Avant notre ère, le territoire compris entre les Pyrénées, les Alpes et le Rhin (France, Bénélux, Suisse et Rhénanie actuels) a une unité toute fictive et ce n'est en rien un pays de sauvages selon l'idée cultivée par les historiens du XIXe siècle…
mardi 15 août 2023
La Gaule et les Gaulois avant César (rediif)
dimanche 19 mars 2023
D'où vient la France ? Éloge des Celtes, qui ont su saisir la chance de la romanisation...
Il s'agit donc bien d'une fusion, au meilleur sens du terme, entre deux grands peuples, d'une addition de leurs qualités, en quelque sorte, et non simplement de la conquête des uns (les Celtes) par les autres (les Romains), quelles que soient les qualités intrinsèques de ces derniers et ce qu'ils apportaient de bon et de fécond...
Le trésor qu'apportaient les romains n'a pu fructifier à ce point que parce qu'il tombait sur une terre tout à fait apte et disposée à le recevoir et à le faire produire au centuple.
C'est ce que dit fort bien Jacques Bainville, dès les premières lignes de sa magistrale Histoire de France :
"La fusion des races a commencé dès les âges préhistoriques. Le peuple français est un composé. C'est mieux qu'une race. C'est une nation..."
Voilà pourquoi, à partir de Jules César, conquérant des Gaules, qui a mis rudement les deux peuples en contact, nous évoquerons d'abord, avec Jacques Bainville, l'apport romain dans cette merveilleuse fusion de deux peuples. Mais, sitôt après, nous lirons un beau texte de Charles Maurras, exaltant les vertus ancestrales et la grandeur évidente de ces Celtes, sans lesquels, redisons-le, rien de ce à quoi l'on a assisté par la suite ne se serait passé de la même façon...
"...À qui devons-nous notre civilisation ? À quoi devons-nous d'être ce que nous sommes ? À la conquête des Romains. Et cette conquête, elle eût échoué, elle se fût faite plus tard, dans des conditions différentes, peut-être moins bonnes, si les Gaulois n'avaient été divisés entre eux et perdus par leur anarchie. Les campagnes de César furent grandement facilitées par les jalousies et les rivalités des tribus. Et ces tribus étaient nombreuses : plus tard, l'administration d'Auguste ne reconnut pas moins de soixante nations ou cités. À aucun moment, même sous le noble Vercingétorix, la Gaule ne parvint à présenter un front vraiment uni, mais seulement des coalitions. Rome trouva toujours, par exemple chez les Rèmes (de Reims) et chez les Eduens de la Saône, des sympathies ou des intelligences. La guerre civile, le grand vice gaulois, livra le pays aux Romains. Un gouvernement informe, instable, une organisation politique primitive, balancée entre la démocratie et l'oligarchie : ainsi furent rendus vains les efforts de la Gaule pour défendre son indépendance.
Les Français n'ont jamais renié l'alouette gauloise et le soulèvement national dont Vercingétorix fut l'âme nous donne encore de la fierté. Les Gaulois avaient le tempérament militaire. Jadis, leurs expéditions et leurs migrations les avaient conduits à travers l'Europe, jusqu'en Asie Mineure. Ils avaient fait trembler Rome, où ils étaient entrés en vainqueurs. Sans vertus militaires, un peuple ne subsiste pas; elles ne suffisent pas à le faire subsister. Les Gaulois ont transmis ces vertus à leurs successeurs. L'héroïsme de Vercingétorix et de ses alliés n'a pas été perdu : il a été comme une semence. Mais il était impossible que Vercingétorix triomphât et c'eût été un malheur s'il avait triomphé.
Au moment où le chef gaulois fut mis à mort après le triomphe de César (51 avant l'ère chrétienne), aucune comparaison n'était possible entre la civilisation romaine et cette pauvre civilisation gauloise, qui ne connaissait même pas l'écriture, dont la religion était restée aux sacrifices humains. À cette conquête, nous devons presque tout. Elle fut rude : César avait été cruel, impitoyable. La civilisation a été imposée à nos ancêtres par le fer et par le feu et elle a été payée par beaucoup de sang. Elle nous a été apportée par la violence. Si nous sommes devenus des civilisés supérieurs, si nous avons eu, sur les autres peuples, une avance considérable, c'est à la force que nous le devons.
