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mercredi 15 novembre 2017

Rudy, tes spaghettis sont servis et la soupe aussi

Je vous donne à lire ci-dessous une lettre ouverte à Rudy Ricciotti.
Il est clair maintenant que la Région Ile-de-France, que ses institutions patrimoniales qui la représentent, que la politique du Grand Paris, osent tout, c'est à ça d'ailleurs qu'on les reconnaît. Chemetov et Prouvé à Saint-Ouen, Émile Aillaud à Nanterre, Jacques Kalisz à Nanterre, Tour Montparnasse, Claude Parent et Paul Virilio à Vélizy-Villacoublay, Esquillan à Fontainebleau et maintenant Maison du Peuple à Clichy de Beaudouin, Prouvé, Bodiansky et Lods... Le bilan des attaques contre le patrimoine moderne et contemporain devient lourd, très lourd, honteux. À qui le tour ? Le Musée des Arts et Traditions Populaires de Dubuisson peut-être...



Salut Rudy !
Je vais te tutoyer car tu es de ceux qui ont toujours fait de leur gouaille un signe de reconnaissance, comme si les tonalités de ta langue si chantante et fleurie et sans compromis devaient pouvoir immédiatement nous permettre de comprendre la franchise de ton architecture et de ta pensée, comme si cette voix, ta voix était l'occasion d'une complicité dont j'ose me saisir ici.
Dans cette vidéo, Rudy, tu affirmes avec une fierté non feinte qu'un architecte ça doit être un casse-couille, je crois que tu remplis bien ton programme.



Car vois-tu, lorsque pendant toute une carrière on joue l'outsider de service, celui qui empêche de tourner en rond, le grand pourfendeur de la pensée commune et le mec proche de la réalité du terrain et des connaissances des métiers, il est étonnant de voir soudain un travail qui écrase justement ceux qui, dans l'histoire de leur Art, furent les pionniers de cette brutalité chantante et de cet hommage aux gens : la Maison du Peuple de Clichy.
Non mais franchement Rudy... Qu'est-ce qui se passe ? C'est quoi cette tour de spaghettis qui va se dresser dans le ciel comme une corde enchantée par un magicien hindou et qui réduit le chef-d'œuvre de Prouvé, Lods, Bodiansky et Beaudouin à un plat de cantine en aluminium ?

Ce n'est pas à ta hauteur, c'est ça le pire. Pas à ta hauteur.

