Entre Agen et Toulouse et la chaleur
Dimanche matin, nous quittons notre location pour entamer la dernière partie de notre voyage. Nous arrivons miraculeusement à ranger et rendre la maison à peu près dans les temps et malgré les efforts soutenus des enfants, rien n'est cassé et le canapé est en un seul morceau. Nous disons au revoir à ma sœur et au neveu. Quant au filleul, il nous quitte pour la soirée et va avec sa mère et sa sœur. Nous repartons donc à trois. C'est notre plus grosse journée de route car nous devons rejoindre Agen et avons décidé de passer par l'intérieur des terres. Nous traversons le magnifique paysage des Causses, sauvage et désertique. Nous nous arrêtons déjeuner à Saint-Affrique, écrasée sous le soleil. Il y a une sorte de compétition de Crossfit et un unique restaurant ouvert où nous nous nourrissons (très sainement) de charcuterie, fromage et frites. Puis nous continuons, redescendons vers Toulouse puis sur l'A62 qui rejoint Agen. Voyant qu'un accident bloque la circulation, nous faisons une rapide pause. Quand nous repartons, l'embouteillage est toujours là mais nous découvrons surtout que l'autoroute a été fermée dans l'autre sens. Nous passons à côté de l'accident, voyant l'hélicoptère des secours, puis devant les voitures à l'arrêt dans la canicule depuis plusieurs heures. Les gens sont sortis des voitures, ont installé tables et chaises, se protégeant autant que possible du soleil brûlant.
Pour nous, c'est un simple ralentissement et nous arrivons bientôt à notre camping. Nous avons un joli emplacement, très grand et ombragé, près d'un petit canal où il y a des canards. Nous étions au frais dans la voiture avec la clim mais là, nous retrouvons la chaleur. Il est déjà plus de 19h mais après le montage des tentes nous sommes en sueur. La piscine est encore ouverte et nous décidons d'en profiter rapidement. Il y a deux beaux bassins, et même des toboggans aquatiques. L'enfant a pied dans tout le petit bassin (il est ravi) mais n'ose pas faire les toboggans de peur d'avoir la tête sous l'eau. Nous ne restons pas longtemps car nous sommes invités à dîner ce soir. Une amie de Seb habite à Agen et c'est pour lui rendre visite que nous sommes venus passer quelques jours ici. Végétarienne, elle nous sert une délicieuse salade qui équilibre un peu notre déjeuner peu diététique.
Lundi, nous devons retourner vers Toulouse pour retrouver Reb et les enfants. Ils logent chez une amie et doivent voir aujourd'hui deux cousines des filleuls qui passent leurs vacances ici. Nous partons en fin de matinée et nous voilà de nouveau sur l'A62 (il y a environ 1h30 de route entre Agen et Toulouse). Aujourd'hui, c'est aussi le pic de canicule qui touche en ce moment la région. Nous avons été épargnés par la chaleur les premiers temps de notre voyage. La semaine dernière, les températures ont monté petit à petit et aujourd'hui, il devrait faire plus de 40. Pour cette raison, nous devons retrouver Reb sur une base de loisirs où l'on peut se baigner. Nous arrivons vers 13h. Nous n'avons pas encore mangé et cherchons des trucs à emporter. Mais il n'y a rien là où nous sommes que de l'herbe desséchée et des activités fermées. Après un certain temps à marcher sous l'écrasante chaleur, nous retournons à la voiture et suivons les indications pour un hypothétique restaurant de burgers. Il s'avère fermé mais juste à côté, il y a une boulangerie salvatrice, climatisée avec des tables et plusieurs sandwichs appétissants. C'était inespéré et très agréable. Nous restons un moment et achetons avant de partir une délicieuse tarte "châtaignes noisettes" pour le goûter.
Nous retournons à la base de loisirs et y trouvons Reb et les maintenant 4 enfants (les deux filleuls et leurs deux cousines). Il faut encore marcher jusqu'à la plage puis patienter car cette dernière est "pleine" (il y a un contrôle à l'entrée de la plage avec une jauge). Heureusement, bientôt nous pouvons enfin nous installer. L'eau du lac est tiède, presque chaude mais elle nous rafraîchit quand même. Les enfants passent toute l'après-midi dans l'eau. Nous, nous sortons nous installer à l'ombre des arbres. Il y a un léger vent qui apporte de l'air mais dont le souffle est chaud. Cependant, nous sommes bien malgré l'écrasante chaleur. Les arbres, l'ombre, le lac, la végétation : c'est un bon endroit pour passer les heures les plus chaudes de la journée.
