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Homéomère et anhoméomère

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L'homéomère et l'anhoméomère désignent le composé physique homogène obtenu par le mélange des quatre éléments que sont l'eau, la terre, le feu et l'air pour l'un, et un composé non-homogène pour l'autre. Il s'agit de deux concepts de la physique et de la métaphysique d'Aristote.

Physique aristotélicienne

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Aristote propose, dans divers ouvrages, une théorie de la physique en tant que science de la matière. Il part de la théorie des quatre éléments, auxquels il adjoint une propriété à chacune (l'eau est froide, la terre est sèche, l'air est humide, le feu est chaud, etc.). À partir de là, il développe une théorie du corps physique comme composé de trois niveaux : le niveau fondamental, qui est celui de la matière élémentaire ; le niveau supérieur, composé des homéomères ; et le dernier niveau, celui de l'assemblage, appelé anhoméomère[1].

L'homéomère est un composé physique dans lequel les éléments disparaissent pour lui conférer des propriétés physiques spécifiques. La matière est obtenue en fonction de la proportion de ces éléments. Leur proportion fait varier les qualités de la matière obtenue ; elle peut ainsi être plus ou moins rigide, souple, lourde[1]...

Le philosophe utilise toujours le concept d'homéomère en opposition à l'anhoméomère, qui désigne ce qui n'est pas homogène, comme les mains, les visages, etc. Dans l'Histoire des animaux, il écrit que si les homéomères se divisent (par exemple, en chair), les anhoméomères, comme la main, ne se divisent pas en mains, ni le visage en visage. Ces parties sont des touts, composés par les homéomères. Pour faire une main, en effet, il faut de la chair, des tendons, des os, etc., qui sont homéomères[1].

Le substrat de ce qui est anhoméomère présente « des discontinuités qualitatives », contrairement à ce qui est homéomère, comme le relève René Thom[2]. Un même organe est à la fois homéomère dans sa constitution, et anhoméomère du point de vue de sa configuration[3]. Si le cœur est homéomère par ses tissus, il a une fonctionnalité (une configuration) propre, et est donc anhoméomère et capable d'action[4].

Métaphysique aristotélicienne

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Aristote utilise le terme homéomère de deux manières différentes. L'homéomère est, dans un premier sens, une composante matérielle homogène localisée, comme une veine ou un intestin. Le terme est toutefois aussi appliqué, dans un deuxième sens, à une « qualité phénoménologique locale ». Les quatre éléments (eau, terre...) sont ainsi eux-mêmes homéomères, bien qu'ils soient d'un type d'homéomère qui ne dispose pas de forme[2].

Aristote soutient que l'opposition entre l'homéomère et l'anhoméomère est une représentation d'une grande opposition métaphysique entre ce qui est puissance et acte. L'anhoméomère est acte, car il limite l'homéomère, il est sa limite, sa bordure[5],[6]. L'anhoméomère forme les parties, et produit quelque chose activement ; il accomplit les qualités que renferment ses parties[7]. Ainsi, selon Aristote, les organes anhoméomères sont « comme des instruments », en ce qu'ils sont constitués en vue d'une fonction. La main est faite pour saisir, l’œil pour voir, etc.[8]

Postérité

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En philosophie antique

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Comme beaucoup de concepts d'Aristote, homéomère a bénéficié d'une grande postérité. Il a été utilisé et parfois reconceptualisé par les épigones du Stagirite, lui apportant des modifications de sens au fil des ouvrages. Porphyre de Tyr, commentateur d'Aristote, et Plotin, réutilisent tous deux le terme[9]. Les stoïciens questionnent l'appartenance de la logique à la philosophie sur le principe de l'opposition entre homéomère et anhoméomère[10].

Lucrèce l'utilise aussi, définissant ainsi le terme : « Voici ce qu'il appelle l'homéomérie des choses : c'est qu'il est manifeste que les os naissent d'os petits et minuscules, etc. ». Le terme latin est « rerum homoemerian »[11].

En philosophie scolastique

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Les concepts sont utilisés par la scolastique[12].

En médecine antique

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Les concepts sont mobilisés par Claude Galien, médecin antique, dans le même sens que celui donné par Aristote[13].

Notes et références

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  1. a b et c Pierre Pellegrin, Histoire des animaux, dl 2017 (ISBN 978-2-08-071291-2, OCLC 1010492630, lire en ligne)
  2. a et b René Thom, Esquisse d'une sémiophysique, InterÉditions, (ISBN 978-2-7296-0131-7, OCLC 300428160, lire en ligne)
  3. Richard Bodéüs, Aristote, une philosophie en quête de savoir, Librarie philosophique J. Vrin, (ISBN 978-2-7116-1564-3, OCLC 300346099, lire en ligne)
  4. Pierre-Marie Impr. de la Manutention), De la matière à l'action : Aristote et le problème du vivant, J. Vrin, (ISBN 978-2-7116-1929-0 et 2-7116-1929-X, OCLC 471017859, lire en ligne)
  5. Evandro Agazzi, L'objectivité dans les différentes sciences, Editions universitaires, (ISBN 2-8271-0378-8, 978-2-8271-0378-2 et 3-7278-0607-9, OCLC 20401087, lire en ligne)
  6. S. G. Dani et Athanase Papadopoulos, Geometry in history, (ISBN 978-3-030-13609-3 et 3-030-13609-4, OCLC 1124767158, lire en ligne)
  7. Lambros Couloubaritsis, Sur la nature, vol. 2, J. Vrin, (ISBN 2-7116-1086-1 et 978-2-7116-1086-0, OCLC 463630366, lire en ligne)
  8. Jocelyn Groisard, Météorologiques, Flammarion, (ISBN 978-2-08-123448-2 et 2-08-123448-3, OCLC 937903865, lire en ligne)
  9. Porphyry, Sentences, Vrin, (ISBN 978-2-7116-1632-9, lire en ligne)
  10. Jean-Baptiste Gourinat, La dialectique des stoïciens, Librairie Philosophique J. Vrin, (ISBN 2-7116-1322-4 et 978-2-7116-1322-9, OCLC 468175592, lire en ligne)
  11. Philippe Rousseau Rossella Saetta Cottone, Diego Lanza, lecteur des œuvres de l'Antiquité, Presses Univ Septentrion (ISBN 978-2-7574-1416-3, 2-7574-1416-X et 978-2-7574-0444-7, OCLC 1229681928, lire en ligne)
  12. Alain de,. Impr. Floch), L'art des généralités théories de l'abstraction, Aubier, impr. 1999 (ISBN 2-7007-3355-X et 978-2-7007-3355-6, OCLC 708515150, lire en ligne)
  13. Julien Devinant, Les troubles psychiques selon Galien : étude d'un système de pensée, (ISBN 978-2-251-91434-3 et 2-251-91434-X, OCLC 1245847130, lire en ligne)