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Anarchisme de droite

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L’anarchisme de droite est une sensibilité philosophique et politique caractérisée par un refus d'adhérer à une société ou un système s'appuyant sur la démocratie parlementaire, les idées reçues en matière d'ordre social, et plus généralement toute forme d'autorité se réclamant d'eux.

Ce mode de pensée conserve cependant des idéaux et des valeurs considérées comme politiquement, moralement et idéologiquement à droite. Dans le cas contraire, c'est le terme anarchisme qui est utilisé.

Fondements métaphysiques et moraux

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L'anarchiste de droite est antimoderne : il s'insurge, à partir de son pessimisme anthropologique, contre l'utopisme, le rationalisme, l'égalitarisme, le libéralisme, l'éducation humaniste et le progressisme des Lumières ; il va à l'encontre des dogmes professant l'idée d'une nature humaine perfectible ou bonne. Il défend la métaphysique du péché originel contre celle, moderne, reposant sur le contractualisme et le libéralisme[1]. L'anarchiste de droite se démarque de la droite politique en se refusant à défendre des projets de société, s'inscrivant ainsi dans les pas des moralistes classiques du Grand Siècle[2],[3].

L'anarchiste de droite souhaite un renouveau des principes moraux aristocratiques. Il défend et applique des valeurs morales dans lesquelles il croit fermement, et notamment la justice, l'honneur et le devoir, envers et contre une société qui les nie ou les pervertit. Il oppose donc à la vanité humaine, à l'« imbécillité humaine », à sa « laideur », une hauteur d'esprit, un profond respect des valeurs morales – qui sont souvent considérées comme des valeurs de droite – auxquelles il adhère.

La rébellion individuelle, toujours présente et profondément ancrée chez les anarchistes de droite, représente leur force principale. C'est elle qui les conduit à prôner la force de la conscience individuelle (parfois exacerbée comme dans Le Culte du Moi, de Maurice Barrès), contre le matérialisme (marxisme, réductionnisme, hédonisme, scientisme, etc.) dans sa complexité et dans son intégrité, comme valeur de référence. C'est également cette préférence pour le sujet pensant qui les pousse à défendre avec fermeté – au moins moralement – l'individu contre le groupe et donc, la personne, unique et complète, contre l'oppression de la majorité et contre le déterminisme social.[réf. nécessaire]

Fondements politiques

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L'anarchisme de droite critique la démocratie représentative, les intellectuels et le conformisme des foules.

Les intellectuels seraient soumis à l'idéologie dominante des démocraties représentatives et ils renforceraient le conformisme intellectuel qui est inhérent à ce type de régime politique. À ce sujet, Marcel Aymé a consacré un livre au Confort intellectuel et Louis Pauwels a fait beaucoup parler de lui en parlant de « sida mental ».[réf. nécessaire] Les intellectuels deviendraient les principaux artisans des démocraties parlementaires, car celles-ci fonderaient leur autorité sur l'expression d'une majorité influençable, et qui devrait être influencée pour maintenir la population, « entière » dans sa cage[réf. nécessaire]. C'est là que réside, selon les anarchistes de droite, le fondement du pouvoir politique et, par extension, de la tyrannie politique. Selon eux, les intellectuels ne seraient pas une force de résistance au pouvoir politique ; au mieux, ils n'auraient aucun effet sur lui ; au pire, ils le renforceraient et recevraient des classes dominantes leur récompense[réf. nécessaire].

La critique des anarchistes de droite ne s'arrête pas aux intellectuels. Elle s'attaque également à une autre source du pouvoir démocratique : le conformisme des foules. Ce « pouvoir du peuple », cette « ferveur de la foule », ils la rejettent comme manipulation. Les anarchistes de droite n'admettent que la révolte individuelle, qu'ils opposent avec obstination à toute autorité institutionnelle ou s'autoproclamant intellectuelle.

Ainsi en est-il de Louis-Ferdinand Céline qui raconte dans Voyage au bout de la nuit comment, n'ayant aucune envie de partir au front durant la guerre de 14-18, il se heurte aux remontrances et aux sarcasmes de ses contemporains qui lui reprochent son manque de ferveur et de patriotisme[réf. nécessaire].

Par ailleurs, l'anarchisme de droite se méfie de la prétention de l’État à agir pour le bien commun, notion considérée comme vague et mal définie, et de sa légitimité à imposer des systèmes de valeurs à la société. Le passage d'une société organique et ordonnée, à une société mécanique et matérialiste, est le point de départ de la critique antimoderne des anarchistes de droite[réf. nécessaire].

