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lundi 12 novembre 2012

Le lièvre et la tortue

On va voir que les fables peuvent parfois prendre forme architecturale en suivant deux réalisations d'un architecte français, Monsieur Zehrfuss, qui a su faire du béton un matériau incroyablement poétique et parfaitement... insoutenable.
Une poésie insoutenable c'est sans doute cela une fable.
Commençons par la tortue :



Cette très incroyable carte postale nous donne à voir une maquette du C.N.I.T de Paris la Défense. L'image totalement construite sur cette maquette collée devant un fond paysager est assez sidérante mais aussi très proche de la réalisation finale. Sauf, je crois, pour ce qui est de la volée d'escaliers au premier plan. On notera que le Centre National des Industries et Techniques semble un rien enterré ce qui d'ailleurs est une prémonition de son état actuel...
La carte postale est une édition publicitaire imitant une vraie carte postale jusqu'au détail de la typo qui donne l'illusion d'une écriture manuelle. En photographie véritable, le cliché est dû à Smeesters. Je vous donne le verso et peut-être que quelqu'un nous retrouvera Mr Gautier, ingénieur-conseil à Méré !



La carte est précise, donne les noms des architectes : Camelot, De Mailly, Zehrfuss. Il s'agit donc d'une publicité pour Nelsonite 35.
Ce C.N.I.T reste une merveille technique et plastique, sans doute l'une des plus beaux et audacieux de Paris au siècle dernier. Trois points d'appui c'est tout. Trois.
La tension est palpable, l'équilibre génial, la masse énorme à peine sensible : une coquille bien plus qu'une carapace. Une tortue fragile presque mais sans doute aussi un peu trop remplie aujourd'hui, un peu trop enterrée aussi.



On regardera avec humour le dessin de la Tour Eiffel au fond de l'image. Nous ne savons rien de cette maquette, si elle fut celle des architectes ou bien une réalisation plus tardive ou encore purement publicitaire. Nous ne pouvons même pas déterminer sa véritable taille et échelle !
Le lièvre :



Il fallait sans doute aller vite et pour pas cher. Il fallait croire qu'une ligne sur l'horizon ajoutait un horizon et non une clôture. Pourtant le Haut du Lièvre à Nancy est bien au-delà de son aspect infini, une hérésie superbe.
Le hard french total, sa définition même qui a fait du chemin de grue une forme absolue.
J'aime ça mais comme je l'ai déjà dit j'aime cela comme on aime les curiosités inattendues et monstrueuses de la géologie. La ligne ainsi marquée pourrait après tout être la forme ultime, celle vénérée et rêvée par Superstudio. Claude Parent aime à dire que d'une manière paradoxale ce qu'il aime le plus c'est un mur dans la nature et que, en même temps c'est précisément ce qui le gêne le plus. C'est bien là la poésie du Haut du Lièvre : un geste brutal, effrayant, grandiose. A la fois le plus beau parce qu'il dit tout du désir et le plus laid parce qu'il est assouvi.
Il paraît qu'en bas, à ses pieds, une maison de Jean Prouvé a trouvé sa place. On comprendra bien que la France, que l'architecture et les territoires devaient choisir entre deux de ces modèles. Qu'aurions-nous dit d'un étalement pavillonnaire, même de pavillons de Prouvé ?
Alors si l'on doit raser le Haut du Lièvre qu'on ne lui laisse, s'il vous plaît, aucun répit. Que cela soit brutal, guerrier, définitif. Une apocalypse joyeuse, sensationnelle et bruyante. Qu'on retourne sa terre, qu'on broie ses gravats, qu'on efface sa trace. Resteront les images sans danger, les noirs et blancs imprimés et quelques souvenirs durs ou heureux de l'un des gestes architecturaux les plus beaux. Comme une erreur surréaliste : mystérieuse à notre entendement.
Merci Monsieur Zehrfuss. Merci.
La carte postale est une édition Photo Aérienne et Industrielle par Gérard. On notera, sans doute dans un désir de troubler les pistes que l'éditeur indique Mancy au lieu de Nancy...
Les actes manqués, je vous dis...




mardi 10 janvier 2012

Sautier, architecte à Melun

Voici un cas bien intéressant.
D'abord par la carte postale elle-même qui nous montre en son recto une superbe vue du Palais de l'Unesco en chantier.