Nous repartons en fin d'après-midi et décidons d'aller à Toulouse Plage, dans le centre-ville au bord de la Garonne, pour le début de soirée. Le soleil est bas mais la ville irradie de chaleur par ses murs et ses rues. Il n'y a presque personne et la plupart des installations sont fermées à cause de la canicule. Il ne reste qu'une petite station de jets d'eau surveillés pour les enfants. Ils y vont tous et heureusement peuvent y être seuls à partir de 6 ans (sinon, il faut être accompagné d'un parent obligatoirement en maillot de bain ce qui me semble une règle tout à fait absurde pour de simples jets d'eau). Les enfants avaient effectivement gardé leurs maillots depuis la base de loisirs mais pas nous. Pendant ce temps Reb et moi trouvons le seul endroit qui sert de la nourriture (il y a des samosas, des frites, des falafels et un plat au poulet). Nous commandons pour tout le monde puis Seb nous rejoint avec la troupe. Reb doit partir rapidement car les cousines doivent rentrer chez elles. Nous repartons peu de temps après, ayant récupéré au passage le filleul qui revient à Agen avec nous. Nous reprenons l'A62 dans le crépuscule et arrivons dans la nuit au camping. Ce soir là, bien que je me couche à presque minuit, j'ai pour la première fois vraiment trop chaud sous la tente. Heureusement, il suffit d'être patient. Dès qu'un brin de fraîcheur apparaît, la tente se rafraîchit elle aussi et on est bien.
Le lendemain, nous avons prévu tranquillité et repos. Dès le matin, nous allons à la piscine ce qui ravit les enfants. Nous avons du mal à les faire sortir vers midi pour aller déjeuner. Nous devons retrouver notre amie à Agen pour le repas ce qui nous permettra de voir un tout petit peu la ville. Il y a quelques jolies maisons anciennes mais les rues sont désertes et certaines façades paraissent même abandonnées. Le restaurant est délicieux et contraste avec les menus frites / pizza / burgers ou bien saucisses / fromage / cassoulet qui ont fait l'essentiel de nos repas. Nous avions évoqué l'idée d'aller visiter quelque chose cet après-midi mais il fait trop et je propose de rentrer directement au camping avec les enfants tandis que Seb et son amie se promènent un peu en ville. Pendant qu'on terminait le resto, les enfants se sont précipités dans une fontaine et mis directement sous les jets d'eau. Je les ramène tout mouillés à la voiture et ils ont à peine le temps de sécher avant de se plonger dans la piscine.
Hier au lac, l'enfant est allé s'aventurer seul avec son flotteur là où il n'avait pas pied après un premier essai où son père l'avait un peu poussé. Il est compliqué de savoir comment agir : si on ne force rien, il n'essaie rien, mais si on force trop, il se braque. En tout cas, aujourd'hui, il fait des progrès. Ce matin, il a suivi le filleul dans le petit toboggan. Il le descend tout doucement puis se glisse hors du toboggan jusqu'à la piscine en se tenant pour éviter de faire "plouf". Mais cet après-midi, il est plus audacieux et se laisse vraiment tomber dans l'eau et va jusqu'à mettre rapidement la tête sous l'eau. Avec mes encouragements, il prend de l'assurance et disparaît réellement sous l'eau quelques secondes. C'est un progrès tellement énorme vu ses refus répétés et définitifs que j'ai du mal à y croire. Il saute même dans la piscine !
Il n'est pas le seul à sauter. Le grand bain propose un plongeoir avec une profondeur de 3m80. C'est très rare dans une piscine de camping et on en profite. L'enfant n'en est pas à sauter du plongeoir, ni même à sauter dans le grand bain, mais il nous y accompagne sans râler et nage au dessus des profondeurs. La piscine est bien faite, il y a un petit rebord où il peut se reposer. Le filleul et moi sautons du plongeoir, le filleul adore et le fait volontier de nombreuses fois. Quand Seb nous rejoint, il y arrive lui aussi malgré ses appréhensions. Et moi, je fais mieux que ça. Comme il y a de la profondeur je peux vraiment plonger. Je m'entraîne d'abord du bord de la piscine pour retrouver le mouvement puis plusieurs fois depuis le plongeoir surélevé. Je n'ai pas la parfaite aisance de certains mais mon mouvement reste élégant et je suis fière car cela faisait plusieurs années que je n'avais pas plongé. C'est une des rares choses que je sais faire moi qui ne suis ni souple, ni sportive.