Liens avec l'anarchisme individualiste

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Ainsi défini, l'anarchisme de droite semble bien proche de l’anarchisme individualiste. En réalité, il ne doit pas être confondu avec lui. Tout d'abord parce que l'anarchisme de droite ne s'appuie pas sur la même tradition de pensée que l'anarchisme individualiste. L'anarchisme individualiste a une filiation bien différente, puisqu'il emprunte au proudhonisme et au libéralisme, une grande partie de ses préceptes fondamentaux. Bien que Max Stirner soit un penseur antilibéral et égoïste, il a séduit également beaucoup de communistes et individualistes libertaires également (voir aussi Antilibéralisme, Max Stirner et son ouvrage L'unique et sa propriété).

D'autre part, s'il est vrai que ce qui nourrit la pensée anarcho-droitiste, c'est l'individu révolté se dressant contre une société oppressive et aliénante, l'anarchiste de droite milite également pour le renouveau des principes aristocratiques. Contrairement à l'anarchiste individualiste, il ne lutte pas contre l'aliénation de la morale et de la religion. De plus, idéologiquement, nombreux sont les anarchistes de droite du XXe siècle à revendiquer ou pratiquer la différenciation raciale (Céline étant le plus extrême mais Lévi-Strauss[4] ou Nimier l'ont intégré à leur œuvre ou à leur activité politique), à avoir des sensibilités nationalistes et à soutenir des positions dites sexistes qui sont toutes trois généralement réfutées par les anarchistes individualistes. De même le rejet de l'argent n'est pas spécialement une préoccupation des anarchistes de droite là où les anarchistes individualistes le considèrent comme un des supports majeurs de l'aliénation de l'individu par le pouvoir et de domination des uns sur les autres.

Des similitudes existent entre les deux pensées concernant la démocratie représentative et l'individu face au groupe. Néanmoins le niveau social et/ou l'origine sociologique — plutôt bourgeois/aisé/lettrée pour les anarchistes de droite et plutôt ouvrier/classe moyenne pour les anarchistes reliés aux mouvements sociaux — conditionne énormément de différences dans le rapport concret à l'État et aux autres composantes politiques de la société. Les anarchistes de droite ayant un confort matériel et une position sociale supérieurs ils peuvent bien plus aisément rejeter toute notion d'unité de classe sociale ou le recours à la redistribution des richesses par l'État et vivre ainsi de fait en marge aristocratique des préoccupations matérielles de leurs contemporains.[réf. nécessaire]

À tel point que, selon François Richard, la plupart des écrivains apparentés à l'anarchisme de droite ont considéré qu'il était plus ou moins de leur devoir de défendre cette intégrité intellectuelle et de refuser toute forme de complaisance envers le conformisme des milieux intellectuels. Cette prise de position radicale, teintée de provocations ou de confessions choquantes, en a fait des intellectuels ou des écrivains jugés « inutilisables par l'intelligentsia littéraire de gauche », voire des personnalités qui furent systématiquement rejetées par leurs contemporains.[réf. nécessaire]

Critiques et interrogations

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Le rejet de ce courant de pensée et de cette posture intellectuelle doit beaucoup au fait qu'une partie de ces auteurs — c'est le cas de Céline, Drumont ou Rebatet — ont tenu des propos antisémites très virulents. Cette incohérence est d'ailleurs encore plus marquée lorsqu'on étudie séparément les œuvres de chaque auteur. Aucun ne se concevait en fait comme représentatif d'une tendance, et encore moins comme anarchistes de droite car l'expression est assez récente (exception faite pour Céline qui se considérait libertaire, ainsi que Micberth et Richard qui sont à l'origine du terme). Ils se considéraient juste — et furent tous au moins un temps — isolés en raison de la radicalité de leurs points de vue. Plusieurs d'entre eux fréquentèrent des cercles littéraires ou des réseaux politiques. Certains[Qui ?] reprochent également à l'anarchisme de droite de n'être qu'une construction de Micberth et Richard, et de ne se contenter que de récupérer certains auteurs, en leur attribuant l'étiquette anarchiste de droite[5].

La théorisation et la légitimation de l'anarchisme de droite, qui est faite par François Richard permet de donner un nom à une sensibilité qui, tout en conservant un attachement à quelques valeurs traditionnelles dans leur morale individuelle, se veut individualiste, anti-conformiste, anti-parlementariste (voire pour certains, proche du nihilisme). Cette sensibilité n'est pas en France représentée politiquement de manière très claire (l'activisme politique des anarchistes de droite est d'ailleurs inexistant). La thèse de Richard (Les anarchistes de droite, coll. « Que sais-je ? ») est cependant perçue par certains[Qui ?] comme une simple hagiographie des écrits de Micberth[5].

L'anarchisme de droite soulève deux questions liées :[réf. nécessaire]

  • La révolte contre le pouvoir en tant que tel et le conformisme sont-ils compatibles avec des valeurs traditionnelles, ou bien ces dernières les situent-elles à droite – et si oui, où à droite ?
  • Ce courant peut-il revendiquer le nom d'anarchisme ?

Ces deux questions restent aujourd'hui ouvertes, une grande partie de la mouvance anarchiste répondant non à la seconde. En ajoutant que l'anarchisme n'est pas de gauche non plus, gauche et droite étant les positions idéologiquement marquées occupées dans les assemblées représentatives que l'anarchisme rejette par nature.