Les chantiers c'est toujours passionnant, voir les entrailles, les squelettes des édifices, leur intimité. Ici on perçoit bien la transparence encore de la construction. Mais finalement on aperçoit peu d'ouvriers au travail. La moitié de la carte postale offre un ciel blanchi qui doit être lui aussi en construction !
détails :





Mais au dos, figure aussi, imprimé un texte qui fait la publicité de Nelsonite France. On s'amusera de la typo qui laisse croire à une carte postale manuscrite. Je vous laisse vous régaler des données techniques :



Mais comme il s'agit d'une publicité, cette carte postale est adressée à un architecte !
Monsieur P. Sautier architecte à Melun !
On notera que l'adresse est manuscrite, je ne vous raconte pas le travail pour l'expédition de toutes ces cartes vers les plus prestigieux (et les autres...) architectes de France.
Je ne trouve rien sur ce Monsieur Sautier architecte et c'est bien dommage. En tout cas voici une carte postale que je vais avoir du mal à ranger...
Merci à Dominique M. de m'avoir signalé cette carte postale. Quel œil Dominique !

mardi 11 octobre 2011

un modèle français : malheureusement ?

Voici trois cartes postales de "grands ensembles" :







On pourrait rapidement en regardant ces trois images se dire qu'il s'agit du même endroit, du même architecte, du même projet.
On n'aurait finalement pas tort sur le projet sans doute : du logement social, un quartier avec son centre commercial, sa galerie marchande, son parking.
Pour le reste...
La première :
Nous sommes à Lyon la Duchère (le plateau). La carte postale Trollet date de 1964 et ne nous indique pas le nom des architectes François Régis Cottin et Frank Grimal. On devine au fond assez majesteuse une barre franche et puissante à la grille très déterminée. Le cliché est absolument superbe, le document rare.
On perçoit en bas de l'image que le chantier se termine et le centre commercial prend la mesure de sa modestie face à la barre. Une sorte de fragilité l'oppose à la masse.
La seconde :
Nous sommes cette fois à Nancy dans le célèbre Haut-du-Lièvre grâce à une carte postale La Cigogne sans date.
Depuis une légère hauteur on vise là aussi la petite galerie commerciale qui s'aligne et se fait déborder par la barre qui n'en finit plus de toucher l'horizon. Certainement l'un des plus célèbres monstres de l'architecture française du logement social, une forme d'apothéose inouïe et aujourd'hui décriée. Aujourd'hui seulement ?
Bernard Zehrfuss qui en est l'architecte a fait ici une œuvre sévère, rigide, presque dédaigneuse. Difficile maintenant de soutenir une telle âpreté même en se réfugiant derrière un classicisme un ordre, une composition.
Pourtant... je sais que je cède facilement à la fascination d'une telle puissance. Ma fascination ne m'oblige pas à y vivre !
Je balancerai donc toujours entre une irrépressible admiration et une inquiétude face à une pensée qui forge une telle forme d'habitat.
Et son abstraction tombant comme un jugement de valeur sur l'habitant est une question difficile. C'est la limite atteinte par l'architecte qui "ordonne" plus qu'il ne construit. On pourrait aimer le Haut-du-Lièvre comme on aime Vauban. Sans défense, sans son programme, juste pour une géométrie paysagère qui n'oblige justement aucun corps à s'y immobiliser. Le plus beau mur du monde...
La troisième :
La cité de la Tour à la Courneuve, rue Renoir...
Je ris de Renoir venant peindre là, trop tendre sans doute, trop mou.
Il faudrait un peintre plus sec, cernant de noir, tirant à la ligne et apposant les aplats comme des coups de couteau.
Mais cette carte postale Yvon n'a pas besoin de peintre. Elle dit tout, d'un coup de noir et blanc colorisé. Elle dit l'architecture qui pousse sur des chemins de grue, qui suit à l'infini les parallèles, qui ne finit que par manque de crédits, d'habitants, d'ambition urbaine.
J'imagine encore et encore les traits au tubulaire sur les règles des apprentis architectes. J'imagine la rationalisation parfaite comme une forme d'hygiène de vie, une pensée toute tournée vers l'élimination des différences parce que le moule de béton ne supporte pas le débord. Alors la vie doit suivre.
Reste une image que j'ose trouver superbe encore, sans doute (et c'est aussi là mon incorrigible défaut) parce que vide... Je rêve de l'espace inscrit sur la dalle qui fait le toit du centre commercial, je rêve de cette géométrie une fois de plus dure et parfaite. Et je me pose la question de son inutilité urbaine, de ce désert construit sans objet, sans raison, sans promenade. Cet aplat d'architecture me fait jubiler, m'emmène dans un imaginaire de solitude, tranquille. C'est, je vous l'accorde, effrayant mais cela me rassure aussi.
Mais je visite plus facilement mes images ayant compris depuis peu que le réel a comme force la déception. Et c'est une force habile qui vous prend sur un refrain de nostalgie, de rêves oubliés, d'utopies encore adorées.
Que faut-il donc penser de ces lieux ?
Je veux m'autoriser à les trouver beaux, indéniablement monstrueux et inaccessibles.
Non pas que je ne puisse pas les voir, mais je ne les vis pas. Ils sont finalement pour moi bien plus comme des sculptures, des pleins, des vides. Et cette dimension sociale, cette exactitude de l'expérience doivent aussi admettre que nous sommes nombreux à les nier pour nous réjouir en toute innocence mais dans un luxe insultant des images bien plus que du réel.