L'après-midi se passe ainsi, la piscine nous rafraîchissant de la canicule. C'est une façon assez agréable de passer ces grandes chaleurs. À l'heure de la fermeture, nous nous installons au snack du camping avec notre amie qui est revenue en même temps que Seb. Ils servent des pizzas et quelques plats et salades. Nous voyons à peine les enfants qui jouent un peu plus loin. Ils ont même l'idée saugrenue d'emporter leurs glaces sur le trampoline ce qui n'est une bonne idée ni pour les glaces, ni pour le trampoline, ni pour Seb qui doit aller nettoyer. Nous rentrons à la tente à la nuit tombée. Pour éviter la chaleur, je reste jusque tard assise dans la nuit. Quand je rentre me coucher, un début de fraîcheur s'est déjà installé.
Le mercredi est notre dernière journée et nous avons prévu d'aller au parc Walygator. C'est un ancien parc Walibi qui a changé de nom et c'est d'ailleurs deux parcs car il y a aussi le parc aquatique Aqualand. J'ai passé beaucoup de temps sur le site à essayer de comprendre l'organisation de ces deux parcs. Sur internet, je n'ai pu trouver que des billets couplés mais au camping, ils offrent des prix pour un seul parc ou 2 parcs sur 2 jours. Finalement, j'ai pris des billets pour tout le monde sur le site qui permettent bien d'aller aux 2 parcs le même jour. Et c'est seulement en arrivant sur place que je comprends que l'on peut effectivement passer d'un parc à l'autre sans ressortir.
Nous sommes 7 : l'amie de Seb est avec nous ainsi que Reb et la filleule qui nous ont rejoint depuis Toulouse. D'ailleurs, elles arrivent avant nous et sont déjà dans les attractions alors que nous sommes encore en train d'organiser nos affaires. Nous commençons par la partie "Walygator". Il y a quelques attractions sympa comme un grand splash que l'on fait cependant à 6 car l'enfant refuse d'y monter. Il faut composer avec les désirs et possibilités différentes des enfants en fonction de leurs âges. Par ailleurs il faut chaud et nous ne voulons pas faire de longues files. Notre tour du parc est au final assez rapide et après le pique-nique, nous décidons de rejoindre la partie parc aquatique.
Les débuts sont un peu chaotiques. Là encore, nous sommes nombreux, nous nous séparons pour pouvoir poser les affaires et explorer le parc mais avons du mal à nous retrouver. Et puis les deux garçons n'ont pas tout à fait envie des mêmes choses, sont tout plein de leur excitation, me tirent dans différentes directions et prennent rapidement des airs boudeurs. Au bout d'un moment, l'excitation retombe un peu, les priorités ont été établies, nous retrouvons l'ensemble du groupe et comprenons mieux le parc. Je comprends aussi ce qui ne va pas depuis le début et explique pourquoi nous n'avons pas pu nous poser calmement : il n'y a pas vraiment de bassin. Il y a seulement une petite piscine à vague pas très agréable et sous-dimensionnée dans laquelle on ne peut pas se poser car il y a beaucoup trop de monde. En dehors de ça : que des toboggans !
Bon c'est assez étonnant et un peu décevant pour un parc aquatique, surtout quand il fait chaud comme aujourd'hui, mais une fois qu'on a compris ce problème et accepté la situation, on peut profiter du reste. Nos affaires sont installées sur l'herbe et nous allons voir les différents toboggans en petits groupes. L'enfant a joué un moment dans la piscine à vague et dans les petits toboggans pour enfant. J'arrive maintenant à le convaincre de m'accompagner sur les grands toboggans. Il y en a deux qu'il a le droit de faire avec moi. On est sur des grosses bouées et ça ne descend pas trop vite. Il était un peu impressionné au départ mais finalement ça lui plaît bien et on le fait plusieurs fois. Le filleul a retrouvé sa sœur qui était d'abord partie explorer sans lui. Ils font eux aussi le même toboggan que nous puis d'autres car il est assez grand pour faire tous ceux du parc. Plus tard, j'en fais un avec lui où l'on est sur de très grosses bouées pour 4 personnes et on glisse dans une sorte d'entonnoir géant. On reste au final jusqu'à la fermeture terminant par un dernier passage à la piscine à vague qui est beaucoup plus agréable maintenant qu'il y a moins de monde.
On rentre enfin tous au camping. J'aide Reb à installer sa tente sur notre emplacement puis on se retrouve comme la veille au snack pour le dîner. On a ce soir là les premières gouttes de pluie de notre séjour qui nous dérangent à peine. C'est la fin des vacances. Le lendemain, on doit non seulement ranger toutes nos affaires mais réorganiser nos sacs et valises pour pouvoir prendre le train. Reb peut prendre certaines choses car elle repart en voiture mais nous sommes tout de même très chargés. Malgré tout le rangement, nous arrivons à profiter une dernière fois de la piscine (et les enfants qui n'ont rien rangé du tout en profite encore plus que nous). Puis c'est le départ : Reb et la filleule vers le nord, nous et les 2 garçons vers le sud. Car nous devons une dernière fois prendre l'A62 vers Toulouse où nous rendons la voiture et prenons le TGV pour Paris (qui repasse encore à Agen, on aura passé beaucoup de temps à faire des allers retours entre ces deux villes). Le jeudi soir, nous sommes chez nous, pas mécontents cependant de dormir dans du dur et plus sous la tente.
