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Date de création : 30.11.2013
Dernière mise à jour :
08.12.2024
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Les prières pour la pluie, « Salat Al Istisqâa », ont été entendues au Maroc. Le roi Mohammed VI, « commandeur des croyants », ordonne depuis des années d’accomplir des « prières rogatoires »le vendredi dans l’ensemble des mosquées du royaume. Le voilà exaucé, un peu trop sans doute, car c’est un véritable déluge qui s’est abattu ces derniers jours sur le Royaume, touché de plein fouet par le dérèglement climatique. Car si l’ondée est restée bienfaitrice en ce qui concerne le remplissage de certains barrages et des nappes phréatiques, les autorités ont sonné l’alerte sur son aspect dévastateur. Dans le désert, les rivières asséchées se sont muées en larges fleuves boueux, emportant avec elles ce qu’elles trouvent sur leur passage.
Dimanche 22 septembre, le bulletin météorologique annonçait encore un niveau de vigilance orange, avec de nouvelles averses dans le centre du pays. La veille, les autorités déploraient un bilan dévastateur, dans le sud-est. Dans la province de Tata, des habitations ont été détruites, deux passagers d’un autobus emporté par les eaux, sont morts, et 14 personnes sont portées disparues. Il y a deux semaines, dans cette zone désertique du pays, les pluies torrentielles avaient déjà entraîné la mort d’au moins 18 personnes.
Gouttes du pouvoirLe lien entre conditions météorologiques et exercice du pouvoir au Maroc s’exprime au moins depuis la période coloniale, pendant laquelle naquit un vif intérêt pour les projets hydrauliques. En 2013, lors d’un déplacement à Casablanca, le président François Hollande avait repris un trait d’esprit attribué à Théodore Steeg, résident général du Maroc entre 1925 et 1929 : « gouverner, c’est pleuvoir ». Un écho à la maxime « gouverner, c’est prévoir », attribuée à l’homme Adolphe Thiers. Le roi Hassan II avait lui aussi très bien compris l’enjeu de composer avec les éléments, lui qui inaugura un barrage par an jusqu’à la fin de son règne, en 1999. Son héritier a poursuivi cet effort, portant à 148 le nombre de barrages. Ces infrastructures sont vitales : l’agriculture emploie encore aujourd’hui 39 % de la population active et consomme 88 % des ressources en eau.
Encore faut-il remplir ces retenues d’eau, alors que la sécheresse s’est entêtée ces six dernières années. Les violents orages auront au moins contribué à cela. Lundi 23 septembre, le ministère de l’équipement et de l’eau indiquait un taux de remplissage global de 29 % (4 862 millions de mètres cubes), trois points de plus que l’an dernier, ce qui laisse entrevoir au monde agricole une légère amélioration. Néanmoins, le sol imperméabilisé par la sécheresse aurait besoin de pluies beaucoup plus régulières, pour que l’eau s’infiltre efficacement jusqu’aux nappes phréatiques.
Infrastructures à revoirLes inondations ont laissé leur lot de destructions. En tout, 44 tronçons routiers ont vu leur circulation interrompue, avant leur rétablissement progressif durant le week-end. Le Maroc a annoncé un plan de 40 millions de dirhams (3,7 millions d’euros) pour réparer les dommages dans le sud-est du pays. Dans une interview donnée au site d’information Hespress, Mohammed Benata du Collectif écologique du Nord du Maroc, met en garde contre les « faiblesses profondes dans les infrastructures »,incapables d’encaisser des phénomènes naturels d’une telle violence. Il pointe du doigt l’insuffisance du système d’assainissement, ainsi que la grande vulnérabilité des ponts et chaussées. Jugeant qu’« il est préférable de laisser la nature suivre son cours sans interférer avec des technologies »,ce militant met en garde contre la tentation de s’en remettre au programme Al Ghaith imaginé en 1984 sous Hassan II, et qui consiste à polliniser les nuages au moyen de sels minéraux, afin d’obtenir des pluies artificielles. Une technique aux résultats marginaux compte tenu des énormes besoins.