguille, l'Huître se préparent d'après cette méthode. La pisciculture fait aujourd'hui des progrès constants au Japon. Le tableau ci-dessous indique les animaux et les plan'es marines qui offrent le plus d'intérêt. EXTRAITS ET ANALYSES. 23» i Triomjx ja^ioniciis Alimenlalioii. Reptiles (Clemys japonica Poisson d'onicmcnt.,. / Percalahrax japonicus Alimenlatiou. IMugil cephalotus — Onchorhynchus Haberi — — Perryi — Cyprinus carpio Alimen talion et oj- nement. Carassiiis auratus Dccoration- Anguilla bostoniensis Alimentation. j Ostrea sp Alimentation. l Avicula Martensii Perles. \SiUquaria comtricta Alimentation. Mollusques ... Cytherea meretrix — I Tapes pliiUppiiiaruM — [ Arca granosa — ' — subcrenata — Crustacés | Balanus sp Engrais. Échinodermes. \ Stichopus japoiiicus Alimentation. ( Poi-phura laciniata Alimentation, Al^'ues \ ° { Gtloiopellis coUformis Colle. Peghe des principaux Poissons en 1895. POIDS. VALEUR» Kwaa (1). Yen (2). 1,969,902 91,232 54,310,023 4,848,263 8.969,646 1,966,019 4,674,552 1,617,655 7,509,798 1,038,171 4,001,790 1,006,373 6,783,374 957,971 3,891,496 935,307 4,155,805 597,071 3,706,028 582,235 585,285 300,283 766,984 265,190 (1) 1 Kwan égale 81/3^1ivres anglaises. (2) 2 Yen égale 2 shillings 1 penny. 240 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLLMATATION. Saumon 567,195 245,794 Requin 1,147,696 196,962 Baleine 537,105 176.664 Morue 1,149,467 113,250 Huître 769,816 99,047 Holothuries 547,022 92,039 Truite 72,480 38,112 Dans ces chiffres n'est pas compris le produit de la pêche dans le Hokkaido. Produit des principaux Poissons en 1895. POIDS. VALEUR. Kwan. Yen. FusM (Thon et Bonite fumés).. 1,510,053 2,117,594 6,180,994 1,588,675 1,620,021 1,267,519 1.879,576 578,732 485,801 459,438 1,861,517 410,518 Algues iJLaminana) sèches 5,654,752 369,649 154,426 306,508 159,328 180,710 523,759 157,077 904,771 133,131 59,810 104,382 Kanten (Gélatine d'Algues) . . . 36,866 83,540 343,714 56,665 - ^ . ( Harengs. . 38,917,158 6,566,480 Guano de Poisson < _ ^. ( Sardines. . 5,752,413 837,033 1,519,279 237,342 I I EKVUE EES CULTURES COLONIALES "Directeur: A. MILHE-POUTINGON, Docteur en droit. Directeur du Service de l'Afrique des Antilles à V Union coloniale française, Vice-Président de la Seciioii coloniale à la Société ^atiotiale d'Acclimatation de France. Créée sous les auspices de V Union coloniale française, cette nouvelle publication a pour but défaire mieux mnaitre, en France, les diverses cultures et les productions coloniales ; de vulgariser dans les colonies s meilleurs procédés de culture, d'y provoquer l'introduction des meilleures variétés des plantes françaises îtuellement cultivées et l'acclimatation de plantes nouvelles. COMITÉ DE PATROiNAGE DE LA REVUE MM. ; prinr-e D'ARENBERG, député, vice-président dti Groupe colonial, président du r.omité de l'Afrique française. } commandant BINGER, ancien gouverneur de la Côte- d'Ivoire, directeur des affaires de l'Afrique au Ministère des Colonies. MJL BOURDE, ancien directeur des contrôles et de l'agri- culture en Tunisie, ancien secrétaire général à Madagascar. UREAU, professeur de botanique au Muséum. CHAILLEY-BERT, professeur à l'Ecole des Sciences poli- tiques, secrétaire général de VVnion coloniale française. HARLES-ROUX. ancien député, membre du Conseil supérieur du commerce, vice-président du Groupe colonial. ORNU, professeur de culture au Muséum. EHERAIN, membre de l'Institut, professeur de chimie agri- cole au Muséum et à l'Ecole d'agriculture de Grignon. ARCEL DUBOIS, professeur de géographie coloniale à l'Uni- veisité de Paris. YBOWSKY, directeur de l'agriculture et du commerce en Tunis e, prof sseur de cultures coloniales à l'Institut natio- nal agronomique. . FLAHAUT, professeur de botanique à l'Université de Montpellier. ouïs GRANDEAUi directeur de la Station agronomique de l Est, rédacteur en chef du Journal d'Agriculture pratique. , RANDIDIER, membre de l'Institut. MM. Baron Jolks de GUERNE, secrétaire général de la Société na- tionale d'Acclimatation. Dr HECKEL, professeur à la Faculté des Sciences, directeur de l'Institut colonial de Marseille. LE MYRE DE VILERS, député de la Cochinchine, président de la Société nationale d'Acclimatation. Mgr LEROY, supérieur général des Missionnaires du Sl-Esprit. MILNE-EDWARDS, membre de l'Institut, directeur du Muséum. CM. NAUDIN, membre de l'Institut. OLIVIER, docteur ès sciences, directeur de la Revue gé- nérale des Sciences pures et appliquées. PRILLIEUX, sénateur, inspecteur géuéri'l de 1 Enseignement a ■ r cole, profesr de Botanique à l'Institut Xallonal agronome POISSON, assistant au Muséum. RISLER, directeur de l'Institut national agronomique. RIVIÈRE, ancien président de laSor iéié d Àgr.culiure d'Alger dire leur du Jardin d'essai du Hamma D' TREILLE, ancien inspecteur eu chef du service de santé des Colonies. VIALA, professeur de viticulture à l'Institut national agrono- mique, directeur de la lîevue de Viticulture. H. DE VILMORIN, membre de la Société nationale d'Agricul- ture. ZOLLA, professeur à l'Ecole d'agriculture de Grignon et à l'Ecole des sciences politiques. La Revue des Cultures coloniales [»araît le 5 de chaque mois. Bureaux : W, rue de la Chaussée d'Antin, Paris. Abonnements : un an : France, 12 francs — recouvré à domicile, 12 fr. 50. — Colonies et Union ostale, 15 francs. — Payement d'avance. PEINTURE IGNIFUGE DITE ANTI-PÉTROLEUR Au moment où l'horrible désastre du Bazar de la Chanté est encore présent a (ouïes les mé- noires, il convient de signaler la découverte récente, par M. de Preux, d'un [iroduii désigné eus le nom û'Anti-Pétroleur et qui rend les objets traités par lui absolument inconibustibles. M. de Preux a fait, il y a peu de temps, à Saultain, près Valeiicit nnes, des expériences déci- iives à ce sujet. Deux baraques de bois blanc recouvertes de carton biiumé et tendues de jule, 'une imprégnée du nouveau produit, l'autre à l'état naturel, ont été remplies de copeaux imbibés l'cttier. Les copeaux ayant elé allumés, la baraque qui avait subi la préparation resta complètement iitacte, tandis que l'autre était détruite en quelques instants. Mis en présence d'un chalumeau légageant 1,200 degrés de chaleur, le bois n'est percé qu'après 25 minutes et le carton bitumé se îonlracte, mais ne brûle pas et ne se fond pas. Les objets en celluloïd ne s'enflamment pas lors- luMIs ont été traités par VAnti- Pélroleur. Après les mêmes expériences faites en grand à TExposition de Bruxelles, au parc du Cinquan- enaire, le Jury international a accordé, à l'unanimité avec ses plus sincères félicitaiions, i VAfiti-Pétroleur, un diplôme de médaille d'or, la plus haute récompense dont il pouvait lisposer. Le produit inventé par M. de Preux rendra d'immenses services. Il est déjà employé dans un icrlain nombre d'usines et il a été adopté par la Compagnie du Nord qui s'en sert dans ses Icpôls de machines. S'adresser pour les commandes et les renseignements au régisseur du château de la Villeltc, 1 Saultain (Nord). Charles NAUDIN Membre de l'Institut Académie des Sciences) Directeur du laboratoire de botanique de la Villa Thuret, à Antibes ET MANUEL DE L'ACCLIMATEUR RECOMMANDÉES POUR L'AGRICULTURE, L'INDUSTRIE ET LA MÉDECINK Adaptées aux divers climats de VEuro'pe et des pays tropicaux OUVRAGE PUBLIÉ AUX FRAIS ET SOUS LES AUSPICES DE LA Société nationale d'Acclimatation de France Un volume in-8<' de près de 600 pages avec portrait Considérations générales sur Tacclimatation des plantes; Aperçu général des genres de plantes auxquels sont empruntées ( espèces déjà utilisées ou qui peuvent Têtre ; Description sommaire des familles ou groupes naturels auxquels rattachent la plupart des plantes indiquées dans ce volume ; Noms vulgaires des plantes et synonymes rapportés aux noms botanique Enumération par ordre alphabétique des plantes, leurs usages et \i culture, formant un dictionnaire des végétaux à acclimater dans les divan régions du globe ; Noms des auteurs cités dans le cours de l'ouvrage avec les abréviatio Pour les Membres de la Société Nationale d'Acclimatation de France, 3 fr. 50 OU CHOIX DE INTRODUCTION : usitées. Prix : 7 Francs EN VENTE AU SIÈGE DE LA Société nationale d' Acclimatation de France, 41, Rue de Lille, PARIS. Le Secrétaire Général, géraat, Jules de GUERNE. Versailles. ~ Imprimeries Cerf, 59, rac Duplessis. Indice décimal. 506 581.52 591.52 ^ IIî BULLETIN DE LA il r m DE FRANCE (Revue des Sciences naturelles appliquées] 45« ANNEE AOUT SOMMAIRE E. DECROIX. — Projet de langage phonétique universel pour la conduite des animaux. 241 DE CONFEVRON. — Lérots et Muscardins 247 A. MERCIER. — Une visite à la ferme d'Autruches à Matarieh^ près du Caire (Egypte). 250 A. L. CLÉMENT. — Abeilles et Guêpes 254 Extraits des procès-verbaux des séances de la Société : 5^ Section : Botanique. — Séance du 15 février 1898 257 6® Section : Colonisation. — Séance du 1898 258 Extraits et Analyses: Léon VAILLANT. — La Ménagerie des Reptiles au Muséum d'Histoire Naturelle. — Les Ecoles de Botaniques, champs d'essais de naturalisation 263 D"^ CLOS- — Essais d'acclimatation végétale au Jardin des Plantes de Toulouse 269 — Le Jardin botanique de Saint-Pétersbourg 27^ La Société ne prend sous sa responsabilité aucune des opinions émises par les auteurs des articles insérés dans le Bulletin. Un numéro 2 francs ; pour les membres de la bociété 1 fr. 50 AU SIEGE DE LA SOCIÉTÉ NATIONALE D'ACCLIMATATION DB FRANGE ^1, RUE DE LILLE, 4:1 PARIS ET A LA LIBRAIRIE CERF, 12, RUE SAINTE-ANNE Le Bulletin paraît tous les mois CRESYL-JEYES •H 0 u u 0 0 •H DÉSINFECTANT ANTISEPTIQUE Le seul joignant à son Efficacité, scientifiquement démontrée, ^««^^ l'immense avantage de n'être ai Tosiquô ni Oorrosif- Hémostatique et Styptîque puissant. Adopté par les Ecoles Nationales Vétérinaires, le Service de Santé de l'Armée, la Préfecture de la Seine et la plupart des Services d'Hygiène et de Désinfection des Départements. Reconnu indispensable dans la pratique vétérinaire. Envoi franco sur demande de Rapports scientifiques et Prospectus *. SOCIÉTÉ FRANÇAISE de PRODUITS SANITAIRES et ANTISEPTIQUES 35, Rue des Francs -Bourgeois (ci-devant 31, Rue des Petites-Ecuries), Par/s. ET CHEZ TOUS LES DROGUISTES ET PHARMACIENS. Pour è>,.s,3r les nombreuses Contrefaçons exiger rigoureusement sur tous les emballages les Marques, Cachets et le Nom CRÉSYL-JEYES. •F Malaen f»B46« mm 1ST8 rtu il m léaiiiii it 12 PHi rïmm Mtilli i'M. Prix l'iiiiBkU, ItHi Itil VOITELLIERiMmES(S.-io. COUVEUSES AKTiriOIILX.M ■iTÉRIEL PtUfAN ▼oIailltt«d« Ilae* GBUFI ▲ GOUVBR SU«e puro 4o ■•v4an ê,§ê CHIENS ât 4htratiou, le local était donc dispo- nible. Perpendiculaire à la rue Cuvier, oriente'e ouest, car le mur opposé n'ofirait pas d'ouve rture de quelque importance, la pièce ne recevait la lumière et le soleil que d'une manière imparfaite, l'espace, au bout de peu de temps, e'tait, de plu^, devenu d'une insuffisance notoire; aussi, dans les dernières années, établit-on, longeant le mur sur la rue, une sorte de couloir, greffe en T sur la salle primitive et lui donnant un peu plus d'étendue, il était, en partie, éclairé par un vitrage supérieur. Mais tout cela manquait évidemment d'élégance, était fort mal disposé et mal commode, bien que des observations très intéressantes, celles de Valenciennes sur l'élévation de température chez certains gros Serpents, pendant l'incubation, celles d'A. Duméril sur la ponte et les transformations des Axolotis, sur Tenkystement estival du Protoptère, et nombre d'autres, y aient été faites au grand bénéfice des sciences naturelles. Tout le monde réclamait un local plus digne de semblables richesses; aussi, dans ces derniers temps, un bâtiment nouveau a éié édifié d'après les plans de J. André, membre de l'Institut, professeur à l'Ecole des Beaux-Arts, en utilisant et augmentant d'anciennes cons- tructions, où se trouvaient les ateliers de menuiserie, de serrurerie et autres, destinés à l'entretien du Muséum. L'inauguration en fut offi- ciellement faite, le 4 octobre 1874, par M. le Professeur Emile Blan- chard, membre de l'Institut, qui, chargé du service par intérim, avait réglé les dispositions du nouveau local. EXTRAITS ET ANALYSES. 255 En entrant dans cette Ménagerie (Voir le plan ci dessous), et se dirigeant vers la droite, on quitte une première pièce pour pénétrer dans la grande salle principale, située en façade ; à Textrémité de celle-ci, une autre salle renferme les Serpents venimeux; elle com- munique avec la salle des aquariums, laquelle, adossée parallèlement à la seconde, ramène dans la pièce d'entrée. 266 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. La grande salle dite des Crocodiles, mais qui renferme, avec ces animaux, beaucoup d'autres espèces, et, d'une manière générale, tous les Reptiles d'une certaine taille, ne mesure pas moins de vingl-deux mètres de long sur dix de large ; elle reçoit le jour à la fois par un vitrage supérieur et par la façade, qui regarde le Sud-Est. Bien éclai- rée, munie d'appareils do chauffage puissants, c'est, sans contredit, la pièce qui présente les meilleures conditions pour conserver les ani- maux. Au fond, le long du mur, se voit un vaste bassin, étendu d'un bout à l'autre de la salle; une plage dallée donne aux Reptiles la faci- lité de s'y mettre à sec ; des cloisons mobiles permettent de diviser l'espace en un certain nombre de compartiments secondaires. En regard, du côté de la façade, s'alignent de grandes cages vitrées, d'un élégant modèle, dans lesquelles les animaux sont visibles aussi bien de l'extérieur que de l'intérieur du bâtiment. Ces cages, comme aussi la plage, sont chauffées par un système de tuyaux à circulation d'eau chaude, qui passent au-dessous, et la température des bassins peut être élevée, en y amenant le contenu de chaudières disposées à cet effet dans leur voisinage. Sur la plage se trouve la série des Crocodiles et des Tortues, une des plus riches que l'on ait jusqu'ici rassemblée. Les cages vitrées ren- ferment les Serpents non venimeux, en particulier les grosses espèces : Boas, Pythons, etc., avec un certam nombre de Lézards, plusieurs de grande taille : Varans, Sauvegardes, Iguanes. Quelques cages volantes, placées contre les paities libres des murailles, donnent la facilité, si les circonstances le réclament, de mettre sous les yeux du public de petits Reptiles, appartenant à ces deux derniers groupes, surtout celui des Serpents. Dans la salle des Venimeux existe une suite de cages destinées à recevoir ces dangereux Ophidiens. Elles sont moins spacieuses que celles de la grande salle, ces Reptiles étant d'ordinaire de taille moyenne ou petite; une circulation d'eau chaude, indépendante du service général, permet de les maintenir à une température convenable. Des grillages métalliques doublent les glaces, pour prévenir tout accident, et des cloisons mobiles permettent aux gardiens d'isoler les animaux dans une partie de la cage, pendant que Ton arrange et nettoie l'autre partie. Devant l'une des fenêtres est disposé un meuble bas, à dessus vitré, divisé en compartiments, il contient différents petits Batraciens : Crapauds, Salamandres. Un bassin adossé à la muraille en face des cages reçoit des Tortues aquatiques des pays tempérés. Les aquariums, au nombre de treize, placés dans la salle en retour, sont suceptibles d'être divisés pour multiplier l'espace, car il est indis- pensable, dans la plupart des cas, de séparer soigneusement par espèces ces animaux aquatiques, excessivement voraces et qui s'entre-dévorent les uns les autres ; souvent môme, de crainte d'acci- dents, les différents individus d'une espèce, si elle est rare et pré- EXTRAITS ET ANALYSES. 