Lacs, rivières et enfants
Le jeudi matin, nous devons quitter notre beau camping au bord de l'Hérault mais les vacances ne sont pas terminées pour autant. Aujourd'hui, nous n'avons que très peu de route. Nous rejoignons simplement une location à quelques kilomètres au sud où nous devons passer quelques jours avec ma sœur et son fils de 3 ans. Nous rangeons tranquillement nos tentes et disons au revoir à nos amis qui restent encore quelques jours par ici.
Je propose d'aller pique-niquer à la cascade de la Vis (affluent de l'Hérault) qui n'est pas très loin et me fait très envie. Nous sommes toujours avec Reb et les enfants et partons donc à deux voitures dès que nous avons fait quelques courses. Le site est facile à trouver et nous découvrons que nous ne sommes pas les seuls à avoir eu la même idée. Le parking municipal est plein. Nous nous garons un peu plus loin sur la route mais ces emplacements sont en réalité interdits et nous prendrons des amendes. Enfin bon, nous descendons dans la chaleur avec nos pique-niques, maillots, serviettes etc et nous arrêtons à l'ombre sous un petit pont au bord d'un ruisseau. Là nous essayons d'empêcher les enfants de se tremper dans la rivière avant d'avoir mis leurs maillots ou d'éborgner quelqu'un en faisant des ricochets. Nous soignons le pied de l'enfant qui s'est blessé car il n'avait pas mis ses chaussures. Nous crions des "viens manger ton sandwich ! Pourquoi tu ne veux pas celui là ? Tu veux quoi alors ?", pris dans ce soucis constant de nourrir les enfants qui risquent de dire "j'ai faim" dès qu'on aura rangé les affaires. Puis Seb remonte poser la glacière à la voiture pendant que nous avançons vers la cascade.
Quel magnifique spectacle ! Dès que nous avons passé le petit pont, nous découvrons la Vis dans laquelle se jette le ruisseau et le superbe site de la cascade. Il y a beaucoup de monde mais on trouve une place sur un bout de rocher. La cascade est un peu plus haut, tombant de plusieurs mètres dans de beaux et profonds bassins puis formant ruisseaux et piscines sur de jolies pierres dorées. Les deux garçons sont ravis et se jettent presque dans l'eau qui est froide mais agréable. Je les suis et remonte avec eux vers la cascade.
Nous voilà bientôt à quelques mètres des chutes sur un gros rocher. Au dessus de nous, des jeunes hommes (en majorité) fanfaronnent de tout leur viril courage devant l'assemblée en sautant d'un promontoire à environ 3m de hauteur jute à côté de la cascade. J'observe attentivement les lieux. Le promontoire est dégagé, le bassin profond, les rochers éloignés, le courant très raisonnable, il n'y a pas de danger. Le filleul saute aussi dans le bassin depuis un petit coin du rocher au bord de l'eau. Je fais de même mais bientôt, je dépose mes ballerines en plastique dans un coin pour ne pas les perdre et grimpe sur le promontoire. La montée est un peu plus difficile que ce que je pensais car les pierres sont glissantes. Une fois en haut, le moyen le plus sûr de redescendre est de sauter dans la rivière. Seb est arrivé entre temps, je lui fais signe ainsi qu'aux deux garçons restés en bas. Ils me regardent avec des yeux ronds puis crient et tapent des mains d'excitation et de surprise. Je m'avance jusqu'au bord et vois le bassin en dessous qui semble maintenant bien éloigné. Pour réussir à sauter, il faut comme éteindre un interrupteur dans son cerveau, aller volontairement contre son instinct primaire de préservation. Le corps voudrait résister à ce geste étrange et il faut pourtant sauter sans retenue pour maintenir un mouvement net et précis et ne pas risquer de se faire mal. Je ferme les yeux et je force mon corps à se lancer. Me voilà au fond du bassin dans l'eau froide, remontant à la surface d'un coup de pied.
Mon cœur bat vite mais je suis heureuse. Les deux garçons sont joies. Je ne suis pas mécontente de les avoir impressionnés. Je reste encore un peu, nageant à contre courant dans le second bassin où je peux remonter jusqu'au pied de la cascade. Nager dans un torrent comme celui-ci est un vrai bonheur pour moi que je vis rarement. Je pourrais rester longtemps mais l'après-midi tourne et je rejoins bientôt Reb et la filleule restée plus loin. Ma sœur nous a envoyé un message. Elle est déjà arrivée au village et la location sera bientôt disponible, c'est l'heure de repartir pour la rejoindre.
