Eve's Hangout
Type |
Speakeasy, restaurant, Lieu LGBT historique des États-Unis (en), lieu historique LGBT, bar gay, salon de thé, cercle littéraire (en), bar lesbien, organisation lesbienne (d) |
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Fondation | |
Propriétaires |
Eva Kotchever, Ruth Norlander (d) |
Patrimonialité |
New York City Landmark (d) () |
Adresse |
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Coordonnées |
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Le Eve's Hangout était un célèbre salon de thé lesbien new-yorkais ouvert en 1925 par la féministe polonaise Eva Kotchever et la peintre suédoise Ruth Norlander à Greenwich Village. Le lieu était populairement appelé le "Eve Adams' Tearoom"[1], jeu de mots provocateur entre les prénoms bibliques "Eve" et "Adam".
Histoire
[modifier | modifier le code]Après avoir tenu le Gray Cottage à Chicago dans les années 1920, un bar gay-friendly et anarchiste[2], Eva Kotchever et Ruth Norlander s'installent dans la ville de New York, près de Washington Square[3].
En 1925, le couple fonde le Eve's Hangout au sous-sol du 129, MacDougal street[4]. Cette rue est réputée pour être au cœur de la bohème intellectuelle new-yorkaise et Greenwich Village est devenu un quartier phare de Manhattan pour la communauté gay et lesbienne[5].
A l'entrée, Kotchever appose une pancarte qui indique « Men are admitted but not welcome » (« Les hommes sont admis, mais pas les bienvenus ») [6]. Ce panneau marque l'histoire du lieu[7] et restera célèbre[8].
Le Eve's Hangout devient un refuge pour les lesbiennes, mais également pour les migrants et les classes populaires. Très rapidement, les intellectuels comme Emma Goldman, amie d'Eva Kotchever, le rendent populaire[9]. Le lieu devient un club où les artistes se retrouvent, comme Henry Miller, June Miller, Anaïs Nin ou Berenice Abbott[10], notamment le soir après les représentations de théâtre, nombreuses à l'époque autour de Washington Square.
Eva Kotchever, qui organise dans son café des concerts, des lectures, des rencontres où on parle de l'amour entre femmes, de politique et d'idées libérales[11], devient une figure du « Village »[12],[13]. Son établissement est l'un des plus prisés et ouverts de l'époque[14].
Raid policier et fermeture
[modifier | modifier le code]Certains journaux conservateurs, tel le Greenwich Village Quill qui le définit sous la plume de Bobby Adward comme un lieu « where ladies prefer each other. Not very healthy for she-adolescents, nor comfortable for he-men » (« Où les femmes se préfèrent. Pas très sain pour les adolescentes, ni comfortable pour les vrais hommes »), s'offusquent la popularité du Hangout[15]. L'un des voisins aurait également appelé la police[16], de telle sorte que, le 11 juin 1926, la Vice Squad (brigade des mœurs du NYPD) fait une descente dans le bar, épaulée par la jeune détective Margaret Leonard. Le livre Lesbian Love, écrit par Kotchever sous le nom de plume d'Evelyn Addams, devient le prétexte[17] pour arrêter Kotchever : elle est inculpée et reconnue coupable d'« obscénité » et de « conduite désordonnée »[18].
Le bar ne survit pas à l'arrestation de sa patronne et le Eve's Hangout doit fermer rapidement[19]. En 1927, Kotchever est expulsée des États-Unis vers l'Europe, mais Greenwich Village ne l'oublie pas[15].
A Paris, sans Ruth Norlander restée à New York, Kotchever ouvre un autre club lesbien, le Boudoir de l'Amour à Montmartre[20] et devient une fidèle du Dôme, lieu de rendez-vous des artistes à Montparnasse, comme Pablo Picasso mais également des intellectuels américains, tels Miller et Anaïs Nin, qu'elle avait accueillis au Eve's Hangout[21].
Pendant la Seconde Guerre mondiale, Eva Kotchever est arrêtée par la police française à Nice avant son départ en bateau vers la Palestine où vivait sa famille[22]. Internée au camp de Drancy, le convoi n° 63 du 17 décembre la déporte à Auschwitz où elle est assassinée avec sa compagne, la résistante allemande Hella Soldner[23].
Postérité
[modifier | modifier le code]Le Eve's Hangout est considéré comme l'un des premiers bars lesbiens aux États-Unis[24],[25],[26].
La descente de police que le club a subi en 1926 est considérée comme précurseur de celle qui aura lieu plus tard au Stonewall Inn[27],[28] et l'un des premiers cas de lesbophobie officielle[29].
La dramaturge new-yorkaise Barbara Kahn a écrit une pièce de théâtre[30] et une comédie musicale, "Unreachable Eden" sur l'histoire du Eve's Hangout,[31],[32].
L'artiste féministe Gwen Shockey[33] a inclus le lieu dans le cadre du projet Adresses project[34]
Depuis novembre 2019, l'University of Pittsburgh propose Tea time with Eve[35], programmation mensuelle autour du projet Eve Addams Tearoom Memorial Browsing Shelf [36].
Patrimoine et tourisme
[modifier | modifier le code]Le bâtiment historique du Eve's Hangout a été construit entre 1828 et 1829[37].
Il est inscrit au registre du patrimoine historique de New York[38] et reconnu au niveau fédéral par le National Park Service[39].
C'est un des rares exemples de maison de ville[40] de style fédéral subsistant à Manhattan[41].
Le lieu est présent dans les tours de l'office de tourisme américain officiel[42] et fait partie des étapes du tourisme LGBT de New York, notamment pour les visiteurs européens[43],[44].
