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jeudi 18 juillet 2024

La stratégie du lézard (Valerio Varesi)


[...] La ville est corrompue jusqu’à la moelle.

L'auteur, le livre (388 pages, avril 2024, 2014 en VO) :

On a déjà croisé dans les bouquins de Valerio Varesi, le commissaire Soneri, version italienne d'un Maigret. Un flic sombre et taiseux qui officie dans les brumes du Pô et qui a pour habitude de laisser venir à lui les confidences, pas du tout le genre à pourchasser les vilains dans une course-poursuite.
Soneri pourrait être un proche cousin de Brunetti ou d'un Schiavone (ses compatriotes), se rapprocher d’un Adamsberg (en moins fantaisiste) ou encore d’un Erlendur (en plus chaleureux).
Cet hiver, Parme est sous la neige et voici notre commissaire confronté à La stratégie du lézard.

♥ On aime mais de moins en moins :

Un véritable guide touristique digne d'un Michelin puisqu'on s'y régale de déambulations citadines aussi bien que de spécialités culinaires !
Pour visiter Parme et les berges du Pô, notre guide missionné par Valerio Varesi est le commissaire Soneri.
 Malheureusement au fil des ans et des épisodes, les propos de Soneri/Varesi deviennent de plus en plus amers et désabusés. Le commissaire parait dépassé par son époque, ses nouvelles mafias et ses nouveaux bandits. 
Il ne reconnait plus sa bonne ville de Parme, celle qu'on surnommait jadis "le petit Paris de la plaine du Pô" mais qui est aujourd'hui rongée par la corruption et où s'entremêlent le monde des affaires et celui des politiques.
Mais tout comme le lecteur, sa chérie Angela commence à trouver que le bonhomme aigri pousse un peu loin la chansonnette grinçante :
[...] — Tu souffres d’arrogance intellectuelle, la maladie des braves. Par contre, si tu t’obstines, tu vas finir par être aussi borné que les vieux.
[...] Il rétorquait que ça n’était pas lui l’inadapté, plutôt le monde qui allait de plus en plus mal, gâché et déprimant, insupportablement indifférent.
[...] — Arrête un peu de te plaindre, c’est insupportable ! le rabroua Angela.
 D'autant que, tout à sa légitime colère pamphlétaire, Valerio Varesi enfile les perles dans des dialogues taillés à la va-vite :
[...] — Quelque chose brûle en nous.
— Je ne marche pas au même carburant.
— Ce n’est pas le carburant qui compte, ce qui compte, c’est la flamme. La plupart de nos congénères en sont complètement dépourvus. Nous sommes des locomotives, les autres, des wagons.
— Nos directions sont opposées.
— Nous finirons par nous rencontrer. Les locomotives représentent le mouvement.

Le canevas :

Comme dans d'autres aventures du commissaire Soneri, l'intrigue peine à se mettre en place et l'enquête ira lentement au fil des déambulations du commissaire dans les rues de Parme. 
Un commissaire Soneri qui semble désorienté par les événements étranges qui agitent la ville : un téléphone abandonné sur les berges de la Parma, un vieillard mort de froid sur un escalier de secours, deux croque-morts qui se battent pour une dépouille, un prêtre agressé dans son église, des chiens éventrés, ...
[...] Ça fait deux jours que je tourne à vide avec toutes ces histoires bizarres : des téléphones qui sonnent, un vieux qui meurt de froid, une bagarre autour d’un cercueil, l’agression d’un curé…
C'est l'hiver et Parme est couverte de son manteau blanc. Mais visiblement c'est une autre "poudre qui couvre la cité plus copieusement que les chutes de neige".
Face à la corruption et aux trafics en tout genre, la justice aura bien du mal à conclure dans cette affaire aussi brumeuse que les berges du fleuve.
[...] Dans cette histoire, pas d’assassin identifié, juste un ensemble d’individus et de circonstances.
[...] — Une histoire de morts sans assassins… constata Angela. Un mort de froid, un suicidé, une overdose plus que suspecte.
Surtout lorsque le crime adopte la stratégie du lézard et préfère abandonner quelques malfrats et complices, abandonner sa queue pour que la tête échappe au couperet de la justice.

Pour celles et ceux qui aiment les villes italiennes.
D’autres avis sur Bibliosurf et Babelio.
Livre lu grâce aux éditions Agullo (SP).

vendredi 27 août 2021

La maison du commandant


[...] C'est presque idiot d'avoir de la mémoire.