Nous arrivons en fin d'après-midi. La maison est grande et fraîche et il y a une large terrasse. Ma sœur a eu le temps de faire des courses et nous avons donc tout ce qu'il faut pour les trois jours que nous passons ici. Nous prenons un apéritif sur la grande terrasse en nous faisant piquer par des moustiques et Reb prépare des pâtes carbonara. Nous sommes maintenant quatre adultes pour quatre enfants allant de 3 à 12 ans, chacun avec les désirs, colères et frustrations correspondant à son âge. Qu'ils se disputent ou qu'ils jouent il y a cependant une constante : le bruit. Le calme sera pour une autre fois.
Il fait trop chaud et il y a trop d'enfants pour se lancer dans de grandes entreprises. Le lendemain quand nous discutons de notre programme, trois projets émergent : le Lac du Salagou, le Pont du Diable et une ferme pédagogique. Les deux premiers sont des lieux de baignade, le lac étant un peu plus loin. C'est moi qui ai trouvé le prospectus de la ferme ce qui a tout de suite intéressé le neveu "Maman, va voi' les nanimaux, 'ega'de là, les nanimaux ! Veux aller voi' les nanimaux !". On déjeune au gîte d'une grande omelette et on pensait ensuite aller à la ferme puis au lac. Mais la ferme est fermée aux heures les plus chaudes et ne rouvre qu'à 17h. Alors on décide d'aller au lac, ce qui permettra peut-être au neveu de faire une sieste dans la voiture.
Il faut rouler environ 40 minutes depuis notre location puis nous arrivons devant ce grand beau lac entouré de collines desséchées. Le sol est rouge ocre ce qui lui donne un aspect un peu brun mais l'eau est claire. Le soleil tape et nous trouvons un petit coin d'ombre sur la plage brûlante. L'eau est d'un calme plat et très peu profonde. Cela convient bien au neveu qui montre les mêmes dispositions peureuses que l'enfant pour les activités aquatiques. On passe un moment agréable, dans l'eau ou paresseusement à l'ombre. L'heure approche de la rouverture de la ferme. Je vois que Reb est fatiguée, je lui propose de rentrer à la location avec Seb et la filleule pendant que ma sœur et moi emmenons les petits à la ferme. Reste la question du filleul. Sa préférence va au retour avec sa sœur mais cela met l'enfant au désespoir. Finalement, l'enfant lui demande de nous accompagner et il accepte avec l'aide d'un peu de corruption de notre part.
La crise ayant été évitée, nous partons satisfaites ma sœur et moi avec les trois enfants. Le filleul a gagné le droit de s'asseoir devant dans la voiture et nous cherchons une pâtisserie dans Clermont-l'Hérault car un goûter a été promis. Le goûter est pris avec gâteaux et glaces, nous achetons avec du sucre la bonne humeur des enfants. Puis nous roulons jusqu'à la fameuse ferme. C'est un petit parc avec des chèvres et moutons en liberté et d'autres dans des enclos, avec aussi des poules, lapins, ânes, chevaux, vaches, cochons et même lamas. Nous achetons des petits baquets de foin pour nourrir les animaux. Les enfants sont ravis. Les deux plus grands qui boudaient tout à l'heure le projet sont aussi excités que le petit. Les chèvres poursuivent l'enfant à qui il reste du foin car il a été plus économe dans sa distribution, plus par apprehension que par calcul. Enfin quand toute la nourriture a été distribuée et que nous avons vu tous les enclos, les enfants jouent dans la grande aire de jeux. L'heure de rentrer approche et nous avons de grandes difficultés à les récupérer. Le neveu surtout n'a pas du tout envie de partir et la technique du "bon ba nous on s'en va, au revoir !" ne fonctionne pas du tout (alors que sur l'enfant, ça marche toujours à 6 ans). Il se fait tirer des jeux en pleurs et il crie "veux 'ester aux jeux ! Veux 'ester tout seul !". Dans la voiture, il pleure toujours jusqu'à ce qu'on arrive à le distraire avec une grande conversation sur tous les animaux que nous avons vus.
Le soir, on voudrait se faire un resto mais toutes les tables du seul resto du village sont réservées. Il y a un camion pizza à côté, mais là aussi il aurait fallu s'y prendre plus tôt : il n'y aura pas de pizzas avant 21h30. Dépités, nous rentrons donc manger nos provisions sur notre grande terrasse.