Les Gaulois ne devaient pas tarder à reconnaître que cette force avait été bienfaisante. Ils avaient le don de l'assimilation, une aptitude naturelle à recevoir la civilisation gréco-latine qui, par Marseille et le Narbonnais, avait commencé à les pénétrer. Jamais colonisation n'a été plus heureuse, n'a porté plus de beaux fruits, que celle des Romains en Gaule. D'autres colonisateurs ont détruit les peuples conquis. Ou bien les vaincus, repliés sur eux-mêmes, ont vécu à l'écart des vainqueurs. Cent ans après César, la fusion était presque accomplie et des Gaulois entraient au Sénat romain.
Jusqu'en 472, jusqu'à la chute de l'Empire d'Occident, la vie de la Gaule s'est confondue avec celle de Rome. Nous ne sommes pas assez habitués à penser que le quart de notre histoire, depuis le commencement de l'ère chrétienne, s'est écoulé dans cette communauté : quatre à cinq siècles, une période de temps à peu près aussi longue que de Louis XII à nos jours et chargée d'autant d'événements et de révolutions. Le détail, si l'on s'y arrêtait, ferait bâiller. Et pourtant, que distingue-t-on à travers les grandes lignes ? Les traits permanents de la France qui commencent à se former..."
II : Éloge des Celtes (de Charles Maurras, allocution prononcée en 1939) :
"...Notre confrère Edouard Helsey mène en ce moment, au Journal, une lucide enquête sur les égarements sincères du peuple français. Et il a touché au point vif, très juste, quand il a observé qu'il existait dans les profondeurs de notre nationalité un élément d'anarchisme qui se met en mouvement un peu plus souvent qu'à son tour.
C'est quelque chose de notre vieux fond gaulois. Ce peuple généreux, mais trop avide d'éloquence, porté à l'esprit de parti, aux divisions, aux jeux naïfs de la jalousie ou même de l'envie, n'a jamais pu s'unifier ni se discipliner, en raison de ce gros défaut.
Mais Helsey oublie une chose. C'était un peuple très intelligent, très ami de l'intelligence, très sensible aux splendeurs de la vie intellectuelle, et l'on se trompe beaucoup toutes les fois que l'on fait honneur aux seules armées de César, au seul glaive des Légions et au seul faisceau des Licteurs de leur rapide conquête assimilatrice, si forte et si profonde que l'Histoire hésite à en admettre toutes les parties. Pour la bien comprendre, il faut se représenter l'admirable ouverture d'esprit du Gaulois et aussi la magique beauté de l'apport romain; c'était la raison, et c'était la science, et c'était l'intelligence, et c'était tout l'esprit de la civilisation générale héritée de la Grèce, de l'Egypte, de l'Etrurie.
Les gaulois auraient indéfiniment résisté à la force de la Légion. Ils ne résistèrent ni à l'ordre ni à l'intelligence qui leur apportaient, avec le Droit, la Loi, avec la discipline aimée et voulue autre chose qui y ressemble : la Charité du genre humain.... Ce fut le dernier coup. Le Gaulois n'y tint plus. Il admit Rome, il la reçut chez lui, en lui. Il constitua cette brillante improvisation de l'Empire qui s'appelle le Gallo-Romain. N'était-il pas trop bien doué pour s'y dérober plus longtemps ?..."
Les Basques puis les Celtes constituent les premiers peuplements connus de la Gaule, qui allait devenir la France. Sur ces deux populations premières vint se greffer l'influence décisive des Grecs et des Romains : voilà pourquoi nous évoquons largement, dans nos Éphémérides, les pages fondatrices de notre identité profonde que nous devons à l'Antiquité : voici le rappel des plus importantes d'entre elles, étant bien entendu qu'un grand nombre d'autres Éphémérides traitent d'autres personnalités, événements, monuments etc... de toute première importance dans le lente construction du magnifique héritage que nous avons reçu des siècles, et qui s'appelle : la France...
