CHRONIQUE
Fouilles et découvertes
L'ÉGLISE PRÉROMANE DE SaINT-GtJILHEM-LE-DÉSERT.
— - Parfaitement documenté, bien pensé et clairement conduit, l'article de Robert Saint-Jean sur Saint- Guilhem-le- Désert doit emporter la conviction. Or l'affaire n'est pas mince, car elle concerne un important édifice préroman du Languedoc méditerranéen.
On sait dans quelles circonstances celui-ci est réapparu. Entre 1962 et 1970, à, l'occasion de l'aménagement du sanctuaire de l'ancienne abbatiale par le Service des Monuments historiques, on a dégagé une robuste substruction de plan rectangulaire au beau milieu de l'abside romane. On avait d'abord pu croire qu'il s'agissait d'un premier chevet de l'église du xie siècle, mais la poursuite de la fouille devait amener la découverte des deux dernières piles d'une nef plus ancienne, avec laquelle le sanctuaire mis au jour était manifestement en rapport. L'étude devait donc en être reprise à, la base, en se donnant comme objectif d'accorder la totalité des renseignements procurés par les fouilles avec les données de l'histoire. C'est ce que Robert Saint-Jean a réussi avec bonheur.
Le monument découvert dans l'abside romane est une construction rectangulaire, longue de 6 mètres et large de 4,50 m. dans œuvre, partagée en deux nefs de deux travées par trois piliers carrés alignés. Cette disposition laisse présumer que l'édifice était à l'origine voûté : une hypothèse que confirme l'examen des murs. Déjà épais de 90 centimètres à un mètre, ils sont encore renforcés à l'intérieur par de grands arcs de décharge et à l'extérieur par des contreforts.
La destination du monument est donnée par un massif de maçonnerie de 2,50 m. de longueur pour 90 centimètres de largeur et 65 centimètres de hauteur, qui se trouve placé transversalement au fond de la nef de droite et qui est construit en tuf et recouvert d'un épais enduit au mortier de chaux comme l'ensemble de la construction. Cette banquette porte des traces très nettes d'un scellement de dalles verticales disposées en forme de sarcophage. Il s'agit donc d'une tombe privilégiée que Robert Saint-Jean identifie avec celle de saint Guilhem lui-même. Nous avons affaire à un caveau funéraire dépourvu de fenêtres, ou mieux à une confession sans autel ayant servi de base à un sanctuaire. Une étude des niveaux indique qu'elle ne se trouvait qu'à 50 centimètres en contre-bas de la nef avec laquelle elle communiquait par une grande arcade. Elle n'était donc pas enterrée. Deux escaliers, établis sur des arcs en quart de cercle, de part et d'autre de la grande arcade centrale, permettaient d'accéder à l'autel élevé au-dessus.
On dispose de deux sortes de données pour dater c^tte intéressante construction. Les unes proviennent de l'analyse
archéologique. C'est ainsi que le moyen appareil de tuf avec des joints de mortier réguliers exclut le xie siècle, qui a vu,
CI. J. Calderon del. PLAN DE LA CRYPTE DE SAINT-GUILHEM-LE-DÈSERT
A : Soubassement du tombeau. B : Arc d'entrée de la confession.
CC : Fondations des piles du transept de l'église haute. DD' : Amorces des arcs au-dessus du couloir transversal. EE' : Premiers piliers de la nef préromane.
à Saint- Guilhem-le-Désert, le règne du premier art roman méridional et de son appareil de pierre froide taillée au pic. Les arcs de décharge, faiblement outrepassés, dépourvus d'impostes, et établis en retrait sur les piédroits, apparaissent