Le lendemain, il fait encore plus chaud, la chaleur se sent maintenant aussi la nuit. Nos plans sont encore moins ambitieux que la veille. Nous voulions aller déjeuner dans le petit village pittoresque de Saint-Guilhem-le-desert mais voyant que le parking est plein, nous nous rabattons sur Saint-Jean-de-Fos. En terrasse, sous de grands parasols, nous avons tout de même la sensation de cuire.
Après ça, nous rejoignons le site du pont du Diable. À cet endroit, l'Hérault passe sous un joli pont en pierre et forme comme un étang avec une petite plage. Le lieu est aménagé pour éviter les dégradations qui viennent avec la popularité touristique. Le parking a été on installé un peu plus loin et il faut marcher sous le soleil brûlant jusqu'à la rivière. La plage elle-même est en plein soleil mais si on s'éloigne un peu en suivant la rivière, on peut trouver des coins tranquilles à l'ombre. Et là c'est assez paradisiaque. Nous sommes éloignés du grand bassin sous le pont mais juste à côté de l'eau à un endroit très agréable pour la baignade.
L'Hérault est décidément une belle rivière. Les enfants peuvent se baigner et jouer dans l'eau et les cailloux. En s'éloignant un peu, la rivière devient plus profonde et on peut nager. Je me laisse dériver dans le courant, enfin rafraîchie de la chaude journée. Plus tard, j'arrive même à distraire mon neveu quelques minutes pour que ma sœur puisse nager un peu. Elle lui dit "Tu restes un peu avec Tatie Viviane ?". Regard inquiet du petit garçon "Non, maman !" j'enchaîne alors "Mais est-ce que tu as vu le bac à poissons ?
- les pachons ? Où c'est les pachons ?
- Oui oui, viens je vais te montrer les poissons
- pa' là les pachons ? Ah va voi' les pachons !"
Et, oh miracle, il attrape ma main et me suit. Il y a effectivement plusieurs personnes qui pêchent et mettent leurs poissons dans une sorte de cage directement posée dans l'eau de la rivière. Observer les pêcheurs et les poissons est une véritable attraction qui prend toute l'attention des enfants. Ainsi la moitié de notre groupe est déjà repartie et nous restons, comme la veille, ma sœur et moi avec les trois plus jeunes enfants. Mais le filleul n'a même pas réalisé et ne s'inquiète d'où sont passés les autres que lorsqu'on l'appelle pour rentrer à notre tour. Aujourd'hui, nous avons mieux anticipé que la veille et avons commandé les pizzas dès ce matin pour le début de soirée. Nous les prenons sur la grande terrasse comme tous nos repas. C'est déjà la fin de ce petit séjour familial.
Canoë
On peut reconnaître à mon caractère une certaine persévérance. Ainsi bien que toute personne me connaissant sache que je n'ai aucune appétence pour le sport, je me lance parfois dans des entreprises qui vont à l'encontre de mes compétences naturelles, en particulier l'été, quand mon goût pour l'aventure (modérée) prend le pas sur mon indolence. C'est comme ça que je me trouve à gravir des montagnes canadiennes alors que je souffre toujours dans les montées. Et c'est ce qui fait que, régulièrement, je propose de louer des canoës alors même que nos expériences passées ont prouvé plusieurs fois notre incompétence à Seb et moi. Il faut dire aussi que j'ai une passion immodérée pour l'eau tumultueuse des rivières. Donc quand je vois un prospectus illustré par une photo de plusieurs personnes entourées de gerbes d'eau, luttant contre les rapides à coups de pagaie, je ne peux que le prendre, oubliant volontairement que je ne ressemble jamais à ces magnifiques jeunes gens descendant fièrement la rivière.
C'est donc bien moi qui ait proposé cette idée il y a quelques jours. Moi encore qui ait appelé et réservé trois canoës pour le "parcours famille" de 8 kilomètres accessible dès 6 ans. En nous entendant discuter de la sortie, la petite s'est mise à pleurer "Vous allez tous faire du canoë sans moi parce que j'ai 5 ans 1/2". Elle apprit à cette occasion la relativité de l'âge des enfants lorsqu'il s'agit d'organiser des sorties en vacances.
Ce mercredi est notre dernière journée au camping. La matinée se passe comme les autres, tranquillement au bord de la rivière. Après le déjeuner, nous prenons les voitures pour rejoindre le lieu de départ de la balade, à quelques kilomètres en aval de notre camping. La mère et la sœur du filleul sont parties de Toulouse dans la matinée exprès pour nous rejoindre. Reb n'a cependant aucune intention de monter dans un canoë, c'est pour ses deux enfants qu'elle a fait cet effort et le filleul est aux anges car faire du canoë avec sa sœur est son rêve absolu.