267 cieuse. doivent être isolés chacun dans un comparliment spécial, tels sont les grandes Salamandres du Japon, les Protoplères. Ces aqua- riums, très vastes et abondamment fournis d'eau, ont e'té surtout construits en vue de la conservation des Batraciens : Grenouilles, Salamandres, etc., qui trouvent là des conditions si favorables que bon nombre d'entre eux s'y reproduisent habituellement. Quelques-uns contiennent des rcpre'sentants de la classe des Poissons, mais en petit nombre, TinstEillation n'e'tant pas, à beaucoup près, assez étendue pour permettre encore de développer cette partie du service. On a, depuis quelques années, mis dans un des aquariums un système de chauffage au gaz placé dans l'eau même, les résultats en sont assez satisfaisants. Des étagères supportent de petits aquariums, où se voient des Salamandres terrestres et aquatiques, celles particulièrement des environs de Paris pour mettre sous les yeux du public chaque différente espèce isolée. Enfin deux grandes vasques, le long du mur en face, logent aussi quelques Poissons, dépose's souvent là, en réserve, pour servir de pâture à d'autres animaux de la Ménagerie, dans l'une cependant ont été longtemps installés deux Silures du Danube. La salle d'entre'e, dans laquelle nous nous trouvons ramenés, de même dimension que celle des Venimeux, présente du côté des fenêtres une série de petites cages sur deux rangs superposés, dans lesquelles prennent place de petites espèces appartenant aussi bien aux Tortues qu'aux Lézards, aux Serpents et même aux Batraciens. Une grande cage centrale, qui, par suite de sa situation, se trouve dans l'ombre, contient d'ordinaire des Crapauds communs, que l'on cherche toujours à rassembler en nombre, beaucoup de Reptiles affec- tionnant ce genre de nourriture. Ces cages sont convenables pour recevoir particulièrement les animaux de nos climats ou des espèces serai- aquatiques, qui ne réclament pas une trop haute température, il est vrai qu'orientées au Sud-Ouest, elles reçoivent le soleil pendant une grande partie de la journée et se trouvent, sous ce rapport, dans une excellente situation ; on y a, de plus, récemment installé un système de tuyaux à eau bouillante, qui chauffe directement les cages intérieures. Bien que la Ménagerie des Reptiles soit relativement vaste et, sans contredit, l'une des mieux comprises en ce genre, réalisée jusqu'à ce jour, elle est loin d'être suffisante au point de vue surtout de l'espace, trop restreint eu égard au nombre de sujets qu'elle renferme. Souvent on est obligé de réunir différentes sortes d'animaux dans une même cage, ce qui n'est pas sans inconvénients graves. Tout d'abord, et bien qu'on s'efforce de combiner les choses au mieux, les accidents ne 268 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLLMATATION. sont malheureusement pas rares et les diverses espèces se blessent ou s'entre-dévorent encore trop fréquemment. En second lieu, cette col- lection, destinée avant tout à l'instruction du public, ne remplit ainsi qu'imparfaitement son but, les e'tiquettes multiples, placées sur une même cage, laissant dans le doute, quant aux individus auxquels chacune d'elles doit être rapportée. Le présent livre pourrait, dans une certaine mesure, lever celte dernière difficulté, s'il permet aux personnes étrangères à cette partie des Sciences naturelles de s'initier aux études herpétologiques en consultant les descriptions sommaires données des espèces les plus intéressantes et que la Ménagerie renferme le plus habituellement ; il ne serait pas possible, en effet, sans sortir des limites d'un ouvrage tel que celui-ci, de faire connaître toutes celles qui y ont été vues. On trouvera d'ailleurs plus loin la liste générale des Reptiles et Batraciens observés jusqu'à ce jour à la Ménagerie ; elle permettra de juger quelle importance scientifique présente cette partie des services du Muséum d'Histoire naturelle. Les animaux, dont il doit êLre ici question, appartiennent à ces deux classes de Vertébrés à sang froid. Dans la première, celle des Reptiles, la peau est écailleuse, elle est nue chez les Batraciens. Ceux-là com- prennent à leur tour quatre groupes : Crocodiles, Tortues, Lézards et Serpents, La seconde en comprend trois : Peroméles, Anoures ou Gre- nouilles, Urodèles ou Salamandres. Cette division naturelle est celle que nous suivrons, il eût peut-être été préférable d'adopter un ordre, si l'on peut dire topographique, en parlant de chaque animal d'après sa place dans chacune des cages en en suivant la série, mais la chose est impraticable; le renouvellement continu des sujets par les décès et les entrées journalières, rend par force tout arrangement provisoire et le nouvel arrivant déplace un hôte plus ancien, si les circonstances l'exigent. Les étiquettes placées sur les cages concordant avec la nomenclature ici adoptée, permettront, j'espère, au lecteur de trouver sans trop de peine, les renseignements qui peuvent l'intéresser. En terminant, je ferai observer que les noms scientifiques latins sont ceux auxquels il faut de préférence s'attacher dans les recherches, les noms vulgaires, qui, pour obéir à l'usage et donner aussi certaines facilités, les accompagnent, sont moins précis, variant avec les pays, avec les auteurs. On a adopté pour ces noms vulgaires, chaque fois que la chose a été possible, ceux donnés par les anciens naturalistes, lesquels noms, dans bien des cas, sont encore usités dans le langage courant ; souvent j'ai pris les dénominations françaises de l'Erpéto- logie générale, ce qui présente l'avantage de conserver trace de la nomenclature de Duméril et Bibron, suivant laquelle est encore classée notre collection publique et qu'il est utile, pour celte rai- son, de respecter dans une certaine limite au Muséum : il a fallu EXTRAITS ET ANALYSES. 269 enfin se contenter parfois de traduire simplement en français le nom latin (1). Au Muséum, juillet 1897. LÉON Vaillant. X ExpÉRiENGKS d'Acclimatation végétale faites au Jardin BOTANIQUE DE TOULOUSE (2) par le Dr D. Clos, Correspondant de l'Institut. Les écoles de botanique^ champs d'e.ssais de naturalisattons. L'introduction en Europe des végétaux des autres régions du globe et surtout des régions chaudes acquiert chaque année de plus fortes proportions. Nos jardins et nos parcs, en présence de ces incessantes nouveautés n'ont plus que l'embarras du choix et s'enrichissent à l'envi, au grand profit de la diversité du paysage et du développement du sens esthétique. Dans ce mouvement la plante herbacée domine (3), mais l'arbuste et l'arbre ont à ce point de vue une toute autre impor- tance. Il convient donc de viser sans relâche à augmenter dans la mesure du possible le bilan des espèces ligueuses. Les Jardins botaniques sont naturellement désignés pour accueillir ces nouveautés et les soumettre à l'épreuve. Aussi est-ce une de nos constantes préoccupations à l'établissement toulousain. Toutefois, selon l'ob- servation de M. le professeur Emery, il ne faut pas espérer voir (1) Préface du Guide à la 3Iénagerie des Reptiles, récemment publié par les soins de M. le professeur Léon Vaillant. (2) Extrait d'une notice intitulée : L'Ecole botanique du Jardin des Plantes de Toulouse et publiée par le D^ D. Clos dans les Mémoires de l'Académie des sciences, inscriptions et belles lettres de Toulouse, 9^ série, tome IX, 1897. (3) L'agriculture peut espérer trouver parfois des ressources nouvelles en certaines d'entre elles. C'est ainsi que parmi les dix-sept espèces d'Astragales cultivées à l'Ecole, l'une d'elles, l'Astragale en faux [Astragalus falcatus de Lamarck), vivace, originaire de Russie, et sur laquelle on avait attiré mon attention, m'a paru otfrir la plupart des conditions réclamées pour la production d'un bon fourrage (là où la Grande luzerne ne réussit pas), et qu'à mon insti- gation elle est en ce moment l'objet de quelques essais dont il faut attendre les résultats pour asseoir un jugement définitif. Mais il n'est pas hors de propos de rappeler que déjà dès 1802, de CandoUe, dans son Astragalogia, constatait la tendance à la naturalisation de celte espèce A' Astragalus en ces termes : « He- perlus circa Parisiis, ubi probabiliter ex Horlo plantarum elapsus, p. 142. • (Voir à ce sujet une note insérée au n" d'août 1895 de la Revue des Sciences na- turelles appliquées, Bulletin de la Société nationale d'Acclimatation.) 270 BULLETIN I)E LA SUCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. l'arbre des contrées equaloriales, qui consent à vivre dans quelques parties de l'Europe, y prendre la taille du pays natal; il restera à l'ctat d'arbuste, car ce n'est qu'à quelques melres au-dessus du sol qu'il rencontrera le climat analogue à celui qui règne à 20 ou 30 mètres de hauteur dans la région d'oii vient l'espèce (1). A. — Naturalisation d'espèces ligneuses. L'Ame'rique du Nord , surtout par les Etals-l'nis , la Chine et le Japon, ont déjà doté nos jardins d'Europe tempe'rée d'un assez grand nombre d'arbres et d'arbustes résistants, soit très décoratifs, soit aux fruits alimentaires. On en doit aussi quelques-uns au Chili et au Pérou. Mais il est une grande contrée, l'Australie avec la Tasmanie et la Nouvelle-Zélande, dont la végétation ligneuse, d'un caractère tout spe'cial, frappait d'étonnement les premiers voyageurs qui les ont par- courues. Or, le climat de ces régions, abstraction faite de l'inverse des saisons, n'est pas sans rapport avec celui de la France, y permettant à l'agriculture une large extension, notamment pour la production soit du Blé, laquelle s'y élève aujourd'hui à plusieurs millions d'hectolitres, soit de la Vigne, soit des pâturages ; nos arbres fruitiers, nos légumes réussissent à merveille autour de Sidney et de Melbourne (2). Pourquoi, si l'Australie est naturellement dénudée de tout produit alimentaire de quelque valeur, ne pourrions-nous pas au moins enrichir nos cultures de ces formes étranges, Acacias vrais à phyllodes, Eucalyptus, et de tant d'autres élégantes Myrtacc'es, ainsi que de Protéacées^ Epacridées, Diosmées, Casuarinées, etc., dont le mélange avec notre flore arborescente et arbustive européenne produirait de si heureux efifets de contraste? L'Algérie, l'Espagne et l'Italie se sont montrées pour elles des terres hospitalières; mais la France a été moins privi- légiée, et ce n'est guère que sur le littoral de la Provence, de Toulon à Vintimille, que les plantes de l'Australie méridionale, de la Tasmanie, de la Nouvelle-Zélande trouvent les conditions requises pour leur développement, favorables surtout entre Fréjus et Antibes. C'est aux portes de cette dernière que prit naissance, en 1856, la Villa Thuret, destinée par son propriétaire, Gustave Thuret, à devenir, suivant l'expression de M. Henry de Vilmorin, une sorte de Musée végétal. Léguée en 1877 par M"'*^ Henry Thuret à l'Etat, elle a acquis une importance considérable, au double point de vue de la naturalisation et de travaux divers, sous le titre de Laboratoire d'Enseignement supérieur, et grâce à la savante et féconde direction du botaniste éminent Charles Naudin, membre de l'Institut. Cette impulsion s'est rapidement répandue, transformant eu maintes localités l'aspect de (1) La vie végétale, p. 4ol. (2) Voir L'Horticulture dans la Nouvelle-Galles du Sied, par MM. Bois et Gibault, Journ. Soc. nat. d'' Horticulture de France, 1897, p. 58 el suiv. EXTRAITS ET ANALYSES. 271 nos cotes medilcrranéennes. Faut-il donc renoncer à tout espoir de voir notre Sud- Ouest 5 jamais ferme à une partie de ces formes nouvelles si propres à régénérer nos jardins paysagers? Ce n'est pas qu'on n'ait cherché de bonne heure les moyens de vaincre, si possible, cette résistance des plantes exotiques plu?; ou moins frileuses et do les forcer à s'adapter à des con- ditions climate'riques un peu difife'rentes de celles du pays natal. Deux opinions à cet égard ont eu cours dans les premières anne'es de ce siècle. Pour les uns, il fallait éloigner ces plantes peu à peu de leur patrie avec stations plus ou moins prolongées dans des régions se rapprochant par degre's successifs du climat qui leur est destiné; pour les autres, certains végétaux introduits et cultivés dans un pays s'y adapteraient mieux d'année en année par une modifica- tion lento de leur organisation, qualifiée d'acclimatement. Encore, en 1859, un botaniste éminent, le professeur Edouard Morren, de Liège, conseillait d'appliquer ce procodé à un très joli arbuste du Chili aux fruits excellents, Eugenia JJgni Hook. [Belgique horticole de l'anue'e 1897, p. 95 et 96.) Or, ni l'une ni l'autre de ces prévisions ne s'est trouvée réalisée par la pratique. Les exemples abondent comme preuves de l'impossibilité' d'une telle acclimatation pour les plantes ligneuses. Les limites de l'Olivier en France n'ont pas varie'. Tout le monde sait qu'aujourd'hui, comme à l'e'poque de son introduction, l'Oranger ne supporte guère des froids au-dessous de 5^ ; que le Ricin ou Palma- Qhri&ti. arborescent en Algérie, est d'une végétation dans nos parcs si vigoureuse qu'il figure un arbre à la fin de l'été, y meurt dès les premières gelées, mais en laissant tomber des graines qui germent sur place ; que même tel arbuste, le Garou {Daphne Gnidium L.), spontané et abondant au nord du département de l'Aude, sur le versant sud de la Montagne noire, ne franchit pas la crête peu étendue de celle-ci qui la sépare de son versant nord du département du Tarn, où cette jolie Thyme'lée n'a jamais montré un seul de ses représentants à l'état spontané ; et ces sortes d'exemples pourraient se multiplier à plaisir. Les tentatives faites à Toulouse, en 1808, en vue d'accli- mater le Cotonnier herbacé devaient échouer, car la plante y fleurit tard, et, contrariée dans sa végétation par les pluies d'automne, n'y trouve pas la chaleur suffisante au développement des fruits et à la maturation des graines. Mais si, en thèse générale, la théorie de l'acclimatation des essences ligneuses doit rentrer dans les utopies, l'horticulture a conquis de nos jours tant et de si ingénieux moyens d'action sur les plantes, qu'elle parvient parfois à en modifier, dans une certaine limite, la manière de vivre, ici fortifiant ou affaiblissant l'organisme, là retardant ou accé- lérant les périodes soit de la végétation, soit et surtout de la floraison et de la fructification. L'expérience a de plus de'montré qu'il n'est pas rare, parmi les 272 BULLETIN DE LA. SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. nombreux individus d'une espèce, d'en voir de moins accessibles que la majorité à l'action des basses températures, d'où l'on peut conjecturer qu'une judicieuse sélection, poursuivie durant une série de générations, amènerait sans doute l'obtention de races un peu moins frileuses que le type. Malheureusement, rien dans l'organisation ne peut en ge'néral faire prévoir ni expliquer cette résistance au froid, propriété indivi- duelle de la vie résidant sans doute dans le protoplasma. Il ne saurait être ici question de l'hybridation, source à notre e'poque de tant d'importants résultats, notamment pour la viticulture française, donnant généralement des produits plus rustiques et d'une plus faible adaptation à tel ou tel sol, mais en général aussi trop peu stables et tendant par fe'condation à faire retour au type des ascendants. Dès lors, à part quelques rares exceptions, tout se réduit à supputer, d'après les effets produits par les hivers d'une plus ou moins longue série d'années, les chances de vie ou de mort d'un certain nombre d'espèces exotiques qu'il y aurait intérêt à conserver dans la région du Sud-Ouest, dont Toulouse est le centre (1). Il ne faut pas faire grand fonds sur les représentants des contre'es tropicales ; mais il est acquis que ceux de la Chine et du Japon ne peuvent être juge's à cet e'gard qu'après essais. Ne sait-on pas que YAucuba et le Paulownia du Japon, d'abord condamnés à vivre en serre, y dépe'rissaient, ne récupérant qu'à l'air libre leur vigueur naturelle et la plénitude du développement? De deux arbres fruitiers de môme origine, l'un, le Bibacier, ou Néflier du Japon, de floraison hivernale, voit ses organes floraux trop fréquemment de'truits par nos gelées et ne donne à Toulouse qu'exceptionnellement des fruits ; l'autre, le Diospyros Si Tche, Kaki ou Plaqueminier, avec ses variétés (Costata, Mazeli, etc.), s'y comporte bien et est fructifère. A son tour, le Juju- bier d'Afrique consent à vivre et à fleurir, sans l'intervention d'abris, sous notre climat, mais il n'y mûrit ses fruits que dans les étés ex- ceptionnellement chauds. L'Olivier y végète, mais n'y fructifie jamais, faute de la forte somme de degrés de chaleur que sa fructification réclame. J'ai donc pu croire qu'il y aurait un double intérêt, à la fois scien- tifique et pratique, à soumettre à l'épreuve de la re'sistance aux froids de notre climat, un choix d'espèces étrangères ligneuses. A cet effet, depuis plusieurs anne'es, on multiplie au Jardin botanique un cer- tain nombre d'arbres ou arbustes exotiques méritants, dont on met en pleine terre et sans abris des représentants sacrifiés d'avance. (1) Cette région, que M. Félix Sahut a qualifiée de toulousaine^ comprend les pays situés au nord de la région pyrénéenne et à l'est de la région littorale, et s'étend sur une partie des départements des Hautes-Pyrénées et de l'Ariège, sur la plus grande partie de la Haute-Garonne, de la Dordogne et du Lot, et sur la totalité des départements du Gers, du Lot-et-Garonne, du Tarn et du Tarn-el-Garonne. EXTRAITS ET ANALYSES. 