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jeudi 17 décembre 2009

Tijuana city blues (Gabriel Trujillo Munoz)

Aïe tequila !

Les Allusifs lancent une jolie (mais un peu chère) collection au nom évocateur : 3/4 polar.
Avec pour le moment de tout petits volumes, des opuscules minuscules.
Et c'est Gabriel Trujillo Muñoz qui ouvre le bal avec Tijuana City Blues, pour prolonger l'actualité mexicaine en cette année 2009 où la littérature de ce pays était à l'honneur.
Un tout petit polar donc, presqu'une nouvelle. Enfin, 3/4 polar comme le disait l'éditeur, car bien évidemment le fil de l'intrigue est ténu et ne sert qu'à nous guider le temps de ce petit voyage.
Un petit voyage en Basse-Californie, dans cette ville-frontière de Tijuana que l'on dit être le Las Vegas du Tiers-Monde.
Un petit voyage dans le temps également puisque l'histoire remonte jusqu'à celle de William S. Burroughs qui écumait la région au début des années 50 avec ses collègues de la beat generation comme Kerouac et Ginsberg (1) .
Gabriel Trujillo Muñoz met en scène un avocat (Miguel Angel Morgado) défenseur des causes écolos et des indiens opprimés.
L'un des ouvriers venus refaire sa bibliothèque, demande à Morgado de retrouver son père mystérieusement disparu en 51, quelque temps après l'épisode où Burroughs tua sa propre épouse en jouant à Guillaume Tell avec un révolver (véridique).
Morgado, armé de quelques photos où l'on retrouve le père du menuisier aux côtés de Kerouac, Burroughs and co, se met en piste ... piste qui le conduira donc jusqu'à Tijuana et même aux États-Unis à San Diego de l'autre côté de la frontière.

[...] - Bon, reprit Leobardo. La fusillade que vous voulez tirer au clair a eu lieu le 8 décembre 1951. Si les journaux ont donné un compte rendu succinct, le strict nécessaire, c'est parce que l'évènement s'est produit au grand jour au beau milieu de l'avenida de la Revoluciòn. On ne pouvait pas le passer sous silence, mais on pouvait l'enfouir sous quelques tonnes de terre pour éviter toute répercussion fâcheuse sur le tourisme - la seule chose qui compte ici. C'est ce qui a été fait. Les quotidiens de Tijuana en ont parlé pendant deux jours, puis ils se sont tus. Vous vous rappelez ce qu'ils en ont dit, non ?

Et la quête de Morgado est autant celle du père de son menuisier que celle de la véritable personnalité de Burroughs ou encore des réalités mexicaines de l'époque, le long de cette frontière avec les États-Unis.
Malgré de nombreuses qualités et de multiples centres d'intérêt (polar, Mexique, années 50 et beat generation, ...) on n'a pas été tout à fait convaincus par cette petite mise en bouche. Pour garder l'appétit, on va sans doute être obligés de replonger dans Mexicali City Blues, un autre épisode du même auteur !
Reste que cela nous permet d'épingler un petit cœur de plus sur notre carte du monde des polars.

(1) : MAM écumait les mêmes lieux vingt cinq ans plus tard, mais bizarrement Wikipédia n'en parle pas ...


Pour celles et ceux qui aiment la tequila.
Les Allusifs 3/4 Polar éditent ces 88 pages qui datent de 2006 en VO et qui sont traduites de l'espagnol (mexicain) par Gabriel Iaculli. Le site (intéressant) de l'éditeur.
Virginie en parle, Béné également comme Anne-Sophie et Jean-Marc.
Rana évoque les trois épisodes de la série.

mercredi 22 avril 2009

Pétales (Guadalupe Nettel)

Du Mexique au Japon.