La filleule a 12 ans, elle est considérée comme "adulte" par la location de canoë mais pas par sa mère et moi. Ainsi, nous refusons de laisser le frère et la sœur seuls sur une embarcation. L'organisation de départ est la suivante : nos amis ont un canoë avec leur fille, Seb est avec l'enfant, et moi je monte avec les filleuls. Un jeune homme nous donne quelques instructions basiques : il y a deux passages difficiles au début puis ensuite c'est "tout plat". Et voilà, Reb nous prend en photo dans notre accoutrement, nous prenons nos embarcations et les tirons dans l'eau plus ou moins maladroitement et nous voilà voguant sur la rivière.
Seb est le dernier à arriver sur l'eau et je surveille de loin ses progrès. Il est à la manœuvre à l'arrière du canoë tandis que l'enfant est installé à l'avant et ne semble pas très rassuré. Bientôt nous arrivons aux premiers rapides. Je n'ai pas grand chose à faire dans mon canoë, dirigé d'une main de maître par la filleule assise à l'arrière. Je suis à l'avant et l'utilité du casque prend tout son sens car je reçois très régulièrement des coups de pagaie du filleul assis au milieu.
Si nous passons sans problème, il n'en n'est pas de même pour Seb que je vois rapidement en difficulté. Sur le premier rapide, il est passé devant. Le canoë n'était pas comme il fallait mais c'est tout de même passé. Au niveau du deuxième rapide, il se coince dans les cailloux. L'enfant, qui a peur de l'eau, panique dès qu'il y a une petite difficulté. Il pleure, il crie, ce qui n'aide pas à la sérénité nécessaire pour débloquer la situation. Je vois bien que Seb a besoin de sortir du canoë mais l'enfant crie "non non non" et Seb hésite à le laisser seul de peur de perdre le contrôle du bateau en essayant de le décoincer. Alors que nous sommes à quelques mètres devant, l'évidence se fait jour. Il faut non seulement que j'aille aider Seb (et sauver mon enfant qui se pense en danger de mort) mais tout simplement que je change de canoë.
La rivière n'est pas du tout profonde. Là où nous sommes, j'ai l'eau aux genoux. Il n'y a donc aucun danger pour les deux enfants qui ont par ailleurs des gilets de sauvetage et sont bon nageurs. Nous avons en théorie passé les passages les plus compliqués. Et puis il y a beaucoup de monde sur cette rivière donc s'ils ont effectivement une difficulté, quelqu'un pourra les aider sans doute mieux que moi. Enfin, je leur rends les choses plus compliquées en restant : j'alourdis le canoë qui est donc plus difficile à manœuvrer et ils commencent déjà à se disputer car leurs pagaies se cognent sans arrêt du fait que le filleul est assis au milieu. J'espère donc que Reb va me pardonner d'avoir abandonné ses enfants seuls sur la rivière au vu des circonstances et je rejoins le canoë de Seb.
Ils ne sont que quelques mètres derrière moi et comme j'ai des chaussures, c'est assez simple pour moi de marcher sur les cailloux. L'enfant pleure toujours mais est un peu rassuré de me voir. À deux, nous arrivons à débloquer le bateau et nous voilà repartis.
Mon arrivée apporte un soutien moral à Seb et un soutien matériel lorsque le canoë est bloqué mais mon incompétence étant à peu près égale à la sienne, nous sommes surtout mauvais à deux au lieu qu'il soit mauvais tout seul. Au départ, je suis à l'arrière du canoë puis nous échangeons. Mais dans un cas comme dans l'autre, nous n'arrivons pas à diriger et notre canoë va rarement droit. Quoi que nous fassions, nous finissons toujours par tourner irrémédiablement vers un des bords et soit nous cogner, soit nous retrouver à l'envers. Nous avançons ainsi en zigzaguant d'une rive à l'autre de la rivière et en nous épuisant à pagayer de façon tout à fait inutile.
Par ailleurs, le trajet n'est pas "tout plat" comme l'annonçait le jeune employé au départ de la balade. Il y a souvent des petits rapides qui nous posent de grosses difficultés car nous n'arrivons jamais à les prendre comme il faut. Nous nous coinçons, nous nous cognons, nous tournons sur nous-même, nous avançons à l'envers. La rivière est très basse et nous nous trouvons souvent pris dans des bancs de cailloux que nous n'arrivons pas à éviter vu notre direction très approximative. Je dois donc souvent sortir du canoë, le tirer, le pousser. Parfois Seb sort lui aussi mais comme il n'a pas de chaussures, il se fait mal aux pieds et a même des crampes. Quand je suis là dans l'eau à tirer et pousser et que je l'entends faire "aie ouille" à cause des crampes et des cailloux et demandant à l'enfant de lui taper la jambe, je nous croirais dans un gag.