273 En 1891, je signalais dans la Revue des Sciences naturelles appliquées {Bulletin de la Société d' Acclimatation) y pages G81-691, les effets du rude hiver 1890-1891 sur les piaules de l'Ecole de botanique de Toulouse. 11 est probable que de longtemps on ne reverra d'hiver aussi clément • pour les plantes exotiques frileuses que celui de 1896-1897. Mais il n'a pu être supporte', en fait de plantes grasses, par les Euphorbes charnues, les .Joubarbes frutescences, telles les Sempervivum arboreum, glutinosum, tortuosum ; ni dans d'autres groupes, par les Myrtacées australiennes ci- après : HaTiea pectinata, Grevillea Theïemannii^ Mela- leuca leucadendron, Metrosideros tomentosa, Eucalyptus macrorhyncha^ Metrosideros tomentosa^ Callistemon pinifolium^ Gijtharexylon cyanocar- pum, Streptosolen Jamesoni, pas plus que par Tecoma capensis^ Mumex lunaria, j compris les Monocotyle'es suivantes : Dracœna reflexa^ Agave vivipara (Mexique), Furcrœa gigantea (Ame'rique me'ridionale). Ont résiste', indépendamment des Lauriers roses : De la Nouvelle-Hollande : Fabricia lœvigata, Melalencahypericifolia, Kunzea cerifera^ les Eucalyptus &unnii, alp/na, urnigera; les Callistemon acerosum, lanceolatt^n, sanguineum, rugulosum; les Acacia dealbata, retinoides, heterophylla, cultrata^ ixiophylla, Haliea saligna, Myoporum punctatum^ Capraria salicifolia, (Jorrea viridi/lora, Westringia rosmarini- formis, Pistacia palœstina. De la Nouvelle-Zélande : Griselinia littoralis^ les Yeronica salicifolia, lindleyana et speclosa, Edwarsia microphylla, Coprosma lucida. Des Canaries : Webbia platysepala^ Laoandula abrotanoides, Cedronella triphylla, Phyllis nobla, Sideritis cauarieusis . De Madère : Qlobularia salicina, Ilex Perado, I. œstivalis. Du Cap : Leucadendron tortuni, Celastnis muUiflorus. Malva capensis, Leonitis leonurus, Phygelîus capensis, Agathœa amelloides , Garuleum pinnatifidum, Chrysocoma coma-aurea, les Mesambrianthemum violaceum, barbatum, intonsum, uncinatum. De l'Amérique méridionale : Solanumjasminoides, Abutilonvexillariim^ Habrotliamnus fascicularis^ Yochroma tubulosum, Psidium cattleyanum, Nicotiana glauca, Eryngium Lasseauxii, Cassia coryfnbosa, Poincinia Gilliesii^ et du Bre'sil en particulier : Eryngium pandanifolium, Abutilon striatmn . Du Chili : les Eugenia JJgnî et apiculata, Azara dentata, Nierenbergia frutescens; les Escallonia rubra et macrantha, les Berberis empetrifoUa et Dartoini, Cestrum Pargui; les Colletia. Du Mexique : Fadyenia macrophylla^ Sedum dendroideum, Ceanothus azureus, Cassia floribunda. Et parmi les Monocotyle'es, trois espèces de Palmiers, les Dattiers commun et des Canaries, le Sabal d'Adanson ; et du genre Aloés, les A. distique et des Barbades; le Pitcairuia ringens, Bromeliace'e. Il faut joindre à cette liste les Millepertuis d'Egypte et des Baléare?;, Bull. Soc. nat. Accl. Fr. 1898. — 19. 274 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. le Poivrier d'Amérique [Schinus molle) qui, d'après M. F. Sahiit, no supporte guère une température inférieure à deux degrés, le Ceanothe d'Afrique. A la suite des hivers ordinaires, il n'est pas rare de voir dans les Jardins botaniques où ont lieu les essais de naturalisation, quelques arbres ou arbustes des contrées chaudes, laisse's en pleine terre, sans abri, atteints par les gelées dans toutes leurs parties aériennes, repousser du pied à l'e'te', remplaçant ainsi par une cepëe plus ou moins nombreuse la tige première. Naturellement, les exemples d^ ce genre se sont montrés cette anne'e dans notre Ecole, plus nombreux que de coutume. Je citerai les suivants : Verberina crocata, Mikania cordifolia (Amérique me'ridionale), Bruns- feUia latifoUa (Bre'sil), JAhonia flonbunda (Bre'sil), Barleria cristata (Inde), les Cestrum Parqui (Chili), C roseum (Mexique), ('. aurantiacum (Guatemala), Tecoma australis, Melianthus minor (Cap), Abutilon vexil- larium (Ame'rique me'ridionale), les Fuchsia globosa, coccinea^ gracUis, Spamnannia palmata, Erythrina crista-galli (Brésil), Eugenia australis, Eucalyptus goniocalyx, citriodora, rostrata, resinifera, Beckea virgata, Curculigo sumatrana^ Phyllanthus mucronatus ; les Rhus tomentosa et cuneifoUa du Cap. De deux pieds de Buddleia brasiliensis et de Cordyline reflexa, de Sparrmannia africana, de Belargonium capUatum, l'un est mort, l'autre repart du pied. Jamais jusqu'ici les nombreuses espèces de Pelargonium livrées sans défense à l'action de l'hiver, n'avaient résisté; ont été épargnés exceptionnellement cette année, les P. radula, quercifolium, odoratis- simum^ malvœfoUum^ scabrum, gibbosum : ont succombé les P. zonale, inquinans^ incisum^ papilionaceum , vitifoliicm, grandiflorum, acetosuniy peltatum, hedercsfolium, monstruosum. Le Rhapis flabellifonms, cru mort, commence à montrer les feuilles vertes d'un bourgeon terminal. Cette sorte de transformation de l'arbre et de l'arbuste en plante vivace sera puissamment facilitée si on prend le soin d'en buter le tronc vers la fin de l'automne. Il est très probable aussi que plusieurs essences d'arbres supporte- raient le climat de notre Sud-Ouest et pourraient même y prendre un grand développement, si, comme on le fait pour le Sterculia à feuilles de Platane de la Chine, on avait soin de les protéger à l'état jeune, ne les livrant à la pleine terre que lorsque leur bois a pris une sutfisante consistance. Il eu sera peut-être ainsi de quelques-unes de ces cent trente espèces à.' Eucalyptus que voit naître l' Australie. On a déjà reconnu comme doués de plus de rusticité que 1'^. glohulus, les E. polyanihema, Guniiii; bien plus, V HH. viminalis, dans la Haute- Italie, a survécu à des froids de — 9 et — 10^ centigrades, et l'E. pauciflora, originaire des montagnes assez élevées du sud de l'Australie EXTRAITS ET ANALYSES. 275 et de la Tasmanie, a résisté, d'après Ch. Naudin, à des gelées de — 10 à 12° centigrades [Manuel de V Acclimate w , pag. 265-270-271). Enfin, plusieurs espèces de ce beau genre, les TH. cosmophylla, cocci- fera, cornigera, cordata^ piperita, rostrata^ obliqua^ urnigera, se sont ac- commodées du climat de l'Irlande à Q.2>i?,i\Q^ oWSin [Gardeners Chronicle]. B. — Naturalisation d'espèces herbacées. Les plantes herbacées d'un tempérament plus flexible que les ligneuses, se prêtent beaucoup mieux, par cela même, aux modifications que l'homme a intérêt à en obtenir. Aussi ses efforts continus depuis de longues années pour ame'liorer, par tous les moyens possibles et à l'aide d'une sélection inconsciente ou raisonne'e, les vége'taux d'origine e'tangère qui lui ont parus utiles, ont-ils déterminé l'appari- tion des varie'tés, bientôt fixées et devenues des races ; il va sans cesse les perfectionnant et on peut les dire acclimatées, mais à la condition expresse de les entourer toujours de nouveaux soins, car, livre'es à elles-mêmes, elles ne tarderaient pas à dégénérer, à retourner au type, à disparaître. Il transforme à son gré et pour son plaisir, la plante annuelle en vivace (Réséda odorant) et, en floricuUure, il traite comme annuelles des espèces par nature vivaces ; mais il ^ de la peine à plier à ses caprices ou seulement à faire vivre en captivité' dans les jardins de nos villes un petit groupe de rudes montagnardes : Antirrhinum azarina^ Rhododendron ferrugineum, Arnica montana, Gentiana lutea, Alyssum pyrenaicum, ne peuvent supporter le climat toulousain, trop influencées peut-être par notre vent d'Autan (Sud-Est), tandis qu'on voit prospérer Horminum pyrenaicum, Ramondia pyrenaica, Géranium pyrenaicum, Aster pyreneus, Erinus alpinus, de nombreuses espèces de Saxifrages, telles que les Saxifraga umbrosa, rotundifolia, geum, geraniodes, cœspitosa, afugœfolia^ aizoon. C'est grâcé à la protection due aux couches superficielles du sol contre les extrêmes de température que l'amateur peut conserver un assez grand nombre de plantes vivaces des régions chaudes, telles que Sphacele subhastata, du Chili, Lepechinia spicata^ du Mexique, Withania somnifera, de l'Inde et nombre d'espèces de Solanum, notam- ment les S. auriculatum, de Madagascar, S- botiarieuse, de Buenos Aires. S. sysimbriifolium, du Brésil, S. stramoniœfoUum^ de l'Inde, etc., et même de plantes sous-frutescentes dont une bonne portion de la tige reste implantée dans le sol, telles que les Dianella cœrulea, divaricata et longifolia, espèces d'Australie. Mais de ce que certaines plantes vivaces exotiques émettront en tous sens des rameaux hypogés de propagation, elles ne pourront être dites naturalisées, si elles ne se reproduisent spontanément de graines, telles que la Passiflora lutea et cœrulea, Menispermiim canadense, Tla- 276 BULLETIN DE SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. diantha duMa, Rehmannia chinensis, SoUdago graminifolia^ les Polygonum^ cuspidatum et sakhalinense, Teucrium pyrenaicum, Stachys alpina, etc. X Le Jardin botanique de Saint-Pétersbourg. Le Jardin botanique de Saint-Pétersbourg est à la fois un établis- sement d'ordre scientifique et d'application technique. Il est situé sur une des îles de la Neva, l'île des Apothicaires, entre la Grande Neva et la Karporka. Cet établissement a ëte' créé en 1823 sur l'emplacement de l'ancien Jardin botanique médical créé par Pierre le Grand en 1714. Son prin- cipal objet est de concourir au développement des connaisseurs bota- niques el à l'acclimatation des plantes provenant d'autres pays. Le Jardin botanique occupe une surface d'environ 12 hectares, une partie est couverte de grandes et belles serres. Dans le jardin en plein air, les plantes sont groupées en massifs variés, en plates-bandes ou en corbeilles disséminées sur des pelouses, de manière à former un jardin d'agrément en même temps que d'instruclion. Chaque arbre ou plante porte d'ailleurs l'étiquette de son nom en latin et en russe. On évalue à 75,000 le nombre de plantes réunies au Jardin, elles appar- tiennent à 25,000 espèces environ. Le Jardin possède un herbier en 6,000 volumes qui est considéré comme un des plus riches du monde. Sa bibliothèque renferme en- viron 12,000 ouvrages en 25,000 volumes. Un musée botanique divisé en trois parties (dendrologie, pomologie, paléontologie) ne renferme pas moins de 40,000 échantillons. Un laboratoire de physiologie végé- tale fait partie de l'établissement. Le Ministre de TAgriculture a créé, comme annexe au Jardin bota- nique, une école pratique de jardinage dont les élèves ont les élé- ments les plus précieux pour leur instruction horticole. Aussi ces élèves sont recherchés, surtout par les municipalités de l'Empire (1). H. Sagnier. (1) Bulletin du Ministère de l'AgricultXire, mai 1898. REVUE DES CULTURES COLONIALES Directeur: A. MILHE-POUTINGON, Docteur en droit, Directeur du Service de l'Afrique et des Antilles à V Union coloniale française, Vice-Président de la Section coloniale à la Société Nationale d'Acclimatation de France. Créée sous les auspices de l'Union coloniale française, cette nouvelle publication a pour but défaire mieux connaître, en France, les diverses cultures et les productions coloniales ; de vulgariser dans les colonies les meilleurs procédés de culture, d'y provoquer l'introduction des meilleures variétés des plantes françaises actuellement cultivées et l'acclimatation de plantes nouvelles. COMITÉ DE PATRONAGE DE LA REVUE MM. Le prince D'ARENBERG, député, vice-président du Groupe colonial, président du r,omité de l'Afrique française. Le commandant BINGER, ancien gouverneur de la Côte- d'Ivoire, directeur des affaires de l'Afrique au Ministère des Colonies. PAUL BOURDE, ancien directeur des contrôles et de l'agri- culture en Tunisie, ancien secrétaire général à Madagascar. BUREAU, professeur de botanique au Muséum. J. CHAILUEY-BERT, professeur à l'Ecole des Sciences poli- tiques, secrétaire général de ['Union coloniale française. CHARLES-ROUX, ancien député, membre du Conseil supérieur du commerce, vice-président du Groupe colonial. CORNU, professeur de culture au Muséum. OEHERAIN, membre de l'Institut, professeur de chimie agri- cole au Muséum età l'Ecole d'agriculture de Gygnon. MARCEL DUBOIS, professeur de géographie coloniale à l'Uni- veisité de Paris. DYBOWSKY, directeur de l agriculture et du commerce en Tunis e, prof 'sseur de cultures coloniales à l'Insiitui natio- nal agronomique. H. FLAHAUT , professeur de botanique à l'Université de Montpellier. LOUIS GRANDEAU. directeur de la Station aç/ronomique de l'Est, rédacteur en chef du Journal d'Agriculture pratique. 3RANDIDIER, membre de l'Institut. MM. Baron Jules DE GUERNE, secrétaire général de la Société na- tionale d'Acclimatation. Dr HECKEL, professeur à la Faculté des Sciences, directeur de l'Institut colonial de Marseille. LE MYRE DE VILERS, député de la Cochinchine, président de la Société nationale d'Acclimatation. Mgr LEROY, supérieur général des Missionnaires du Sl-Esprit. MILNE-EDWARDS, membre de l'Institut, directeur du Muséum. CH. NAUDIN, membre de l'Institut. OLIVIER, docteur ès sciences, directeur de la Bévue gé- nérale des Sciences pures et appliquées. PRILL1EUX, sénateur, inspectetir général de l'Enseignement aïricole, pi ofes'- de Botanique à l'Institut National agronome POISSON, assistant au Muséum, RISLER, directeur de l'Institut national agronomique. RIVIÈRE, ancien prés dent de laSof-iété d Agriculture d'Alger dire- leur du Jardin d'essai du Hamma D'' TREILLE, ancien inspecteur en chef du service de santé des Colonies. VIALA, professeur de viticulture à l'Institut national agrono- mique, directeur de la Bévue de Viticulture. H. DE VILMORIN, membre de la Société nationale d'Agricul- ture. 20LLA, professeur à l'Ecole d'agriculture de Grignon età l'Ecole des sciences politiques. La Hevue des Cultures coloniales paraît le 5 de chaque mois. Bureaux : 44, rue de la Chaussée d'Antin, Paris. Abonnements : un an : France, 12 francs — recouvré à domicile, 12 fr. 50. — Colonies et Union postale, 15 francs. — Payement d'avance. PEINTURE IGNIFUGE DITE ANTI-PÉTROLEUR Au moment où l'horrible désastre du Bazar de la Charité est encore présent a toutes les mé- moires, il convient de signaler la découverte récente, par M. de Preux, d'un produit désigné sous le nom ù'Anti-Pétroleur et qui rend les objets traités par lui absolument incombustibles. M. de Preux a fait, il y a peu de temps, à Saultain, près Valenciennes, des expériences déci- sives à ce sujet. Deux baraques de bois blanc recouvertes de carton bitumé et tendues de jute, l'une imprégnée du nouveau produit, l'autre à l'état naturel, ont été remplies de copeaux imbibés â'éther. Les copeaux ayant été allumés, la baraque qui avait subi la préparation resta complètement intacte, tandis que l'autre était détruite en quelques instants. Mis en présence d'un chalumeau dégageant 1,200 degrés de chaleur, le bois n'est percé qu'après 25 minutes et le carton bitumé se contracte, mais ne brûle pas et ne se fond pas. Les objets en celluloïd ne s'enflamment pas lors- qu'ils ont été traités par VAnti-Pétroleur. Après les mêmes expériences faites en grand à l'Exposition de Bruxelles, au parc du Giaquan- [jtenaire, le Jury international a accordé, à l'unanimité avec ses plus sincères félicitations, à VAnti-Pétroleur, un diplôme de médaille d'or, la plus haute récompense dont il pouvait disposer. Le produit inventé par M. de Preux rendra d'immenses services. Il est déjà employé dans un uertain nombre d'usines et il a été adopté par la Compagnie du Nord qui s'en sert dans ses lépôts de machines. ^ S'adresser pour les commandes et les renseignements au régisseur du château de la Villette i Saultain (Nord). Charles NAUDIN Membre de l'Institut (Académie des Sciences) Directeur du laboratoire de botanique de la Villa Thuret, à Antibes ET Le Baron F. Von MUELLER Botaniste du gouvernement anglais à Melbourne MANUEL L'ACGLIMATEUR OU CHOIX DE PLANTES RECOMMANDÉES POUR L'AGRICULTURE, L'INDUSTRIE ET LA MÉDECINE Adaptées aux divers climats de V Europe et des pays tropicaux OUVRAGE PUBLIÉ AUX FRAIS ET SOUS LES AUSPICES DE LA Société nationale d'Acclimatation de France Un volume in-S^ de près de 600 pages avec portrait INTRODUCTION : Considérations générales sur l'acclimatation des plantes ; Aperçu général des genres de plantes auxquels sont empruntées des espèces déjà utilisées ou qui peuvent l'être ; Description sommaire des familles ou groupes naturels auxquels se rattachent la plupart des plantes indiquées dans ce volume ; Noms vulgaires des plantes et synonymes rapportés aux noms botaniques. Enumération par ordre alphabétique des plantes, leurs usages et leur culture, formant un dictionnaire des végétaux à acclimater dans les diverses régions du globe ; Noms des auteurs cités dans le cours de l'ouvrage avec les abréviations usitées. Prix : 7 Francs Pour les Membres de la Société Nationale d'Acclimatation de France, 3 fr. 50 EN VENTE AU SIÈGiï DE LA Société nationale d'Acclimatation de France, 41, Rue de Lille, PARIS. Li Secrétaire Géiéral, gérant, Jules de GUERNE. Versailles. ~ Imprimeries Cerf, 59, rue Duplessii. ndice décimal. 