Mais vous, (je reprends le vouvoiement toujours lorsque je suis en colère), mais Monsieur Ricciotti franchement, là, vous rigolez ? Non ? Allez... C'est une blague ? Vous allez annoncer demain que vous y renoncez à ce projet et que c'était là un exercice pour montrer à tout le petit monde de l'architecture à quel point la gestion du Patrimoine Architectural du XXème siècle est méprisé en France ? 
Car sinon, tout ce que vous étiez jusque là, tout ce que vous avez porté de colères, d'intransigeance, de force et de respect à ceux qui bâtissent devient vain, inutile.
Quand on fait finalement de ses colères, de sa révolte, une image de marque, un objet de communication, un slogan à la Seguela pour servir un plat de promoteurs, on devient quoi ? 
Comment appelez-vous cela ?
Alors vous me direz que vous êtes donc bien un casse-couille pour tous ceux qui comme moi défendent le respect du Patrimoine et que vous méprisez ce combat car, sans doute, nous sommes, nous, croyez-vous, dans l'histoire et vous dans l'avenir... Que l'Histoire de la Modernité doit être réécrite, que son respect est inutile, voir ringard.
Vous avez sans doute raison Monsieur Ricciotti, mais entre l'histoire d'une gauche populaire de Clichy et de sa Maison du Peuple et l'avenir du Grand Paris des Promoteurs soutenu par une politique fourvoyée de personnalités décadentes à leur propres idéaux, je préfère le passé. 
Et je parie, oui, je parie que vous aussi Monsieur Ricciotti finalement. 
Rien dans votre projet architectural, rien ne rend hommage à cet optimisme, à cette architecture, à ces combats sociaux. Et surtout rien ne rend ici hommage à votre propre travail. Vous vous servez de ce passé comme d'un symbole, un signe qui vient marketer votre tour. Et l'absence de cette belle franchise qui était la vôtre est le signe de ce ratage. En fait, cette tour, elle débande, triste après sa petite mort érectile.
C'est certain que vous me rétorquerez que vous ne vouliez pas rendre hommage, que vous pensez que l'hommage aux aînés est une servilité. Que ce que porte cette Maison du Peuple d'idéologies d'émancipations sociales doit être réduit au silence simple de sa structure, comme un squelette vidé de sa chair. 
Mais le blanc de votre tour, ce blanc comme une boutique Macintosh de province, son élan amolli par sa façade serpentine, le contact entre l'existant, tout y est déjà épuisé surtout par son bio-design des années 90 que même Audi a abandonné il y a longtemps. Ce n'est pas du Maniérisme, c'est maniéré, c'est nouille comme on disait des mauvais suiveurs de Guimard.  Pourquoi avez-vous perdu votre puissance, votre force, votre courage ? Pourquoi la rage Ricciotti a disparu ? Pourquoi votre belle et nécessaire radicalité poétique a laissé la place à cette ascension racoleuse de spaghettis ? Quel mauvais, très mauvais dessin... Vraiment pas à votre niveau.
Mais le pire c'est l'ensemble des complicités à cette attaque patrimoniale. Le pire c'est cette caution. Le pire c'est le fourvoiement des Institutions Culturelles logotypées dans les arguments (publicitaires) des promoteurs. Ils ont instrumentalisé votre hargne pour en faire l'argument de leur probité. Le pire c'est ça, cette communication qui prend la place de la pensée, qui fait semblant, cette novlangue, outil magique pour faire passer l'indigestion de ce plat de spaghettis. Quand l'architecture devient communication, quand on illustre des concepts communicationnels par une construction, on ne fait pas de l'architecture. On fait un produit. 

Et, venant de vous Monsieur, de vous, après tout ce que vous avez porté, que j'ai tant aimé, tant admiré, et même tant diffusé auprès de mes étudiants comme modèle de résistance à ce monde boursouflé, c'est là le signe infamant qu'ils ont gagné et que nous avons perdu. Je vous inclus dans ce Nous.
Vous avez inventé ici le totem de ce retournement idéologique. Nous aurions préféré un beau majeur dressé dans le ciel de Clichy, doigt plus digne de l'héritage du Progrès Social.
Tu as raison Rudy, un architecte ça casse les couilles et on a le droit de changer après tout et nous, vois-tu, nous avons le droit au désamour.

Sinon ? Ça va ?

Pour en savoir plus sur ce projet allez là :
http://www.leparisien.fr/clichy-92110/maison-du-peuple-le-pcf-de-clichy-oppose-aux-appartements-de-luxe-05-11-2017-7374381.php 
Allez ici et lisez bien les arguments de communications. C'est hilarant puis affligeant. Où apprennent-ils à rédiger de tels textes ?

http://www.groupeduval.com/projet-maison-peuple-de-clichy-garenne/


mardi 20 novembre 2012

Jean Prouvé à Royan : une conférence.




Hier soir nous avons assisté à une conférence sur Jean Prouvé à Royan.
Au-delà des difficultés inhérentes au genre ne permettant pas toujours d'aller droit au but et de nous parler effectivement de Jean Prouvé à Royan mais bien plus de la personnalité touchante de ce grand nom de l'architecture, nous avons tout de même pu saisir quelques très petits éclairages sur sa présence dans la plus belle ville du Monde.
On doit surtout s'attacher dans ce cas à la présence de Catherine Prouvé qui a su, elle, nous communiquer avec passion, sérieux et évidemment la tendresse d'une fille pour son père les joies et difficultés de Jean Prouvé dans sa carrière.
Nous avons pu aussi tardivement et trop succinctement découvrir des documents de l'architecte, documents qui sont des trésors qui auraient mérité un travail sérieux d'analyses et de décryptages. Je vous propose de voir quelques images (mauvaises) prises pendant cette conférence.







On y aura appris que Jean Prouvé avait dessiné un front de mer pour Royan qui finalement n'aura pas été choisi. Mais il avait aussi semble-t-il proposé un type de maison différent du prototype 8x12 construit lui en bord de mer pour en tester la résistance.



