Rhône. — Lyon : Rapport sur les fouilles de sauvetage du groupe cathédral : Saint- Etienne et Sainte-Croix (15 no- vembre-21 décembre 1972).
La première tranche de travaux effectuée dans les rues Saint- Etienne et Mandelot s'est achevée en ce 21 décembre 1972. Les structures mises au jour vont être immédiatement recouvertes et les rues rendues à la circulation. La fouille va se poursuivre dans les sous-sols du n° 4 de la rue Saint- Etienne.
D'ores et déjà nous avons en main tous les éléments pour replacer exactement les trois églises du groupe cathédral. La fouille de la rue Mandelot, selon une direction nord-sud, nous a permis de retrouver la nef de Saint-Etienne et son collatéral nord, le collatéral sud de Sainte-Croix et les fondations d'un des piliers sud de la nef de cette même église. Ces structures ont été coupées lors de l'installation d'un égout et sont visibles en coupe, ce qui facilite l'étude des différentes campagnes de construction et rend visible également en coupe la superposition des sols correspondant à ces différentes périodes.
Rue Saint-Étienne, la fouille a été rendue plus difficile par la présence d'un égout à faible profondeur, par le passage de conduites d'eau et de gaz. Malgré ces obstacles, nous avons pu dégager des éléments d'une abside de brique englobée dans un massif barlong.
L'abside de Sainte-Croix, conservée dans les caves du n° 4 de la rue Saint-Étienne, nous permet de mieux comprendre les vestiges dégagés à l'extérieur.
Essayons de mettre en rapport les vestiges archéologiques et les maigres renseignements fournis par les textes.
Saint-Étienne est l'église la plus petite (environ 30 mètres de long sur 15 de large), mais aussi la plus ancienne ; elle iemonte sans doute au début du ive siècle, elle aurait ensuite été reconstruite ou restaurée à l'époque carolingienne, puis à. l'époque romane. La partie la plus ancienne est sans conteste l'abside : son faible diamètre (entre 3 et 4 mètres),
ses assises de briques liées par des lits épais de mortier, la rattacherait à l'époque paléochrétienne. Quelques mètres plus à l'ouest, un sol de mortier rose s'étend 50 centimètres plus haut que le précédent et semble appartenir à la reconstruction carolingienne. L'abside semi-circulaire a été englobée dans un massif barlong, sans doute à la même époque. Rue Mandelot, c'est l'église romane qui nous est apparue : un premier pavement de grandes dalles calcaires est en liaison avec un pilier cantonné de colonnes engagées, un deuxième pavement est venu cacher les moulures de la base de ces colonnes quelque trente centimères plus haut. En profondeur et au niveau de ce pilier, l'église est traversée par une structure d'axe nord-sud, le mur de la nef ne se prolonge vers l'ouest qu'après un décalage de plus d'un mètre vers le sud. Plus bas encore (2m50 de profondeur) s'étend un autre mur perpendiculaire (nord-sud) d'un type très différent des autres.
L'église de Sainte-Croix est séparée de Saint-Étienne par un espace de 3 mètres occupé par un caveau construit à la fin du Moyen Age. La voûte de ce caveau vient s'appuyer sur la partie basse du mur du collatéral sud de Sainte-Croix. Ce mur est d'autant plus intéressant qu'on y retrouve quatre mortiers différents correspondant à quatre périodes de construction au-dessus d'un niveau romain (caniveau et murette aux moellons liés par une sorte de loess). La première période de construction est représentée par un sol de mortier rose, conservé au-dessus d'un niveau de démolition romain et par la partie basse du mur au mortier rosâtre. D'après les textes, l'église aurait été construite au début du vir9 siècle et restaurée à l'époque carolingienne. La deuxième période est représentée par la partie moyenne du mur ; la partie haute de ce mur et le pilier cylindrique correspondent à la reconstruction de l'église en 1450. A cette époque, l'église de Sainte-Croix était de grande taille (environ 55 mètres de long) et assez large (environ 19 mètres) ; elle est encore en partie conservée en élévation au n° 4 de la rue Saint- Étienne où les grandes arcades de la nef sont encore visibles au rez-de-chaussée et à l'étage. Dans les caves subsiste l'abside de l'église, où nous avons dégagé une douzaine de squelettes à 50 centimètres du sol moderne et au-dessus des fondations d'une abside de courbure différente.
Ces premiers travaux ont donc déjà apporté des renseignements du plus haut intérêt, nous en avons tiré des photos d'ensemble et de détail, un plan d'ensemble au vingtième, une coupe nord-sud au vingtième et des détails au dixième. Les recherches vont se poursuivre dans les caves et dans un garage situé à l'emplacement de la nef de Sainte-Croix, au seul endroit qui n'ait pas été perturbé par les caves où nous espérons trouver une stratigraphie plus riche en céramique, un décapage minutieux des murs permettra une analyse des superstructures. Nous espérons enfin pouvoir intervenir lors de la démolition de l'immeuble, prévue pour juillet 1973 (J.-F. Reynaud).