Troisième étape dans notre périple à la découverte de la littérature mexicaine.
Après le doux parfum de mort de Guillermo Arriaga, et les nouvelles du Mexique de François Gaudry, voici Pétales et autres histoires embarrassantes de Guadalupe Nettel.Le site du Salon
Encore un recueil de nouvelles, six nouvelles d'une auteur mexicaine qui vit en Espagne.
Et qui crée la surprise : on n'imaginait pas aller si loin vers l'ouest mexicain pour découvrir une auteure aussi ... japonaise !
On se croirait chez Yoko Ogawa ...
Le livre s'ouvre même sur une histoire de ... paupières ! étrange coïncidence.
Une autre nouvelle se passe à Tokyo où il est question de bonsaï.
Dans une autre, on découvre un bézoard, celui d'une jeune femme atteinte de trichophagie (cette fois je ne mets pas de liens, na, vous ferez comme moi : vous chercherez !).

[...] Les manies de Victor étaient elles aussi imperceptibles aux yeux du monde extérieur. Il fallait l'observer un certain temps pour se rendre compte qu'il faisait craquer ses doigts de façon compulsive - et pas pour une question de style, comme j'avais pu le croire au début - car son geste était naturel et le bruit du craquement presque inaudible. Et pourtant, passé les premiers mois, ce geste superflu et acceptable a commencé à m'être désagréable. Petit à petit, mon ouïe est devenue plus sensible au craquement.

Avec ses histoires embarrassantes, Guadalupe Nettel nous emmène loin du Mexique, dans son cabinet des curiosités, là où les fantasmes prennent corps, prennent notre corps.


Pour celles et ceux qui aiment les étrangetés des corps.
Actes Sud édite ces 142 pages parues en 2008 en VO et traduites de l'espagnol par Delphine Valentin.
Leiloona en parle, Le Figaro aussi.

mardi 14 avril 2009

Des nouvelles du Mexique (François Gaudry)

Quand les éboueurs jouent aux pirates.

On poursuit sur notre lancée à la découverte de la littérature mexicaine.
Après le doux parfum de mort de Guillermo Arriaga, voici Des nouvelles du Mexique.
Un recueil d'une trentaine de nouvelles présentées par François Le site du SalonGaudry (celui qu'on avait repéré dans la traduction d'Arriaga justement).
Un recueil avec donc les avantages et les défauts de l'exercice : dans le lot il y a du bon et du moins bon, de la variété et de la diversité mais aussi moins d'unité de ton.
Mais globalement, la découverte est un beau voyage et ce recueil sans doute un moyen d'accès idéal à la littérature de ce pays.
On plonge donc avec délices et effrois dans la chaleur et la moiteur mexicaine, pour un voyage dans ce pays où l'on parle plus de mort que d'amour.
Et comme dans tout voyage, c'est l'occasion d'étranges rencontres.
Un grand-père dont on salue les cendres dans leur urne sur la cheminée ... jusqu'à ce qu'un ravisseur les emporte et exige une rançon.
Un bourreau expert dans l'art de manier la corde à pendu ... qui terrorise des fils en attendant qu'ils reprennent la charge familiale.
Des éboueurs pirates qui se mutinent à bord de leur camion-poubelle ... et qui prennent la mer (ou l'autoroute) après avoir hissé le drapeau noir.
Un flic dont les mains puent la mort, au sens propre, si on peut dire.

[...] Marcial n'avait pas dormi depuis environ deux jours, à cause d'un boulot qui n'avait pas marché, il était obsédé par l'odeur bizarre qui émanait de ses mains, et cela explique qu'il ait mal engagé cette nouvelle affaire. Au lieu de vérifier les numéros de série, il accusa d'entrée le fermier d'utiliser les moissonneuses pour une inexistante récolte de marijuana, suivant en cela la vieille pratique qui consiste à accuser d'abord et à enquêter ensuite. Il se mit à crier, cassa une carafe pleine de limonade, envoya par terre un plat rempli de tacos bien dorés, fractura d'un coup de crosse la mâchoire de la femme du fermier quand celui-ci tenta de protester et menaça de mort les deux gamins si leur père ne disait pas où se trouvait la plantation. L'un des gosses chia dans on pantalon, le père saisit le couteau de cuisine pour taillader Marcial qui le descendit d'une balle en pleine tête ... Bref, le parfait désastre.

Attachez vos ceintures, c'est l"heure du décollage pour Mexico.
Un copieux et goûteux recueil de nouvelles dont plusieurs laissent une forte impression.