En réalité, si la conquête de la Gaule était nécessaire à César pour sa prise du pouvoir à Rome, il faut bien admettre que "le divin Jules" avait été appelé à l'aide, en Gaule, par les Gaulois eux-mêmes, incapables de s'opposer au déplacement massif des Helvètes, quittant leurs montagnes - en 58 avant J.C - pour s'établir dans les riches plaines du sud ouest; César vainquit les Helvètes à Bibracte (voir l'Éphéméride du 28 mars); cinq mois plus tard, envahis par les Germains d'Arioviste, les Gaulois le rappelèrent une seconde fois : César vainquit et refoula les Germains au-delà du Rhin (voir l'Éphéméride du 5 août); et, cette fois-ci, auréolé de ses deux prestigieuses victoires, et gardant plus que jamais en tête son objectif premier (la conquête du pouvoir à Rome), César ne voulut plus se retirer de cette Gaule où on l'avait appelé, et dont la conquête serait le meilleur tremplin pour ses ambitions politiques à Rome... Il fallut six ans à Vercingétorix pour fédérer les divers peuples de Gaule contre le sauveur romain : le soulèvement général commença par le massacre des résidents romains à Cenabum (l'actuelle Orléans), en 52 (voir l'Éphéméride du 23 janvier); le 28 novembre de la même année, Vercingétorix remporta la victoire de Gergovie (voir l'Éphéméride du 28 novembre); mais, moins d'un an après, enfermé dans Alésia, Vercingétorix vécut l'échec de l'armée de secours venue à son aide de toute la Gaule (voir l'Éphéméride du 20 septembre) : il capitula une semaine après (voir l'Éphéméride du 27 septembre). Emmené captif à Rome, il fut mis à mort six ans plus tard, en 46 (voir l'Éphéméride du 26 septembre)...
Cependant, dans sa conquête des Gaules, César n'eut pas seulement à lutter contre les tribus gauloises proprement dites : il s'opposa également à Massalia, puissance amie et alliée de Rome, mais qui ne voulut pas choisir entre César et Pompée lorsque la guerre civile éclata entre ceux-ci : César réduisit Massalia, mais avec difficulté (voir nos trois Éphémérides des 19 avril, 27 juin et 31 juillet)...
vendredi 4 novembre 2022
Ecologie et spiritualité : Jules César et la destruction de la forêt gauloise – par Nicolas Bonnal
La destruction du monde ne date pas d’hier. La destruction des bois et des forêts a été maintes fois commentée dans l’Antiquité, notamment par Ovide.
« Les pins abattus sur les montagnes n’étaient pas encore descendus sur l’océan pour visiter des plages inconnues. Les mortels ne connaissaient d’autres rivages que ceux qui les avaient vus naître. Les cités n’étaient défendues ni par des fossés profonds ni par des remparts. »
L’âge d’or: quand on ne touche pas aux forêts?
Car l’âge d’or, c’est quand on ne touche pas aux forêts. La dimension sacrée, si présente dans la Norma de Bellini, est aussi soulignée par Tacite dans sa Germanie. J’évoquerai les splendeurs d’Ovide une autre fois (c’est le poète qu’on nous fit le plus rater à l’école…).
Grâce à une page de l’historien des celtes Venceslas Kruta, j’ai enfin découvert la Pharsale de Lucain, rival et martyr de Néron. Comme chez Tolkien, on y trouve un bois sacré que va détruire César. Il est situé près de Massilia, ville alors phocéenne et prestigieuse pour sa résistance à César.
La forêt sacrée évoquée par Lucain
Je laisse la parole à Lucain (Pharsale, chant III, vers 400-430 environ) : « Non loin de la ville était un bois sacré, dès longtemps inviolé, dont les branches entrelacées écartant les rayons du jour, enfermaient sous leur épaisse voûte un air ténébreux et de froides ombres. Ce lieu n’était point habité par les Pans rustiques ni par les Sylvains et les nymphes des bois. Mais il cachait un culte barbare et d’affreux sacrifices. Les autels, les arbres y dégouttaient de sang humain ; et, s’il faut ajouter foi à la superstitieuse antiquité, les oiseaux n’osaient s’arrêter sur ces branches ni les bêtes féroces y chercher un repaire ; la foudre qui jaillit des nuages évitait d’y tomber, les vents craignaient de l’effleurer. Aucun souffle n’agite leurs feuilles ; les arbres frémissent d’eux-mêmes. »
La forêt est fascinante et périlleuse. Mais vivante.
