danabbott
beautiful.
funny.
uncategorisable.
A labyrinth of flowers and half-memories.
I'm smitten!
Favorite track: Sabots triviaux.
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La grande accumulation
08:34
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Quand elle sort dans la rue
Où qu’elle aille se promener
Elle donne des coups de pied
Elle donne des coups de pied
Elle donne des coups pied dans les cailloux
Mais quand elle donne un coup de pied dans un caillou
Elle est obligée de le garder
Et de l’emmener à la maison
C’est comme ça et pas autrement
Elle est obligée de le garder
Et de l’emmener à la maison
C’est comme ça et pas autrement
Elle se promène dans la rue
Elle donne un coup de pied dans un petit caillou
Elle ramasse le petit caillou
Elle emmène le petit caillou à la maison
Et elle le dépose.
Elle donne un coup de pied dans un moyen caillou
Elle ramasse le moyen caillou
Elle emmène le moyen caillou à la maison
Et elle dépose le moyen caillou à côté du petit caillou
Elle donne un coup de pied dans un caillou biscornu
Elle ramasse le caillou biscornu
Elle emmène le caillou biscornu à la maison
Et elle dépose le caillou biscornu à côté du moyen caillou et du petit caillou
Elle donne un coup de pied dans un caillou qui a un peu la forme d’un lapin
Elle ramasse le caillou qui a un peu la forme d’un lapin
Elle emmène le caillou qui a un peu la forme d’un lapin à la maison
Et elle dépose le caillou qui a un peu la forme d’un lapin à côté du caillou biscornu,
du moyen caillou et du petit caillou…
Caillou après caillou, caillou après caillou, les cailloux s’accumulent.
Mais elle finit par ne plus se cantonner aux cailloux
Et quand elle se promène dans la rue
Et qu’elle donne un coup de pied dans un objet
Elle est obligée de le garder
Et de l’emmener à la maison
C’est comme ça et pas autrement
Elle est obligée de le garder
Et de l’emmener à la maison
C’est comme ça et pas autrement
Alors comme ça
Elle donne un coup de pied dans un bouchon de liège
Elle ramasse le bouchon de liège
Elle emmène le bouchon de liège à la maison
Et elle dépose le bouchon de liège à côté de ses trente-cinq- mille-cinq-cents cailloux
Elle donne un coup de pied dans un emballage de sandwich triangle
Elle ramasse l’emballage de sandwich triangle
Elle emmène l’emballage de sandwich triangle à la maison
Et elle dépose l’emballage de sandwich triangle à côté du bouchon de liège et des trente-cinq-mille-cinq-cents cailloux
Elle donne un coup de pied dans un chien
Elle ramasse le chien
Elle emmène le chien à la maison
Et elle dépose le chien à côté de l’emballage de sandwich triangle, du bouchon de liège et des trente-cinq-mille-cinq- cents cailloux
Elle donne un coup de pied dans un congélateur éventré
Elle ramasse le congélateur éventré
Elle emmène le congélateur éventré à la maison
Et elle dépose le congélateur éventré à côté du chien,
de l’emballage de sandwich triangle, du bouchon de liège et des trente-cinq-mille-cinq- cents cailloux
Elle donne un coup de pied dans le pneu d’un tractopelle
Comme elle n’a pas de quoi séparer le pneu du tractopelle Elle ramasse le tractopelle,
Elle emmène le tractopelle à la maison
Et elle dépose le tractopelle du chien, de l’emballage de sandwich triangle, du bouchon de liège et des trente-cinq-mille-cinq- cents cailloux
Objet après objet, objet après objet, Les objets s’accumulent.
Un jour : merde alors, la maison est pleine.
Les cailloux, qui sont bien plus de trente-cinq-mille-cinq-cents désormais, cumulés au très nombreux bouchons, aux engins de chantiers avec ou sans personnel, sans même parler des ballons dérobés à des enfants en pleurs, des revues périodiques qu’elle ne lira bien évidemment jamais mais qu’elle classe, des mouchoirs usagés qui sèchent consciencieusement aux murs et des diverses fournitures
de bureau dont les trombones font partie – tout ces objets dans lesquels elle a donné des coups de pied remplissent sa maison désormais.
Plus de place pour elle
Elle emmène juste le chien
Et elle va dormir dans la rue.
Par inadvertance,
Elle donne un coup de pied dans un mec
Elle ramasse le mec
Mais elle est bien emmerdée :
Elle n’a plus nulle part où l’emmener !
Alors bon, elle le suit.
Il proteste, évidemment Il se débat, se met à courir
Mais la v’là sur ses talons !
Impossible de la semer !
C’est comme ça et pas autrement
La voilà devenue son ombre
La voilà devenue sa queue
C’est comme ça et pas autrement
La voilà devenue sa queue
C’est comme ça et pas autrement
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2. |
Sirop amer (la goule)
04:00
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Tapie dans le caniveau
Parmi les vers et les crapauds
Je guette les voyageurs
Dans l’ombre j’attends mon heure
Je suis la goule ! Je suis la goule ! Si t’as des beaux mollets
Prends garde je vais attaquer
J’enlève mes guenilles
J’entonne ma mélodie
Je suis la goule ! Je suis la goule !
Ma voix est un sirop
Avale et fais dodo
Je ponds mes œufs dans ton sommeil
Je suis la goule !