06 81.52 .31.52 BULLETIN DE LA mm m\m mmmm ^ DE FRANCE (Revue des Sciences naturelles appliquées) 45« ANNÉE 1 SOMMAIRE Paul MARGHAL. — VÀ.yddiotus pemieiosus ou Sau-Jose Scale des Etats-Unis. . . . 277 Extraits des procès-verbaux des séances de la Société: 10 Section: Mammifères. - Séance du 21 février 1898 _ .^0 _ Ornilhologie. - Aviculture. - Séance du 28 mars 1898 ^ 30 — Aquiculture. - Séance du 7 mars 1898 40 _ Entomologie. — Séance du 14 mars 1898 - ,50 _ Botanique. - Séance du 15 mars 1898 go - Colonisation. - Séance du 28 février 1898. Extraits de la correspondance K^sais de culture sur le Safran, le Stachys, et l'Igname de Chine, par Paul CHAP- PELLIER. - Mo Ulola et Z^.yp}.us s^nen.u au Jardm des Plantes de Toulouse ^^^^ par CLOS B Extraits et Analyses: ^ EDOU.RD FOA. - Les Eléphants .auveges de l'Afrique Auslrale • • • ^ G. ROCHÈ. — La Culture des mers eu Europe. Ca. iNAUDlN. — La soie au Soudan, ," " * V ' ^' 308 1 MILNE-EDWARS. - Les arbres à GuUa-Percha a la Grande Comore I » «iooiPté ne prend sous sa responsabilité aucune des opinions . émises par fel Tutlurs des articles in^sérés dans le Bulletm. Un numéro 2 francs; P""' -^! "^J^^ f ^" "'^^ ^ AU SIEGE DE LA SOCIÉTÉ NAllONALK D'ACCLmAIAIlON DE FRANCK Jil, RUE DE LILLE, 41 PARIS ET A LA LIBRAIRIE CEBF, 12, RUE SAINTE-ANNE Le Bulletin paraît tous les mois. 0 • H DÉSINFECTANT AITTISEPTÏQXJE Le seul joignant à son Efficacité, scientifiquement démontrée, rimmense avantage de n'être ai Toxique ni Corrosif. Hémostatique et Styptîque puissant. Adopté par les Ecoles Nationales Vétérinaires, le Service de Santé de l'Ajytée, la Préfectui-e de la Seine et la plupart des Services d'Hygiène et de Désinfection des Départemeitts. Reconnu indispensable dans la pratique vétérinaire. Envoi franco sur demande de Rapports scientifiques et Prospectus *. 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Sur demande envoi franco du Catalogne — TELÉPHOH BA V MINIER A LE GAZEUSE^ déclarée d'INTERET PUBLIC r Décret du 7 A vril 1868) BUSSANG ANEMIE, GASTRALGIE, COLIQUES NEPHRÉTQUES, GRAVELLE, ARTHRITISME RECONSTITUANTE.imiiqucedanstouteslesGONVALESGENCES t'ASPJDIOTUS PBRNICIOSUS OU LE SAN JOSE-SCALE DES ÉTATS-UNIS ET LES COCHENILLES D'EUROPE VOISINES VIVANT SUR LES ARBRES FRUITIERS (1) par le Paul MARCHAL, Chef des travaux à la Station entomologique de Paris. Le San Jose-Scale, V Aspidiotiis perniciosus, est actuellement le fléau le plus redoutable qui sévisse aux Etats-Unis sur les arbres fruitiers. Sa présence vient, d'autre part, d'être reconnue en Allemagne sur des fruits de provenance améri- caine : un grand nombre à" Aspidiotus vivants ont été trouvés dans une caisse de poires arrivée d'Amérique à Hambourg, et le Ministre des Finances à Berlin vient de lancer un ordre de prohibition pour empêcher l'entrée dans les ports allemands des fruits frais, des matériaux ayant servi aux emballages et des plantes vivantes de provenance américaine, prohibition fondée sur une enquête officielle conduite par M. le profes- seur Franck (2). L'alarme doit donc être donnée dans tous les pays d'Europe, qui sont exposés à être contaminée par l'importation des fruits ou des jeunes arbres ayant une origine américaine, et le signalement du nouvel ennemi qui menace nos vergers doit être partout répandu. Nous nous attacherons donc, dans les lignes qui vont suivre, à retracer les traits principaux de son histoire, et à signaler les caractères essentiels qui per- mettent de le reconnaître et de le diff'érencier de nos espèces indigènes. (1) Communicatioa faite en Séance générale le 27 mai 1898. (2) L'importation des fruits frais en Allemagne a été interdite au cas seule- ment où ces fruits seraient attaqués par l'Insecte en question. Par contre, est interdite d'une façon absolue l'importation des déchets, ma- tériel d'emballage et de plantes. Cette interdiction ne s'applique pas aux fruits secs. Bull. Soc. nat. Accl. Fr. 189 S. — 20. 278 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ L'ACCLBIATATION, Origine de l'Insecte, marche progressive du fléau. Cet Insecte est apparu, vers 1873, dans la vallée de San José (Californie) et fut décrit pour la première fois, en 1880, par Comstock, qui lui donna le nom significatif de pe7mi- ciosus. On ignore encore quel est le pays d'origine du San Jose-Scale. Peut-être est-il venu d'Australie ; toutefois, bien qu'il ait été signalé dans ce continent, il paraît y être peu répandu et les Australiens sont portés à le considérer comme une espèce d'importation étrangère. Le Japon a été aussi indiqué comme étant son foyer d'origine, et ce qui donne du poids à cette hypothèse, c'est que l'on a rencontré au Japon deux variétés ou sous-espèces deVA. pe^miciosiis [andromelas et aWopunctatiis). De la Californie, qui a été appelée le verger de l'Amérique, et qui exporte ses fruits et ses arbres dans tous les Etats- Unis, le fléau s'est progressivement répandu et a atteint la côte de l'Atlantique. L'Etat de New- Jersey paraît avoir été, dans l'Est, l'un des centres de propagation les plus actifs, et c'est principalement sur certains grands pépiniéristes de cette contrée que retombe la responsabilité de l'invasion du San Jose-Scale dans la partie orientale des Etats-Unis. Description, biologie et évolution. VAspidiotîis 2)fr7iiciosus est un Hémiptère de la famille des Cochenilles [Coccviœ) et de la tribu des Diaspinœ; il se présente sous la forme d'une très petite coquille discoïde, d'un gris cendré, mesurant en moyenne de l'"'",5 à 3'""\ et collée à la surface de l'écorce ; lorsque l'arbre est sérieuse- ment attaqué, les Aspidiotus sont agglomérés en masses compactes, chevauchant les uns sur les autres et formant des croûtes écailleuses que l'on peut enlever facilement avec l'ongle. La petite coquille grise, dont nous venons de parler, présente en son centre un mamelon saillant qui est générale- ment d'un jaune plus ou moins grisâtre; si on la détache de l'écorce à laquelle elle est faiblement adhérente, on trouve logée à son intérieur une petite masse jaune et molle, qui n'est autre chose que l'Insecte séparé de la cuticule et de la sécrétion cireuse qui forment la coquille. Cette propriété que L'ASPIDIOTUS PERNICIOSUS. 279 possède l'Insecte de produire une coquille distincte et séparée de son propre corps et le protégeant extérieurement, cai^ac- térise la tribu des Diaspines à laquelle appartient V Aspidioius pemlciosiis. Les caractères qui précèdent sont faciles à reconnaître ; mais ils peuvent s'appliquer à toute la tribu des Diaspines, et Fifj. I. — Aspidioius per,iiciosus. Brandie contaminée ; à gauche, de grandeur cauireile ; à droite, portion grossie uioutraut des parasites ù divers degrés de développemeut. sont, par cela même, insuffisants pour affirmer la présence de l'espèce qui nous occupe. Sans compter les autres espèces américaines ayant un faciès et des habitudes analogues, nous avons, en efïet, en France, des espèces voisines appartenant à la même tribu et qui s'attaquent aux arbres fruitiers en se présentant avec un aspect extérieur très analogue à celui de VAspldiotits perniciosics. Il est donc utile de poursuivre plus loin l'anah^se, et pour faire connaître l'Insecte d'une façon suffisante, il importe d'en retracer le développement. 280 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATIOxN. Ainsi que Font montré les belles recherches de Howard, de Mariait et de Pergande, auxquels nous em[)runtons la plupart des détails qui suivent, Y Aspidiotus peniiciosus est vivipare, et l'on peut voir par transi)arence au microscope les jeunes larves à l'intérieur du corps de la femelle [rig. 2) ; la con- statation de ce lait, seul, per- mettrait de dilïérencier chez nous l'Insecte américain des espèces indigènes vivant sur les arbres fruitiers et d'affir- mer la présence du redou- table fléau. Chez VAspi'Uoliis , il n'y a point d'œufs d'hiver. C'est la femelle qui hiverne, et, après avoir passé la saison froide, elle atteint sa maturité sexuelle en avril ; elle donne alors naissance à de nom- breuses larves pendant une période de six semaines, met- tant au jour en moyenne neuf à dix petits par vingt-quatre lieures, ce qui fournit environ quatre cents rejetons pour son existence dont le terme ne tarde pas à venir. La larve, lorsqu'elle vient d'éclore, est ovale, de couleur orange pâle; elle présente six pattes et deux antennes mul- tiarticulées. En avant et en dessous, elle porte un bec qui se prolonge en un long suçoir filiforme formé de trois soies. Cette larve est active, et, par ce fait, diffère essentiellement de l'adulte; c'est à ce stade que l'Insecte peut être dispersé d'une façon naturelle, soit par le vent, soit par le transport au moyen d'autres animaux sur lesquels les larves de la Cochenille peuvent accidentellement se fixer. Si aucune cause de dispersion n'intervient, la larve qui se promène à la sur- face de l'écorce de l'arbre ne tarde pas à trouver un endroit favorable et à implanter son long suçoir dans l'écorce ; elle est alors fixée ; peu à peu son corps se contracte et prend une forme circulaire; une sécrétion se produit à la surface du corps sous la forme de filaments de cire blanche d'une grande ténuité, et, progressivement, le corps se recouvre d'un enduit Fifj. 2. — Aspidiotus perniciosus, femelle renfermant un certain nombre de jeunes (t'ortement frrossie). — Le petit trait à droite indicjue la f;randeur naturelle. L'AiîPlDIOTUS PERNICIOSUS. 281 duveteux ; puis les filaments se fusionnent entre eux et ne for- ment plus qu'une couche blanche compacte et lisse qui n'est antre chose que la coquille ; celle-ci, d'abord claire, prend en vieillissant une teinte plus sombre, à l'exception du mamelon central qui reste d'un jaune grisâtre. Douze jours après la naissance, l'Insecte mue pour la première fois et après cette mue, il devient facile, en enlevant la coquille qui le recouvre, de distinguer les sexes qui jusqu'alors pouvaient être con- fondus. Mâles et femelles se montrent alors dépourvus de pattes et d'antennes qui sont totalement disparues ; mais les mâles sont, à ce stade larvaire, plus gros que les femelles et ont deux grands yeux pourpres, tandis que les femelles sont com- plètement aveugles ; il sont en outre pyriformes, les femelles étant discoïdes ; la couleur des deux sexes est alors d'un jaune citron, tandis que l'écaillé ou coquille qui les recouvre est d'un gris souvent mélangé de jaune. A la deuxième mue, la différence entre les deux sexes s'accentue encore bien da- vantage ; cette mue s'effectue un peu plus tôt pour le mâle que pour la femelle : elle a lieu dix-huit jours après la nais- sance pour le premier et vingt jours après pour la seconde; à partir de cette mue, il devient possible de reconnaître les sexes par le simple examen extérieur de la coquille ; celle-ci prend, en effet, chez le mâle une forme ovalaire allongée, tandis qu'elle reste discoïde chez la femelle ; à l'intérieur de la coquille, l'Insecte mâle commence en outre à laisser voir des rudiments de pattes, d'antennes et d'ailes, tandis que la femelle conserve sa forme sacculaire primitive. Vingt jours après la naissance, l'Insecte mâle subit une deu- xième mueet arrive ainsi au stade nymphal. Cette nymphe est jaune, avec des antennes, des pattes, des ailes repliées contre le corps, mais bien développées; elle présente à son extrémité postérieure un stylet aussi long que les tibias postérieurs. L'éclosion de l'Insecte parfait du sexe mâle a lieu quatre à six jours plus tard, soit vingt-quatre à vingt-six jours après la naissance ; il ressemble à une petite mouche orange pourvue de deux longues antennes, de deux ailes irisées^ présentant chacune une nervure bifurquée, de six pattes et d'un long stylet anal ; sur la tête se trouvent, en outre, deux gros yeux pourprés {fig. 5). Tandis que les mâles éprouvent ces changements profonds, qui les transforment en Insectes actifs et mobiles, les femelles 282 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. conservent leur forme de sac aplati et restent invariablement fixées au même endroit sous la coquille qui les abrite ; trente jours après la naissance, elles ont atteint toute leur taille et l'on peut voir par transparence les jeunes qui se trouvent dans leur corps; une dizaine de jours après, elles commencent à mettre les larves au jour. Le nombre des générations qui se succèdent dans une année à Washington est de quatre et il peut y avoir une cinquième génération partielle. Etant donné Fig. 3. — Aspidiotus pcrniciosus, mâle adulte, fortement grossi. que chaque femelle produit en moyenne 400 rejetons, on arrive ainsi au chiffre fantastique de 1,608,040,200 individus pour la descendance d'une seule femelle au bout de l'année (Howard). Il va sans dire que ce chiffre n'est jamais atteint, et loin de là, en raison des causes de destruction multiples qui assaillent les jeunes ; mais il n'en est pas moins vrai que la prolixité de l'espèce est énorme et l'on comprend sans peine comment un Insecte aussi petit arrive , en peu d'années , à envahir complètement un arbre et à le faire périr. Les rameaux peuvent être à ce point couverts par VAspi- diotus perniciosus qu'ils paraissent revêtus d'une couche de cendres (voir la fig. /). Les Insectes se fixent non seulement sur les rameaux, mais encore sur les feuilles et les fruits ; lors- L'ASPIDIOTUS PERNICIOSUS. 