Kimpa Vita
Maire Mbanza-Kongo | |
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Nom dans la langue maternelle |
Kimpa Vita Nsimba |
Activités |
Femme politique, cheffe religieuse, prophétesse, chef spirituel |
Vénérée par |
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Kimpa Vita, Kimpa Mvita, Tsimpa Vita ou Tchimpa Vita (née à Mbanza Kongo, aujourd'hui en Angola, 1684 - morte à Evolulu, aujourd'hui en Angola, le ), aussi connue sous son nom portugais Dona Beatriz, est une prophétesse kongo, fondatrice et dirigeante du mouvement antonianiste, une forme de syncrétisme entre catholicisme et religions traditionnelles du Kongo. Elle lutta pour la réunification du royaume Kongo, alors en proie à l'anarchie portugaise ; elle fut attrapée par les Capucins, condamnée au bûcher et mourut brûlée vive sur ordre du roi Dom Pedro IV, le 2 juillet 1706[1]
Elle fait partie des rares personnalités ayant vécu sur la côte atlantique de l'Afrique à cette époque au sujet desquelles il existe d'abondantes sources écrites[2] : les journaux, rapports et lettres de quatre missionnaires capucins italiens actifs dans la région (Luca da Caltanisetta, Marcellino d'Atri, Bernardo da Gallo et Lorenzo da Lucca).
Biographie
Née entre 1684 et 1686[3] dans une famille de la noblesse kongo, Kimpa Vita est baptisée à une date inconnue, peut-être par un prêtre métis originaire d'Angola, Luis de Mendonça. À l'époque, une grande partie de la population du royaume du Kongo est catholique, l'évangélisation ayant commencé dès la fin du XVe siècle, avec le baptême de Nzinga Nkuwu sous le nom de Jean Ier. Elle grandit à une époque où la guerre civile fait rage entre différentes factions au sein du royaume de Kongo, affaibli par des conflits incessants avec le Portugal (bataille d'Ambuila) et certains peuples voisins. Dès sa jeunesse, elle est reconnue comme nganga marinda, intermédiaire entre les hommes et le monde des esprits[4] ; elle est initiée au sein de la société secrète dite kimpasi[5]. La société kimpasi avait pour mission de délivrer les gens des forces du mal à travers des cérémonies d'exorcisme appelées mbumba kindonga.
Elle est influencée par les prophéties d'Appolonia Mafuta « Fumaria », qui annonce un châtiment divin et se promène avec une pierre qu'elle présente comme la tête du Christ déformée par la méchanceté des hommes[6]. À partir de 1703 ou 1704, Kimpa Vita dit recevoir des révélations, et annonce que Dieu punira les habitants du royaume si ce dernier n'est pas réunifié, avec pour capitale São Salvador. Elle enseigne aussi que les missionnaires blancs ont dénaturé le message divin pour tromper la population noire[1]. Le roi Pierre IV prend connaissance de son message, mais garde ses distances avec elle.
En revanche, elle est soutenue par de nombreux nobles kongo dont l'épouse de Pierre IV du Kongo, Hipolyta, et Pedro Constantinho da Silva, un des généraux de l'armée royale, et plusieurs viennent s'établir avec elle à São Salvador, où elle occupe les ruines de l'ancienne cathédrale (Pierre IV avait repris possession de São Salvador en 1696, mais l'avait quittée par la suite, craignant une attaque d'un roi voisin). Kimpa Vita enseigne que Jésus, ses apôtres et de nombreux personnages bibliques sont noirs et sont pour la plupart des Bisi Kongo (le véritable peuple élu). Elle enseigne, que la véritable Terre sainte est le Kongo et identifie en même temps Sao Salvador comme la Jérusalem céleste[1]. Elle annonce ensuite, que le roi Antoine Ier (Nvita Nkanga en kikongo) doit être considéré comme un « messie[7]», Kimpa Vita se disant elle-même possédée par son esprit. On prétend qu'elle meurt chaque vendredi et ressuscite chaque dimanche, après avoir passé deux jours à s'entretenir avec Dieu.