Dans la culture

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Le vecteur médiatique qui a permis de diffuser l'anarchisme de droite dans le grand public est le cinéma. Certains réalisateurs et acteurs ont usé de cette sensibilité politico-philosophique.

Michel Sardou est qualifié d'« anarchiste de droite » par Sophie Girault, et décrit comme « vivant ses chansons dans lesquelles il s'invente des personnages qui prennent la parole contre la mollesse ambiante et la facilité des idéaux conventionnels »[Cit. 1].

Quelques anarchistes de droite

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Selon François Richard, qui a publié un « Que sais-je ? » sur le sujet[6], des écrivains comme Barbey d'Aurevilly, Paul Léautaud ou Louis-Ferdinand Céline[7], plus récemment Antoine Blondin, Roger Nimier ou Marc-Édouard Nabe, le dialoguiste Michel Audiard ou l'acteur Jean Yanne ont donné force à ce courant qui plonge ses racines dans la pensée baroque et libertine.

Il fait allusion à l'anarchisme de droite dans son livre La Nuit, le jour et toutes les autres nuits[Cit. 2].
Avec sa trilogie Le Culte du Moi.
Il est qualifié « d’anarchiste de droite » par Antoine Compagnon dans son livre Un été avec Baudelaire[8].
Après un parcours politique plutôt proche de la gauche socialiste et en lien avec les institutions des Nations unies, il se définissait sur la fin de sa vie comme « un vieil anarchiste de droite »[4].

Notes et références

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  1. « Il est ce qu'on a pu appeler un « anarchiste de droite », mais surtout un artiste entier, vivant ses chansons dans lesquelles il s'invente des personnages qui prennent la parole contre la mollesse ambiante et la facilité des idéaux conventionnels. » Sophie Girault, Michel Sardou : Biographie intime, City Éditions, 2013.
  2. P. 50 : « [...] Aristide Lancien, un Sarthois triste et doux qui confectionnait des bombes dans sa cave en 1936. Anarchiste de droite, comme on dit maintenant. »

Références

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  1. Aimeric Jardin, « La gauche et la droite face au péché originel : la théologie politique de Léo Moulin », sur PHILITT, .
  2. Sylvain David, « Chapitre IV. Un retour aux origines », dans Cioran : Un héroïsme à rebours, Presses de l’université de Montréal, coll. « Espace littéraire », (ISBN 979-10-365-0201-9, lire en ligne), p. 121-148.
  3. Pierre Damamme, « Henry de Montherlant, un antimoderne ? », sur Lire Montherlant.
  4. a et b « Archive: Claude Lévi-Strauss, un anarchiste de droite », L'Express,‎ (lire en ligne, consulté le ).
  5. a et b Bruno Deniel-Laurent, « Michel-Georges Micberth (et les anarchistes de droite) », Cancer!,‎ (lire en ligne), version archivée par la Wayback Machine.
  6. Les Anarchistes de droite, PUF, 1997.
    Voir aussi, du même auteur, L'Anarchisme de droite dans la littérature contemporaine, PUF, 1988.
  7. Alain Pessin, Littérature et anarchie, Presses Univ. du Mirail, , 543 p. (ISBN 978-2-85816-308-3, lire en ligne).
  8. Tiré des émissions du même nom sur France Inter.

Bibliographie

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  • Michel-Georges Micberth et François Richard, Révolution droitiste, Jupilles, 1980.
  • Pascal Ory, L'Anarchisme de droite ou du mépris considéré comme une morale, le tout assorti de réflexions plus générales, Paris, éditions Bernard Grasset, .
  • François Richard, L'Anarchisme de droite dans la littérature contemporaine, Presses universitaires de France, coll. « Littératures modernes », 1988.
  • François Richard, Les Anarchistes de droite, PUF, coll. « Que sais-je ? », 1991.
  • Michel-Georges Micberth et François Richard, Révolution droitiste, dix ans après, Res Universis, 1991.
  • François Richard, Micberth : Anarchiste de droite, Comédit, 1991.
  • Michel-Georges Micberth, Petite Somme contre les gentils : allocutions télévisées (1976-1982), Lorisse, 1995.
  • Jean-Claude Michéa, Orwell : Anarchiste tory, éditions Climats, 1995.
  • Loïc Decrauze, L'Aristocratie libertaire chez Léautaud et Micberth, Lorisse, 1996.
  • Anne Ollivier-Mellos, « H. L. Mencken : Anarchiste de droite ? », Études anglaises, Klincksieck, 2003.
  • Nicolás Gómez Dávila, Les Horreurs de la démocratie, Éditions du Rocher, 2003.
  • Aymeric Taillefer, Anarchiste de droite (Précis de survie), Godefroy de Bouillon, 2015.

Articles connexes

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