283 qu'ils se trouvent sur ces derniers, chaf[ue Cochenille est en- tourée d'une zone rouge caractéristique ; une zone semblable, d'un pourpre intense, se voit également sur les jeunes ra- meaux autour des Insectes, lorsque ceux-ci ne se sont pas encore assez multipliés pour masquer l'écorce ; les feuilles infestées se distinguent enfin par une coloration similaire. En proie aux atteintes de VAspidiotiis perniciosus, les arbres sont tués en un temps plus ou moins long, suivant leur force et suivant la gravité de l'attaque qui, parfois, peut être atténuée par la présence des parasites. Généralement, les jeunes Pêchers ne survivent pas plus de deux ou trois ans ; les Poiriers peuvent être tués avec une très grande rapidité, mais le plus souvent ils languissent pendant quelques années avant de mourir. Les plantes attaquées par la Cochenille américaine sont fort nombreuses. Voici la liste de quelques-unes, d après Lintner : Pommier, Poirier, Cognassier, Pêcher, Abricotier, Prunier, Cerisier, Framboisier, Groseiller, Rosier, Cotoneaster, Fusain, Tilleul, Acacia, Orme, Noj^er, Saule. Cette liste, fort incomplète, indique combien YAspidiotus perniciosus est polyphage, et par conséquent avec quelle facilité il s'adapte à des régimes différents , condition qui, malheureusement, est des plus favorables à son cosmo- pohtisme. Auxiliaires naturels. Quelques Insectes contribuent à mettre un frein à la mul- tiplication excessive de l'Aspidiote. Une petite Coccinelle, la Pentilia misella, en fait sa principale nourriture, et plu- sieurs petits Hyménoptères [Aphelinus fuscipennis How., A. mystUaspi'lis le B., Aspidiotiphagus citrinus Craw., AnapJies gracilis How.) vivent en parasites à ses dépens. Il ne faudrait pas compter toutefois d'une façon trop com- plète sur ces utiles auxiliaires dont le rôle se borne à main- tenir l'espèce dans certaines limites, et c'est aux substances insecticides que l'on doit avoir recours pour traiter les arbres atteints par le San Jose-Scale. BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. Traitements. La méthode, qui dans l'Est des Etats-Unis, s'est montrée la plus efficace, consiste à traiter l'arbre d'une façon complète à l'aide de forts lavages d'eau savonneuse : celle-ci est employée à chaud avec avantage, et deux traitements doivent être faits l'un à l'automne, aussitôt la chute des feuilles, l'autre au printemps, juste avant la floraison. Les solutions doivent con- tenir en moyenne de 1 à 2 livres de savon pour 5 litres d'eau; que l'on se serve d'un savon à base d'huile de Poisson, ou d'un savon résineux, l'essentiel est que la solution que l'on obtiendra reste bien fluide à froid, et de choisir le savon et les proportions en conséquence. Ces lavages à l'eau savon- neuse, faits à l'automne, ont pour résultat de diminuer le nombre des fruits, tout en augmentant la force du feuillage, mais cet inconvénient est largement compensé par la des- truction des Insectes. Si les arbres sont complètement envahis, et si leur vitalité est compromise, on doit agir d'une façon radicale et les déraciner pour les brûler. Il va de soi que dans un pays nou- vellement contaminé, où le mal est localisé sur un petit es- pace, cette mesure violente doit être prescrite exclusivement alors même que les arbres sont faiblement attaqués. Quelques autres traitements ont été appliqués en Amérique, au San Jose-Scale ; mais ils ne présentent point, paralt-il, tout au moins pour le climat de Washington, les mêmes avantages que les lavages au savon. . Citons d'abord l'emploi de l'acide cyanhydrique gazeux qui donne de bons résultats, mais qui nécessite un matériel et un personnel spécial soumis à une organisation telle qu'il n'en existe actuellement qu'en Californie. Dans rOrégon et la Californie, on a également beaucoup employé la solution sulfureuse suivante : Ajouter ]80 litres d'eau et remuer pendant que la chaux est en train de s'e'leindie ; faire bouillir ensuite peudant trois heures et ajouter de l'eau de façon à obtenir en tout 3(50 litres ; filtrer et appliquer à chaud pendant le sommeil de la vc^^élation. Chaux Soufre Sel... 40 livres 20 — 15 L'ASPIDIOTUS PERNICIOSUS. 285 Les émnlsions de kérosène (huile de pétrole) ont été aussi conseillées comme traitement d'été. Les émulsions d'huile lourde de goudron (pittéléine) pourraient être également essayées. D'une façon générale, on opérera pour les traitements d'hi- ver avec des solutions trois à cinq (bis plus fortes que pour les traitements d'été et l'on rendra l'opération encore plus effi- cace par un énergique brossage de l'écorce. fait à l'aide d'une brosse en chiendent imbibée du mélange insecticide. Mesures préventives. Au point de vue des mesures préventives, la prohibition des fruits et des plantes provenant d'Amérique est le système qui semble offrir le plus de garanties ; mais, pour être efficace, il faudrait qu'elle fût générale et s'appliquât aussi aux pays voisins et notamment à la Belgique, ou bien que ceux-ci prissent simultanément les mêmes mesures vis-à-vis de l'Amé- l'ique ; en outre, elle soulève des difficultés d'un autre ordre qu'il ne nous appartient pas ici de discuter. Disons toutefois que si l'on en arrive à des mesures aussi radicales, les plantes vivantes et susceptibles d'être transplantées, qui constituent de beaucoup les agents de dispersion les plus dangereux, devront être les premières visées. Les quarantaines et les ins- pections ont aussi leurs inconvénients, surtout lorsqu'il s'agit d'un Insecte tel que celui qui nous occupe, qui est susceptible d'être confondu avec une quantité d'autres espèces voisines n'offrant pas les mêmes dangers. Néanmoins, lorsque VAspi" dioUis perniciosus se trouve sur les fruits, il est beaucoup plus facile à identifier que lorsqu'il occupe les autres parties de l'arbre ; car il est alors entouré d'un cercle rouge caracté- ristique, et en outre, la plupart des autres Cochenilles des arbres fruitiers à feuilles caduques ne se développent pas sur les fruits, mais seulement sur les rameaux. L'examen des fruits importés par un service spécial peut donc présenter de réels avantages : il ne saurait toutefois être considéré comme présentant une garantie complète ; car dans toute une cargai- son de fruits, si quelques-uns seulement sont faiblement atta- qués, la présence du minuscule Insecte peut parfaitement échapper à l'attention des plus consciencieux observateurs. 286 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. Reste la surveillance de nos plantations indigènes ; celle-ci ne saurait être trop préconisée. Il laiit que la possibilité de rintroduction de l'Insecte américain chez nous soit partout connue, de laron à ce que l'attention générale se trouve éveillée et que l'on puisse soumettre les plantes ou les fruits suspects à l'examen des services préposés à l'Entomologie agricole et notamment à celui de la Station entomologique de Paris. Dans le cas où un foyer serait signalé, on devrait pro- céder par extinction, c'est-à-dire arracher et brûler les arbres contaminés. Espèces indigènes susceptibles d'être confondues AVEC h'Aspidiolus perniciosus. Ainsi que nous l'avons dit, il existe en France des espèces indigènes qui peuvent être facilement confondues avec VAspi- diotus perniciosus, et qui parfois, du reste, ne sont pas sans causer des dégâts très sérieux. Des spécialistes compétents sont donc seuls capables d'affirmer, d'après l'examen des échantillons qui leur sont soumis, s'il s'agit de l'Insecte amé- ricain ou d'une autre espèce. Les deux espèces européennes qui sont le plus susceptibles d'être confondues avec le San Jose-Scale, sont V Aspidiotus oslreœfor77iis Curtis et le Diaspis ostreœformis Signoret. Ij' Aspidiotus perniciosus se distingue des deux autres espèces par ce fait qu'il est vivipare, tandis que les autres sont ovipares ; il est en outre caractérisé par l'absence d'or- ganes discoïdes glandulaires (disques ciripares) qui, chez les autres espèces, sont répartis en cinq groupes, dont un médian et quatre latéraux sur la partie postérieure (pygidium) de la face ventrale de la finnelle; l'absence de ces organes constitue un caractère important, qui légitime le classement de Y Aspi- diotus perniciosus par Berlese et Leonardi, dans un sous- genre spécial {Aonidiella); d'autres détails d'une observation très délicate, résidant principalement dans les dentelures du pygidium, fournissent encore des éléments pour établir la diagnose différentielle de l'espèce américaine. V Aspidiotus ostreœformis est très commun en France ; il abonde actuellement aux environs de Paris, et, à Sceaux notamment, il y a des vergers entièrement envahis par cette L'ASFJDIOTUS PEllNIClOSUS. 287 espèce qui cause d'assez grands dégâts. J'ai vu des arbres qui en sont totalement recouverts, les générations succes- sives formant des croûtes superposées. M. Noël a également signalé la même espèce en Normandie. Le Diaspis osireœformis, d'après les envois adressés à la Station entomologique, est moins fréquent en France que V Aspidiotus dont il vient d'être question. Nous l'avons pour- tant reçu de quelques localités et notamment de Bretagne. Confondu par Signoret avec l'espèce précédente, il en a été depuis nettement distingué par Douglas. Il en diffère, ainsi que de VAspidiotus perniciosus, par la forme de la coquille du mâle qui est allongée et linéaire avec une carêne au milieu ; sa taille est notablement plus petite que celle de VAs- pidiotus ostreœformis et sa teinte plus blanche. Nous ne parlerons que pour mémoire du Mytilaspis porno- rum Bouché, espèce qui peut être très nuisible aux Pommiers et fort commune en France, mais qui se reconnaît facilement à cause de sa forme semblable à celle d'une petite coquille de Moule. Les trois espèces dont nous venons de parler peuvent être traitées par les mêmes méthodes que celles qui ont été indi- quées pour VAspidiotus perniciosus. L'exportation de ces trois Insectes d'Europe en Amérique est aujourd'hui un fait accompli et le Mytilaspis pumonim y a même occasionné de très grands dégâts. Souhaitons qu'en échange l'Amérique, à laquelle nous devons déjà le Phylloxéra et le Puceron lani- gère, ne nous envoie pas encore le San Jose-Scale I 288 EXTRAITS DES PROCÈS-VERBAUX DES SÉANCES DE LA SOCIÉTÉ. Ire SECTION (MAMMIFÈRES). SÉANCE DU 21 FÉVRIER 1898. PRÉSIDENCE DE M. DECROIX, PRÉSIDENT. Le procès-verbal de la dernière séance est lu et adopté. M. le Président signale la pre'sence à la se'ance du R. P. Camboué, procureur des Missions à Madagascar, auquel la Société doit de'jà beau- coup de renseignements intéressants sur la grande île afiicaine et qui compte d'ailleurs parmi nos laurc'ats. 11 l'invite à exposer devant la Section quelque sujet se rattachant à l'étude des Mammifères. Le R. P. Canaboué fait une communication sur les Zébus et leur uti- lisation à Madagascar. Dans l'Imérina, ces animaux sont employe's comme porteurs de fardeaux et comme montures. Bien qu'ils soient assez rétifs, ils rendent de grands services; mais on les abandonne de plus en plus comme montures, au fur et à mesure de l'introduction des Chevaux. Sur le littoral, à Tamalave, pur exemple, on les emploie comme betes de trait; on les attelle au moyen d'une cangue carre'e et on en obtient un bon service. La taille des Zébus est moyenne, et leurs couleurs sont variées, comme celles de nos Bovidés d'Europe. M. de Guerne signale les produits do croisements de Zcbus et de Vaches bretonnes obtenus à Bône (Algérie) et dont on a pu déjà goii- ter la chair môme en France, à Marseille où il en a été importo. M. Bourdarie parle des services que sont appelées à rendre dans les colonies les Fermes d'Essai où seront étudiées et améliorées les es- pèces autochtones et où l'on cherchera à obtenir des races nouvelles au moyen de croisements raisonnes. M. Decroix recommande, lorsqu'il s'agit d'introduire dans des ré- gions intertropicales des animaux domestiques, de les faire venir, non d'Europe, mais d'un pays à climat se rapprochant le plus possible de celui où l'on veut les acclimater. La même observation s'applique aux plantes fourragères dont l'étude s'impose également dans les Fermes d'Essai. M. le Secrétaire général dépose sur le bureau un mémoire publié à Washington et intitulé; Metliods and resuUs of investigations on the chemistry and economy of food; il n'est pas fait mention dans cet ou- vrage de la viande de Cheval. PROCÈS-VERBAUX DES SÉANCES DE LA SOCIÉTÉ. 289 M. Bourdarie dit qu'une des causes de la destruclion des Élépljants en Afrique est le manque d'animaux de boucherie. Les indigènes tuent les Éle'pbants comme tout autre gibier, non seulement pour l'ivoire, mais encore pour les manger. L'e'levage des animaux domestiques serait donc de nature à détourner les nègres de massacres inutiles. M. de Guerne, tout en reconnaissant l'intérêt que présente la ques- tion, envisagée dans ce sens, fait cependant quelques réserves. Les animaux domestiques seront employés, non seulement à l'alimenta- tion, mais encore au travail et la domestication de l'Éle'pbant, indis- pensable pour la conservation de l'ivoire, ne semblera plus aussi ne'- ccssaire. Aux Indes, de semblables difficultés ne se présentent pas, les Indous ne mangeant pas la chair des animaux. Le Secrétaire, Ch. Mailles. 2« SECTION (ORNITHOLOGIE. — AVICULTURE). SÉANCE DU 28 MARS 1898. PRÉSIDENCE DE M. DeBURUIL, MeMBRE DU CONSEIL M. Oustalet, président, s'excuse de ne pouvoir assister à la se'ance. Le procès-verbal de la deroière reunion est lu et adopté. La Société de Géographie offre une douzaine d'exemplaires d'une brochure intitulée : L' Autruche^ son utilité et son élevage et qui a pour auteur M. J. Forcst aîné; cc-s brochures sont mises immc'diatemeut eu distribution. M. le Secrétaire go'néral présente le dessin du titre du Bulletin de la Société des Aviculteurs français qui sera publié chaque mois à partir d'avril et distribue avec le Journal de la Société d'Acclimatation, La composition artistique de ce litre est due à M. Remy Saint-Loup. Une discussion s'engage à propos du prix accordé, à l'Exposition d'Oiseaux de basse-cour du Concours général agricole, à un Coq de la race de FaveroUes. Après diverses explications fournies par MM. Mérel, de Guerne, Debreuil, la Section estime qu'il serait fort utile de réunir les photographies de types aussi parfaits que possible des diverses races gallines dont on formerait un album, et elle émet le vœu qu'un appel soit fait, à ce sujet, à tous les aviculteurs. M. Mercier entretient la Section d'une visite faite par lui à la ferme d'Autruches de Matarieh près le Caire (Egypte). (Voir Bulletin «ci-dessus, n° d'aoiit.) A propos de l'élevage des Autruches, plusieurs personnes deman- 290 BULLETIN LE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. dent s'il ne serait pas possible de répandre cette industrie dans les colonies françaises. M. Mercier ajoute que l'élevage des Autruches paraît être assez rémune'rateur en Egypte. Ce n'est pas du reste la seule industrie ayant pour objet les Oiseaux qui s'exerce dans ce pays. C'est ainsi que M. Mercier s'est embarque pour rentrer en France sur un paquebot qui transportait, entre autres denrées, 49,000 Cailles vi- vantes prises au filet et destinées au marche' de Londres. On ne s'in- quiète nullement de celte destruction en Egypte où la Caille est conside'rée comme un Oiseau nuisible. M. le Secrétaire géne'ral parle des excursions projetées pour l'été prochain et qui intéressent tout particulièrement la Section d'Ornitho- logie et d'Aviculture. 11 s'agit, en effet, de visiter la Faisanderie de Mériel où M. Galichet poursuit actuellement l'acclimatation et l'élevage en grand du Tinamou roux. M. Debreuil est également disposé à faire à la Société les honneurs de la propriété où il élève, à Melun, divers animaux, parmi lesquels un grand nombre de volatiles et spécialement des Nandous. M. De- breuil n'a toujours pas pu se procurer de Nandou mûle cl saisit cette occasion pour offrir aux Membres de la Société auxquels cela pourra être agréable, des œufs clairs dont la ponte commencera incessam- ment. Le Secrétaire, Comte d'ORFEUILLE. 3« SECTION (AQUICULTURE). SÉANCE DU 7 MARS 1898. Présidence de M. Raveret-Wattel, délégué du conseil. Le procès-verbal de la séance précédente est lu et adopté. M. Raveret-Wattel, qui arrive de Nice, rend compte de la visite qu'il a faite à M. Proschawsky, Membre de la Société, amateur dis- tingué de plantes rares et de Poissons exotiques. A ce propos, M. de Guerne donne lecture d'une lettre dans laquelle M. Proschawsky, rappelant des observations faites par lui, pendant un voyage aux États-Unis, mentionne la facilité que présenterait racclimatation en France du Sun-fish [FAipomotis gibbosus Linné . M. Raveret-Wattel estime que l'acclimatation de celle espèce n'est pas à recommander. 11 est vrai qu'en raison de la petitesse de leur bouche, les Sun-fîsh ne sont pas dangereux pour les autres Poissons déjà d'une certaine taille; mais ils détruisent beaucoup de frai, el con- PROCÈS-VERBAUX DES SÉANCES DE LA SOCIÉTÉ. 