Kimpa Vita adapte certaines prières catholiques, notamment l'Ave Maria et le Salve Regina, qu'elle transforme en « Salve Antoniana[8],[9] ».
Son mouvement est appelé antonien ou antonianiste ; des missionnaires diffusent sa doctrine dans d'autres régions du royaume. Elle reconnaît l'autorité du pape mais se montre hostile aux missionnaires européens, principalement actifs sur la côte atlantique. Pierre IV, inquiet du succès rencontré par le mouvement antonianiste, finit par la faire arrêter et condamner au bûcher en 1706 avec son enfant, après un procès en hérésie, devant un tribunal civil conseillé par les missionnaires capucins Bernardo da Gallo et Lorenzo da Lucca[10].
Après avoir confessé ses péchés, elle fut brûlée vive sur un bûcher le [11], dans la ville d'Evolulu (Angola), près de Mbanza Kongo, avec son compagnon et « ange gardien », João Barro. Leur fils nouveau-né est sauvé grâce à l'intercession auprès du roi de leur dernier confesseur, le père Lorenzo da Lucca. Il est baptisé par ce dernier Jerónimo, contrairement au souhait de sa mère qui voulait le nommer António[12].
Luttes
Kimpa Vita a lutté en faveur de l'unité et la réunification du Kongo dia Ntolila, qui était ravagé par une guerre qui a duré près de 40 ans, et elle a également milité contre la colonisation portugaise mais aussi la traite esclavagiste.
Au delà de l'image d'une prophétesse, Kimpa Vita est aussi une figure du nationalisme et de l'anti-colonialisme[13]
Son action bénéficiera à Mvemba Agua Rosasa, roi du Kongo dia Ntolila, qui sera à l'origine de la réunification du royaume.
Postérité
Malgré la défaite de ses disciples dans les années qui suivent (Pedro Constantinho da Silva est vaincu par Pierre IV en 1709), le mouvement antonianiste survit à la mort de Kimpa Vita ; il est combattu par les missionnaires catholiques aux XVIIIe et XIXe siècles[14].
Les messianismes congolais et angolais du XXe siècle (matswanisme, kimbanguisme et tokoïsme), toujours actifs aujourd'hui, font référence à la figure de Kimpa Vita[15]. Elle est parfois surnommée la « Jeanne d'Arc congolaise » [16], en raison des ressemblances entre sa biographie et celle de Jeanne d'Arc, brûlée vive à Rouen en 1431.
En 1970, elle est représentée sur la Fresque de l'Afrique à Brazzaville, œuvre socialiste commanditée par la République populaire du Congo pour représenter l'histoire du peuple congolais. Le mot lingala « etumba » (signifiant « lutte ») y est inscrit près de son visage[17].
L'université de Uíge, en Angola, est appelée « université Kimpa Vita » depuis 2009[18].
Voir aussi
Notes et références
- Les Africains: Initiation à une longue histoire et à de vieilles civilisations, de l'aube de l'humanité au début de la colonisation, Éditions Lidis, Paris, 1981, p. 172.
- (en) John Thornton, The Kongolese Saint Anthony: Dona Beatriz Kimpa Vita and the Antonian Movement, 1684-1706, Cambridge University Press, 1998, p. 2.
- (en) John Thornton, The Kongolese Saint Anthony: Dona Beatriz Kimpa Vita and the Antonian Movement, 1684-1706, Cambridge University Press, 1998, p. 17. Kimpa Vita est âgée de vingt à vingt-deux ans au moment de sa mort ; dans sa biographie, John Thornton indique que de son point de vue, l'âge le plus avancé est le plus probable.
- (en) Entretien avec John Thornton sur executedtoday.com.
- (en) John Thornton, The Kongolese Saint Anthony: Dona Beatriz Kimpa Vita and the Antonian Movement, 1684-1706, Cambridge University Press, 1998, p. 56.
- Kabolo Iko Kabwita, Le royaume congo et la mission catholique, 1750-1838 : du déclin à l'extinction, Karthala, 2004, p. 56.