Pour celles et ceux qui aiment les mouches en été.
Métailié édite ces 382 pages.
Evene en parle, Essel également, Amérique latine aussi (avec une interview de François Gaudry).

samedi 4 avril 2009

Un doux parfum de mort (Guillermo Arriaga)

Un avant-goût (amer) de l’été.

Cette année la littérature mexicaine est à l'honneur.
On en reparlera donc bientôt avec deux recueils de nouvelles : avec Pétales et d'autres Nouvelles du Mexique.
En attendant, voici un auteur déjà célèbre et déjà connu même si l'on n'a encore rien lu de lui puisque Guillermo Arriaga est l'auteur de scénarios à succès au ciné : Babel, 3 Enterrements, 21 Grammes, Loin de la terre brûlée, c'est lui !
Une actualité et une renommée qui suffisaient à justifier qu'on se précipite sur ce petit polar de poche.
Pari gagné. Guillermo Arriaga avait signé ici un excellent roman qui n'avait rien d'un futur scénario hollywoodien.
Un polar si on veut (il y a meurtre, voire meurtres).
Une pièce de théâtre si on veut aussi : un presque huis-clos dans un petit village perdu au fin fond de la campagne mexicaine, plus exigû qu'une scène de théâtre.
On y retrouve même le chœur des villageois pour faire avancer l'histoire ... et les héros vers le drame final.
Tout commence, comme souvent, par la découverte d'un cadavre.
Celui d'une jeune fille du village, retrouvée nue et poignardée.
Ramòn, le jeune qui tient l'épicerie-bar-tabac et qui avait eu quelques chastes regards pour cette jeune fille de son vivant, se retrouve trop vite et à l'insu de son plein gré, à endosser le rôle de l'amant mystérieux de la jeune fille.
Pour ne pas peiner les parents de son amoureuse-malgré-lui, il ne dément pas.
Pour ne pas perdre la face vis à vis des piliers qui soutiennent son bar, il ne dément pas non plus quand on évoque le devoir de vengeance.
Et lorsque les soupçons se portent sur un fier gitan que l'on sait innocent et beaucoup trop dangereux pour notre jeune Ramòn, il s'enfonce lentement mais sûrement vers un destin qui n'aurait pas dû être le sien.
Bref, de fil en aiguille, de mensonges en non-dits, le drame se noue peu à peu, chacun endossant un rôle pour lequel il n'était pas forcément taillé.
C'est cette chronique d'une vengeance annoncée qui fait l'intérêt du roman. Chronique de la bêtise humaine.

[...] À 3 heures de l'après-midi, la plupart des habitants de Loma Grande savaient que Ramòn Castaños avait l'intention de tuer son rival avec le pistolet que lui avait prêté Juan Prieto. "Le même que celui avec lequel il a refroidi un flic au Texas", certifiaient ceux qui connaissaient la véritable histoire de Juan. La rumeur avait également couru qu'il s'agissait d'un pistolet défectueux ne permettant pas de viser juste. De sorte que certains hommes du village s'étaient réunis à l'épicerie pour mesurer les avantages et les inconvénients du recours au Derringer Davis. Les avis étaient partagés.

Avec un humour noir et distancié, Guillermo Arriaga nous emmène inexorablement sur le flux de la rumeur publique : on cause, on cause, sans savoir, ou pire parfois, en sachant pertinemment la vraie vérité.
Un roman très physique aussi, avec un soleil écrasant et une chaleur étouffante, ça pue la sueur et les mouches volent pendant la sieste.
De la rumeur et de la bêtise publiques ou des mouches et du soleil d'été, inutile de vous dire qu'on devine très vite lesquels sont les plus étouffants.
Et le doux parfum de la jeune fille cache mal celui de la mort.


Pour celles et ceux qui aiment les mouches en été.
Points poche édite ces 203 pages qui datent de 1994 en VO et qui sont traduites de l'espagnol par François Gaudry, ce même François Gaudry qui a conçu le recueil de nouvelles dont on parlera bientôt.
Cathe en parle, Jean-Marc aussi..