291 somment une grande quantité de nourriture, qui pourrait profiler à d'autres espèces de plus de valeur. Aussi les piscicuîteurs américains n'en font-ils aucun cas. M. Bertrand, Membre de la Société, qui a de'jà obtenu plusieurs fois la reproduction de V Eupomotis gibbosus dans les étangs qu'il possède près ^ d'une fois, nous autres chasseurs — nous avons profite', à défaut d'autre nourriture, des fruits qu'il nous laissait ainsi sur son passage. La façon dont il e'corce les arbres est assez curieuse: si les végétaux sont gros, il se sert pour cela de ses défenses et soulève l'écorce qu'il tire à lui avec sa trompe; si les végétaux sont petits, il les arrache et les pèle délicatement tout en marchant. Il est particulièrement friand des petites épines vives et l'on se demande comment sa bouche, qui est délicate, n'en est pas incommodée. L'eau lui est indispensable et il lui en faut en abondance. Rien n'est EXTRAITS ET ANALYSES- 303 plus triste à voir que des Éle'phants qui manquent d'eau; ils s'en vont la tête basse, la trompe et les oreilles pendantes^ comme las de vivre. C'est une bonne aubaine pour ceux qui les poursuivent; mais il faut se rappeler que ceux-ci souffrent encore plus de la soif et de la chaleur que leur malheureux gibier. La solidarité entre les Éle'phants est touchante. J'ai vu un certain jour que j'avais blessé un vieux mâle, les femelles l'aider et pousser la pauvre bête qui se refusait à avancer, pour la mettre à l'abri dans un fourre'. Elles s'appuyaient contre lui de tous côtés, le portaient presque sous nos yeux, à quelques centaines de mètres. Le vieux se faisait traîner. Elles l'avaient fait entrer, de gré ou de force, dans un grand taillis où elles ne l'abandonnèrent que lorsqu'elles comprirent qu'il était blesse' mortellement et ne demandait plus qu'à mourir en paix, et qu'elles risquaient leur propre vie en demeurant un instant, car nous arrivions à la course. La passion du chasseur n'est pas incompatible avec les sentiments, et l'Éléphant, cet être grandiose, puissant et intelligent, est celui que j'admire le plus parmi les chefs-d'œuvre de la Nature (1). X La culture des mers en Europe (2). M, Georges Roche, Inspecteur ge'néral des Pêches maritimes, pré- sente à la Société un livre, dont il est l'auteur et qui vient de paraître dans la Bibliothèque scientifique internationale de la Librairie Félix Alcan. Dans cet ouvrage, intitule' : La culture des mers en Europe, M. Rocbé a voulu présenter dans son ensemble l'énorme travail accompli depuis trente ans, dans le domaine scientifique et dans le domaine industriel, pour préciser les conditions d'exploitation rationnelle des eaux ma- rines. Tout d'abord, l'auteur envisage l'industrie des pêches maritimes pro- prement dites dans les mers du nord et de l'ouest de l'Europe. Il étudie leur évolution, les conditions économiques de leur mise eu œuvre, et les relations qui existent entre la prospérité de ces indus- tries et l'économie sociale des populations maritimes. Il est aussi amené à envisager l'influence que les pêches exercent ou sont appelées à exercer sur la fécondité des mers. (1) Extrait du Bulletin du Muséum d'Histoire naturelle, 1898. (2) Analyse d'une communication faite par M. Georges Roché dans la Séance générale du 28 janvier 1898, ea présentant son livre intitulé : La culture des mers en Europe (Piscifacture — Pisciculture — Ostréiculture), 1 vol. in-8°, de 328 pages, avec 81 gravures dans le texte, 304 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLLMATATION. Etudiant alors les conditions dans lesquelles les espèces sont placées par leur biologie propre pour lutter contre les nombreuses causes na- turelles ou industrielles de destruction, M. Roche examine avec grand soin les dispositifs réglementaires que l'ou a cru devoir adopter pour l'exploitation des eaux et se livre à une critique très serrée — encore que discrète — de la législation des pêches. 11 semble résulter, en effet, du travail de M. Roche' que la dépopulation des fonds dont se plaignent souvent les pêcheurs, est, dans son ensemble, controuvée, et que cette dépopulation ne saurait être considérée comme vraie que pour des espèces détermine'es — et, encore, dans des localités spéciales seule- ment. L'auteur étudie également les méthodes propose'es par divers spé- cialistes pour combattre, par la piscifacture, la stérilisation des eaux. Après avoir exposé la technique de ces méthodes et les résultats aux- quels elles ont permis d'arriver aujourd'hui, il conclut que l'on ne sau- rait, sans courir le risque de cruels mécomptes, tenter leur application dans nos eaux. L'application des méthodes de piscifacture au réem- poiasonnement des terrains épuisés ressortit encore, suivant M. Roche, à la zoologie scientifique pure, pour le moment. De longues et minu- tieuses études sont encore à faire avant que l'on puisse songer sérieu- sement à propager artificiellement les espèces comestibles dans les eaux libres. Par contre, M. Rocbé croit que, dans un avenir rapproché, la pisci- facture est appelée à rendre d'importants services à la pisciculture marine en eaux closes, dont il donne une description, complète pour les installations de ce genre, françaises et italiennes. L'étude des conditions de développement du Homard et de la Lan- gouste ainsi que des essais de propagation artificielle qui ont été tentés pour la première de ces espèces, en divers pays étrangers, constitue un chapitre entier du livre. L'auteur s'est soucié là, comme dans tout son ouvrage d'ailleurs, de dégager, de tous les travaux et de toutes les études faites sur le sujet qui l'intéresse, les faits scientifiquement ac- quis, de tout le fatras littéraire et assez romanesque, au milieu duquel sont en général présentées les questions relatives aux industries ma- rines. 11 est intéressant de retenir cependant cette déclaration de l'auteur qui ne paraît pas cependant plein d'une confiance aveugle dans les méthodes de propagation artificielle — à savoir que la création de vi- viers flottants pour la conservation des femelles de Homards et de Langoustes grainées ne peut qu'être utile au maintien de la producti- vité des fonds où Ton capture ces animaux. L'ostréiculture et la mytiliculture forment à elles seules la moitié de l'ouvrage de M. Roché. Et c'est justice, étant donnée l'importance immédiate, réelle, qu'ont ces deux industries pour nos populations maritimes. EXTRAITS ET ANALYSES. 305 Après avoir fait l'historique de la rénovation de rostréiculture en Europe, et avoir minutieusement étudié le rôle de Costa et celui de de Boa pour le développement de cette culture sur les plages fran- çaises, notre collègue expose les méthodes qui doivent présider à l'ex- ploitation des! gisements huîtriers naturels. Il o'tudie ensuite la technique de Tostréiculture dans les divers pays qui se livrent à cette industrie. La leçon très se'rieuse qu'il donne en pareille matière est d'ailleurs rendue plus instruclive par un exposé des conditions biolo- giques des Lamellibranches comestibles, exposé mis au courant des recherches nombreuses et fort importantes accomplies dans les vingt dernières années, par des savants français et étrangers. Enfin, l'auteur se livre à des considérations fort into'ressantes, et certainement appe- lées à détruire bien des illusions, sur l'économie de l'industrie ostréi- cole. L'ouvrage est terminé par un chapitre sur les essais tentés jusqu'ici pour la culture des Eponges industrielles. Dans son ensemble, l'ouvrage de M. Roché constitue une synthèse absolument sérieuse de tous les travaux anciens et modernes concer- nant l'exploitation des animaux marins. Sur de nombreux points, il rectifie des erreurs qui sont cependant acceptées comme vérités démontrées dans tous les ouvrages qui ont paru jusqu'alors sur le même sujet. Du reste, c'est la première fois, qu'un travail synthétique rigoureusement scientifique de ce genre ait été écrit en pareille matière. II ne pourra manquer de servir, à la fois, aux hommes de science, aux industriels et aux administrateurs qui, à un titre quelconque, doivent connaître de ce genre de questions. X La Soie au Soudan. D'un rapport adressé à M. de Trentinian, lieutenant-gouverneur du Soudan français, nous extrayons les passages suivants : Les Cocons envoyés à Kayes sont de provenance locale; ils ont été récoltés dans un rayon de 2 kilonaètres autour de la ferme de Kati, sur un arbuste épineux qui devient quelquefois arborescent et qui est désigné par les indigènes sous le nom de Tomboro, Cet arbuste et ses cocons existent dans toute la colonie en assez grande quantité; j'ai souvent récolté ces derniers sur la ligne de ravi- taillement et môme à Kayes d'avril à juin. Le Cocon est probablement construit par le ver en fin hivernage. L'Insecte parfait se dégage de la chrysalide en juillet. La Soie est, au moment de la récolte, d'une éblouissante blancheur, du moins dans toute l'épaisseur des parois du Cocon ; la Soie intérieure qui enveloppe directement la nymphe est légèrement brunâtre. 306 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. Nous avons essayé, avec l'aide de M. Tagenl des cultures, de de'- vider plusieurs de ces Cocons, et nous avons obtenu un succès relatif qui a permis de constater un degré de résistance, sinon de finesse, très convenable du fih Consulte's sur la provenance probable de la graine, les indigènes déclarent avoir vu de tout temps ces Cocons sur le même arbuste, sans d'ailleurs s'en préoccuper davantage. Les conditions climate'riques de Kati paraissent assez bien convenir à l'installation d'une magnanerie : moyenne de température, degré' d'humidité et de sécheresse alternées convenables. Etant donné le caractère très rustique de la plante qui sert à la nourriture de la Chenille, on pressent que la Soie pourrait être trans- formée avantageusement en substituant au Tomboro un arbre à feuilles- plus tendres et plus nutritives. L'élevage consiste essentiellement à faire éclore la graine dans des chambres spéciales et à nourrir le Ver le plus possible. L'Insecte parfait que j'ai pu réussir à obtenir a laissé dans le réci- pient où il est éclos une toute petite quantité de graines, ce qui in- dique que la ponte s'effectue en juillet-août. Nous rechercherons à obtenir la transformation en Ver de cette graine, qui est malheureusement en trop petite quantité. Quand tous les éléments du problème seront réunis, il y aura une tentative intéressante à faire en vue de l'élève du Ver à soie au Sou- dan. Déjà les jardins d'essai de Kati renferment quelques pieds de Miirier blanc qui serviront ultérieurement aux premiers élevages. A la suite de la publication de la notice ci-dessus, M. Charles Naudin, Membre honoraire de la Société d' Acclimatation a fait par- venir à la Revue des Cultures coloniales^ les observations suivantes : « Il y a une quarantaine d'années, quand j'étais aide-naturaliste au Muséum, Isidore Geoffroy Saint-Hilaire, fondateur de la Société d'Ac- climatation, m'avait remis, pour en avoir le nom, un petit rameau en mauvais état d'un arbrisseau de Sénégambie, sur lequel vit une Che- nille, dont la soie, lui disait-on, pourrait êlre utilisée par l'industrie. 11 s'agissait, avant tout, de déterminer le genre et l'espèce de l'arbre, et, à l'aide de la Flore de Sénégambie de Guillemin et Perrottet, j'ai reconnu ou cru reconnaître que c'était un Zizyphus, arbrisseau épineux assez voisin de notre Jujubier commun, ou vulgaris. I. Geofifroy Saint-Hilaire n'ayant pas reçu de graines du prétendu Ver à soie, l'afifaire en est restée là, et depuis il n'en a plus été question. Il se pourrait fort bien que les Cocons récoltés à Kayes par nos offî- EXTRAITS £T ANALYSES 307 ciers fussent de la même espèce que ceux dont il vient d'être question, et que l'arbre épineux [Tomboro) qui nourrit la Chenille fiît un Zizyphus. Il serait donc à de'sirer qu'on nous envoyât de Kayes des é.-.hantillons de cet arbre, avec feuilles, fleurs et fruits, le tout en assez bon état pour qu'on pût arriver à une détermination certaine du genre et de l'espèce. On y ajouterait des Cocons pour les faire examiner et dévider dans quelqu'une de nos Écoles d'Agriculture, celle de Montpellier par exemple, qui est parfaitement outillée pour ces sortes de recherches. I. Geoffroy Saint-Hilaire pensait que le nouveau Ver à soie pourrait être acclimaté dans le midi de la France; ce n'est peut-être pas impos- sible, mais les probabilités de succès seraient plus grandes en Algérie, où, avec un climat plus chaud, existent plusieurs Zizyphus indigènes plus ou moins analogues à celui de Sénégambie. En matière de colonisation, il ne faut rien négliger : aussi me sem- ble-t-il que la question d'un nouveau Ver à soie est assez intéressante pour être tirée au clair (1). » Ch. Naudin (de l'Institut). X Les Arbres k Gutta-Pergha a la Grande-Comore par M. A. MIlne-Edwards. de l'Institut, Directeur du Muséum d'Histoire naturelle. A la réunion des naturalistes du Muséum du 25 mai 1897, noire correspondant, M. L. Humblot, annonçait qu'il avait introduit à la Grande-Comore des pieds de Gutta-Percha [Isonandra Qutta, Hooker). L'un d'eux, planté à 250 mètres d'altitude, était devenu en trois ans un bel arbre de 5 à 6 mètres de hauteur, dont les branches pouvaient supporter le poids d'un homme et dont les feuilles donnaient un latex abondant (2). A la suite de cette communication, M. H. Lecomte faisait dans la Revue des Cultures coloniales (3) les remarques suivantes : On peut se demander si l'arbre transporté à la Grande-Comore est véritablement l'Isonandm Gutta de Hooker; à défaut, on ne saurait tirer de conclu- (1) Loc. cit., n» du 5 décembre 1897. (2) Humblot, lissais d'introduction de V arbre à Crutta-Percha à la Grande Comore, Bull, du Muséum d'Histoire naturelle, t. III, p. 172. La notice de M. Humblot a été reproduite dans le Bulletin de la Société d'Acclimatation 1897, p. 478. (3) Rcme des Cultures coloniales, 5 juillet 1877, t. I, p. 72. \ 308 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. sions fermes des essais restreints qui sont rapporte's. Ces observations étaient trop justes pour ne pas donner à M. Humblot le désir de s'as-. surer de l'exacte détermination botanique de l'arbre dont il s'agit et il m'a envoyé récemment des rameaux et des feuilles que j'ai soumis à l'examen de M. Guignard, membre de l'Institut et professeur de bota- nique à l'Ecole supérieure de pharmacie. Mon savant confrère a re- connu que ces échantillons provenaient bien de V Isonandra Gutta et il vient de m'adresser à ce sujet la lettre suivante : « J'ai examiné les feuilles û'honandra provenant des Comores que vous m'avez remises dans le but de savoir quelle est la qualité de la Gutta qu'elles renferment. Il existe en eSct des variétés d'Isonandra {Pelaquium) Gutta dont les feuilles contiennent des cellules laticifères aussi nombreuses et d'un produit aussi abondant que la meilleure variété de cette espèce et qui pourtant ne fournissent qu'une Gulta de mauvaise qualité. Aucun caractère exlerne ou interne ne permet, à ma connaissance, de distinguer une mauvaise qualité d'une bonne ; il faut, pour y parvenir, recourir à certains procédés. J'en ai la preuve avec des échantillons recollés à Bornéo par M. de Guigné ut envoyés en B'rance comme excellents, alors qu'ils ne contenaient qu'une Gutta friable et sans qualité. » Dans la petite boîte que je vous adress?, vous trouverez trois préparations de feuilles dans lesquelles les laticifères à Gutta sont colorés et peuvent être vus facilement au microscope, à un faible grossissement. Ces préparations ont été faites toutes les trois avec des feuilles de bonne qualité, l'une provenant de Bornéo, l'autre du jardin de l'Ecole de pharmacie, la troisième des feuilles venant des Comores. Par suite. Varbre de M. Humblot fournira sûrement un bon produit (1). » (1) Extrait du Bulletin du Muséum d'Histoire naturelle, 1898, w" 3. RKYUE LES CULTUIIES^^COLONIALES Directeur : A. MILHE-POUTINGON, Doctrur en droit. Directour du Service de rAfriq i'2 ot des Antilles à V Union coloniale française, Vice-Frésideiil de la Seciioii coloniale à la Société f Nationale d'Acclimatation de France. [ Créée sous les auspices de VUnion coloniale française, cette nouvelle publication a pour but défaire mieux ' connaître, en France, les diverses cultures et les productions coloniales ; de vulgariser dans lés coionici •les meilleurs procédés de culture, d'y provoquer l'introduction des meilleures variétés des plantes françaises I actuellement cultivées et l'acclimatation de plantes nouvelles. COMITÉ DE PATRONAGE DE LA REVUE MM. Le prince D'ARENBERG, député, vice-président du Groupe colonial, président du Comité de l'Afrique française. Le commandant BINGER, ancien gouverneur de la Côte- d'IvoIre, directeur des affaires de l'Afrique au Ministère des Colonies. PAUL BOURDE, ancien directeur des contrôlés et de l'agri- culture en Tunisie, ancien secrétaire général à Madagascar. BUREAU, professeur de botanique au Muséum. J. CHAILLEY-BERT, professeur à l'Ecole des Sciences poli- tiques, secrétaire général de l'Union coloniale française. CHARLES-ROUX, ancien député, membre du Conseil supérieur du commerce, vice-président du Groupe colonial. CORNU, professeur de culture au Muséum. DEHERAIN, membre de l'Institut, professeur de chimie agri- cole au Muséum et à l'Ecole d'agriculture de Grignon. MARCEL DUBOIS, jirofesseur de géographie coloniale à l'Uni- versité de Paris. DYBOWSKY, diri'cteur de l'agriculture et du commerce en Tunisie, professeur de cultures coloniales à l'Institut natio- nal agronomique. H. FLAHAUT, professeur de botanique à l'Université de Montpellier. LOUIS GRANDEAU. directeur de la Station agronomique de l'Est, rédacteur en chef du Journal d'Agriculture pratique. GRANDIDIER, membre de l'Institut. MM. Baron Jclfs DE GUERNE, secrétaire général de la Société na- tionale d'Acclimatation. Dr HECKEL, professeur à la Faculté des Sciences, directeur de l'Institut colonial de Marseille. LE MYRE DE VILERS, député de la Cochinchine, président de la Société nationale d'Acclimatation. Mgr LEROY, supérieur général des Missionnaires du Si-Esprit. MILNE-EDWARDS, membre de l'Institut, duecteiir du Muséum. CH. NAUDIN, membre de l'Institut. OLIVIER, docteur ès sciences, directeur de la lievue (jé- nérale des Sciences pures et appliquées. PRILL1EUX, sénateur, inspecte. cr génér. l de l'Enseignement a-:r cote, profesi- de Botanique à l'Institut \alionol agronome POISSON, assistant au Muséum. RISLER, directeur de l'Institut national agronomique. RIVIÈRE, ancien prés'dent de la Société d Agr cul ure d'Alger dire leur du Jardin d'ess"i du Hamina. D'' TREILLE, ancien inspecteur eu chef du service de santé des Colonies. VIALA. professeur de viticulture à l'Institut national agrono- mique, directeur de la Bévue de Viticulture. H. DE VILMORIN, membre de la Société nationale d'Agricul- ture. ZOLLA, professeur à l'Ecole d'agriculture de Grignon et k l'Ecole des sciences politiques. La Itevue des Cultures coloniales paraît le 5 de chaque mois. Bureaux : 4^i, rue de la Chaussée d'Antin, Paris. Abonnements : un an : France, 12 francs — recouvré à domicile, 12 fr. 50. — Colonies cl Union vostale, 15 francs. — Payement d'avance. PEINTURE IGNIFUGE DITE ANTI-RÉTROLEUR * Au moment où rhorrible désastre du Bazar de la Charité est encore présent a loules les mé- ;• moires, il convient de signaler la découverte récente, par M. de Preux, d'un produit désigné ssous le nom û'Anti-Pétroleur et qui rend les objets traités par lui absolument inconibustibles. ? M. de Preux a fait, il y a peu de temps, à Saultain, près Valencienncs, des exi:»ériences déci- isives à ce sujet. Deux baraques de bois blanc recouvertes de carton bitumé et. fendues de jute, Tune imprégnée du nouveau produit, l'autre à l'étal naturel, ont été remplies de copeaux imbibés d'éther. Les copeaux ayant été allumés, la baraque qui avait subi la préparation resta complèlement intacte, tandis que Taulre était détruite en quelques instants. Mis en présence d'un chalumeau dégÊtgeant 1,200 degrés de chaleur, le bois n'est percé qu'après 25 minutes et le carton bitumé se contracte, mais ne briile pas et ne se fond pas. Les objets en celluloïd ne s'enflamment pas lors- qu'ils ont été traités par VAnti-Pétroleur. Après les mêmes expériences faites en grand à TExposition de Bruxelles, au parc du Cinquan- tenaire, le Jury international a accordé, à l'unanimité avec ses plus sincères félicitations, à VAnti-Pétroleur, un diplôme de médaille d'or, la plus haute récompense dont il pouvait disposer. Le produit inventé par M. de Preux rendra d'immenses services. Il est déjà employé dans un certain nombre d'usines et il a été adopte parla Compagnie du Nord qui s'en sert dans ses dépôts de machines. S'adresser pour les commandes et les renseignements au régisseur du château de la Villette à Saultain (Nord). Charles NAUDIN Membre de l'Institut (^Académie des Sciences) Directeur du laboratoire de botanique de la Villa Thuiet, à Antibes ET Le Baron F. Von MUELLER Botaniste du gouvernement anglais à Melbourne MANUEL L'ACGLIMATEUR OU CHOIX DE PLANTES RECOMMANDÉES POUR L'AGRICULTURE, L'INDUSTRIE ET LA MÉDECINE Adaptées aux divers climats de V Europe et des pays tropicaux OUVRAGE PUBLIÉ AUX FRAIS ET SOUS LES AUSPICES DE LA. Société nationale dC Acclimatation de France Un volume in-8° de près de 600 pages avec portrait INTRODUCTION : Considérations générales sur l'acclimatation des plantes; Aperçu général des genres de plantes auxquels sont empruntées de.^ espèces déjà utilisées ou qui peuvent l'être ; Description sommaire des familles ou groupes naturels auxquels se rattachent la plupart des plantes indiquées dans ce volume ; Noms vulgaires des plantes et synonymes rapportés aux noms botaniques. Enumération par ordre alphabétique des plantes, leurs usages et leui culture, formant un dictionnaire des végétaux à acclimater dans les diverses régions du globe ; Noms des auteurs cités dans le cours de l'ouvrage avec les abréviations usitées. Prix : 7 Francs Pour les Membres de la Société Nationale d'Acclimatation de France, 3 fr. 50 EN VENTE AU SIÈGK DE LA Société nationale d' Acclimatation de France, 41, Rue de Lille, PARIS. le Secrétaire Général, gérant, Jules de GUERNE. Versailles. — Imprimeries Cerf, 59, rue Duplessis. tiladice décimal. '506 581.52 i 591.52 BULLETIN DE LA m DE FRANCE (Revue des Sciences naturelles appliquées] 45« ANNÉE OOTOIBflE-NOVKMBIlE 1898 SOMMAIRE COSSAH EWART. — Hybrides du Zèbre de Burchell et de la Jument 30 •H 2 llAlBsii fentfôo «m i87S Plu U m Méiiillii tt 1! Prix n»si«ir i'H, Prix i mnik, hrii 11» VOiTELLIERàll&ms(S.-i'0. GOUVKUSES ▲RTIVIOIILLU KATÉRIEL D'iLITAil ▼olailles 4« Rae* GBUF» A COUVKR a«-A.RIS 10, Rue Haute feui II i au coin de la rue Serpente (près l'Ecole-c!e-Médecinc Les plus hautes Eécompenses auxIip^^'IriDcaiseietEtraDièr VOITURE mue au moyen de 1 ou 2 leviers. Snr demande envoi franco dn Catalogne — TÉLÉPHONÉ, BA U MlYtlR A LE GAZEUSE^ déclarée d'INTERJET PUBLIC ( Décret du 7 Avril 1888) BUSSANG ANÉMIE, GASTRALGIE, COLIQUES NEPHRÉTQUES, GRAVELLE, ARTHRITISME HEGONSTITUANTE^indiquéedaDstouteslesGONVALESCENGES 309 HYBRIDES DU ZÈBRE DE BURCHELL ET DE LA JUMENT (1) OBTENUS EN ECOSSE par I.-COSSAR EWART, Professeur d'Histoire naturelle à TUniversité d'Edimbourg. Le Père des Hybrides. Dans le cours des deux dernières années, j'ai obtenu cinq hybrides, par le croisement de différentes Juments avec un Zèbre de Burchell, [Equus Burchelli var. Chapmanni], Le premier est né le 12 août 1896; les autres dans le courant de rété de 1897. Les mères de ces hybrides sont respectivement : une Poney de l'Ile de Rum, une Poney de Shetland, une Poney d'Islande, une Jument irlandaise et une Jument croisée Clj'desdale. Le père de tous les hybrides, Matopo, est un beau Zèbre de Burchell, que je crois originaire du Transvaal. Gomme le montre la fîg. 1 , il est bien conformé, a les jambes puis- santes, le cou fin et les épaules bien développées et, pour un Zèbre, ses mouvements sont presque parfaits. Lorsqu'il trotte, ses jambes antérieures se meuvent gracieusement et ne rap- pellent en rien l'allure raide des Chevaux communs. Lorsqu'il galope, il semble le faire sans effort et sans que cette allure paraisse exiger de lui une grande dépense d'énergie. Le Zèbre a été souvent accusé d'avoir un mauvais carac- tère. Matopo fait certainement exception à cette règle. Nous perdons trop facilement de vue que, tant que les Zèbres n'au- ront pas été soumis à la domestication pendant un certain [1] Mémoire publié dans The Zoologist, n» 680, 1o février 1S98, et traduit avec l'autorisation de l'auteur et du directeur, M. W. L. Distant. La Société d'Acclimatation est redevable des illustrations qui accompagnent ce mémoire à l'obligeance de MM. West, Newmanu et C". éditeurs de llie Zoolocjist. — Ce mémoire a été présenté à la Séance générale du 11 mars 1898 par M. Jules de Guerne, Secrétaire général de la Société. La reproduction en est formelle- ment réservée, sauf les autorisations des auteur, éditeur et traducteur. Bull. Soc. nat. Accl, Fr. 1898. — 22. 310 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. nombre de générations, on ne peut les juger en les compa- rant au Cheval qui, après tout, n'est pas parfait. J'ai yu des Zèbres en captivité parfaitement dociles et j'ai eu en ma possession une femelle qui, capturée très jeune au Transvaal, était dès le début, aussi obéissante, aussi douce et aussi sûre que n'importe quel Poney. Différentes raisons m'ont empêché de me servir de Matopo, et cependant il n'y a jamais eu au- cune difficulté à l'employer, sauf lorsqu'il se trouve avec des Juments ou qu'il est particulièrement excité. Lorsqu'il se trouve dans un champ avec des Juments, il est impossible de l'approcher, car il se jette sur tous ceux qui s'aventurent au- près de lui. Il galope alors la bouche ouverte, poussant son cri caractéristique et essayant de saisir par les jambes ceux qui l'approchent. Un jour dans un petit paddock, il faisait si bonne garde auprès d'une douzaine de femelles qu'il fallut nous mettre à quatre pendant près de deux heures, pour faire rentrer ces femelles dans leurs boxes. D'ailleurs, tout bruit inaccoutumé l'émotionne : rien ne le terrifie autant qu'un coup de fouet et rien ne le surexcite comme d'entendre battre des tapis ; le claquement d'une corde le trouble profondément. Je me suis souvent demandé si le bruit cadencé du battage des tapis ne lui rappelait pas le jour, où, dans la lointaine Afrique, il perdit sa liberté alors que les Boers lui liaient les jambes pendant que les Zoulous frappaient sur leurs boucliers avec leurs assa gaies. Les rayures les plus caractéristiques de Matopo sont re- présentées dans les figures 1 et 2. J'ai décrit ailleurs (1) les rayures des différentes espèces de Zèbres. Je me bornerai à donner ici quelques détails sur celles de Matopo. Sa tête (fig. 1) est marquée d'une série de bandes brunes courbées dont quelques-unes se terminent dans une touffe de poils de deux pouces environ, placée sur le front. Faisant suite aux bandes frontales, se trouvent quelques bandes verticales descendant jusqu'au museau, dont la peau foncée est parsemée de quelques poils clairs excepté au-dessus des narines où ces poils sont très bruns. Les Zèbres ont ordi- nairement une bande qui contourne l'épanle, passe en des- sous du garrot et se bifurque au niveau de l'attache de (1) Veterinarian, novembre 1897. 312 BULLETIN DE LA SOClÉTi^ D'ACCLIMATATION. l'épaule. Chez Matopo, d'un côté, (fig. 1), cette bande est double, de l'autre (fig. 2), elle va se confondre avec Tune des bandes humérales. Entre cette bande et le sommet de la tête, il existe habituellement une douzaine de bandes cervi- cales qui, en aboutissant à la crinière, y forment une série Fi{/. i . — Matopo, Zèbre de Burchell, père des hybrides. (D'après une photographie de M. Reid.) de touffes noires alternant avec un nombre égal de touffes claires. Entre ces deux rangs de touffes dont les poils sont dressés et continuant la ligne de la bande dorsale, se trouve la crinière proprement dite consistant en poils noirs, plus ou moins dressés. La partie antérieure de la crinière, au lieu de former un toupet, s'étend au delà da niveau d'insertion des oreilles et se projette en avant, sur le front, formant un angle HYBRIDES DU ZÈBKE DE BURCIIELL ET DE LA JUMENT. 313 droit sur le long axe de la face. Derrière la bande de l'épaule, du côté gauche, descendent cinq larges bandes presque verti- cales. Toutes, sauf la dernière, atteignent Ja bande dorsale par leur extrémité supérieure, et toutes, sauf la première, se rattachent d'autre part à la bande ventrale. En arrière de ces Fi(]. 2. — Matopo, Zèbre de Burchell, père des hybrides. (D'après une photographie de M. Swaa Watson.) cinq bandes verticales, se trouvent de larges bandes obliques, entre lesquelles est une bande claire estompée au milieu d'une légère teinte brune. L'une de ces bandes obliques commen- çant à la naissance de la queue, se porte en avant au-dessus de la hanche, puis se courbe brusquement pour rejoindre la bande ventrale. Je lui ai donné le nom de « grande bande des flancs ». Au-dessous d'elle, s'en trouve une seconde, de forme HYBRIDES DU ZÈBRE DE BURCHELL ET DE LA. JUMENT. 315 analogue, qu'on pourrait appeler « bande intermédiaire des flancs ». Ensuite vient une troisième commençant un peu au- dessous de la naissance de la queue qui traverse le flanc en se bifurquant au-dessus du grassei (1), la division antérieure se dirigeant vers la bande ventrale, mais sans la toucher. Ces trois bandes de flanc se trouvent également sur le côté droit où la bifurcation de la dernière est très apparente. Dans l'espace formé par la bifurcation de la bande de l'épaule, se trouvent quelques autres bandes courbées, peu distinctes, et au-dessous viennent les bandes transver- sales des jambes. Quelquefois, cet espace angulaire, en forme de A, renferme sept bandes courbées interrompues, et les jambes sont rayées jusqu'au sabot. Au-dessous de la bande du grasset, on trouve des bandes d'abord obliques, puis presque transversales sur les jambes postérieures et accom- pagnées quelquefois de bandes estompées. Chez Malopo, les bandes ne sont pas très visibles dans la partie inférieure des jambes de derrière, mais chez beaucoup de Zèbres, elles sont plus nettes et relativement plus larges à mesure qu'elles se rapprochent du sabot. La partie supérieure de la queue est distinctement rayée et, comme chez les Bœufs, elle se termine par un bouquet de longs poils. Les jambes de devant portent une large châtaigne, mais celles de derrière n'en montrent aucune trace ; aucune touffe de poils n'existe sur les fanons. Il y a lieu de remarquer que chez deux Zèbres ou même sur les deux côtés d'un même animal, la disposition des bandes n'est pas toujours exactement pareille (fig. 1 et 2) ; chez certains, le cou et le corps présentent autant de bandes secondaires que de bandes principales. Même certains Zèbres de Burchell, portent sur la croupe des bandes qui rap- pellent le gril des Zèbres communs [E. zehra) et, tandis qu'en été les bandes foncées sont presque noires et les bandes claires d'un jaune clair, en hiver, les premières sont couvertes de longs poils bruns, et les secondes de poils blancs également longs. Les touffes claires, de chaque côté de la crinière, sont blanches en hiver comme en été. Il convient d'ajouter que Malopo^ comme la plupart des Zèbres de Bur- (1) Le fjrasset est la région du membre postérieur correspondant au genou de rhomme. 316 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. chell, étant conformé pour habiter la plaine, a les sabots ronds et les oreilles relativement courtes. Il diffère ainsi du Zèbre de montagne (E. zébra) et de son compagnon d'écurie, un Ane blanc d'Egypte, dont les sabots sont longs et étroits, et dont les oreilles mesurent 11 pouces 1/2, soit 5 pouces de plus que celles de Malopo. Fig. 5. — Romulus C^, âfj;é de sept jours, et sa mère Mnlatto. [Photographie de M. Swan Watson.) L'hybride « Romulus ». Le plus vieux de mes hybrides, Romulus, est né, comme je l'ai dit, le 12 août 1896. La période de gestation a été de 342 jours. Chez la Jument, elle est ordinairement de 343 à 350 jours. La mère de Romulus était une Poney noire de l'île de Rum, prêtée pour cette expérience par lord Arthur Cécil, d'Orchardmains, Kent. HYBRIDES DU ZÈBRE DE BURCHELL ET DE LA JUMENT. La bonne race des Poneys noirs des montagnes et des îles de l'Ecosse occidentale est excellente sous beaucoup de rap- ports pour produire des croisements avec des Zèbres. Les analogies que présentent les Chevaux de cette race avec ceux de l'Orient, ont fait dire qu'ils descendent d'étalons qui se seraient échappés des vaisseaux de l'Armada espagnole (1). Romulus, quelques jours après sa naissance, était le plus intéressant petit animal que j'aie jamais vu (fig. 1). 