Lucain poursuit : « Des sources sombres versent une onde impure ; les mornes statues des dieux, ébauches grossières, sont faites de troncs informes ; la pâleur d’un bois vermoulu inspire l’épouvante. L’homme ne tremble pas ainsi devant les dieux qui lui sont familiers. Plus l’objet de son culte lui est inconnu, plus il est formidable. »
Chez Dante aussi il y a des arbres qui saignent en enfer. Je cite mon livre sur Tolkien :
« Comme on aura compris, Dante arrive donc avec Virgile dans une forêt très obscure (nous sommes au chant XIII de l’Enfer). Dans un univers encore plus terrifiant, il dialogue avec des arbres, et il comprend le drame sanglant de ces troncs qui sont des âmes de suicidés punis : « Ainsi que le bois vert pétille au milieu des flammes, et verse avec effort sa sève qui sort en gémissant, de même le tronc souffrant versait par sa blessure son sang et ses plaintes. Immobile, et saisi d’une froide terreur, je laisse échapper le rameau sanglant… Quand une âme furieuse a rejeté sa dépouille sanglante, le juge des Enfers la précipite au septième gouffre : elle tombe dans la forêt, au hasard ; et telle qu’une semence que la terre a reçue, elle germe et croît sous une forme étrangère. Arbuste naissant, elle se couvre de rameaux et de feuilles que les harpies lui arrachent sans cesse, ouvrant ainsi à la douleur et aux cris des voies toujours nouvelles… Chacune traînera sa dépouille dans cette forêt lugubre, où les corps seront tous suspendus : chaque tronc aura son cadavre (chant XIII de l’Enfer)… »
On repart sur Lucain (toujours cet étonnant chant III de la Pharsale) : « Les antres de la forêt rendaient, disait-on, de longs mugissements ; les arbres déracinés et couchés par terre se relevaient d’eux-mêmes ; la forêt offrait, sans se consumer, l’image d’un vaste incendie ; et des dragons de leurs longs replis embrassaient les chênes. Les peuples n’en approchaient jamais. Ils ont fui devant les dieux. Quand Phébus est au milieu de sa course, ou que la nuit sombre enveloppe le ciel, le prêtre lui-même redoute ces approches et craint de surprendre le maître du lieu. »
On a ainsi les dragons et l’Apollon hyperboréen.
Sacrilège Jules César
Mais survient César (lisez la Vie de Suétone pour rire un peu de lui). Il va agir comme le Saroumane de Tolkien, comme un agent du Mordor : « Ce fut cette forêt que César ordonna d’abattre, elle était voisine de son camp, et comme la guerre l’avait épargnée, elle restait seule, épaisse et touffue, au milieu des monts dépouillés. »
Les hommes de César hésitent car on respecte alors encore un peu la forêt.
« À cet ordre, les plus courageux tremblent. La majesté du lieu les avait remplis d’un saint respect, et dès qu’ils frapperaient ces arbres sacrés, il leur semblait déjà voir les haches vengeresses retourner sur eux-mêmes. »
César prend même le risque de défier les divinités et de se maudire pour détruire le bois sacré : « César voyant frémir les cohortes dont la terreur enchaînait les mains, ose le premier se saisir de la hache, la brandit, frappe, et l’enfonce dans un chêne qui touchait aux cieux. Alors leur montrant le fer plongé dans ce bois profané : “Si quelqu’un de vous, dit-il, regarde comme un crime d’abattre la forêt, m’en voilà chargé, c’est sur moi qu’il retombe”. Tous obéissent à l’instant, non que l’exemple les rassure, mais la crainte de César l’emporte sur celle des dieux. »
On a détruit la littérature latine à l’école….
Lucain oublie les sacrifices humains et redevient lyrique : « Aussitôt les ormes, les chênes noueux, l’arbre de Dodone, l’aune, ami des eaux, les cyprès, arbres réservés aux funérailles des patriciens, virent pour la première fois tomber leur longue chevelure, et entre leurs cimes il se fit un passage à la clarté du jour. Toute la forêt tombe sur elle-même, mais en tombant elle se soutient et son épaisseur résiste à sa chute. À cette vue tous les peuples de la Gaule gémirent… le laboureur consterné vit dételer ses taureaux, et, obligé d’abandonner son champ, il pleura la perte de l’année. »
Mais le destin malheureux de la forêt sacrée est de toute manière fait de destruction : « Les bois sacrés tombent, dit Lucain, et les forêts sont dépouillées de leur force… » (Procumbunt nemora et spoliantur robore silvae)
Notre Ronsard s’en souviendra à sa gentille manière scolaire (Écoute bûcheron…).
