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lundi 24 février 2025

Rares ceux qui échappèrent à la guerre (Frédéric Paulin)


[...] Les hommes sont ainsi capables du pire.

Second épisode de la saga de Frédéric Paulin sur l'histoire récente du Liban. Le récit est toujours aussi soigneusement documenté et toujours instructif et passionnant.
Nous voici maintenant au cœur des années Mitterrand avec la période 1983-1986.

❤️❤️❤️🤍🤍

L'auteur, le livre (416 pages, février 2025) :

Frédéric Paulin s'est fait une spécialité de romans (façon thrillers) avec lesquels il éclaire la géopolitique de notre Histoire contemporaine à travers celle des pays qui nous sont proches : après la série sur l'Algérie, c'est au tour du Liban
Prof d'histoire-géo, journaliste, il a entamé l'an passé une nouvelle série destinée à mieux nous faire comprendre les enjeux des conflits libanais. Vaste entreprise (!) dont le premier titre Nul ennemi comme un frère est paru en août dernier et couvrait la période de la guerre civile des années 70.
Le premier tome se refermait en 1983, au jour des terribles attentats qui visèrent les américains à l'aéroport de Beyrouth et les français dans l'immeuble Drakkar. 
On avait laissé le Liban à feu et à sang, et on le retrouve de même dans ce second épisode, Rares ceux qui échappèrent à la guerre, qui couvre une période plus courte (1983-86) au cœur des années Mitterrand.

Le contexte :

Depuis des millénaires, le Liban est le centre géopolitique du Moyen-Orient et aujourd'hui toujours, le cœur d'une région en train d'imploser.
Sur place, Frédéric Paulin a convoqué tous les acteurs de l'époque.
[...] D’un côté de la table, le camp chrétien : Amine et Pierre Gemayel, et Camille Chamoun. En face, les autres, tous les autres : le Front du salut national, pro-Damas, représenté par le chrétien Soleiman Frangié, le sunnite Rachid Karamé, l’ancien Premier ministre, et le druze Walid Joumblatt, les chiites Nabih Berri et Adel Osseirane, et les sunnites menés par Saëb Salam.
[...] Le président Gemayel tente en vain de s’opposer aux Israéliens qui maintiennent leurs troupes au Sud-Liban, aux Syriens qui considèrent le Liban comme leur jouet, et à l’OLP qui voudrait y créer une nouvelle Palestine.
[...] Les Palestiniens ont déstabilisé le pays, puis les Syriens, les Iraniens maintenant. Vous, les Français et tous les Occidentaux, vous vous êtes trouvé un champ de bataille loin de chez vous pour continuer à affronter l’URSS et ses alliés. C’est pratique, non ?

Le canevas :

Pour la trame romanesque de cette série, Frédéric Paulin a réuni, aux côtés des personnalités bien réelles de l'époque, quelques personnages de fiction que l'on retrouve avec plaisir dans cet épisode (même si aucun n'est vraiment très sympathique) et qui vont continuer à nous servir de guides dans l'imbroglio libanais où se mêlent trop étroitement politique, guerre et religion : Philippe Kellermann l'agent de l'ambassade shooté aux anxiolytiques, Zia al-Faqîh la belle interprète chiite, l'arrogant Christian Dixneuf l'agent de la DGSE, la juge antiterroriste Gagliago et son mari des RG, les chrétiens maronites de la famille Nada, ...
[...] — Je vous le répète : je ne fais pas de politique, moi.
— Au Liban, un proverbe dit que vivre, c’est déjà faire de la politique.
[...] Alors, donc c’était vrai : les hommes sont ainsi capables du pire.
Les années 83-86, ce sont les années Mitterrand on l'a dit, le début de la cohabitation avec Chirac, la série d'attentats terroristes à Paris, les otages au Liban (les Seurat, Kauffmann, et d'autres) : ce sont les années où les errements de la France au Moyen-Orient s'invitent dans la politique intérieure de notre pays.
Le contentieux avec l'Iran du prêt Eurodif n'est toujours pas soldé, la France fournit toujours des armes à l'Irak, et pour libérer les otages du Hezbollah, les négociations croisées menées à la fois par les émissaires de Mitterrand et ceux de Chirac-Pasqua jouent une farce grotesque qui ferait rire aujourd'hui si la vie des otages n'était pas en jeu (Michel Seurat décédera d'un cancer non soigné à Beyrouth) : un triste spectacle, qu'il est édifiant de revoir avec le recul nécessaire.
[...] La vitre de Dumas se baisse.
— Philippe, il faut que les otages soient libérés rapidement, dit le ministre des Relations extérieures, le sourcil grave.
— Évidemment, monsieur.
— Le président veut que ça soit fait avant les législatives, vous comprenez ?
On refermera cet épisode dans le bruit de l'explosion de la rue de Rennes ...
C'est aussi l'époque de la naissance en France de la juridiction antiterroriste.