Nos amis se débrouillent mieux mais les pro de la rivière ce sont le frère et la sœur qui gissent sur l'eau avec élégance et dirigent leur canoë sans aucune difficulté. Nous arrivons souvent les trois canoës devant un rapide. Les filleuls passent devant, filant légèrement sur les crêtes d'écume, suivis par le canoë de nos amis et leur fille qui s'en sortent parfois moins élégamment mais plutôt bien et puis nous derrière qui n'arrivons jamais où nous voulions aller, nous retrouvons en travers de la rivière ou à l'envers si nous ne sommes pas simplement coincés. Ils nous attendent souvent un peu plus loin en aval et rient de nos difficultés, devinant à l'avance quels branchages, quels rochers nous allons percuter. Ils me disent "à chaque fois que je me retourne pour voir où vous en êtes, je vois ton dos !". Je réponds "oui bah on pensait que c'était de l'autre côté..." ou bien "on a décidé de faire la balade à l'envers, on voit mieux le paysage".
Nous, nous gardons notre bonne humeur, lutant sans relâche contre les éléments, tournant et retournant. Quand nous nous retrouvons une nouvelle fois à l'envers nous patientons avec philosophie, attendant que le courant nous pousse et nous aide à revenir dans le bon sens. Quand il ne crie pas de désespoir, comme quand on a dû le faire descendre du bateau sur un petit monticule de cailloux, l'enfant nous donne des ordres et des conseils outragés de navigation "Mais enfin non ! Pas par là ! Maman !! Pourquoi tu vas là ? Tu vois bien que c'est pas par là !! Tu vois pas là ?! Il faut tourner ! Tourner !" alors que nous avançons tout droit dans des branchages. Quand il n'a rien à nous reprocher, il commente la balade ou chante des chansons. Il ne se tait jamais.
Nous ne sommes pas seuls sur cette rivière, loin de là. Et pas les seuls non plus à avoir des difficultés. Il y a parfois des vrais embouteillages de canoës. Comme nous maîtrisons mal notre direction, nous percutons parfois nos voisins qui ne nous en tiennent pas rigueur. Il y a de l'entraide entre canoë comme lorsque nous sommes complètement coincés en travers de la rivière et que nous perdons une pagaie ! Une dame la rattrape et nous la rend en nous aidant à débloquer notre bateau (c'est là que l'enfant a dû être descendu du canoë et qu'il hurlait de tous ses poumons "je ne veux pas descendre !" persuadé qu'on allait l'abandonner au milieu de la rivière.) Plus tard, la filleule ramasse une chaussure et la rend à sa propriétaire plusieurs canoës derrière. (moi je n'ai perdu aucune chaussure)
Nos amis et les filleuls font régulièrement des pauses pour nous attendre mais nous très peu. Nous leur passons devant en disant "bon heu, nous on continue hein" et deux minutes plus tard, ils nous dépassent de nouveau. Nous faisons tout de même une vraie pause en milieu de parcours pour nous tremper dans la rivière (nous tremper un peu plus car je passe la moitié de mon temps dans l'eau) mais nous ne nous attardons pas.
Sur la deuxième partie du parcours, nous nous en sortons un peu mieux. La filleule a donné quelques conseils de navigation à Seb et nous nous retrouvons moins souvent à l'envers. Nous continuons cependant à zigzaguer et nous lamentons qu'au lieu de 8km, nous avons dû en faire au moins 16 à force d'aller en travers. Malgré nos efforts et difficultés, nous prenons tout de même le temps d'admirer les magnifiques paysages des gorges de l'Hérault avec ses hautes parois rocheuses et ses rives sauvages.
Finalement, après de longues heures, nous atteignons le point de rendez-vous. Nous avions loué les canoës pour 14h, la balade devait durer 2h et nous arrivons tout juste à 18h pour prendre la dernière navette. Nos amis étaient déjà arrivés depuis un moment mais ne pouvaient pas partir sans nous car nous avions leurs clés de voiture ! Les filleuls nous avaient attendu un peu avant l'arrivée. Enfin bon, tout le monde est là, personne n'a coulé, l'enfant n'est pas tombé du canoë, personne ne s'est renversé et je ne regrette pas l'expérience. Certes, je ne sais toujours pas faire du canoë mais je m'amuse bien.
Nous retrouvons Reb au camping qui accueille avec circonspection la nouvelle du parcours en solo de ses deux enfants mais est aussi fière d'eux, véritables poissons dans l'eau, sportifs et agiles et meilleurs que tout le monde. Nous passons la soirée à Laroque animée par un marché nocturne où nous prenons nos repas sur de grandes tables partagées dans l'animation joyeuse. Puis nous rentrons, tous épuisés par l'effort de la journée, pour passer notre dernière nuit dans ce joli camping.