 Nous ne savons rien de ce choix, rien de la localisation de la maison et de son histoire... Dommage. Rien non plus sur les qualités constructives de ces maisons.
Nous aurons appris que Jean prouvé avait travaillé en 1936 pour la Poste avec Monsieur Ursault... Il aurait fallu développer un peu.
Il faudra, et cela est maintenant une évidence, permettre un vrai travail autour de cette production de Jean Prouvé à Royan. Une exposition de ces documents, une analyse par un spécialiste, une publication viendront certainement (vu l'importance de ce qui émerge maintenant ) révéler au public cet héritage primordial.


jeudi 21 juin 2012

Charlotte Perriand dans les livres



Alors que je termine la lecture de Une vie de création de Charlotte Perriand, livre dans lequel elle raconte son histoire et sa vie riche, incroyablement riche, mon frère Christophe m'apporte pour une relecture un livre qu'il possède depuis longtemps Intérieurs de chalets et de maisons de campagne aux éditions Massin. Il est temps que je vous dise que ce frère depuis des années s'intéresse au design bien avant moi et que son flair de frère aîné l'a amené à acheter mobilier et livres que je dédaignais alors...
Ainsi aujourd'hui est-il à la tête d'une sorte de petite bibliothèque des Arts Décoratifs des trente glorieuses, bibliothèque que je jalouse souvent le week-end quand Christophe me fait le plaisir d'apporter un ou plusieurs de ses volumes et les trois éclairs au café du dessert dominical !
En voici donc un exemple et mon cœur a sursauté lorsque je me suis aperçu que la quasi totalité des photographies de ce livre représentaient du mobilier de Charlotte Perriand ! Alors pas de carte postale aujourd'hui mais je vous connais maintenant et je sais que vous allez vous régaler. Je dois donc remercier Christophe mais aussi Claude et Gaëlle qui m'ont permis de lire Charlotte Perriand dans une version de ce livre dédicacée par l'artiste lors de leur rencontre avec celle-ci.
Je vous donne sa dédicace : " L'enfant est un créateur né".
J'ajouterai également : "quel joyeux petit destructeur !"

Une vie de création
Charlotte Perriand
éditions Odile Jacob
1998

Allez ! Regardons l'œuvre de Charlotte Perriand :



























jeudi 7 juin 2012

de Mailly sous bois

Nous allons regarder deux cartes postales du même endroit, l'Hôtel de Ville de Rosny-sous-Bois par Jean de Mailly architecte et nous allons nous amuser (eh oui!) à comparer les choix de cadrages des deux photographes ou du même photographe d'ailleurs.
En effet, les deux cartes postales sont chez Combier éditions et ne donnent aucune information sur leur photographe. Elles sont toutes deux éditées en 1966, ce qui pourrait bien être le signe d'une même campagne photographique donc... d'un même photographe. Pourtant les deux images sont très différentes. Allez, regardons d'abord...



...L'hôtel de ville de Rosny-sous-Bois ici porte bien son nom puisque le photographe nous place l'architecture de Jean de Mailly sous une frondaison d'arbres centenaires et romantiques. Nous sommes bien "sous bois"!
Des vieux sont assis sur leur banc, les parterres sont à leur place, bref une vraie carte postale à la fois champêtre, pittoresque et bien construite car la tour de l'hôtel de ville réussit à surgir tout de même dans un trou des branchages. On aurait voulu dire la modernité et en même temps l'adoucir par la végétation qu'on ne s'y serait pas pris autrement !
Pour les puristes, la carte fut expédiée le 8 décembre 1966 et elle est une exclusivité de la Maison de la Presse dans la collection Merle (sic). L'architecte est également nommé.
Une autre ?