11 sem- blait réunir la grâce et la beauté de l'Antilope à l'élégance du Poulain arabe de bonne race. La disposition et la colora- tion de ses bandes et de ses taches était parfaite. La couleur du corps était jaune doré; les bandes et les taches d'un beau brun foncé. L'éclat de sa robe était surtout remarquable et les bandes foncées avaient un lustre particulier. Au premier coup d'œil, on s'apercevait qu'en ce qui concerne la disposition des bandes, il n'avait aucune res- semblance avec son père et un examen attentif permettait de reconnaître que, pour le nom- bre et la disposition des taches, il présentait beaucoup d'ana- logie avec le Zèbre des Somalis. Il porte au milieu du front (fig. 4) une large tache brune qui res- semble à l'empreinte du doigt. Au lieu d'avoir, comme son père, quatre ou cinq bandes frontales courbées se terminant en pointes aiguës, il présente Fig. 4.— Romuhs, fils de Matopo et quatorze bandes arrondies, rap- ^® Mulatto, à l'âge de vingt-sept pelant celles qu'on remarque sur pi,,t,.raphie de M. Reid.) le front du Zèbre des Somalis. Matopo a douze bandes cervicales ; Romulus en a vingt- quatre, qui toutes peuvent être suivies jusque sur la crinière. Ce nombre relativement considérable de bandes cervicales, (1) Pour certains détails complémentaires relatifs à Mulatto, la mère de Ho mulus, voir Veterinarian, novembre 1897. 318 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLLMATATION. semble indiquer qu'il appartient à un type plus primitif que le Zèbre des Somalis, chez lequel je n'ai jamais yu plus de quatorze bandes cervicales et le rapprocher d'une de mes femelles qui porte ce même nombre de bandes, en y com- prenant les bandes secondaires. La bande de l'épaule se bifurque plus haut que chez Matopo et est accompagnée de sept bandes cintrées, comprises dans l'angle formé par la bifurcation. Derrière la bande de l'épaule (fig.3), se trouvent neuf bandes verticales très distinctes, au lieu de cinq comme on le remarque chez son père (fig. 2) , correspondant aux trois bandes des flancs, qui existent si fréquemment chez le Zèbre de Burchell, se voient, chez l'hybride, en avant du grasset, trois rayures qui, d'abord dressées, se recourbent ensuite pour aller se terminer en arrière sous la nais- sance de la queue (fig. 3). Dans l'espace triangulaire qui se trouve entre la première bande du flanc et la neuvième ver- ticale, on remarque un grand nombre de petites lignes étroites dont les unes se dirigent vers la bande ventrale, tandis que les autres vont rejoindre la première bande du flanc. Parallèlement à ces lignes presque transversales, il y avait, à la naissance, des rangées de taches également dis- posées transversalement sur les reins et la croupe. Aujour- d'hui que Romiiliis est âgé de plus d'un an (fig. 5), beau- coup de ces taches se sont réunies pour former d'étroites bandes en zigzag, analogues à celles qui marquent le train de derrière du Zèbre des Somalis. Cette fusion des taches est beaucoup plus accentuée sur le C(3té gauche que sur le côté droit. De l'épaule à la naissance de la queue, on compte quarante-trois bandes, — à peu près le même nombre que chez le Zèbre des Somalis ; Matopo a seulement cinq bandes transversales après celle de l'épaule (flg. 2). — Le mélange des taches sur le train de derrière de Romuliis semble in- diquer que dans beaucoup de cas, les bandes ne sont primi- tivement que des taches ou des lignes ondulées et interrom- pues. Entre la troisième bande des flancs et la pointe du jarret, il existe un certain nombre de bandes foncées, alter- nant avec quelques bandes secondaires ; derrière le jarret sont quelques barres transversales et enfin quelques lignes obliques moins distinctes jusqu'au sabot. Quelques lignes semblables existent également sur les membres antérieurs. Ces bandes des jambes étaient à la naissance plus apparentes HYBRIDES DU ZÈBRE DE BURCHELL ET DE LA. JUMENT- 319 que chez le père. A partir de la crinière, une bande dorsale très apparente, portant de chaque côté une étroite bande jaunâtre, se continue en partie sur la queue. Celle-ci, à la naissance de l'hybride, portait jusqu'à sa base de longs poils, et, néanmoins, était marquée de trois bandes distinctes de Fi(j. 5. — JïomuhiS , à Tâge d'un ao, (Photographie de M. Swan Watson.] chaque côté ; j'ai vu une fois chez un Cheval la queue ornée de bandes semblables. Les oreilles, arrondies à leur extrémité, ne sont pas rela- tivement beaucoup plus longues que chez la plupart des Chevaux, les naseaux, par leur forme, leur position, etc., ressemblent à ceux des autres Zèbres ; les yeux et les sourcils sont intermédiaires, mais les cils longs et recourbés, diffèrent en cela de ceux des Chevaux et des Zèbres qui sont droits et assez courts. Le pied rappelle celui du Zèbre plutôt que celui du Cheval. Il paraît solide et résistant. HYBRIDES DU ZÈBRE DE BURCHELL ET DE LA JUMENT- 321 Dans ses mouvements, Romulus semble tenir beaucoup plus de son père que de sa mère. Quelques instants après sa naissance, il courait dans son boxe, paraissant impatient d'aller retrouver les autres animaux. Ce qui m'a surtout frappé au début, c'est son agilité et sa circonspection lorsqu'il se trouvait en présence d'objets qui lui semblaient suspects ou ne lui étaient pas familliers. Dans son enfance, lorsqu'il était surpris pendant son sommeil, il était vraiment merveil- leux de voir avec quelle rapidité il se dressait sur ses pieds, prêt à s'élancer. Le plus grand ennemi du Zèbre paraît être le Lion. Il lui échappe non par la rapidité de la course, mais par son agilité et les bonds qu'il fait au moment où son ennemi va s'élancer sur lui. Tous les hybrides ont hérité de cette faculté extraordinaire de bondir avec la plus grande rapidité. Les Zèbres sont difficiles à conduire, non parce qu'ils sont d'un naturel vicieux, mais parce qu'ils s'effraient facilement. A certains moments, ils sont pris de panique, s'imaginant sans doute que le Lion va les atteindre ; ils se précipitent, sans regarder, contre un mur ou une haie, et se jettent dans un fossé, sans que le mors ou les rênes puissent les arrêter. Dans leur éducation, on devra s'attacher surtout à combattre peu à peu cette tendance à bondir et à se dérober. On est arrivé assez facilement à corriger de ce défaut des Zèbres adultes. Il sera sans doute encore plus facile d'arriver au même résultat chez les hybrides. Du reste Romulus est parfaitement docile ; il se laisse facilement ferrer, et supporte l'examen de ses dents ; lorsqu'il avait un peu plus d'un an, il semblait disposé à être monté par un enfant. J"ai mentionné que Mulatio a juste 13 mains (1), tandis que l'étalon Zèbre a 12, 3 mains. A sa naissance, le 12 août 1896, Romulus mesurait 34 1/2 pouces au garrot; à deux mois 38 1/2 pouces ; à six mois 43 pouces ; et à douze mois 45 1/2 pouces. Sa croissance a été extrêmement irrégulière ; ainsi du 12 février au 12 avril, il n'a grandi que d'un demi- pouce, et du 12 juin 1897 au 12 septembre, de trois quarts de pouce seulement ; mais du 12 septembre au 12 décembre, sa taille augmenta d'un pouce un quart. Aujourd'hui, 12 jan- vier 1898, il mesure 47 1/2 pouces, presque 12 mains; ses (1) Main — 0™,4016. 322 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ D'ACCLIMATATION. jambes de devant ont 6 1/2 pouces de circonférence, le genou 10 pouces et le tour du corps à l'endroit où se place la sangle 52 1/2 pouces. Les poulains issus de Poneys noirs de l'île de Rum sont souvent de couleur gris souris foncé avec une bande dorsale peu apparente et portant une tâche sombre sur les épaules. Après la première mue chez ceux de race pure, le poil devient plus foncé et enfin presque noir, avec quelques taches sur les flancs et l'arrière-train. Comme je l'ai dit, Romulus à sa naissance, avait le poil d'un jaune orange bril- lant, tirant sur le jaune paille sur le museau, et vers les genoux et les sabots. Le dessous du cou et du ventre étaient brun foncé et la bande ventrale peu apparente. Les oreilles étaient garnies de poils d'un jaune orange bril- lant. A l'âge d'un mois, il commença à muer. Des poils clairs commencèrent à tomber de la face et de son cou, vers le milieu de septembre et, à la fln de ce mois, sa couleur géné- rale était devenue beaucoup plus foncée. Il continua à perdre ses poils jaunes et bruns, sauf sur le dos, pendant tout le mois d'octobre et vers le milieu de novembre. Le poil orangé de ses oreilles rappelait seul la jolie robe qu'il portait dans les premiers jours de sa vie. A la fin de novembre, son nouveau poil était complètement poussé. Les bandes orangées de sa face étaient remplacées par d'autres beaucoup plus pâles ; le museau était devenu brun, le cou et le corps gris souris et le bas des jambes brun foncé. Du garrot à la naissance de la queue, les poils étaient particulièrement longs et épais. A cer- tain moment, les poils recouvrant la plus grande partie de la croupe devinrent si longs que le reste paraissait avoir été tondu. Il se recouvrit d'un épais manteau de poils laineux d'un demi-poucé à 2 pouces de long et dont une partie at- teignait même 3 pouces. A leur racine, tous les poils étaient de couleur claire, de sorte que si l'animal avait été tondu, toute trace de bandes aurait disparu. Chez les Zèbres, au contraire, le pigment brun se montre dès la racine des poils, et, si courts que soient ceux-ci, les bandes sont toujours très visibles. Dernièrement, Matopo éprouva un accident qui lui enleva une partie de la peau auprès de la queue en faisant disparaître tout l'épiderme, et avant même qu'on pût distinguer les poils qui repoussaient à cet endroit, on constatait très nettement la place que devaient HYBRIDES DU ZÈBRE DE BURCHELL ET DE Lk JUMENT. 323 occuper les bandes foncées. On a dit que la peau des Zèbres était uniformément noire, même sous les bandes claires; il serait plus exact de dire qu'elle est presque entièrement de couleur gris foncé. Vers le milieu de mars, les longs poils commencèrent à tomber et à la fin de ce mois on pouvait les enlever par poi- gnées. En même temps, les longs poils de la partie basilaire de la queue tombaient aussi de sorte qu'à un certain moment, la queue de Romidus n'était guère plus fournie que celle de son père. A la fin de mai, tous les longs poils clairs ou foncés tombaient, et, de bonne heure en juin, les poils laineux, foncés et gris souris avaient aussi disparu. Vers le 0 juin, le poil d'hiver avait disparu autour des oreilles et au-dessus des yeux et l'on pouvait voir déjà quelle serait la couleur du pelage d'été. La mue se continua en juin et en juillet. Le 12 août, premier anniversaire de sa naissance, Romulus avait sa robe d'été. Les bandes foncées, formées de poils robustes et couchés sur la peau, étaient parfaitement indiquées. Les bandes intermédiaires étaient d^un rouge brun sur le front, mais sur le reste du corps d'une teinte rappelant celle du pelage d'été du Cerf. Pris dans son ensemble, Ro- mulus, à l'âge d'un an, était certainement d'une teinte géné- rale beaucoup plus foncée que pendant les premiers temps de sa vie. En même temps que tombaient les longs poils sur son corps et à la naissance de la queue, de nombreux crins se déta- chaient de la crinière. Chez un Mulet ordinaire issu d'une Poney de New-Forest que j'avais eue pendant quelque temps, tous les longs poils de la crinière étaient tombés pendant l'été. Mais chez Royyiulus, les nouveaux poils se montrèrent avant que les anciens fus- sent tombés. Bien que sa crinière fût plus courte, moins épaisse et moins dressée pendant le mois d'août, elle se com- posait néanmoins de poils fort longs. Aujourd'hui, cette cri- nière formée de crins ondulés de 7 à 9 pouces de longueur, tend à retomber d'un seul côté, comme chez certaines espèces de Zèbres. Vers le milieu de septembre, Romulus avait encore perdu une grande partie de ses poils les plus clairs qui furent rem- placés par de plus foncés. Probablement en raison de l'extrê- me douceur de la saison, les poils les plus longs ont déjà 324 BULLETIN DE LA SOCIÉTÉ L'ACCLIMATATION. commencé à tomber en janvier, comme ils le firent en mars dernier. Tous ceux qui ont vu Romuhis s'accordent à le considérer comme bien supérieur à son père et comme plus beau et mieux conformé que sa mère ; ayant été dressé dès le début, il est aujourd'hui extrêmement docile. Quelquefois cependant, il montre bien qu'il est plein d'ardeur et n'a pas besoin d'être excité. Il témoigne beaucoup d'affection à une petite Jument, de très bonne race. Lorsqu'on le sépare de cette Jument, il se montre quelquefois aussi inquiet que son père quand on dérange celui-ci de ses habitudes. La semaine dernière, un Cheval étranger galopant dans le paddock où il se trouvait, l'hybride s'anima aussitôt, se mit à trotter et à galoper, montrant de fort belles allures et il continua encore à galoper, quelque temps après que le Cheval eut quitté l'enceinte. Romulus a été récemment cité dans le ScoUish Farmer par un excellent juge de Chevaux, comme un très beau poulain, parfaitement constitué, aux actions élégantes et gracieuses ; il est remar- quable que rien ne rappelle chez les hybrides le Mulet ou le Bardeau. L'hybride « Remus ». La mère de Remus, Biddy, est une Jument 3/4 sang irlan- daise de 14,1 mains qui m'appartient depuis 1893 et qui a au- jourd'hui neuf ans. Elle est baie, marquée de taches noires, mais n'a de poils blancs nulle part. Remus est son premier produit, c'est une bonne bête, très douce, qui a toujours été en excellente condition, été comme hiver. Evidemment le Zèbre, avant de venir ici, ne s'était jamais trouvé avec des Chevaux, quand je le mis pour la première fois avec Mulatto, il se réfugia dans un coin, la queue entre les jambes, et poussant un cri particulier qui témoignait d'une grande frayeur, quelques Poneys se précipitèrent vers lui, la bouche ouverte, d'autres lui lancèrent des coups de pied. D'un autre côté, un étalon arabe et quelques Juments se mon- trèrent aussi effrayés en le voyant que s'il se fût agi d'un Tigre ou d'une bande de Lions. Pour le familiariser avec les Chevaux, je le plaçai le soir avec un Poney des Shetland, ardent, mais d'un caractère doux. Le Poney commença à taquiner le Zèbre qui bientôt fi HYBRIDES DU ZÈBRE DE BURCHELL ET ])E LA JUMENT. 325 mine de vouloir l'attaquer. Il se mit à tourner autour de lui, en cherchant à lui mordre les jambes. Le Poney, surpris d'abord par ce mode d'attaque, adopta bientôt la même tactique et à plusieurs reprises fit tomber le Zèbre à genoux (1). Après deux heures environ, le combat prit fin, sans qu'il y ait eu du reste grand dommage de part et d'autre, et, à partir de ce moment, Matopo et Scheila devinrent d'excellents amis. Mais pendant tout le printemps de 1896, le Zèbre demeura d'une extrême timidité et, même encore aujourd'hui, à la moindre démonstration hostile, il s'empresse de battre en retraite. Biddy est le premier animal adulte qu'il se soit décidé à approcher. Un jour, j'attachai Biddy dans une cour de 40 pieds environ, après avoir pris la précaution de lui bander les yeux. Le Zèbre entra et fit quelques pas vers elle, il s'approcha, posa sa tête sur son dos^ puis sur son garrot ; ensuite il lui lécha les lèvres et lui mordilla doucement les oreilles. Enfin il parut satisfait de son examen. Le Cheval ne lui parut plus un animal si terrible; il rentra à l'écurie et acheva son repas. Il avait vu une fois ce qu'était une Jument et il ne l'oublia plus. 11 y a cependant certaines Juments qu'il n'aime pas tandis qu'il a pour d'autres une grande aff*ection; il se montre très excité quand celles-ci passent près de lui. Mais il ne fait aucune attention aux Anesses. i?gmi