♥ On aime :

 Les ouvrages de Frédéric Paulin sortent au même moment que le polar de David Hury que l'on vient de lire : Beyrouth Forever
Le roman de David Hury était pétri de vécu et nous donnait une vue synthétique de l'histoire du pays. Désespérante mais synthétique.
Les bouquins de Frédéric Paulin fournissent un éclairage plus politique et une vue plus analytique de l'histoire du pays. 
Désespérante mais analytique.
Il est naturellement inutile de comparer les deux œuvres, mais il est intéressant de constater comment elles se complètent mutuellement.
[...] — Comment on peut aimer un tel pays ?
— Pour les gens qui y vivent, peut- être.
 F. Paulin parle évidemment du Liban mais on (ré-)apprend également beaucoup de choses sur la France de l'époque, celle qui croyait encore tirer les ficelles de sa diplomatie : nous voici au cœur des années Mitterrand, dans les coulisses où se jouent les grandes manœuvres de Tonton pour consolider son pouvoir et celles de la droite pour le reconquérir derrière Chirac et Pasqua.
Il n'est jamais inutile de réviser un peu notre propre passé récent, même avec une vue depuis Beyrouth !
Pour ne pas oublier que "les otages servent dans le cadre des tractations pour le milliard d’Eurodif, pour l’arrêt de l’armement vendu à l’Irak, pour la libération de Naccache".
 Bien sûr c'est un roman, avec quelques personnages de fiction (mais très peu), avec des espions et de l'action, des victimes et du suspense, des méchants et des gentils (euh, des gentils, y'en n'a pas beaucoup), mais ce n'est pas un thriller à la James Bond, c'est un roman à la belle façon de Frédéric Paulin : c'est l'Histoire avec un grand "H" qui nous est contée et les faits relatés sont méticuleusement vérifiés par cet auteur scrupuleux qui possède l'art et la manière de mettre tout cela en lumière pour notre bonne compréhension. Question de perspective.

Pour celles et ceux qui aiment comprendre aujourd'hui.
D’autres avis sur Bibliosurf et Babelio.
Livre lu grâce aux éditions Agullo (SP).
Mon billet dans ActuaLitté.

mercredi 28 août 2024

Nul ennemi comme un frère (Frédéric Paulin)


[...] Au Liban, la guerre pourrait ne jamais se terminer.

Frédéric Paulin retrace pour nous l'histoire récente du Liban, de 1975 à 1983, jusqu'à la naissance du Hezbollah. Le récit est soigneusement documenté et c'est tout simplement passionnant.
Vivement la suite ...

L'auteur, le livre (480 pages, août 2024) :

Frédéric Paulin s'est fait une spécialité de romans (façon thrillers) avec lesquels il éclaire la géopolitique de notre Histoire contemporaine. 
On se rappelle notamment sa trilogie Benlazar sur le terrorisme venu du Maghreb et surtout son récit du sommet du G8 à Gênes
Prof d'histoire-géo, journaliste, il ouvre aujourd'hui une nouvelle série destinée à mieux nous faire comprendre les enjeux des conflits libanais. Vaste entreprise (!) dont le premier titre Nul ennemi comme un frère est tiré d'un proverbe qui évoque la trahison.
➔ Issu d'une longue tradition française, le pays du Cèdre, la Suisse du Moyen-Orient dont la capitale fut même appelée le Paris du Moyen-Orient, fait toujours et encore aujourd'hui la Une des actualités : l'histoire que l'auteur va nous raconter tombe vraiment à point nommé.
Ce premier tome (début d'une nouvelle série) couvre la période des années 70 jusqu'en 1983, du début de la guerre civile libanaise jusqu'au 23 octobre 83 précisément, jour des terribles attentats contre les forces de la FMSB qui visèrent les américains à l'aéroport et les français dans l'immeuble Drakkar.
[...] Je suis le Liban qui a fait la guerre depuis tant d’années que parfois j’accepte que cette guerre ne s’arrêtera peut-être jamais.