On citera le magicien Tacite pour terminer : « Emprisonner les dieux dans des murailles, ou les représenter sous une forme humaine, semble aux Germains trop peu digne de la grandeur céleste. Ils consacrent des bois touffus, de sombres forêts ; et, sous les noms de divinités, leur respect adore dans ces mystérieuses solitudes ce que leurs yeux ne voient pas » (« lucos ac nemora consecrant, deorumque nominibus appellant secretum illud, quod sola reverentia vident… »).
Il y a la destruction de la forêt gauloise, et aussi de la littérature romaine à l’école…
Bibliographie
Bonnal – Le salut par Tolkien, Avatar, p. 96.
Dante – Enfer, chant XIII.
Kruta – Les Celtes, histoire et dictionnaire, « Bouquins » Robert Laffont.
Lucain – La Pharsale, III (sur Remacle.org).
Ovide – Les métamorphoses, I (ebooksgratuits.com).
Suétone – Vie de César (sur Wikisource).
Tacite – Germanie, IX.
mercredi 14 septembre 2022
Les secrets de la Rome antique (Eric Teyssier)
Eric Teyssier dirige le département d’histoire à l’université de Nîmes. Spécialiste de la Rome antique, il est l’auteur de plusieurs livres consacrés à cette période.
Les origines d’une cité antique se perdent souvent dans la nuit des temps, là où naissent les légendes. Celle de Rome remonte au début du VIIIème siècle avant Jésus-Christ. Eric Teyssier analyse les mythes fondateurs de Rome, la légende de Rémus et Romulus, l’enlèvement des Sabines,…
Le lecteur observera avec intérêt comment Rome a assimilé les Gaulois qui l’ont envahie. Leurs ancêtres ont assiégé le Capitole, leurs aïeuls ont combattu les légions de Rome et menacé le grand César devant Gergovie et Alésia mais l’armée romaine a été un puissant vecteur de romanisation grâce aux troupes auxiliaires. Distinctes de la légion, ces unités sont essentiellement constituées de « pérégrins ». Ces hommes libres s’enrôlent dans les cohortes d’infanterie ou les ailes de cavalerie qui portent le nom d’un peuple et conservent un recrutement régional. Les Gaulois sont nombreux à constituer ces corps de troupe où la durée de l’engagement est plus longue que dans la légion romaine avec une solde moins importante. Pourtant, le service dans ces unités demeure attractif, car à l’issue de son contrat l’auxiliaire reçoit la citoyenneté romaine avec tous les privilèges liés à ce statut. En dehors de ces militaires, les mesures prises dans le cadre de la Pax Romana organisent la diffusion du mode de vie romain accompagnée d’une acculturation qui rattachent lentement mais sûrement les populations les plus diverses à l’Empire de Rome.
Une part de la puissance de Rome provient incontestablement de la qualité des serviteurs de l’Etat. Même sous l’Empire, ces derniers s’efforcent de correspondre à l’archétype du Romain idéal dont les vertus cardinales sont la dignitas et l’auctoritas. Que l’empereur soit bon ou mauvais, des générations de généraux et de gouverneurs de province se sont confirmées avec plus ou moins de succès à ce modèle.
Eric Teyssier réussit avec cet ouvrage à nous montrer les secrets du succès de l’Empire romain et de sa pérennité durant cinq siècles.
Les secrets de la Rome antique, Eric Teyssier, éditions Perrin, 330 pages, 21,90 euros
A commander en ligne sur le site de l’éditeur
https://www.medias-presse.info/les-secrets-de-la-rome-antique-eric-teyssier/52480/
samedi 14 mai 2022
SPQR -Histoire de l’Ancienne Rome (Mary Beard)
Mary Beard, professeur à Cambridge et conseillère de la BBC pour ses émissions historiques, est l’auteur de nombreux livres consacrés à l’Antiquité.