- Louis Jadin, Le Congo et la secte des Antoniens. Restauration du Royaume sous Pedro IV et la « saint Antoine » congolaise (1694-1718), Bulletin de l'Institut historique belge de Rome, fasc. XXXIII, 1961, p. 516.
- Kabolo Iko Kabwita, Le royaume congo et la mission catholique, 1750-1838 : du déclin à l'extinction, Karthala, 2004, p. 58.
- (en) John Thornton, The Kongolese Saint Anthony: Dona Beatriz Kimpa Vita and the Antonian Movement, 1684-1706, Cambridge University Press, 1998, p. 216. Il en donne le texte intégral, qui se termine ainsi : « [...] saint Antoine est la porte du ciel. Saint Antoine détient les clés du ciel. Saint Antoine est au-dessus des anges et de la Vierge Marie. Saint Antoine est le second dieu... »
- « Kimpa Vita, étoile révolutionnaire et « Jeanne d’Arc du Kongo » – JeuneAfrique.com », JeuneAfrique.com, (lire en ligne, consulté le )
- Abdourahman Waberi et Alain Mabanckou, Dictionnaire enjoué des cultures africaines, Fayard, , « Kimpa Vita », p. 205-206
- *(en) John Thornton, The Kongolese Saint Anthony: Dona Beatriz Kimpa Vita and the Antonian Movement, 1684-1706, Cambridge University Press, 1998 p. 178
- « Kimpa Vita, l’étoile révolutionnaire du Kongo – Jeune Afrique », sur JeuneAfrique.com (consulté le )
- Kabolo Iko Kabwita, Le royaume congo et la mission catholique, 1750-1838 : du déclin à l'extinction, Karthala, 2004, p. 62.
- Dictionary of African Christian Biography (dacb.org), « Kimpa Vita (Dona Beatriz »
- Sébastien Fath, "Kimpa Vita, la Jeanne d'Arc d'Afrique", ''Regards protestants'', 21 juin 2018.
- Nora Greani, « Les monuments du septennat à Brazzaville : Une statuaire publique pour la Renaissance nationale », Cahiers d’études africaines, no 227, , p. 619-640 (lire en ligne)
- (pt) « Breve histórico da Instituição », unikivi.com.
Bibliographie
- Georges Balandier, La vie quotidienne au royaume de Kongo du XVIe au XVIIIe siècle, Hachette, 1965
- António Custódio Gonçalves, La symbolique politique. Le prophétisme kongo au XVIIIème siècle, Munich, Weltforum Verlag, 1980
- Kabolo Iko Kabwita, Le royaume congo et la mission catholique, 1750-1838 : du déclin à l'extinction, Karthala, 2004
- Louis Jadin, « Le Congo et la secte des Antoniens. Restauration du Royaume sous Pedro IV et la "saint Antoine" congolaise (1694-1718) », Bulletin de l'Institut historique belge de Rome, fasc. XXXIII, 1961, p. 411-614.
- (en) John Thornton, The Kongolese Saint Anthony: Dona Beatriz Kimpa Vita and the Antonian Movement, 1684-1706, Cambridge University Press, 1998
- Rudy Mbemba Dia Benazo-Mbanzulu, Le procès de Kimpa Vita : la Jeanne d'Arc congolaise, L'Harmattan, 2003.
- Serge Mboukou, Messianisme et modernité: Dona Béatrice Kimpa Vita et le mouvement des antoniens, L'Harmattan, 2010.
- Royaume du Kongo
- Mystique chrétien
- Église d'institution africaine
- Condamné à mort exécuté au bûcher
- Personne brûlée vive par intolérance religieuse
- Personnalité brûlée pour sorcellerie
- Personnalité chrétienne condamnée pour hérésie
- Décès en juillet 1706
- Violence contre les femmes en Afrique
- Sorcière du XVIIe siècle
- Sorcière du XVIIIe siècle
- Femme de l'histoire africaine - UNESCO
- Naissance à Mbanza-Kongo
- Personnalité condamnée pour sorcellerie en Angola
- Personnalité africaine du XVIIe siècle
- Personnalité africaine du XVIIIe siècle