Le contexte :

Depuis des millénaires, le Liban est le centre géopolitique du Moyen-Orient et aujourd'hui toujours, le centre névralgique d'une région sur le point d'imploser.
[...] Qui comprend ce qui agite depuis quelques années la Bekaa et le pays entier ? Pourtant tout le monde pressent le pire.
Nous voici dans les années 70 puis 80 au cœur d'une poudrière faite d'une multitude de communautés et de confessions irréconciliables. C'est ici, entre chiites, chrétiens, druzes et sunnites, qu'ont trouvé refuge les palestiniens chassés par les israéliens et les jordaniens.
➔ Frédéric Paulin a convoqué le phalangiste chrétien Pierre Gemayel et son fils Bachir, le druze Kamal Joumblatt, Hassan Nasrallah et Abbas Moussaoui, ... tous ces noms qui faisaient la Une des journaux télévisés de notre jeunesse et certains encore aujourd'hui.
Quelques acteurs français également comme Charles Pasqua chef d'orchestre des basses œuvres du RPR, Pierre Marion nommé par Mitterrand à la tête de la DGSE lors de la réforme du SDECE, ...
➔ Les années 70 ce sont celles où se succèdent à Beyrouth enlèvements, attentats, massacres et assassinats, celles de la révolution iranienne menée par les chiites de Khomeyni, celles aussi des premiers attentats d'Action Directe à Paris [clic], ...
➔ Les années 80 ce sont celles de l'assassinat de l'ambassadeur français Louis Delamare en poste à Beyrouth, celles de Mitterrand au pouvoir, celles des attentats palestiniens à Paris (rue Copernic, rue des Rosiers), ...
Rappelons que 1982 c'est l'année de l'opération Paix en Galilée et l'invasion du Liban par les israéliens qui se conclura par les sinistres massacres de Sabra et Chatila ...
[...] Peut-être que le Liban n’a pas d’autre intérêt pour ses puissants voisins que d’être un champ de bataille où régler leurs comptes.

Le canevas :

Pour la trame romanesque de son livre, Frédéric Paulin a réuni, aux côtés des personnalités réelles de l'époque, quelques personnages de fiction qui vont nous servir de guides dans ce dédale libanais où se mêlent très étroitement politique, guerre et religion : Philippe Kellermann l'agent de l'ambassade shooté aux anxiolytiques, Zia al-Faqîh la belle interprète chiite qui parle (trop bien) le farsi iranien, l'arrogant Christian Dixneuf l'agent du SDECE (puis de la DGSE avec Mitterrand), la charmante juge antiterroriste Gagliago, les chrétiens maronites de la famille Nada, ...

♥ On aime :