Aujourd’hui encore, après deux mille ans, la Rome antique continue d’influencer la culture et la politique occidentales. L’assassinat de Jules César a fourni le modèle de tous les tyrannicides. L’organisation du territoire impérial romain est sous-jacente de la géographie politique de l’Europe. C’est principalement parce que les Romains firent de Londres la capitale de leur province de Bretagne qu’elle est aujourd’hui celle du Royaume-Uni.
Rome nous a légué certaines conceptions de la liberté et de la citoyenneté, mais aussi une idée de ce qu’est l’impérialisme. Nous avons également reçu d’elle une partie de notre vocabulaire, puisque nous parlons toujours de sénateurs et de dictateurs. Nous lui devons des adages comme Là où il y a de la vie, il y a de l’espoir. Les gladiateurs ne faisaient pas moins d’entrées dans l’arène, qu’aujourd’hui au cinéma.
Convaincue que l’histoire romaine continue de nous être utile, Mary Beard tente d’expliquer comment un petit village parfaitement ordinaire du centre de l’Italie a pu devenir une puissance à ce point dominante, exerçant son autorité sur un vaste territoire déployé à travers trois continents.
Beaucoup a déjà été écrit à ce sujet mais ce livre tient compte de la succession extraordinaire de découvertes – sous terre, sous l’eau, et même dans les bibliothèques – faites au cours des dernières décennies pour dresser un tableau complet de cette ancienne Rome, toujours fascinante.
SPQR – Histoire de l’Ancienne Rome, Mary Beard, éditions Perrin, 592 pages, 26 euros
A commander en ligne sur le site de l’éditeur
https://www.medias-presse.info/spqr-histoire-de-lancienne-rome-mary-beard/64740/
jeudi 16 décembre 2021
Vercingetorix, chef de guerre (Alain Deyber)
Alain Deyber est spécialiste d’histoire militaire et d’archéologie des champs de bataille. Ancien officier, il a été rédacteur au Service Historique de la Défense et professeur d’histoire militaire aux Ecoles de Saint-Cyr-Coëtquidan.
Le personnage de Vercingetorix » chef de guerre » a peu retenu l’attention des auteurs, bien moins que le célèbre siège d’Alesia où il fut vaincu. Alain Deyber tente avec ce livre de montrer comment Vercingetorix se forma à l’art de la guerre, la façon dont il constitua et entraîna son armée, quelle fut sa conception de la guerre et sa manière de la conduire, et pourquoi, si proche de la victoire, il fut finalement vaincu par César.
L’auteur de ce livre, spécialiste de la stratégie, la tactique et le combat qui avaient cours à cette époque en Gaule, démontre que les Celtes en général et les Gaulois en particulier connaissaient les grands principes de la guerre et les paramètres de la manœuvre, bien loin des stéréotypes entretenus sur le sujet.
Vercingetorix, chef de guerre, Alain Deyber, éditions Lemme, 222 pages, 22 euros
A commander en ligne sur le site de l’éditeur
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mardi 10 novembre 2020
Redécouvrir la bataille d'Alésia
Alésia, connaît pas ? Nul ne pourra plus le prétendre après avoir lu le livre que Yann Le Bohec a consacré à cette bataille célèbre, après laquelle nos ancêtres les Gaulois devinrent peu à peu gallo-romains.
Encore Alésia !… N'a-t-on pas déjà tout dit sur la fameuse bataille de ce début du mois d'octobre 1952 avant J.-C, qui opposa le chef arverne Vercingétorix aux armées romaines de César ? Il semble que non et le spécialiste de l'Antiquité Yann Le Bohec vient nous le prouver dans un admirable petit livre publié dans la collection L'Histoire en batailles des éditions Tallandier.
Dans un premier temps, l'historien prend en compte les derniers résultats des recherches archéologiques réalisées dans les années 1990 sur le Mont Auxois, résultats qui ont bouleversés une historiographie tributaire le plus souvent d'éléments datant de l'époque du Second Empire ! Depuis, bien évidemment, la recherche a progressé. À ce titre, l'Académie des Inscriptions et des Belles Lettres a réalisé récemment un énorme travail(1) salué par Le Bohec, mais dont l'épaisseur (plus de mille pages), en découragera beaucoup.