mercredi 14 juillet 2010

le dessin laid et la belle photographie

Une belle architecture peut (ou pas) inspirer de beaux documents.
Elle peut aussi faire naître des choses moins... intéressantes.
Voyez par exemple le superbe Palais de l'Unesco à Paris.
Voici une carte postale dite du premier jour :


On doit cette carte postale aux éditions "Bourgogne" 3, rue du Mersy-St-Denis à Dijon. C'est tamponné derrière !
Le lavis est de L. Bourgeois d'après... la maquette !
Ceci explique sans doute cela.
L'ensemble est un rien pâteux et épais mais on remarquera tout de même la précision du détail avec le mobile de Calder fidèlement (!) représenté.
Il semble que la façade ait donné beaucoup de mal au dessinateur car même le graveur du timbre a eu du mal.
Pourtant la maquette est assez claire et on voit que dans le numéro 58 de février 1956 d'Architecture d'Aujourd'hui, le grand photographe Lucien Hervé se penche lui aussi sur cette dernière.
Je trouve d'ailleurs qu'il s'agit là pour un photographe d'architecture de cette envergure d'un bien drôle d'exercice que de photographier une maquette.
Alors voici quelques images :





Mais finissons avec une autre carte postale :


Cette merveille des éditions Cap est en Real-Photo. Cet éditeur fait bien son travail car il nous donne également le nom des architectes Marcel Breuer, Pier Luigi Nervi, Bernard Zehrfuss et date la construction de 1955-1958.
Mais quelle image !
D'abord le parking rempli de nostalgie automobile. Des Simca, des Peugeot, des Renault...
Puis le bâtiment lui-même parfaitement éclairé, presque scintillant et vibrant sous un ciel nuageux remarquablement habité. Le travail de la façade est vraiment incroyable. On dirait que la construction veut avaler le monde, s'ouvrir complètement.
Quelle volumétrie !
J'aime tout particulièrement les dégagement dans le dernier niveau et l'auvent superbe dont nous avons parlé ici.

Futuro passé simple


Il semble bien que la vision d'une soucoupe volante au pied du C.N.I.T vous ait plu. Alors encore un tout petit peu d'OVNI parisien.
La carte postale Lyna sait bien nous montrer le monstre superbe de béton précontraint et à son pied la Futuro déjà vue ici et ici.


Le mystère reste entier sur son rôle ici.
Peut-être un lieu d'informations sur la Défense ?
Il doit bien y avoir quelqu'un qui se souvient être monté à bord...
On n'oubliera pas de jeter un coup d'œil au snack bar qui ne manque pas d'allure surtout avec sa terrasse recouvrable un peu particulière.
En tout cas j'aime beaucoup comment le ciel travaille les reflets sur l'immense paroi de verre du C.N.I.T.
Encore donc une belle carte postale de l'éditeur Lyna, photographie de Monsieur Rolf Walter qui a vraiment beaucoup travaillé pour nous !
Je vous rappelle que la Futuro est l'œuvre de l'architecte Suuronen et que vous pouvez aussi en voir une sur le site de Julien Donada ici.

dimanche 6 juin 2010

triangle, cercle, trapèze

Trois architectures.
Trois lieux.
Trois programmes.
Des points en commun : une certaine puissance, une radicalité et un sens aigu du paysage.
D'abord revenons sur un lieu et un moment déjà vu sur ce blog avec cette carte postale Lyna :


On retrouve le Palais du C.N.I.T et ses jardinières moribondes mais on retrouve aussi la soucoupe volante Futuro de Suuronen posée devant la merveille de béton. On détaille d'ailleurs un peu mieux l'objet ici :


Il semble que les martiens ou les vénusiens aient un sens profond de la détente car au pied de la soucoupe volante des parasols et des chaises permettent de boire un godet en toute tranquillité.
Qui aurait des souvenirs de cette soucoupe, qui saurait ce qu'elle fait là ?
Dans un tout autre genre :


Tout est dit sur le recto de cette carte postale premier jour.
Le nom de l'architecte, Monsieur Renaudie dont vous savez ma totale admiration, le nom du lieu, Givors dont vous connaissez l'incroyable beauté et la date de l'événement le 20 avril 1985.
Si l'image n'est pas flatteuse avec sa teinte grise généralisée et la verdure absente il faut savoir regarder cet endroit, s'y promener et jubiler de sa parfaite implication dans la topographie de la ville, s'appuyant contre une falaise de rocher, venant à la fois l'épouser et l'inventer.
Vous devrez vous y rendre un jour.
Et ici ?


