LA FORMATION DES AUMÔNIERS DE LA MARINE DU ROI SOLEIL

À Marie-Claude d'Espagne, Présidente des Femmes écrivains catholiques

In Memoriam ;

Au xvne siècle ont été promulguées quatre ordonnances sur la Marine *, dont les deux dernières, celle de 1681 et celle de 1689, constituent un véritable code de législation maritime. L'ordonnance de Colbert d'août 1681 concerne plus particulièrement la marine marchande tandis que celle du 15 avril 1689 concerne la marine de guerre ou « marine royale ». Cependant nous nous intéresserons à la première puisqu'elle marque l'obligation d'embarquer un aumônier à bord pour tout voyage au long cours, et qu'elle détermine quelles doivent être ses fonctions. L'ordonnance de 1689 traite, pour sa part, des armées navales et des arsenaux de la marine et parle des séminaires d'aumôniers des vaisseaux du Roi, qui vont être créés entre ces deux ordonnances, et qui vont faire l'objet principal de l'étude de ce présent article.

Avant ces ordonnances, une ébauche de préoccupation s'était fait sentir de la part des autorités politiques et religieuses dans un souci de ne pas laisser sans assistance spirituelle des hommes qui s'embarquaient pour des voyages de six mois au moins, et pouvant durer jusqu'à dix-huit mois ou plus, loin de leur paroisse, ces voyages présentant par ailleurs des dangers certains. Ainsi, comme le note Alain Cabantous dans son ouvrage Le Ciel dans la mer2, « le début du XVIIe siècle fut marqué par des expériences sporadiques ou limitées, comme l'envoi en 1627-1628 de capucins auprès de * la plupart des grands vaisseaux et dans les escadres des petits ' ou le travail des lazaristes dans le monde des galères à la suite de la nomination de Vincent de Paul à l'Aumônerie générale en 1619. Mais, poursuit-il, à l'exception de Richelieu, l'intérêt du pouvoir politique pour la Royale, déjà bien timide, devint peu à peu inexistant jusqu'à la veille du ministériat de Colbert, entraînant la désaffection pour l'encadrement religieux des marins enrôlés » 3.

Cependant, la lente et progressive application des décrets du Concile de

R.H.Ě.F., t. LXXX, 1994.