 On profite avec plaisir et intérêt du parcours historique que Frédéric Paulin retrace brillamment pour nous : un intelligent résumé des événements de 1975 à 1983 quand Syriens, Iraniens, Israéliens et Palestiniens réglaient leurs comptes dans l'arrière-cour libanaise. Et un peu à Paris, aussi.
L'auteur nous balade d'une faction à l'autre, de Paris à Beyrouth : le récit est soigneusement documenté et c'est tout simplement passionnant. 
Nous allons même assister en direct à la naissance du Hezbollah qui fait tant parler de lui aujourd'hui.
Il va sans dire qu'on attend la suite avec impatience !
 Frédéric Paulin ne se contente pas de Beyrouth et détaille longuement les tergiversations et retournements de la diplomatie française au Moyen-Orient. Une politique française qui, de Chirac à Mitterrand, ne ressort pas vraiment grandie de ce récit, c'est le moins que l'on puisse dire.
 On regrette cependant que l'intrigue romanesque marque le pas sur le résumé historique : le lecteur, captivé par le récit des événements, aura bien du mal à s'intéresser aux déboires des personnages de fiction, pas tous recommandables. Pour une fois, l'alchimie entre Histoire et roman ne semble pas fonctionner à plein, peut-être parce que Frédéric Paulin a voulu brosser un trop large panorama dans lequel ses personnages de roman se sentent un peu perdus.
[...] Ici, au Liban, le pouvoir politique et économique est un héritage. Depuis des siècles, la transmission se fait par lignées familiales, chez les chiites de la Bekaa et du Sud, chez les chrétiens ou les Druzes de la montagne, chez les sunnites dans les grandes villes. Depuis la création de l’État libanais, moins de trente familles occupent le tiers des sièges des députés ou la présidence des partis.
[...] Si un grand pays comme l’Iran devenait un état chiite, la communauté chiite libanaise ne serait plus livrée à elle-même. [...] Si l’Iran devient une République islamiste avec à sa tête Khomeini qui est chiite, les chiites dans le monde entier vont acquérir un putain de pouvoir. Et pour ce que j’en connais le mieux, au Liban, ça va être la merde.
[...] La guerre civile libanaise est une guerre sans visage. La mort, là-bas, n’est pas celle que l’on côtoie dans les autres guerres. Pas de prison, pas de procès, pas d’exécution légale. On y meurt au petit déjeuner dans sa cuisine lorsqu’une roquette réduit en miettes un immeuble. On y meurt en traversant une rue alors que les chasseurs israéliens bombardent un quartier palestinien ou chiite. On y meurt d’une balle dans la tête tirée par un sniper au petit matin, en allant au travail. On y meurt à un barrage parce que sa carte d’identité est celle d’une communauté ennemie. On y meurt anonymement parce que l’État n’existe pas et que des pays étrangers ou des milices s’y sont substitués.
[...] Paix en Galilée n’est pas qu’une opération militaire, c’est une véritable ingérence politique destinée à hisser la minorité chrétienne au pouvoir en écrasant les autres milices alliées aux Palestiniens.
➔ À noter : le journaliste Marwan Chahine [clic] publie un roman sur le massacre du bus palestinien par les milices chrétiennes, le 13 avril 75, événement qui ouvre également le bouquin de Frédéric Paulin.

Pour celles et ceux qui aiment comprendre aujourd'hui.
D’autres avis sur Bibliosurf et Babelio.
Livre lu grâce aux éditions Agullo (SP).
Mon billet dans la revue Actualitté et le journal 20 Minutes.

lundi 29 novembre 2021

La nuit tombée sur nos âmes (Frédéric Paulin)


[...] Il ne reviendra pas de Gênes comme il y était venu.

    L'auteur, le livre (288 pages, 2021) :

Chroniques d'une catastrophe annoncée.
Frédéric Paulin quitte ses mémoires algériennes [1] pour se rapprocher un peu plus du jour d'aujourd'hui et nous rappeler les tragiques événements de 2001, lors du sommet du G8 à Gênes.
Mieux vaut réviser un peu son Histoire très contemporaine avant d'attaquer La nuit tombée sur nos âmes, pour pouvoir profiter pleinement du bouquin [2] [3] [4].

    On aime :

❤️ Un thriller passionnant comme on les aime, appuyé par une rigoureuse enquête de journaliste comme on les aime : que du bonheur pour ce salutaire travail de mémoire contemporaine.
❤️ Un devoir de mémoire indispensable parce que quelques semaines plus tard, le monde entier oubliera Gênes lorsque deux tours s'écrouleront à New York.
❤️ Un rappel salutaire : c'était hier tout juste et l'actualité nous montre que le fascisme n'est jamais aussi loin qu'on voudrait bien le croire.

      Le contexte :

En 1999, état d'urgence et couvre-feu s'abattent sur ce qu'on a carrément appelé la bataille de Seattle lors du sommet de l'OMC et la planète découvre la détermination altermondialiste (... et celle de l'autre camp).
En 2000, le sommet du FMI à Prague cristallise à nouveau manifestations et répression.
En juin 2001, à Göteborg le sommet européen se solde par un mort par balle (ce sera le sommet de l'angoisse dans la soi-disant si tranquille démocratie suédoise).
Ce sont les années de la naissance des fameux black blocs, du moins de leur naissance médiatique.
Autant dire que quelques semaines après la Suède, en juillet 2001, les puissants sont sur les dents et pètent de trouille à l'approche du sommet gênois : l'escalade de la violence et de la répression est à son paroxysme et chacun des camps affute ses armes pour en découdre, au sens propre souvent.
George Bush dormira même sur un navire de l'US Navy ancré dans la baie.
Frédéric Paulin était sur place à Gênes et en est revenu bouleversé par des scènes dignes des dictatures fascistes sudaméricaines : la boucherie de l'école Diaz, les tortures de la caserne de Bolzaneto et bien sûr le décès de Carlo Giuliani abattu par un carabinier pris au piège.

