vendredi 18 juillet 2025

Les Berbères seraient-ils des Arabes ?

L’arabisation de l’Algérie entreprise après l’indépendance de 1962 se heurte à la résistance berbère (soulèvement kabyle de 1963, Printemps Berbère de 1980-1981, « grève du cartable » de 1994, etc.). Face à cette volonté de survie, le régime algérien use de l’arme de la répression. Ses résultats étant nuls, il a donc défini une nouvelle stratégie : tenter de soutenir avec l’aide des idiots utiles de l’extrême gauche française que le problème n’existe pas puisque les Berbères sont en réalité une création coloniale destinée à diviser les Algériens.

Le 1er mai 2025, Mohamed El Amine Belghit, historien officiel et porte-parole de l’institution militaire algérienne déclara ainsi sur la chaîne émiratie Sky News Arabia, que « l’amazighité est un projet idéologique sioniste-français par excellence visant à saper les piliers de l’unité du Maghreb arabe (…) puisque les Berbères (…) sont d’origine arabe. »

Ce faisant, l’auteur de ces propos à ce point outranciers qu’ils furent dénoncés par le pouvoir algérien lui-même, était fidèle à la ligne suivie par les idéologues du courant « arabo-islamo-conservateur » qui dirige l’Algérie depuis 1962. Selon ces derniers, l’islamisation a marqué la fin de l’histoire des Berbères puisque leur conversion à l’Islam, il y a quatorze siècles, les a inscrits de façon irréversible dans l’aire culturelle de l’Islam, donc de l’arabité.

D’autres propagandistes officiels estiment qu’il est faux de parler d’arabisation des Berbères puisque la langue berbère procédant du phénicien (???), les Berbères sont donc des Orientaux, comme le sont également les Arabes. Par conséquent, tout se passant en « famille », où est donc le problème ?

Cette théorie de l’arabité des Berbères qui va à l’encontre de toutes les preuves scientifiques (archéologiques, épigraphiques, linguistiques, et anthropologiques), vient d’être balayée par la génétique. Cette dernière démontre ainsi que les Berbères ont de tout temps peuplé l’Afrique du Nord et qu’ils n’ont eu que très peu d’apports génétiques extérieurs. L’analyse de momies naturelles datées de 7000 ans [1]  montre ainsi que :

1) Les proto-Berbères n’ont aucune trace génomique tant sud-saharienne, c’est-à-dire avec les actuelles populations noires, qu’orientales, donc avec les Arabes.

2) Que ces momies de proto-Berbères datées d’il y a 7000 ans sont génétiquement apparentées à l’homme de Taforalt qui vivait au Maroc il y a environ 15000 ans, et dont l’ADN ne montre également aucune trace de gènes sud-sahariens ou associés à des populations orientales. Les seules traces de gènes extérieurs seraient celles, en faible nombre, de l’homme de Néandertal européen.

Les Berbères qui remplissent tous les critères de l'ONU, à savoir l'antériorité, l'identité distincte et l'auto-identification par rapport au territoire, ne peuvent donc se voir retirer leur statut de Peuple autochtone par des idéologues arabistes. D’autant plus que ce statut qui est une évidence scientifique, vient encore d'être renforcé par la génétique.

Cette découverte sera étudiée en détail dans le numéro 188 de l’Afrique réelle que les abonnés recevront le 1er août prochain. Pour vous abonner, cliquer ici.

[1] Nada Salem,  Johannes Krause et alli .Ancient DNA from the Green Sahara reveals ancestral North African lineage. Nature, 02 April 2025, DOI: 10.1038/s41586-025-08793-7

mardi 1 juillet 2025

L'Afrique Réelle n°187 - Juillet 2025

Sommaire

Actualité :
- Les deux projets du gazoduc Nigeria-Europe
- Le Maroc, trait d'union entre Méditerranée et Afrique noire
Dossier : Le ruineux fardeau colonial
- La ruine de la France
- La France a surpayé les productions de son Empire africain
- L’Empire, une rente et une bouée de sauvetage pour des secteurs économiques condamnés
- L’Algérie, un insupportable fardeau économique  pour la métropole
- L'échec de la doxa face à Jacques Marseille

Editorial de Bernard Lugan

« Génocide colonial » ou ruine de la France coloniale ?

Selon un histrion du nom de Jean-Michel Apathie, la colonisation française aurait été une entreprise génocidaire à ce point emblématique que le nazisme s’en serait inspiré… 
Ce faquin qui, il y a quelques années, proposait de raser le château de Versailles (!!!), n’inventait rien en proférant ces inepties. Il ne faisait en effet que répéter servilement le discours décolonial dominant, s’inscrivant ainsi dans la lignée de l’Emmanuel Macron candidat à la présidence de la République, qui osa parler à Alger de la colonisation comme d’un « crime contre l’humanité » décoloniaux. 
Singulier « crime contre l’humanité » et singulier « génocide » en effet, qui eurent pour résultat l’explosion démographique coloniale, et plus particulièrement algérienne, la population de ce dernier pays passant d’un peu plus d’un million d’âmes en 1830 à plus de dix millions en 1962…

Autre poncif de la doxa, la France aurait tiré sa richesse du pillage de son empire. Avant même tout examen des chiffres, la réponse à cette accusation récurrente tient en une question de bon sens : puisque la France tirait sa prospérité du « pillage » de son Empire, pourquoi son économie ne s’est-elle donc pas effondrée avec la décolonisation ? Pourquoi, tout au contraire, a-t-elle économiquement considérablement bénéficié de cette rupture durant la décennie 1960 ?

La réponse à cette question a été donnée en 1984 par Jacques Marseille qui publia un livre fondateur (republié en 2005) dont le titre était « Empire colonial et capitalisme français, histoire d'un divorce ». Dans ce livre, l’auteur bouleversait totalement et en profondeur la perspective coloniale en démontrant que :

1) Contrairement à ce qu'avait postulé Jules Ferry, les investisseurs privés se détournèrent de l’Afrique, laissant donc à l’Etat français le fardeau de sa mise en valeur à travers les emprunts d’Etat et les impôts des Français.

2) L’Empire ne fut pas une « bonne affaire » car ses produits qui n’étaient pas rares furent achetés par la métropole à des coûts supérieurs à ceux du marché international. 

3) Les territoires n’ayant pas de ressources propres, leurs budgets durent être constamment alimentés par la France. 

Non seulement la France n’a donc pas pillé l’Afrique, mais, tout au contraire, elle s’y est ruinée. Son empire africain fut même un boulet économique pour la France qui s’était condamnée à y assurer la totalité des investissements dans tous les domaines, qu’il s’agisse du génie civil, de la santé ou de l’éducation. En retour, et là encore contrairement aux mensonges des décoloniaux, l’empire lui fournissait à des prix supérieurs à ceux du marché des productions qu’elle payait en réalité deux fois puisqu’elle les avait subventionnées.