Ça change non ?
Pourtant nous sommes bien chez le même éditeur, dans la même collection et à la même époque. Il devait y avoir une clientèle pour le pittoresque boisé et une pour la radicalité moderniste et frontale. Devinez à laquelle j'appartiens ? Oui ! Gagnez !
Quelle belle image ! Quelle belle architecture !
Regardez la quasi-symétrie rompue simplement par le drapeau national. Regardez le traitement du claustra du rez-de-chaussée de la salle des fêtes et comment l'ensemble gris bleu du métal fait son effet. La tour de l'Hôtel de Ville ne vous rappelle rien ? Arrondie au coin...
Il vous faudra retourner ici à la Défense où vous retrouverez la Tour Nobel du même Monsieur de Mailly en collaboration avec Jean Prouvé. Au fait, est-ce que ce dernier aurait aussi participé à la construction de l'Hôtel de Ville de Rosny-sous-Bois ?

samedi 14 avril 2012

généalogie Novarina

Une nouvelle fois, je vais évoquer une famille attachante que le hasard et le goût me font régulièrement croiser : la famille Novarina.
Sur ce blog nous sommes particulièrement attachés à l'œuvre de Maurice Novarina, l'architecte. Il y a peu nous avons pu nous réjouir de la belle tour CILOF et la gare de triage (à droite) vous donnera l'occasion de revenir sur le travail de l'architecte.
Je vous donne l'occasion aujourd'hui de découvrir cette nouvelle carte postale de l'une des œuvres les plus attachantes de cet architecte :


La buvette Cachat à Evian-les-Bains est une architecture dont la légèreté, presque le désir d'évanescence, est remarquable. Une sorte de boîte de verre couverte d'une feuille fine interroge admirablement la question de la disparition architecturale, son évanouissement. Cette édition Gil nous permet par sa vue de nuit de nous donner à voir la structure des béquilles de Jean Prouvé et dans mes cartes postales de cette buvette c'est bien la seule à offrir une telle clarté de sa structure tendue et équilibrée, chef-d'œuvre sans aucun doute de technique métallique.



La carte postale fut envoyée en 1959 (!) donc très tôt après sa construction. L'architecte Novarina est bien nommé mais pas Jean Prouvé. Certainement l'une de mes plus belles cartes postales de ces deux grands architectes et ingénieurs.
Je vous donne quelques images d'Architecture d'Aujourd'hui de 1958, revue n°75 qui consacra une double page à la buvette et même des photographies en couleurs ! La mise en page de l'article est aussi d'une grande beauté.




Mais il se trouve que j'ai reçu un message puis un envoi de Virgile Novarina le petit-fils de l'architecte. Celui-ci me confie qu'il possède à son tour une belle collection de cartes postales des œuvres de son grand-père (je jalouse cette collection !) et me fait le grand plaisir de m'envoyer cet ouvrage :


Dans Maurice Novarina Dessins et Peintures, Virgile a réuni une très grande partie de la production graphique de son grand-père. Je ne connaissais pas cette partie du travail de l'architecte, travail pourtant prolixe et varié.
Ici, l'hommage à Le Corbusier est total :







Voici une carte postale Combier de cette même église de Vongy qui nomme bien Monsieur Novarina comme architecte.



Le livre retrace pas moins que la période de 1928 à 2002 ! On voit un homme libre, se laissant prendre par les influences de son époque, les modelant, ne se refusant aucune tentative et jubilant des couleurs, des lignes, des espaces. On devine là un impérieux besoin, sans doute un contrepoint à l'architecture mais avec un écho léger à son travail. C'est d'une grande liberté et toujours d'une grande jeunesse, presque parfois une candeur.
On sent là, comme chez Le Corbusier, un désir d'être un artiste complet exerçant sa main et son œil pour que sans doute les analyses du paysage et du monde forment un vocabulaire ouvert, une sorte de terrain propice à la justesse.
On dira un équilibre personnel.
Je me dois donc de remercier vivement Virgile Novarina pour cet envoi et son attention à ce blog. Il va de soi que dès que les cartes postales m'en donneront l'occasion, j'évoquerai ici Maurice, Valère, ou Virgile Novarina.

Maurice Novarina, dessins et peintures
éditions du centenaire
2007
isbn : 2-915460-49-3

Pour connaître un peu mieux Virgile Novarina : les endormis, France Culture

Pour ceux qui n'auraient toujours pas rencontré l'écriture de Valère Novarina, je me permets de vous conseiller : le Drame de la Vie, chez P.O.L éditeur. Vous ne verrez plus et n'entendrez plus la langue française de la même façon !

Et pour que la famille soit au complet, visitez le site consacré à Madeleine Novarina.