Chaque région d'Italie dispose de son flic attitré et de sa série de polars.
Dans la région de Parme et la plaine du Pô, c'est Valerio Varesi qui met en scène le commissaire Soneri au fil des épisodes [clic].
Avec La maison du commandant, on retrouve le meilleur de cet auteur, tout comme dans le Fleuve des brumes, et on retrouve cette ambiance si particulière le long du Pô et de ses rives en crue.
Une région au passé troublé par les conflits entre fascistes et communistes qui résonnent encore aujourd'hui d'une rive du fleuve à l'autre.
Le commissaire Soneri reste fidèle à son personnage et l'on peut reprendre mot à mot ce que l'on disait déjà d'un précédent épisode : le commissaire mène son enquête ou plutôt sa quête, au fil des eaux, au rythme lent de la crue et de la décrue, un rythme ponctué de temps en temps par sa fougueuse compagne Angela dont les débordements ne supportent pas l'amour entre deux tables de chevet et préfèrent des lieux incongrus.
[...] Je me sens bien quand le fleuve grossit et qu'il me soulève avec lui. J'ai l'impression qu'il emporte toute la merde, comme la crue quand elle racle les berges et les fonds. 
Notons tout de même qu'au fil des ans et des épisodes, le propos de Varesi devient de plus en plus amère et désabusé : comme dans Les mains vides, l'auteur et son commissaire semblent désormais un peu dépassés par leur époque, les nouvelles mafias et les nouveaux bandits, ce qui plombe un peu l'ambiance.
[...] Tu l'aimes, toi, cette société où les arrogants et les malhonnêtes dirigent les gens bien ? Où les pires gouvernent les meilleurs ? Où la méchanceté est toujours victorieuse ? Tu l'aimes ce monde où tout s'achète ?

Pour celles et ceux qui aiment le parmesan bien sûr.
D’autres avis sur Bibliosurf.

lundi 28 juin 2021

Les mains vides (Valerio Varesi)


[...] Vous aviez l’air d’un curé ou d’un communiste.

Chaque région d'Italie a son flic attitré et sa série de polars.
Dans la belle ville de Parme, c'est Valerio Varesi qui met en scène le commissaire Soneri au fil des épisodes [clic].
Les revoici avec une nouvelle intrigue : Les mains vides.
Un titre à prendre au second degré puisque l'intrigue évoque plutôt les mains bien remplies de ceux qui s'en mettent plein les poches : il sera question de beaucoup de fric, celui des mafias qu'il faut lessiver et blanchir, celui des spéculations immobilières sans foi ni loi.
On est toujours content de pouvoir compter sur des valeurs sûres, retrouver de bons amis transalpins comme ces deux-là, Varesi et son commissaire fétiche, avec qui on sait que l'on peut voyager sans crainte.
Cette fois, l'intrigue peine un peu à se mettre en place : le commissaire Soneri ne sait trop s'il doit s'occuper du vol de l'accordéon du pauvre bougre qui anime habituellement la place ou s'il doit s'intéresser au décès d'un commerçant battu à mort (un avertissement, un appel de fonds, qui aurait mal tourné peut-être ?).
Malgré la canicule, comme à son habitude Soneri flâne dans les rues de Parme, des errances sans but qui lui permettent de s'imprégner de sa ville, c'est sa façon à lui d'enquêter si l'on peut dire. La vérité finira bien par lui apparaître au détour d'une vieille maison.
[...] Il n'avait jamais aimé l'été en ville, quand les rues puent la pisse et que des odeurs âcres de transpiration flottent dans les autobus. [...] Heureusement le 15 août approchait et la ville se viderait en laissant derrière elle les vieux et les fauchés. Il se consola en songeant aux rues désertes, à la beauté de la ville enfin silencieuse et aux dîners dans quelque auberge à l'ombre des tonnelles : sa petite villégiature personnelle.
[...] La perspective des complications se renforçait dans son esprit. Il le savait d’expérience : si l’on n’apercevait aucune lueur les premiers temps d’évaluations, l’enquête s’annonçait mauvaise.
Mais les temps changent et Soneri semble bien dépassé par les bandits modernes, les nouvelles mafias de l'est, les nouvelles spéculations immobilières, les nouveaux trafics.
C'est une nostalgie amère et désabusée qui parcourt le bouquin dont l'ambiance est un peu plombée par l'auto apitoiement d'un commissaire dépassé par son époque.
[...] – Un conseil, reprit sérieusement Gerlanda, ne jouez pas les Don Quichotte. Que vous le vouliez ou non, vous faites partie de la police et la police a toujours été du côté des puissants. Depuis quand la police change le monde ?
Finalement les mains vides seront celles de Soneri et c'est un étrange final au goût bien amer qui l'attend dans les derniers chapitres. 

Pour celles et ceux qui aiment le parmesan bien sûr.
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dimanche 8 septembre 2019

La pension de la Via Saffi (Valerio Varesi)


[...] Ne jamais revenir là où l’on avait été heureux.