Alors ? Où sommes-nous d'après vous ?
Je vous le dis tout net, nous sommes aux U.S.A, en Arizona à Sedona pour être très précis.
Cette chose étrange et splendide a connu une belle fortune critique puisque je la retrouve dans mon ouvrage sur Les Eglises modernes à travers le monde de Joseph Pichard et surtout dans le numéro 71 de Architecture d'Aujourd'hui d'avril 1957. Je vous propose ici des extraits de l'article qui insiste et c'est logique sur l'identité paysagère du lieu et la valeur symbolique du signe et de son dépouillement.
Les architectes sont Messieurs Anshen et Allen.









mercredi 12 mai 2010

C.N.I.T S.I.C.O.B. FUTURO

Le C.N.I.T est vraiment une des pièces maîtresse de l'architecture française.
C'est dit.
C'est une évidence et qu'il s'agisse de ses prouesses techniques et formels, il est un bâtiment absolument époustouflant du XXème siècle même si aujourd'hui il est un peu enclavé.
Je ne vous ferai pas une leçon d'architecture (ici remarquable) et je vous laisse à la joie de la découverte de quelques cartes postales.
D'abord une vue incroyable :


Superbe non ?
De ce point de vue, difficile de comprendre la volumétrie de l'ensemble mais on perçoit bien la tension du voile de béton et les nervures de celui-ci me font toujours penser à un textile gonflé.
Il s'agit d'une édition Raymon qui ne donne pas le nom des architectes.
Prenons le bus :


Le rond-point de la Défense est encore là et l'animation automobile est bien vivante formant une sorte de magnifique manège.
La carte postale Alfa nous indique les architectes : Messieurs Camelot, De Mailly et Zehrfuss.
Il y a beaucoup de monde à l'entrée mais je n'arrive pas à saisir la manifestation... On perçoit bien la transparence de l'ensemble.


Pour cette carte postale Lyna, pas de souci pour trouver le nom du Salon : Le S.I.C.O.B.
Admirons le point de vue original du photographe comme souvent chez Lyna éditeur. Il vient placer la ligne de chemin de fer tout contre jouant du rapprochement des courbes du remblais et de celles du bâtiment.
Le train, le parking rempli, la rampe, quelle image !
La carte postale est datée par son correspondant de 1973 est-ce que cela correspond bien au 21ème S.I.C.O.B ?
Encore...


Ici une carte postale de Albert Monier, le grand photographe aux éditions toujours remarquables.
C'est culte.
Il place le bâtiment dans une symétrie bien mesurée où la construction offre une ligne qui coupe la carte postale en deux.
Le premier plan permet pourtant de ce dégager d'une trop grande brutalité et offre une profondeur en utilisant la forme des topiaires du rond-point... habile cet Albert Monier !
Pas de date ni de nom d'architecte.
Attention les yeux !


Comment dire ?
Évidement mettre ainsi en concurrence l'une des plus audacieuse forme architecturale jamais produite et trois malheureuses jardinières en béton c'est un peu ironique.
j'aime ça !
Et puis ainsi le C.N.I.T est posé sur des gradins !
Ce qui fait aussi la force de cette image c'est la minéralité. Tout est sec même les pauvres plantes dans les jardinières !
Mais regardons attentivement.
Là :


Une soucoupe volante !
Que fait-elle là ? Vient-elle de Mars ou de Vénus ?
Il s'agit en fait d'une architecture de Suuronen un architecte finnois, la Futuro ! Mais pourquoi a-t-elle atterri ici ? Quel salon, quelle manifestation furent à l'origine de son installation sur le parvis du C.N.I.T ?
Je vous montre quelques images tirées d'un livre en allemand de Matthias Ludwig Mobile Architektur chez Diva éditeur.






Mais encore plus étrange...



Cette carte postale Abeille-carte nous montre également la Futuro mais aussi un énorme globe terrestre au premier plan !
Il semble même qu'on pouvait le visiter non ?
Or il ne fait aucun doute que ce globe n'est pas sur les deux images. Il fut donc très peu de temps sur les lieux à moins que ce ne soit la Futuro de Monsieur Suuronen qui fut longtemps exposée ici. Mystère.
Qui aura les réponses ?