De nos jours, l'immeuble accueille un restaurant italien au premier niveau, nommé La Lanterna di Vittorio[45], et une boîte de jazz au sous-sol, le Bar Next Door[46],[47].
Voir également
[modifier | modifier le code]Références
[modifier | modifier le code]- « Eve Adams' Tearoom », NYC LGBT Historic Sites Project
- « Professor Kathy Ferguson | University of Hawai‘i at Mānoa », sur www.politicalscience.hawaii.edu
- « Shownotes: Eve's Tearoom Part 1 », Queer Ephemera
- (en-US) Tasha, « LGBTQ History: MacDougal Street », sur GVSHP | Preservation | Off the Grid,
- Hampshire, « The Lavendar Lens: Lesbianism in the United States 1870-1969 », Nonviolent Social Change, Manchester College, vol. 35, (lire en ligne)
- Wallace, « Eve's Hangout », Lost Womyn's Space,
- (en) « Challenging and Changing America: The Struggle for LGBTQ Civil Rights 1900-1999 », sur furbirdsqueerly,
- (en) « 10 Gay Club Legends Who Lit Up NYC Nightlife », sur PAPER,
- Anonymous, « Lost Womyn's Space: Eve's Hangout », sur Lost Womyn's Space,
- (en) Julia Van Haaften, Berenice Abbott: A Life in Photography, W. W. Norton & Company, (ISBN 978-0-393-29279-4, lire en ligne)
- (en) Julie Scelfo, The Women Who Made New York, Basic Books, (ISBN 978-1-58005-654-0, lire en ligne)
- (en-US) Gay New York, (lire en ligne)
- « Chauncey - Gay New York.pdf | Coming Out | Homosexuality », sur Scribd, p. 242-243
- Whitney, « Greenwich Thrillage »
- Gattuso, « The Founder of America's Earliest Lesbian Bar Was Deported for Obscenity », Atlas Obscura,
- (en-US) « A Herstory of Lesbian Bars in NYC: Gwen Shockey Charts No Man’s Land », sur Bedford + Bowery,
- « LGBTQ Heritage Theme Study- Volume Two | Fifteenth Amendment To The United States Constitution | Fourteenth Amendment To The United States Constitution », sur Scribd
- « The History of Gay Bars -- New York Magazine - Nymag », New York Magazine
- (en) Heather Gilligan, « The economy is killing the lesbian bar, again », sur Medium,
- (en) « It happened here! | Things to Do | reviews, guides, things to do, film », sur Time Out New York
- (en-US) « Eve Adams in Paris », sur Queer Ephemera
- « Eve Adams », sur geni_family_tree
- « Holocaust Survivors and Victims Database -- EVA ZLOCZOWER », sur secure.ushmm.org
- (en) Gwen Shockey et Karen Loew, « Photo-Documenting the Lost Landscape of Lesbian Nightclubs in New York City », Change Over Time, vol. 8, no 2, , p. 186–205 (ISSN 2153-0548, DOI 10.1353/cot.2018.0014, lire en ligne)
- « The city that never sleeps », sur gotham.canalblog.com
- (en-US) « Gay Bars and Their Importance to LGBTQ History », sur Lesbian Love Addiction,
- (en-US) « 17 LGBT landmarks of Greenwich Village », sur 6sqft
- « Urban Archive », sur www.urbanarchive.org
- « Policewomen, Plainclothes, and Pelvic Examinations: NYPD Abortion Investigations, 1913 –1926 »
- Manfre, « Lesbian Tearoom Before Its Time », The Forward
- « All About Eve (Adams) », jewishweek.timesofisrael.com
- « At 129 MacDougal, circa 1926, lesbian tearoom ruled », The Villager,
- (en) Emily Colucci, « Don’t Leave Me This Way: Finding The Remnants Of NYC’s Lesbian Bars In Gwen Shockey’s “Addresses” », sur Filthy Dreams,
- (en-US) « Addresses Project », sur Gwen Shockey
- « Re/Activation: Tracing Textual Herstories | History of Art and Architecture | University of Pittsburgh », sur www.haa.pitt.edu
- « Eve Addams Tearoom Memorial Browsing Shelf | History of Art and Architecture | University of Pittsburgh », sur www.haa.pitt.edu
- (en) Yumpu.com, « 178 Bleecker Street - Greenwich Village Society for Historic ... », sur yumpu.com
- « https://parks.ny.gov »
- « LGBTQ America », www.nps.gov,
- (en) Gwen Shockey et Karen Loew, « Photo-Documenting the Lost Landscape of Lesbian Nightclubs in New York City », Change Over Time, vol. 8, no 2, (ISSN 2153-0548, DOI 10.1353/cot.2018.0014, lire en ligne)
- « WhitneyEggers's Blog on Lipstick Lesbian Catch », sur www.pinklobsterdating.com
- « Profiter de la Pride pour explorer Greenwich Village, New York », sur Visit The USA
- (de) Dirk Baumgartl, « NEW YORK: Stadtgeschichten », sur männer*,
- « GREENWICH VILLAGE - PASSION NEW YORK CITY », sur passionnyc.canalblog.com,
- (en-US) « LGBT — Eve Adam's Tearoom: Men Are Admitted, but Not Welcome », sur Uncovering Queer Histories
- Miller, « Daytonian in Manhattan: "Men Are Admitted, But Not Welcome" -- 129 MacDougal Street »,
- « Macdougal Street: New York Songlines », sur www.nysonglines.com