Valerio Varesi n’est pas un inconnu : on avait déjà découvert [clic] le commissaire Soneri dans les brumes du Pô entre Crémone et Mantoue pour un polar où venait se mêler l’Histoire passée.
Revoici le flic taiseux dans le brouillard hivernal de Parme, à quelques pas de la Pension de la via Saffi dont on retrouve la logeuse assassinée.
Le conte de Noël commence mal.
[...] Ça a l’air d’une mort naturelle », conclut Nanetti après son examen préliminaire pendant que les agents s’affairaient tout autour et que l’un d’entre eux prenait des photographies.
Soneri le fixa en mâchouillant son cigare éteint. « Ça a l’air, mais ça ne l’est pas. » 
Et l’Histoire sera de nouveau conviée : celle de l’Italie est faite de luttes entre les milices des fascistes et celles des rouges comme ces Arditi del Popolo.
[...] Ce monde trouble d’affairistes composé d’anciens révolutionnaires convertis à l’argent, d’arrivistes, de maîtres-chanteurs et de toute une faune provinciale grisée par la richesse. 
Si l’Histoire récente italienne est pour le moins agitée, c’est loin d’être le cas du commissaire Soneri qui erre dans les rues de Parme en grignotant des copeaux de fromage : hanté par ses fantômes, il finira bien par croiser la solution de l’énigme sur son chemin, au gré de ses rencontres.
[...] Plutôt que d’action, ses enquêtes étaient faites d’attente.
[...] Dans une enquête, tout était question de rythme et de temps. Et l’enquête qu’il était en train de vivre était marquée de pauses et de soubresauts, comme dans un tango. 
Loin des thrillers ou des page-turners, le héros de Varesi, proche cousin de Brunetti, se rapproche peu à peu d’un Adamsberg (en moins fantaisiste) ou d’un Erlendur (en plus chaleureux).
Et n’oubliez pas que [...] c’étaient bien les femmes qui commandaient dans cette histoire. 
Une histoire empreinte d’une nostalgie désabusée car il ne faut [...] jamais revenir là où l'on avait été heureux.

Pour celles et ceux qui aiment marcher dans les rues de Parme.
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mercredi 22 juin 2016

Le fleuve des brumes (Valerio Varesi)


[...] Mais pourquoi avoir attendu cinquante ans ?

Il aura fallu pas mal de billets de ci de là pour éveiller notre intérêt pour Le fleuve des brumes.
Encore un polar italien ! Un de plus [clic], la vague continue.
Et puisqu'il est question de flot justement, Valerio Varesi nous emmène sur les berges du Pô, en pleine crue (c'est d'actualité !).
Entre Crémone et Mantoue, une péniche qui part à la dérive, un batelier qui disparait, une défenestration peu naturelle, ...
[...] Mais le cadavre n’a jamais été retrouvé…
— Le fleuve, d’habitude, rend toujours ce qu’il prend. Mais ici on dit que celui qui ne sait pas nager de son vivant ne flotte pas non plus quand il est mort. »
Le commissaire Soneri va mener son enquête, au fil des eaux, au rythme lent de la crue et de la décrue, un rythme ponctué de temps en temps par sa fougueuse compagne Angela dont les débordements ne supportent pas l'amour entre deux tables de chevet et préfèrent des lieux incongrus.
[...] Le commissaire réfléchissait. Deux frères au centre de deux affaires à quelques kilomètres de distance. L’un qui vole par la fenêtre, l’autre qui disparaît alors que sa péniche dérive le long du fleuve en crue. Il se figura le Pô et toute cette eau lui rappela qu’il pleuvait sans trêve depuis cinq jours.
Des investigations patientes et obstinées, d'autant que la plaine du Pô est un pays de taiseux.
[...] Sur le Pô, il y a des gens farouches. On se tient à distance de tout le monde comme les bêtes dans les bois. Le seul moment de proximité est lorsqu’on se croise, mais on va dans des directions opposées.
[...] Quelqu'un sait et se tait.
Alors on se laisse porter par le rythme lent des rencontres du commissaire Soneri : histoires de familles, trafic fluvial, fantômes de Salò, vieilles rancunes entre chemises noires et bannière rouge de chaque côté du fleuve, ...
Les blessures de l'Histoire ne sont toujours pas cicatrisées.
Et ces pluies, et cette crue qui n'en finissent pas ...
[...] Vous avez bien choisi, le félicita-t-il en indiquant les pâtes aux haricots.
— J’ai du flair pour la nourriture. Plus que pour les enquêtes.
— Il faut de la patience, le consola le vieil homme. Ce n’est pas un don très répandu. Aujourd’hui tout le monde est pressé.
Le commissaire est d'une patience à toute épreuve, il laisse ces taiseux venir à lui, il passe d'une rive à l'autre, d'un camp à l'autre, suscite les confidences, attend les confessions. Pas vraiment une enquête, à peine une quête, plutôt une patiente attente des flux et reflux des eaux ...
[...] Il craignait qu’une question trop directe bloque le récit du vieil homme. Ce ne devait pas être un interrogatoire, mais une incitation à l’aveu.
[...] « Mais pourquoi avoir attendu cinquante ans ? »
Bref, ça valait le coup de plonger avec Varesi dans le passé agité et douloureux de cette région italienne que l'on ne connait guère.

Pour celles et ceux qui aiment les débordements (de rivières).
D’autres avis sur Babelio.