      L'intrigue :

Paulin s'empare de ces événements et les met en perspective dans un sacré roman.
Aux côtés des 'vrais' protagonistes de l'époque, il développe tout son art pour camper une galerie de personnages de tous bords et nous faire (re-)vivre de l'intérieur ces événements que l'on a oubliés seulement vingt ans après.
Nous voici donc en Italie en compagnie d'un couple de jeunes altermondialistes qui écument les sommets, celui de Gênes après celui de Göteborg.
Un militant du MSI italien devenu conseiller en sécurité du nouveau gouvernement de Berlusconi compromis avec les néo-fascistes.
[...] Carli sait que ses chefs sont pour la plupart incompétent, que sans le retour au gouvernement de Berlusconi ils n'auraient jamais pu se retrouver à gérer un tel événement. Pour lui, le choix de Gênes, une ville aux ruelles tortueuses construite sur un terrain escarpé, est une aberration. Seule la zone de réunion des huit chefs d'état a d'ailleurs été sécurisée. Les autres quartiers ont été abandonnés. Les émeutiers, les rouges, les noirs et tous les étrangers réduiront la ville en miettes si bon leur semble.
Un jeune conseiller en communication du cabinet Chirac. 
[...] La guerre froide est terminée, les antagonismes est-ouest se sont dissipés. Maintenant, le temps de l'opposition nord-sud est venu. Et ça, ça fascine Chirac.
Un duo de flics de notre DST. Une journaliste qui voulait jouer les reporters de guerre.
Tout le monde est en place pour trois jours de violence déchainée et l'on tourne tourne les pages sans pouvoir reposer le bouquin.
On peut aussi, pour se mettre dans l'ambiance, jeter un œil sur le film américain inspiré des événements de Seattle (qui n'arrive pas à la cheville du bouquin de Paulin).
Un livre qui éclaire également les violences policières plus récentes et l'incapacité (plus ou moins assumée) de nos polices à préserver la sécurité en même temps que la liberté de manifestation.

Pour celles et ceux qui aiment l'Histoire.
D’autres avis sur Bibliosurf.

jeudi 18 octobre 2018

La guerre est une ruse (Frédéric Paulin)


[...] Ce lien contre nature entre militaires et islamistes.

Oh nous voilà tout près du coup de cœur avec La guerre est une ruse, roman de Frédéric Paulin qui nous donne à découvrir les coulisses d'une Histoire qui nous est si proche et si méconnue : l'Algérie des années 90.
Les islamistes du FIS ont été à deux doigts de prendre le pouvoir, les dissidents du GIA ont pris le maquis, les barbouzes déclarent ouverte la chasse aux barbus.
Et, question guerre civile, les militaires algériens ont été à bonne école ...
Tout cela va nous mener quelques années plus tard jusqu'à l'attentat de la station Saint-Michel de 1995 et la cavale de Khaled Kelkal dans la région lyonnaise.
Frédéric Paulin a décidé qu'on se coucherait moins bête après la lecture de son bouquin et nous fait visiter les coulisses de ces événements, leur enchaînement terrible et inexorable, l'aveuglement des uns et la cécité des autres, les compromissions des pouvoirs français et algérien (Charles Pasqua en prend pour son grade).
Des deux côtés de la Grande Bleue, les barbouzes jouent avec le feu et font le jeu des barbus.
Il faut s'accrocher un peu au début face à l'enchevêtrement des différents groupuscules et officines (DGSE, DRS, FIS, GIA, ...) mais on peut faire confiance à l'auteur pour ne jamais perdre son lecteur en chemin, pour expliquer encore et encore : sans aucune arrogance érudite, Frédéric Paulin fait preuve de pédagogie et nous éclaire le côté obscur avec intelligence et sans manichéisme facile.
Il nous suffit de se laisser guider par les personnages et une intrigue bien ficelée au suspense garanti, même si l'on connait la triste fin de cet épisode.
Episode, car il s'agit du premier tome d'une trilogie : espérons que la suite sera à la hauteur de ce coup de maître.
[...] Ce lien contre nature entre militaires et islamistes engendrera inévitablement le grand bordel. Le grand bordel, comprendre l’importation des problèmes algériens en France.
[...] Les hommes qui tiennent l’Algérie ont besoin que le chaos s’étende pour légitimer leur pouvoir.

Pour celles et ceux qui aiment les barbouzes.
D’autres avis sur Babelio.