Ma voix est un sirop
Avale et fais dodo
Mon corps est un charnier
Rempli d’amants décomposés
Cherche et tu trouveras
Sans doute un pote à toi Je suis la goule ! Je suis la goule !
Le pauvre, il n’a pas su Flairer le parfum alarmant
Des crétins qui avant lui
Ont succombé à mon chant
Je suis la goule ! Je suis la goule !
Ma voix est un sirop Avale et fais dodo
Je ponds mes œufs dans ton sommeil éternel
Je suis la goule
(Ils écloront au petit matin
Tu seras pris d’une fièvre fatale
Aucune plante médicinale
Aucun onguent n’y fera rien)
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3. |
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Est-ce que tu penses que
René est têtu ?
Est-ce que ses cousins sont en vie ?
Si Breton est son cousin en poésie, est-ce que les cousins de Breton sont en vie ?
S’ils sont en vie, est-ce qu’ils comprennent comment des opposés peuvent se fondre au sein d’un tout ?
S’ils comprennent, est-ce qu’il y a des peintres et des sculpteurs parmi eux ?
Lesquels, s’il y en a, se souviennent de la planète telle qu’elle était avant Socrate ?
De quoi se souviendront-ils quand le grenier aura pris feu ?
C’était qui, ce Virgile ?
Combien de pages il faut pour faire l’éloge d’un poète ?
Bon, ben je vais siffler maintenant
C’était qui ? C’était qui, ce Virgile ?
Mais qu’est-ce que c’est que cette histoire ?
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4. |
Sabots triviaux
04:07
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Une tour d’argent et un phacochère
Ils ne sont pas censés se rencontrer
Que ferait le phacochère dans l’escalier ?
L’escalier est escarpé Le phacochère a du mal à le monter
La délicatesse infinie de la tour d’argent décontenance le phacochère Il se précipite, toutes défenses en avant
Les poils de ses verrues au vent
Fou d’un enthousiasme débordant
Mais la tour d’argent est trop gracile
Pour ses sabots triviaux
La tour d’argent apprécie les efforts du massif animal
Le phacochère se reflète dans les parois de l’escalier de la tour
La tour se sent flattée
Le phacochèr
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5. |
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Certaines conditions sont rarement remplies
Un journal, par exemple, ne peut pas chanter dans un rêve Mais certains oiseaux,
quand leur queue est en feu, peuvent se toucher Pour peu qu’ils aient bien chacun leur sac, leur chapeau à froufrous et leur cortège de papillons
Sauf les paons,
Les paons qui jouent aux cartes
Cartes avec lesquelles ils sont en train de composer une sonate
Certaines conditions sont rarement, certaines conditions sont rarement remplies
Certaines conditions sont rarement, certaines conditions sont rarement remplies
Une sonate,
Une sonate au jambon Jambon longuement mariné dans les larmes d’un dandy
Un dandy, par exemple, a toutes les difficultés du monde
A aller voir la Joconde s’il est accompagné de douze autre dandys même si ces derniers ont mis leurs plus beaux pantalons à l’envers comme il se doit
Car le canard télépathe – mais si, enfin, souvenez-vous –
Est là pour protéger contre les courants d’air
Les dents de Mona Lisa
préalablement retirées de la mâchoire de cette dernière
Et conservées dans un coffre uniquement ouvrable par la pensée
Or je ne sais pas si vous avez déjà essayé d’infléchir un tel gugusse Mais à moins d’avoir sur vous
deux battements de cils en argent d’une valeur de dix- mille euros chacun, c’est mort
Certaines conditions sont rarement, certaines conditions sont rarement remplies Certaines conditions sont rarement, certaines conditions sont rarement remplies etc.)
Rien dans cette histoire ne tient debout
Dès lors qu’on lui retire son ample manteau de plumes et la caisse sur laquelle elle est perchée Il n’y a vraiment plus rien à en tirer ; à la rigueur, j’aurais tendance à vous recommander
De la débiter en tronçons puis d’en faire du petit bois ; c’est très utile, le petit bois, et tout le monde, vraiment tout le monde peut en avoir l’usage
Sauf les paons,
Les paons qui jouent aux cartes
Cartes avec lesquelles ils sont en train de composer une sonate
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6. |
La reine des bordels
08:00
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Quelques miettes sur un socle vide
C’est tout ce qui reste de la reine des bordels
Les ouvriers vont raser la villa
Sur le macadam gisent les tripes d’un chat
Le jour où Gilles a gagné son premier million il suffoquait sous sa moustiquaire
Les jambes velues de son collègue endormi
Lui ont paru porter des bas résille
A présent, inclinons le dossier de notre siège pour observer la statue de Maria, enfin libre, qui survole les cimes brûlées par le soleil. Dans quelques instants, elle va rencontrer Gilles.
«Merhaba»
Voilà, c’est fait
Il est temps de se taire. La ville connectée est loin.
Un souffle hélicoïdal porte nos deux héros. Peu leur importent les carcasses desséchées qui s’amoncellent à leurs pieds. Ce qui les intéresse, ce sont les vers qui y ont élu domicile, les vers, les merveilleux vers.
«Et en fait là je lui ai fait un benchmark, tu vois
– Un quoi ? – Un benchmark
– C’est quoi ? – En fait, c’est un… c’est un…
– C’est comme un diagnostic ? – Oui, toi tu pourrais appeler ça “diagnostic”, j’imagine, oui – Ok, donc t’as fait
un diagnostic – Voilà, j’ai fait un diagnostic, ouais»
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