Spécialiste d'histoire militaire(2) Le Bohec réhabilite aussi l'histoire bataille, un genre complètement délaissé pendant des décennies par l'histoire marxiste. La particularité de son étude réside non seulement dans la prise en compte, somme toute traditionnelle, de la décision des autorités militaires et politiques, mais aussi dans la connaissance du simple soldat dont le rôle fut naturellement décisif. L’auteur rouvre et relit par ailleurs la fameuse Guerre des Gaules de César, en rappelant néanmoins que ce texte reste avant tout une écriture de propagande visant à entretenir la gloire et mettre en valeur l'action du conquérant romain.
Déjà le syndrome du gendarme
L’avantage de cet ouvrage est enfin de sortir d'une controverse, celle de la localisation des événements. Pendant longtemps, l'historiographie s'est trop attaché à savoir où avait eu lieu cette bataille fondatrice de la romanité en Gaule. Autre aspect largement étudié pendant trop longtemps, les techniques de siège ont, elles aussi, accaparé les chercheurs au point d'en oublier l'essentiel. Bref, Le Bohec, non sans humour, fuit la spécialisation afin de revenir au principal la bataille en elle-même, des origines du conflit aux conséquences de la victoire de César.
Ce n'est pas le moindre avantage de ce livre que de nous présenter les ressorts psychologiques qui présidèrent au conflit entre le chef gaulois et le proconsul romain. Il faut rappeler que les Gaulois avaient laissé un mauvais souvenir au peuple romain des origines. Dans les mémoires, les Gaules étaient synonymes de pillage et de misère. Ces peuples du Nord étaient, en quelque sorte, des « ennemis héréditaires. » Les hommes de l'époque, explique Le Bohec, « se trouvaient aussi pris dans un monde où le choix était simple, obéir ou commander on devine ce que préféraient les Romains. Par ailleurs, la guerre résulte d'un enchaînement après une conquête, une autre conquête, puis une autre, et ainsi de suite. Enfin, Rome dominait une grande partie du monde de son temps, et en avait conçu une attitude qui découlait de cette position le Sénat se sentait responsable de l'ordre du monde, c'est-à-dire du monde méditerranéen c 'était le syndrome du gendarme. » À l'heure des élections américaines, nous ne saurions que trop recommander la lecture de cet ouvrage…
1). M. Reddé & S.Von Schnurbein dir., Alésia. Fouille et recherches franco-allemandes sur les travaux militaires romains autour du Mont-Auxois (1991-1997). Mémoires de l'Académie des Inscriptions et Belles-Lettres,! XXII, 3 vol., De Boccard,Paris,2001
2). Cf. notamment, du même auteur, L'armée romaine dans la Tourmente, aux éditions du Rocher consacré à la crise militaire du IIIe siècle.
Yann Le Bohec, Alésia, 52 avant J.-C., coll. L'Histoire en batailles, Editions Tallandier 221 p.
Christophe Mahieu monde&vie 10 novembre 2012 n°867
lundi 7 septembre 2020
Quand l’histoire fait dates : -52 Alésia
La défaite d’Alésia, en 52 avant J.-C., met fin à la guerre des Gaules, immortalisée par son vainqueur, Jules César. Année zéro de notre roman national, la bataille d’Alésia est devenue l’acte fondateur d’une unité gauloise improbable, personnalisée par un héros impossible, Vercingétorix. Mais cette séquence militaire ne constitue en réalité qu’un acte de pacification de provinces gauloises, alors largement romanisées depuis deux siècles au moins. Les Gaulois étaient-ils des Gréco-Romains comme les autres ?
https://www.fdesouche.com/2020/09/06/quand-lhistoire-fait-dates-52-alesia/
jeudi 31 août 2017
Caius Julius Caesar, le premier grand populiste romain
dimanche 16 avril 2017
L’archéologie française à nouveau en pleine dérive idéologique
mardi 5 janvier 2016
Retour sur "Le dernier Gaulois"
Jean/C.N.C.
mardi 20 mai 2014
Site d’Alésia : admettons la vérité !
ensuite, ils soulignent les incohérences et les invraisemblances de ce site, trop petit, trop bas, trop ouvert, trop mal doté en eaux vives notamment ;
enfin, ils rappellent que la conformation des lieux ne permet ni de situer, ni de comprendre les différentes étapes de l’affrontement censé s’y être livré, en 52 avant JC.